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[FB 1617] Chemins d'innocence

Le 18 décembre 1617. Dans une petite ruelle sale et poisseuse de Manshon, un jeune garçon aux cheveux collés de sel et à l'allure hirsute fait face à un marchand aux dents jaunies. Sur son épaule, Morgan veille, inquiet.

Sören... Tu ne devrais pas te fier à ce brocanteur... Non, je t'assure. Au fond de ses yeux, il y a quelque chose qui luit et qui ne me plait pas. Tu devrais le sentir, toi aussi ! Il ne cherche pas à t'aider, mais à te dérober le peu que tu possèdes...
Oui, c'est vrai. Depuis que Bonne Parole et ses compagnons sont partis pour devenir pirates, tu t'es retrouvé le bec dans l'eau. Mon ami... Est-ce qu'un chat doit te rappeler la justice des choses ? La chance t'a sourit pour tes premiers pas loin de notre île. Une chance insolente qui t'a évité un retour forcé à la maison...

Voilà maintenant bientôt trois mois que nous battons le pavé de Manshon. Les deux premiers ont été un ravissement, car tu avais retrouvé trois heureuses connaissances : Edwin aux mots toujours francs, Serena la mystique, et Olaf le pointilleux. Trois troubadours qui ont su t'initier aux arts de la débrouille urbaine. Mais je dois dire que tu peines à leur faire hommage... mais que suis-je pour juger ?

Ils t'ont abandonné tous leurs gains, avant d'embarquer avec Brom. Ils t'ont dit de t'acheter une guitare, et de faire ce que tu savais le mieux faire. Mais toi, avec ta folie d'enfant et ton orgueil de rêveur, tu as préféré attendre une meilleure occasion... de manière à t'offrir un bouzouki en tous points semblable à celui d'Olaf. Sören... je sais que cet instrument t'a toujours fasciné, mais tu n'as pas bien considéré tes priorités. Tu as mangé les quelques berrys que tu possédais, et maintenant, tu es sans ressources.


-Vous... euh... z'êtes certain qu'elle vaut aussi cher, c'te guitare ?
-Mais bien sûr ! Vous voyez ce bois, ce noir profond, cette douceur... oui, touchez. Et ces motifs ? Assurément, c'est une des dernières répliques en ébène de l'instrument de George Barde-Saint de South Blue, lui-même ! Ma parole d'honneur ! Eheh...
-Et si j'vous en donnais 50 000 berrys ? J'ai pas plus, je l'jure !

Dépité devant l'honnêteté limpide que tu affiches, le marchand se caresse longuement la barbe.

-Mmh... ma foi, je veux bien faire un geste, mais tu me devras les 50 000 restants. Quand tu les gagneras. Qu'est-ce que t'en dis ? Prêt à signer un contrat ?
-Euh... Bah... ouaip, ma foi...

Oubliant sa passivité de chat devant tant de naïveté, Morgan se frappe le front de sa patte velue et enfonce partiellement ses griffes dans son pelage.

Miaw ! Sören, ce n'est pas possible ! Moi non plus, je n'avais jamais quitté l'île du Loupiac, avant... mais à ta place, jamais je... Oh !

D'une main tremblante, peu habituée à manier la plume, le garçon venait de signer d'une croix.

Idiot ! Crétin ! Sais-tu au moins ce que cet homme a pu écrire sur ce morceau de papier ? Espérons qu'il n'ait aucun droit d'établir ce genre de marchés ! Sans quoi il pourrait bien te faire cracher absolument n'importe quoi ! … heureusement qu'une telle signature ne doit pas prouver grand chose.
En attendant, tu vides le contenu de ta bourse dans la sienne, et tu t'empares de l'instrument en renouvelant tes promesses de remboursement. Comme s'il y avait quelque chose à rembourser ! Même moi, je le vois : le bois est attaqué par la vermine, les cordes sont usées, les mécaniques, rouillées. Cette guitare est bonne à jeter au feu.


-Tu vas voir, Morgan ! Maint'nant, on va faire des sous, exac'tement comme on f'sait avec Bonne Parole et les autres ! J'te l'prom...

Bzong.

... C'était sensé être quoi ?

Bzang.

... Euh...

BRRRWWJJJJJ.

-Morbleu !

D'un coup, tu tires une drôle de tête. Le marchand a déjà disparu, ton contrat signé en poche, lorsque tu te rends compte que les réparations à effectuer avant que tu puisses jouer de cette guitare vont te coûter aussi cher que l'instrument lui-même. Les mécaniques sont pourries, le bois, gonflé d'humidité, a rapproché douloureusement les cordes des barrettes (ce qui rend le son inaudible)... sans parler du reste. Bref, tu t'es fait avoir, et en beauté !

… Sören ? Oh, compagnon, ne prend pas cet air si triste. La vie continue... Oui, cette ruelle est laide et vide, oui, tu es tombé dans un univers bien violent, auquel tu n'étais pas franchement préparé. Mais ne t'en fais pas. Nous nous en sortirons, comme toujours.
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- Hey psssst...

Y des légendes de marins, qui vous raconte à grand renforts de prouesses verbales et de métaphores flatteuses l'appel des sirènes, qui par leurs chants attirent les marins pour les dévorer. Bon, de une on a pas dû entendre les même sirènes chanter, car j'peux vous dire que mes souv'nirs d'la voisine Frida prenant sa douche étaient pas des plus doux. Et ensuite j'ai jamais vu d'sirènes dévorer un type, sauf par très petits bouts et dnas des milieux très spéciaux. Mais bon en général ils payaient pour ça alors je... En fin bref ! Un joli ramassis d'conn'ries et d'préjugés sur les homme poisson une fois d'plus, signe évident qu'les humains sont des irrécupérables tanches et qu'ils méritent toutes les misères que le ciel peut leur faire pleuvoir sur la gueule.
Ceci étant dit, niveau image ça parle pas mal, et ça illustre à l'occasion assez fidèlement l'invitation suave qui vient d'hameçonner l'oreille du marchand. Car même si pour cela sa curiosité doit le faire se rapprocher dangereusement de cette silhouette sombre mais au combien généreuse dans la ruelle, Isidore le citadin ne peut y résister. 50 000 berrys a dépenser, vous pensez bien qu'il compte finir sa journée en beauté. Le voilà donc qui s'engouffre prudemment dans la venelle, comme si son instinct tachait de le prévenir d'un danger camouflé, mais sans pour autant parvenir à lutte contre ses pulsions. Sa mère lui a toujours dit que les femmes le perdraient, et c'était une sage femme...

- Alors mon beau... Tu viens me voir ou pas ? Viens... viens...



SBLAM !

Le temps qu'Isidore ait pu comprendre ce qui lui arrivait, une imposante masse jaillissait d'une ombre derrière lui pour le plaquer avec violence contre la brique nue d'un mur. Douleur et peur de concert, il n’eut tout juste l'occasion de glapir. Comme tracté par une force invincible, son bras droit fut ramené en arrière, avant d'être violemment tordu dans tous les sens ! Et comme pour se sur-rajouter à cette douleur qui lui vrillait l'épaule, une main immense lui planqua une fois de plus le front contre le mur.

- Un cri, un seul, et t'es mort.
- Glups.
- Tient ma belle, prends tes thunes et tire toi. Et n'oublie pas : pas un mot.

Bruit d'une bourse pleine de berrys qu'on rattrape, puis des talons hauts de la prostitué pressée qui s'enfuit sans un mot. Un traquenard. Nul doute la dessus, il venait de foncer tête baissée dans un piège. Mais par tous les saints qui voudrait le racketter pour quelques dizaines de milliers de berrys, surtout en en donnant au moins autant à une complice ? Il devait s'être trompé de personne assurément ! Un malentendu ahahah, il était sauv*...

-Isidore le citadin.
-Glups...
-Tu as en main quelque-chose qui m’intéresse.
-M... moi ?
-Ouais. Un papier. Encore tout frais péché du matin.
-Qu... que...
-J'veux parler du papier qu't'as fait signer à ce garçon au chat sur l'épaule.
-...
-J'imagine que t'as laissé des blancs dans le document pour mieux l'entuber hein ?
-O...Oui...
-Bien. Voilà ce que tu vas faire si tu veux encore pouvoir compter sur tes doigts au delà d'deux.

Et tandis que la voix gutturales lui susurre son plan dans le creux de l'oreille, les yeux de Isidore s"écarquillent devant tant de machiavélisme... Dans quelle obscure manigance s'était-il donc fourré ? Et pourquoi diable cet homme en voulait-il à un garçon si inoffensif d'apparence ?



Lentement, la pression disparue de son bras, tandis qu'il sentait la présence derrière lui disparaitre de concert. Il lui fallu tout de même quelques minutes avant de ce décider à se retourné, de nouveau seul dans la ruelle. Quelques instants de réflexion entre sa morale précaire et son instinct de survie digne d'un rat, puis le voilà qui se rue en direction de la taverne du "Pichet penché" afin de se débarrasser au plus vite de sa sinistre besogne. Plus vite il obéirait, plus longtemps il pourrait se passer d'un boulier pour ses calculs sommaires.



Dernière édition par Toji Arashibourei le Ven 5 Juil 2013 - 13:52, édité 1 fois
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Tout le monde croit que chasseur de prime, ça consiste à cogner, tirer, frapper, puis rentrer chez soi les poches pleines et le coeur vide. Mais ces gens là, qui croient ce genre de connerie, z'ont rien compris. Z'ont pas imaginé que pour cogner, faut trouver. Et que pour trouver, bah, faut cherher. Et ce temps là, de recherche, de labeur à devoir fouiller les recoins les plus pourris, les endroits à vingt connard au metre carré ou même ceux plus calmes, d'une ville comme Manshon,

C'est chiant. Tellement chiant que j'en aurai envie d'une corde. Ou bien d'un briquet , histoire de tout cramer. Parce que la vermine, comme partout, ça sort toujours en premier.

Mais non, comme un con, je reste là à marcher de long en large dans toute cette connerie de ville mafieuse. Les papelards à la main j'attends de voir défiler une gueule connue, ou quelque chose de louche qui pourrait m'amener à quelque chose de moche. Mais à croire qu'ici, les péquenots ne savent pas dévier, même un peu. Z'onr peur de ce quelque chose que le clampin moyen appelle Mafia. Que j'appelle... Pas. Ce genre de truc je leur parle pas, je leur casse la gueule. Quand je les vois.

Mais là....

Rien. Nada. Que dal. Jusqu'au moment où, forcément, je mire un guss qui fait un pas un peu trop loind du légal. Une foutue arnaque, toute conne. Mais j'ai rien d'autre à me foutre sur la dent et je commence à en avoir ras le cul, de cette ville. Alors, pourquoi pas. Je l'observe. Je vois la gueule déconfite du mome qui s'est fait avoir comme une merde. Je vois son chat qui parraitrait presque énrvé. Je vois l'arnaqueur qui se sauve déjà. Et je l'suis. Jusqu'au moment où il se fait prendre dans un coin par un gros truc. Je le sens mal, j'ai cru voir une main et ça m'avait pas l'air humain. Ca sent la grosse histoire. J'vais pouvoir m'en mettre dans la poche. Enfin... L'arnaqueur arnaqué sort de là, tout défait. Son costume tout mal en point, sa guule toute trite de celui qui vient d'voir un monstre. M'interesse déjà plus. C'est le gros machin que je veux, moi. Alors je m'avance dans l'encablure. Je me lance dans l'ombre et là.

Plus rien.

Le gros machin s'est déjà sauvé. Me reste plus qu'à trouver où est partis dents pourries. Je le vois qui part se planquer dans un bar. Je le suis. Je le rattrappe et je rentre dans le bar.

[...]

En fait non. Deux gars tout bien costumés de noir qui viennent de fermer la porte sur ma gueule me font leurs plus sales sourires. J'aime pas trop ça. Je les mire histoire de comprendre. Ils me mirent histoire de me faire peur. Et ils l'ouvrent, histoire que je comprenne.

_Casse toi d'ici gamin, ta tête nous revient pas.
_La votre non plus, d'gueule, me revient pas, mais j'fais bien avec.
Là, les deux carrés sur patte avec leur costume se marraient presque si c'était autorisé par leur connerie de contrat d'travail.
_Toi, t'es un peu con. Tu sais pas que ce bar appartient à l'une des sept familles?
_Ecoutez moi bien les gars. J'ai fait Grand Line moi, alors c'est pas deux connards de vigies mafieux qu'ont raté leur vie qui vont m'faire peur.

Merde. Z'ont pas apprécié. Veulent me cogner.

PAF BOOM PAF.

Trop tard pour eux, j'ai été plus rapide. Mais l'arnaqueur, lui, a forcément entendu le bordel. S'est forcément déjà cassé du bar. C'est foutu pour aujourd'hui.
    Il s'était mis à pleuvoir. Des bourrasques terribles telles que l'on en trouve que sur North Blue (ou peut être aussi sur la route de tous les périls, pour peu que l'endroit soit digne de son nom) se sont abattues avec la violence du ressac. Tu es tiraillé, harcelé par le vent. Tes vêtements claquent comme un drapeau, et toi même, tu claques des dents.

    Manshon n'est plus qu'un désert grisâtre. Les affaires des mafias semblent s'être suspendues en l'air, et la tempête agressive, incessante, les empêchent de revenir prendre racine sur le sol des hommes. Tes yeux... oh, Sören. Tes yeux versent des larmes sous le harcèlement de l'ouragan ! Il te faut un abri. Ce trou d'ombre ne suffit pas. Mais tu es à la rue, tu n'as plus un sou en poche... Cela ne peut pas durer ! Il faut que tu trouves de l'embauche, ne serait-ce que pour un temps. Tu es un garçon capable, tu dois pouvoir t'en sortir. Nous en sortir. Car s'il fallait aller jusque là, n'oublie pas que je t'accompagnerais dans la tombe.

    Tu te lèves, tu chasses d'une pensée le frisson qui met ton corps au supplice. Tu as l'air d'ignorer le vacarme horrible du vent, et tu marches. L'air est si dense que l'on croirait avancer dans l'eau. Cet air, tu pourrais presque le saisir à pleines mains, le ramener à toi comme une couverture... Et dormir dans les bras du zéphyr en colère. Dormir... Non, Sören ! Tiens bon ! La taverne a l'air fermée, mais on ne te refusera pas l'asile par ce temps ! Et elle n'est plus très loin ! Fssshhhh ! Avance, compagnon ! Avance !

    … oui ! Tu as attrapé la poignée que tu tournes prudemment. Le bois est lourd, mais la fureur du vent rend les choses relatives. Tu entres. L'établissement est bondé. Excités par la tempête, les hommes rient comme des enfants à chaque bourrasque manquant d'ébranler un volet. Ou même le toit. Toi, tu te délectes de cette première seconde à l'abri. C'est comme si tu sentais le bénéfice d'un calme étrange et d'une chaleur soudaine, après t'être immergé tout entier, corps et âme, dans un enfer mouvant, froid et humide. Sans ne rien demander à personne, tu te réfugies à une petite table où trônent déjà des gens de ton acabit. C'est ce que tu penses, en fait. Un manchot, un cul-de-jatte et un débile que l'on a pas osé mettre dehors. Ils ne boivent pas, mais leur rire est glauque à la lumière vacillante des lampes à huile. Mais en passant, la tavernière tourne ses yeux outrageusement maquillés vers toi. Elle a l'air d'ignorer la présence de deux énormes plateaux lourdement chargés sur ses bras.


    -Eh là, p'tit. C'est la table des calamiteux, là.
    -Ouai, mais comme j'ai plus un sou...
    -T'as vu l'temps qui fait ? J'fais mon chiffre pour le mois, là, alors j'peux bien payer une grenadine à un mioche. Cale toi au comptoir, j'arrive. Et va pas faire ton timide, hein.

    Tu vois, Sören. Il y a de bonnes choses partout, malgré les apparences... Au comptoir, tu sors ton épave d'instrument. Ici, ce serait l'occasion rêvée... Mais tu sais que tu ne pourras pas en tirer une seule note pure. C'est peine perdue. Une dernière fois, tu observes les mécaniques rouillées et souvent manquantes, la touche enflée d'eau, les cordes usées jusqu'à la... bref. La serveuse revient, la cigarette aux lèvres et les plateaux vides.

    -Musicien, en plus ? T'sais qu'on aime chanter, par ici. T'aurais du l'dire tout de suite...
    -Ouai, mais je m'suis fait avoir, pour sûr. C't'à cause de ça que j'suis en peine, comprenez ben... un escroc, en ville, 'me suis pas méfié.
    -Ah, ouai. Le problème quand on est pas de la région. Tu viens de loin ?
    -Je sais pas trop. L'île du Loupiac, ça vous parle ?
    -Mmh...
    -Coteau Hurlevent ? Château Ouranos ?
    -Ah, ouai, j'me disais... j'ai des bouteilles de là-bas, mais c'est pas ce qui se vend le mieux. Surtout en ce moment. Tiens, bois. Et un truc, aussi.
    -Oui ?
    -Arrête de me parler comme à une grande dame. T'es chez toi ici, jusqu'à nouvel ordre. J'm'appelle Ginette. Mais Gigi, ça ira.
    -Moi, c'est Sören. Merci !

    Tu plonges le nez dans la boisson fumante, qui s'avère être un grog particulièrement chargé. Sous mes coussinets, je sens que tu te détends doucement, qu'un peu de sueur vient tremper ta nuque. Tu es rassuré, tu bénis l'instant présent. Et dans ton bonheur, tu ne remarques ni l'homme aux allures de justicier qui avale un whiskey à tes côtés, en silence, ni l'ombre qui passe derrière la fenêtre, lentement, indifférente aux caprices du temps.
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    C'était pas la journée d'Isidore... Il aurait pu y croire, mais voilà, c'était pas l'cas. Petit à petit, il sentait son doigt s'enfoncer  dans l'engrenage... lentement mais surement... et les mines patibulaires qui l'encadraient dans la taverne avaient des bonnes tronches de rouages menaçants. Du genre qui broient les grains d'sables plutôt que de s'coincer d'ssus. Faut dire que Nathan "Baby kill" s'entourait rarement d'incompétents. En tous cas pas longtemps.


    -Et tu me dis que c'est lui qui t'envoie ?

    -O.. oui Nathan...
    -M'sieur Nathan !
    -Oui oui pardon m'sieur Nathan !
    -C'est parce'que j'ai pas encore 16 ans que tu crois pouvoir m'parler comme ça ?!
    -Non non m'sieur Nathan ! Pardon !
    -Mon père m'a confié le gang sur son lit d'mort, alors voilà !
    -Bien s/*...
    -Passons. Tu disais donc que c'était lui qui t'envoyait ici. Pour me donner ceci ?
    -Oui m'sieur Nathan. Il a dit que vous sauriez quoi en faire.

    Et d'un air empli d'une curiosité malsaine, Nathan déploie la lettre malgré les manches de son costard trop grand pour lui, avant de le lire d'un air suffisant. L'armée de colosse tout aussi curieux se pencheront par dessus ses épaules pour mieux voir, ce qui ne sera pas bien difficile...

    -Bon et à quoi je l'reconnaitrai c'garçon ? Tu l'as amené avec toi j'espère ?
    -Euh...

    Crrr crrr... fait le grain de sable qui se refuse à glisser entre les rouages... Il est perdu... Puis tout à coup, le miracle ! Le gosse ! Là au comptoir ! Ahah la chance de tous les diables !


    -Bien sûr M'sieur Nathan ! Je l'ai laissé là au comptoir.
    -Au comptoir ? Mais c'est qu'un gosse qui doit pas avoir plus de /* BANG ! Aaaargl mon genou....
    -Continue.
    -Hii !... Oui m'sieur Nathan ! Il est là en bas !

    Et d'un coup d’œil par les vitres de son bureau qui surplombe la salle, Le caïd de secteur lorgne d'un air mauvais son fief à la recherche de la jeune et innocente victime. Son reflet dans le verre teinté se teint d'une étincelle cruelle quoiqu'un peu exagérée lors-qu’enfin il le trouve, là juste en bas. La foule alentour ne se doute de rien, étrangère aux bruits et manigances qui se déroule dans le bureau capitonné.


    -Rufus. André. Aller l'inviter à prendre un verre en haut. Gentiment.
    -Bien patron. Mais Gigi risque de n'pas apprécier cette fois encore...
    -GIGI c'est pas ma mère ok ?!!!!
    -Ok patron ok !

    Et filant à la révo', les deux gros bras descendent dare-dare les marches menant à la salle et vers leur cible, tandis que leur chef Nathan se passe les nerfs en tripotant un étrange morceau d'étoffe...



    Dernière édition par Toji Arashibourei le Mer 3 Juil 2013 - 11:47, édité 1 fois
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    Quand on vient de cogner des gars qu'on devait pas cogner, y'a deux solutions. La première c'est de filer fissa et de se faire oublier histoire d'faire croire qu'on n'a rien à voir avec ça. La seconde, l'est un peu plus dangereuse mais assez simple. Suffit de s’asseoir boire un sky chez le patron des gars qu'on a cogné. Faut se la jouer gars sérieux. Les épaules hautes, la gueule cachée par le chapeau. Le pétoire bien en évidence et la main posée lentement sur le verre qui se descend par goulée comme si c'était l'biberon d'un p'tiot. Mais sereinement, sans trembler. Comme si ça f'sait que du bien.

    Et sacrebleu c'que ça me fait du bien.

    La minette qui s'appelle Gigi parlotte avec un gamin à côté. M'mire noir en voyant déjà que je vais ramener les emmerdes.

    Faut bien bosser, ma p'tite Gigi. Moi aussi j'ai une gosse à nourrir.

    Sauf que l'petiot à côté, il m'embête. Faire couler du sang d'mafieu me fait le plus grand bien. Mais par contre, celui d'gamin pas encore pubère, ça me dérange plutôt. Ma main vient s'perdre dans la poche intérieur de mon veston. Le porte tout se fait attraper et en sort quelques billets qui finissent sur le comptoir. En face du gosse.


    _Ecoute gamin. Empoche ces biftongues et filoche de ce bars t'acheter une vraie gratte.

    D'coin de l’œil je vois son air surpris du gus qui comprend pas. Mais surtout j'vois les deux brutasses aussi carrés sur pattes que ceux que j'ai zigouillé qui s’approchent. Trop près. Trop vite. Trop tard pour le gamin. Mon pétoire se sort et les pointe avant qu'ils n'aient le temps d'arriver à portée de poings.

    Tout doux les agneaux. J'voudrais pas vous bouffer.

    Une rasade de sky.

    Les guss se mirent comme pour comprendre.


    Z'êtes pas discrets, c'est tout. Vous louper reviendrait à foirer un tir sur un éléphant dans un corridors. Un GROS éléphant. Un p'tit corridors.

    C'est pas pour toi qu'on est là. Le p'tiot est invité là haut.

    Là, c'est moi qui comprends plus. Apparemment casser des gueules sert pas à se faire connaître par ici. Ça serait bien la première fois. Ou alors j'en ai pas cogné assez, de gueules.

    Faut voir.

    _Désolé les agneaux, le p'tiot va sortir d'ici et va filer s'acheter une gratte musique. Hein qu't'es d'accord, p'tiot ?
      -Ou... ouais, m'sieur. J'suis d'accord.

      Là, tu sens l'embrouille, le détail qui ne colle pas au scénario. Tu as joué les inconscients, tu t'es fait rouler, et d'un coup, deux bonnes âmes te tendent la main. Une boisson chaude, et une somme d'argent qui compense largement ce que tu as perdu ce matin.
      Tu te rappelles que tu as une dette a combler. Mais ton cœur se fait plus fort. Non, tu ne la payeras pas. Le brocanteur t'a vendu du verre pour du diamant. Tu ne la payeras pas, et si tu le retrouves, tu iras jusqu'à lui coller ton poing dans la figure. Parce qu'ici, ça marche comme ça.

      … Non ? Tu n'as pas encore compris ? Par les crocs du grand Belzébuth, Sören...


      -Enfin, j'peux attendre que l'temps s'calme un peu ?

      Le regard du bienfaiteur dit que non. Ton instinct lit la menace dans ses yeux. Tu regardes celui qui te cherche, qui veut que tu montes. Tu lèves les yeux. En haut, ça ne t'inspire rien de bon. Mais en même temps, tu t'es déjà mis à croire à ta bonne étoile. Optimiste ? Fssshhh ! Ce n'est pas parce que tu as eu, jusque là, une chance insensée que ça va durer, compagnon ! Est-ce que tu es vraiment notre frère, un homme de la race des opportunistes et des traqueurs nocturnes ? Alors tu devrais te contenter de ce qui est bon, et fuir le reste comme la peste.

      Eh... Qu'est-ce que tu fais ? Pourquoi est-ce que tu le suis comme ça ? Gigi !


      -Il a un problème, le p'tit Dédé ? Et toi, Rufus ? Je t'avais pas dit de pas remettre les pieds ici ?
      -Ça va, Gigi. 'Sont pas mauvais bougres... et puis 'vec le temps qui fait, j'vais quand même pas sortir tout d'suite. Pas vrai, m'sieur ? Et puis... z'êtes sûr, pour tout cet argent ? C'est beaucoup, quand même.

      Oh, nom d'un chien (voilà que je deviens grossier). Il devait vraiment être chargé, ce grog. Tu as l'œil qui brille un peu, et tu viens de dire adieu à tout instinct de survie. Le type insiste, tu gardes ses berrys. Les deux autres aussi, tu montes avec eux. Gigi te dit de faire attention. Tu lui renvois un sourire innocent qui lui fait tirer une longue latte sur son mégot à demi consumé.
      Et derrière la fenêtre martelée par la pluie battante, deux grandes rangées de dents à faire pâlir le grand Belzébuth s'étirent dans un rictus malsain.

      Tu t'es trompé de chemin.
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      Frouche frouche… Dix jeunes doigts qui malmènent le foulard en soie orné d’une tête de mort cyan, Nathan « baby kill » a visiblement du mal à contenir son excitation ; et c’est son doudou qui en fait du coup les frais. Mais au moins ce n’est pas toi ou encore les gardes qui t’encadrent d’un air peu rassuré, comme si ta poisse pouvait être contagieuse. Car il faut bien le dire, depuis que tu es arrivé dans le grand bureau silencieux et qu’on t’a assis presque de force devant un grand verre de limonade, rien n’a été fait pour te rendre vraiment à l’aise.

      Sourire mauvais du gamin qui vient de trouver la collection cachée de poupée de sa sœur et qui se rend compte qu’il a une paire de ciseaux en main ; Nathan te calcule du regard autant que son trop grand col amidonné le lui permet. Puis une fois qu’il a assez apprécié ce spectacle mesquin, la terreur pré-pubère tire sur sa manche de costar’ sur-mesure-bien-trop-grand avant de pousser une feuille vers toi.

      -Reconnais-tu ce papier ? Kh.kh.kh.kh !
      Evidemment que tu ne le reconnais que trop bien…

      -Il y est écrit que tu me dois six mois de ta vie. Noir sur blanc, avec ta signature légitime.

      Tu ne saurais dire si le plus terrible est le son de ta gorge qui déglutit ou s’il s’agit de celui de celles de toute l’assistance qui en fait de même …

      -Six mois de ta vie pour un salaire « honorable » en reconnaissance de dette. A moins que tu ne veuilles briser ce contrat nous liant pour la modique somme de 50 millions de berrys. J’espère que cette… guitare en vaut le coup ?

      Les chiffres tournent autour de toi comme autant de satellites fous !

      -Mais si jamais tu décidais de renoncer à ce contrat et que tu n’avais pourtant pas la somme indiquée… je serais contraint d’en référer à la marine tu comprends… ou pire.

      La loi est contre toi… la chance aussi apparemment.

      -Mais ne t’inquiète pas, je sens qu’on va bien jouer ensemble, kh.kh.kh !


      (…)


      -Tsss… fichus mômes.

      La vieille tenancière te lance un regard où plane le mécontentement le plus évident. Puis comme si la vie était ainsi faite, Gigi se détourne de la porte maintenant close, quitte à agrémenter encore un peu plus son ulcère. Maudits gamins… maudite famille…

      -Si j’étais vous étranger je m’en irais. Y’a rien d’bon pour un type comme vous à part des embrouilles avec des gens qu’il vaut mieux n’pas côtoyer. Même pour un grand gaillard.

      Les gestes de ses mains qui essuient verres après verres se font de plus en plus vif, nerveux, mal contenus…

      -Si l’jeune patron n’est pas du genre à faire gaffe à deux trois balourds corrigés, il ne vaut mieux pas le déranger en pleine affaire. Croyez-en ma vieille expérience.

      Gigi te foudroie d’un regard dur où tu peux voir que la vie ne lui a rien épargné mais qu’elle ne batt’ra pas pavillon blanc pour autant.

      -Maint’nant vas-t-en étranger ; ta tournée est pour moi, file avant qu’il ne te prenne l’envie d’faire une conn’rie regrettable.