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Trompettes de la renommée ♫

L'histoire des civilisations fonctionne comme une horloge. Son unité de mesure en est "l'ère". La machinerie y est complexe et tous ses rouages minutieusement assemblés afin qu'aucun pépin ne vienne enrayer l'implacable processus de révolution de ses roues dentées s'actionnant les unes les autres méthodiquement. Ses cliquetis battent la mesure avec une précision à vous en faire pâlir la plus chirurgicale des horloge atomiques. Sa plus grande originalité vient de son absence d'aiguille. Le passage du temps est ainsi laissé à la libre appréciation des gens. Parfois, elle sonne. Son carillon n'est semblable à nul autre. Mais plus personne n'y prête attention. Depuis le temps, on a perdu le mode d'emplois et certains pensent qu'il s'agit d'une boussole, d'autres d'un damier, d'autres encore pensent qu'il s'agit d'une vieille pizza base crème oubliée dans un coin et devenue très dure avec le temps. Mais ils se trompent tous (surtout ceux qui appartiennent à la troisième catégorie si vous voulez mon avis). Il s'agit d'une Horloge.

C'est la plus belle Horloge du monde.

Préface du manuscrit "Comment recycler ses filtres à cafés et autres méthodes pour pingres" rédigée par le moine de l'histoire Ôjoure D. Ui (la préface seulement. Le reste du bouquin est de Jequo Nomizmonfritzs).

Les ères n'ont pas de limites définies. Elles commencent et s'arrêtent le plus souvent lorsqu'un bonhomme suffisamment armé le décrète ou quand une nouvelle paire de fesse se pose sur un trône, non sans avoir botté les précédentes au préalable. Mais ces évènement ne sont jamais décisifs. Ils n'en sont généralement que les facteurs ; Ils annoncent la nouvelle ou délivrent le courrier sans en connaitre le contenu. Ce ne sont pas eux qui écrivent la lettre, achètent le timbre puis lèchent l'enveloppe.

Le terme d'une époque n'arrive que lorsque l'horloge de l'histoire le sonne. Et l'histoire n'en fait qu'à sa tête. L'histoire écrit la lettre. Et les livres d'histoire nous apprennent que ce sont ce genre de lettres qui écrivent l'histoire.

Oui, l'histoire est très souple.
De l'avis de Munster, elle est même carrément molle.

Et, question mollesse, Munster était un cador. Architecturalement parlant, il tenait de l'huitre à l'envers ou du gâteau mal cuisiné : Un noyau aussi dur qu'indigeste enveloppé de gras dégoulinant ; le tout en égal proportion puisque Munster était aussi rigide d'esprit qu'il était bloblotant de corps - une performance remarquable, dans un sens ou dans l'autre.


"OH ET PUIS TIENS, J'PAYE LA CHROPAINE TOURNÉE !"
"On paye d'avance ici, cureton."
"BON, QUI PAYE LA PROCHAINE TOURNÉE ?!"

L'esprit est comme une éponge : si on l'imbibe d'alcool, il se ramollit - Et lorsqu'il est plein, il recrache tout dans un seau. Munster ne buvait pas d'ordinaire, et ce pour deux raisons : S'il se savait être une peau de vache indécrottable en toute circonstance, l'alcool le mettait dans des dispositions inversement proportionnelles, ce qui le transformait le temps d'une soirée en joyeux luron éminemment sympathique disposant d'un répertoire de chants grivois impressionnant. Et il le savait : une fois la petite Huguette psalmodiée, il souffrirait d'un lourd déficit de crédibilité - une valeur primordiale dans sa branche. Enfin, lorsqu'il en venait à boire, son corps tenait bien mieux l'alcool que son porte-monnaie. Les gens qui ne picollent jamais sont sans doute les pires car dès lors qu’ils s’y mettent, ils se croient avoir la licence de boire tant que ça leur chante histoire de compenser.


« EH BAH MOI, beugla le bonhomme en s’essuyant maladroitement la moustache d’un revers de manche, J’SUIS SHLASSE ! Mais j’m’en vais continuer à boire, parc’que les héros, bah ça doit bien déproncress … décrompré …. Défron … MERDE, ça doit lacher du lest, de temps en temps, voila ! »

Là-dessus, il claqua sa chope vide sur le comptoir encombré et braqua son poing en signe de défis devant le nez du tenancier – une profession faisant office, rarement de bonne grâce, d’interlocuteurs privilégiés aux alcooliques solitaires.

« Et j’vais t’dire : Si l’histoire elle voulait pas qu’on picole autant, bah elle avait qu’à augmenter l’prix d’la bière !! »


Toutes les tavernes ont un coin mal éclairé dans lequel on devine plus qu’on ne voit généralement une table isolée flanquée d’une unique chaise. C’est cet emplacement privilégié (et systématique) que les individus suspects flanqués d’une redingote noire et d’une valise capitonnée choisissent pour se poser. De leur perchoir, ces bonhommes passent le plus clair de leur temps à scruter la salle en silence en ne consommant que le stricte minimum – c’est-à-dire juste assez pour ne pas se faire virer de l’établissement ; un dénouement qui mettrait un sacré coup à leurs effets. Munster ne l’avait pas vu (d’abord parcequ’il lui tournait le dos, ensuite parce que même de face, il était de toute manière bien trop saoul pour accorder de l’importance à quoique ce soit si ça ne se buvait pas) mais le bonhomme-suspect-tapi-silencieusement-dans-le-coin de la taverne dont notre gros lard s’évertuait à vider les fûts depuis le milieu de l’après-midi, ce bonhomme-ci regardait dans sa direction depuis quelques minute maintenant, tapotant nerveusement la malle qu’il avait disposé devant lui sur la table. Avec une infinie précaution, ses doigts glissèrent vers les loquets de sa valise, les liberèrent de leur gonds dans un petit « clic » à peine audible, et ouvrirent le bagage. Ses yeux se posèrent sur les objets disposés dans la malle sur une écharpe.

« Et m’en vais t’dire un aut’ truc bonhomme : J’ai bien vu qu’personne mourrait dans mon histoire. ‘fin, si, bien sur, les gens meurent. Simplement, jamais dans son champs d’action. Ils meurent ailleurs. ‘fin techniquement ils meurent pas hein, continua Munster sans cesser de s’approcher à chaque mot un peu plus du visage impassible du barman qui s’évertuait à essuyer le même verre depuis plusieurs minutes, comme pour se concentrer sur autre chose que la voix de ce gros tagazou de cureton bavard. Techniquement, j’dis bien, les gens meurent pas vu qu’ils existent pas. Disons juste qu’à un moment, y’en a bien qui prennent une balle ou qui choppent une mauvaise grippe ou qui glissent dans les escalier et la CRACK, l’histoire regarde ailleurs. Du coup, depuis l’temps, j’me suis dit que, bah mon histoire, si elle était aussi à ch’val là-dessus, c’était qu’elle était forcément lu par DES GOSSES ! Comme j’te le dis. C’est une histoire pour lopettes, avec de la morale, des valeurs et surtout PAS DE TRUCS DEGUEULASSES !


Sans le moindre bruit, l’individu commença à les emboiter les uns aux autres. Une fois l’objet assemblé, il le porta à bout de bras devant lui, l’embouchure du canon pointé vers Munster Fonduslip.


… Et bah moi, les gosses, j’vais leur dire un bon truc ! HEY DITES, LES MOCHES, fit-il cette fois-ci en levant les yeux au ciel et en s’adressant d’un air de défi au plafond. LISEZ MOI DONC CA, ON VERRA SI VOS PARENTS VOUS LAISSERONT ACHETER LES PROCHAINS TOMES !! ALLEZ VOUS ASTIQUER LA *POUEEEEEET ♫* AVEC DU *PWAAAAAP ♪* BANDE DE PETITS *Pweeeeet♫* A LA *PWWIIP♪* DE VIEILLE *PWADAPWET♫* FRIPPÉ DU *PWÊÊT PWON♪* ! »

Réalisant seulement ce qui se passait, Munster se retourna subitement vers la source de l’impromptu vacarme qui avait étouffé sa diatribe par intermitence.

« Hep toi là ! Le gros pebron ténébreux assit dans le coin avec ta trompette , tu veux que j’te joue un air avec après te l’avoir enfourné dans l’c*PWAADAP♫* pour v… ET ARRÊTE DE SOUFFLER DEDANS QUAND J’TE CAUSE !! »

_________________________

Parfois, l’horloge de l’histoire sonne.
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Une fois le trompettiste sonné à son tours à grands coups de son instrument sur le crane, Munster regagna sa place au comptoir Ce fut à ce moment là que la porte de la taverne s’ouvrit à la volée.
Litteralement.
Sur plusieurs mètres
.
A sa place d'origine, se trouvait un pied cachant, du fait de son envergure, la maigre parcelle du bonhomme apparaissant derrière l’emplacement laissé vacant de la porte. Munster, décroché pour l'occasion de sa nébulosité, s’étonna de cette entrée en matière franchement peu répandue que pratique - pour l'hôte, s'entend. Mais en voyant le bonhomme se plier en deux pour passer par le seuil, notre ivrogne de circonstance comprit combien le concept de porte devait être étranger à un gus qu’une carrure pareille avait du imperméabiliser à l’idée même de vie en interieur.

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Quelque part, dans un coin paumé sur Red Line.
« Maitre Hui ! Maitre Hui ! Le carillon commence à remuer ! »
« Shoulalalalalalala ! Une ère s’achève, et une autre commence ! »


Parfois l’horloge de l'histoire sonne.

*GING BAM DONG*

Son carillon n’est semblable à nul autre.



Dernière édition par Munster Fonduslip le Jeu 18 Oct 2012 - 18:56, édité 1 fois
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"Va falloir payer pour les réparations."

Effectivement, peu nombreux étaient ceux qui la faisaient à Denis le barman et ses trente ans de métier dans la bibine. Il en avait connu des tribulations exotiques avec leur lot de personnages tantôt charismatiques, parfois exceptionnels, mais toujours repartis après avoir payé ce qu'ils devaient. Ainsi ce n'était pas la carrure, certes titanesque, d'un client qui avait plus l'allure d'un fouteur de merde que d'un respectable consommateur qui allait lui faire de l'ombre. Au sens figuré. Puisque les trois mètres et des poussières de Ging avaient finis de plonger le boui-boui lugubre en baraquement d'une obscurité qu'on ne pensait pas atteignable à moins de six mille mètres au dessous du sol. Oui, quand le Lion débarquait quelque part, ce n'était pas sans amener une fraîche brise dans le tableau qui, paradoxalement, n'avait jamais été aussi étouffant de tension.



En général, il suffisait d'un rire franc et gras pour redonner au cadre l'ivresse euphorique qu'il méritait.

"BWAHAHAHA ! T'EN FAIS PAS, C'EST MON AMI QUI VA PAYER !"


C'est alors que le colosse ramena sa main de son dos, et le marine inconscient qu'elle tenait par la même occasion, pour l'exhiber au propriétaire à bout de bras ; un peu à la manière qu'aurait un pécheur dédaignant les veines de son bras sur le point de péter pour exposer fièrement sa prise le temps qu'on prenne cette foutue photo. A la différence près que Ging n'avait pas le moindre de mal à soulever l'homme au dessus du sol -sans compter qu'il n'avait rien du type qui taquine la truite à ses heures perdues. Les ivrognes qui formaient la clientèle du soir restèrent interdits quelques secondes, yeux écarquillés, bouche béante. Puis tous eurent le même réflexe d'examiner la bibine qu'ils descendaient depuis quelques heures, pour savoir si la scène peu commune -même pour des alcoolos notoires- incombaient au nectar ou à la débilité du nouveau-venu. On reprit ici et là une gorgée hésitante, puis on statua sur la deuxième option.



"HUM ?! EH BAS, FAIS PAS TON TIMIDE !"


Tonitrua le colosse en secouant grossièrement le badaud pendu à sa main qui ne semblait ne pas vouloir se réveiller -ce qu'on comprenait sans mal. Ging dut lui faire faire l'avion plusieurs secondes qui passèrent pour des décennies du point du vue des clients mal à l'aise, mais il se rendit enfin compte que le bonhomme était dans les vapes. Sa tête se déforma alors sous le coup de la réflexion, mais loin de se démonter ; il scanda de nouveau de sa voix qui ne permettait pas le doute.



"BWAHAHA ! IL AIME BIEN FAIRE CA. MOI JE LUI COLLE UNE MANDALE, ET LUI IL FAIT SEMBLANT DE S’ÉVANOUIR ! UN SACRE BLAGUEUR CE P'TIT GARS !"



A vrai dire, on ne pouvait affirmer si le capitaine croyait bel et bien ce qu'il racontait ; tout était possible avec les gens de son espèce. Par exemple, cela ne le dérangea pas une seconde d'asseoir le matelot inconscient au bar sur le tabouret à coté du sien, avant de lui faire remuer le bras et de prendre une voix aigüe pour commander à sa place. Le tout, bien sûr, en s’efforçant de lui relever la tête de temps en temps et en veillant à ce qu'il ne tombe pas en arrière. Sans quoi, ça aurait pas été crédible. Ging, improvisé marionnettiste, se réservait en plus le droit de feinter le bon samaritain en annonçant qu'il allait payer. Puis, dans la seconde qui suivait, il faisait taper la poing de son pantin sur la table et, d'un ton naissilard au possible, lui prêtait les mots qu'il avait toujours rêvé d'entendre : "c'est moi qui offre !". Le tavernier, l'air incrédule, dévisageait Ging pour tenter de lui faire comprendre que son cinéma ne trompait personne. En vain. Le capitaine, tout sourire, était déjà en train d'aider son ami à sortir sa bourse de sa poche puisque "il avait l'air rudement fatigué ce soir". Denis, briquant inlassablement le même verre propre depuis des lustres, n'avait pas souvenir avoir connu pareille scène, même en trente ans de métier. Il savait les emmerdes pas loin. Mais il savait également qu'on ne disait pas non au tintement métallique des pièces s'entrechoquant dans une escarcelle qu'on vous tendait. Au moins elle servirait à payer pour les dommages collatéraux.


"GING "BAM" DONG !


Ces dommages collatéraux mêmes qui, si l'on était pas averti, avaient étrangement l'allure d'une poignée de marines rassemblés dans l'entrée de la taverne.


"Vous êtes en état d'arrestation pour avoir uriné sur un agent en fonction et...

-IL ME SEMBLE BIEN M'ETRE EXCUSE POURTANT !

-...l'avoir ensuite assommé avant de...

-JE LUI AI A PEINE MIS UNE TAPE DANS LE DOS QU'IL S'EST EFFONDRE !

-...vous en servir pour attaquer ses collègues pour finalement le kidnapper.

-BWAHAHA. J'AVOUE, POUR CELLE-LA, J'AI PAS D'EXCUSES !


Comme dit précédemment, Denis avait de la bouteille comme tenancier. C'est pourquoi il ne fut pas tellement surpris lorsque Ging le saisit au col pour l'expédier sur le tas de marines. En revanche, il fut plus interloqué par la vitesse à laquelle il fusait vers eux.
    On dit des tavernes qu'elles sont souvent le théâtre de nombreuses altercations. Chaque bagarre y est une pièce. Chaque combattant y est un acteur. Chaque coup y est une réplique. Et chaque saoulard accoudé paisiblement à sa table, regardant le spectacle en applaudissant de temps à autres certaines passes audacieuses y est donc un spectateur. Les pièces qu'interprétait Ging étaient d'une nature assez particulières. Si le premier acte tenait de la comédie participative (de celles où la troupe invite certains membres du public à les rejoindre sur scène, le plus souvent pour faire office de figurant visant à se faire ridiculiser devant toute la salle ou, dans ce cas de figure précis, à servir de projectile), elles se transformaient bien vite en One Man Show - de ceux où l'audience se roule par terre. Enfin, Ging appartenait à cette classe de comédien particulièrement redoutée multipliant les rappels en fin de pièce sans qu'on les lui réclame. Dans tous les cas, c'était un bon acteur.


    De l'avis de Munster, c'était avant tout un mauvais personnage.

    Au cours de ses aventures, et bien malgré lui, il avait croisé des pleins régiments de grosses brutes taillées dans le roc et distribuant les pins par grappes de douze pour un "oui", un "non" ou dans certains cas pour un gros paquet de pognon.

    Bien sur, on pourrait tenter de signaler à Munster qu'il tenait lui aussi de la grosse brute, ce à quoi il rétorquerait sans doute qu'il avait au moins l'originalité d'être taillé dans du nougat.


    En tout bon prêcheur, Munster était un bonhomme bourré de convictions - soit le terme poli accolé à la notion de préjugé. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, la conviction est un intrus nuisible proche du microbe ou du punk à chien. N'importe quel concept, même le plus farfelu, peut se muer en conviction. Pour ce faire, il lui suffit que l'idée qui le contient vous frappe suffisamment fort pour s'enfoncer dans votre crane et s’agripper au passage à l'une de vos circonvolution pour ne jamais la lâcher. La conviction se distingue de la certitude en cela qu'elle n'est pas rationnelle. La seconde va toquer poliment à la porte de votre cervelle et vous demander votre avis avant d'aller squatter le canapé-lit de votre lob frontal. La conviction, elle, entre sans avoir été invitée, se dirige vers votre frigo qu'elle dévalise de ses bières sans vergogne et organise des soirée dans votre tête en mettant la musique à fond. Et celle de Munster en était remplie jusqu'aux oreilles. D'aucuns diraient que sa tendance à imposer ses convictions aux autres à tout bout de champs venait justement de ce que son crane en hébergait plus qu'il ne pouvait en contenir, lui imposant fatalement de les partager avec ses voisins afin d'éviter que sa cervelle n'en déborde.


    Et puis quelque chose le frappa.
    Deux choses en fait.
    D'abord un poing ; Celui du mastodonte.

    Suivit de peu par une sensation distillée dans tout son corps. Ce n'était pas la douleur du coup reçu à la mâchoire. Ni celle de l'atterrissage douloureux sur la pyramide humaine que composait la troupe de marines sonnés (auxquels s'ajoutait Denis le barman). Ni même la surprise* suscitée par le vol plané calé au milieu du processus. C'était une sensation bien plus désagréable que ce que toutes les mandales distribuées dans le monde, que ce que tous les atterrissages fracassants contre des objets non prévus à cet effets, ou que ce que n'importe quelle combinaison des deux pouvait procurer. C'était la certitude que Ging BAM Dong n'était pas qu'un énième mastodonte improvisé par l'histoire et bazardé en orbite autours de Munster comme une grosse mouche bleue pour détourner son attention de l'imminente peau de banane négligemment déposée sur le chemin. Il n'était pas une grosse brute tendant vers le cliché mais l'absolu vers lequel tendaient les grosses brutes clichées. Il n'était pas un nouvel anonyme gravitant en périphérie de l'histoire mais le centre de sa propre histoire à lui.
    Spoiler:

    Ce n'était pas le bonhomme qui déclarait une nouvelle ère.
    Mais le rugissant carillon de l'horloge qui la sonnait.

    Bien évidemment, en l'absence d'ère à sonner, Ging avait su s'adapter et s'était reporté sur tous ceux qui lui passaient sous, sur, dans ou contre la main, le pied, les dents, ou tout autre attirail et pseudopode potentiellement contondant dont la nature l'avait greffé. D'ordinaire, après s'être vu administré une rouste par un mastodonte amoureux fou de la bagarre partageant avec le boulet de canon la force de frappe et un sens aiguë des relations sociales, les individus lambda découvrent le sens du mot "magnanimité", s'asseyent sur leur amour propre et, s'ils le peuvent encore, sur leur chaise sans faire d'histoires. Mais Munster faisait les histoires. Techniquement, l'histoire le faisait, lui. Et présentement, l'histoire le fit se relever, s'épousseter les manches tranquillement, s'extraire du tas de marines assommés sur lequel il était jonché, s'arrêter net, se regarder les mains, grommeler dans sa barbe, se retourner et commencer à farfouiller dans l'amas de soldats à la recherche de son bougeoir.

    Puis, l'histoire plaça une nouvelle troupe de marines à la porte.

    En l'absence de cordes vocales, l'histoire ne peut pas, à proprement parler, rigoler. En revanche, le panel de codes narratifs mis à sa disposition lui permettent de signifier un éventail d'humeurs étonnamment large. Dans la taverne, un silence accompagna l'échange de regards prostrés entre une troupe de marine venus aider leurs collègues et un bonhomme prit la main dans le sac à farfouiller allègrement dans une pile de bonhomme assommés que composaient les collègues sus-mentionnés. Puis une mouche passa en zig-zag, répandant son irritant bruissement d'ailes caractéristique en brisant le silence dans la plus pure tradition comique.

    C'était l'histoire qui rigolait.

    Dans ce genre de situation, beaucoup de personnes auraient tenté d'expliquer la teneur du qui proquo, d'autres se seraient contentées de fuir en courant. Munster, lui, reprit ses recherches de plus belle.

    "'ttendez un peu. J'suis à vous dans deux secondes les gars." Fit-il, l'air faussement détaché à la douzaine de paire d'yeux lui louchant dessus avec le regard de celui qui se pose une multitude de question en même temps sans arriver à ranger les réponses dans l'ordre.

    Munster se sentit soudain l'âme d'un joueur de mikado géant. faisant serpenter ses mains dans la pile d'objets pour y dénicher le bon sans faire bouger le reste, le tout sans détacher son regard des marines louchant sur lui, tous vraisemblablement prit au dépourvu. Ses doigts se refermèrent finalement sur un manche en bois familier. Fermement maintenu à bout de bras, le bougeoir jailli de sa cachette dans une éruption de marines inconscients. Profitant de la confusion momentanée, Munster téléscopa son arme contre l'un des soldats avant de se jeter à plat ventre sur ses collègues, soulevant un nuage de poussière sous l'impact.

    "BELLY BELLY CRUNCHY !!"

    S'en suivit une série de sons aux tonalités clairement contondantes rythmés par des bruits de succion que l'opacité du nuage de fumée ne rendirent que plus intriguant. Finalement, la silhouette de Munster se dessina dans la purée de poids, comprimant entre deux bourrelets de son ventre pantagruélique un malheureux marine dont la seule jambe de libre se débattait dans une frénésie inoffensive mêlant comique et horreur sourde. Sans accorcer plus d'importance au malheureux qu'à une queue de cerise, Munster pointa un doigt accablant en direction d'un Ging hilare.

    "ET TOI, T'AS DRÔLEMENT DE LA CHANCE D'AVOIR UNE *POIIIIN* D'HISTOIRE DERRIÈRE TOI SINON J'T'AURAI TELLEMENT APLATI LA TRONCHE QUE T'AURAI PU SERVIR DE MARQUE-PAGE AU LECTEUR !"

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    Il est coutume de dire que chacun fait avec les cartes qui lui ont été données. Les nobles dilapident leurs pognons, les pauvres le réclament, et l'homme à la tête de noix de coco fait des jus de fruits. Chaque être voit le jour avec des caractéristiques, parfois pas folichonnes on vous l'accorde, mais il ne tient qu'à lui d'en faire quelque chose de grand. Ging lui, était né géant. Cela voulait dire deux chose. Premièrement qu'il percevait les grands actes de ce monde un peu moins grand, et les plus petits ridiculement insignifiants. Il avait ainsi d'après ses plus profondes croyances, un quota de grandiloquence à atteindre plus important que celui du premier paltoquet venu. Pour celui-ci en revanche la vie est facile, il n'avait qu'à devenir amiral en chef de la marine ou bien un corsaire craint de tous, et tout le monde le respecterait. Mais le colosse, de par sa nature-même, voyait plus grand. Ce n'était pas tant affaire de conviction ou d'ambition mais plus un problème physiologique. C'était là la première carte de la belle paire qu'il avait reçue de son créateur. Celle-là, personne ne la remarquait.


    Pour l'autre, on ne pouvait faire autrement que la prendre en plein face.

    C'était sa main.

    L'immaculée conception faisant bien les choses (rappelons que Ging a deux mamans), le capitaine avait non seulement le moyen de distribuer des mandales peu flatteuses pour la virilité de ceux les recevant, mais aussi le manque de remords associés d'ordinaire au geste. Après tout qu'est ce que pouvait bien être une simple torgnole dans le pif lorsque vous voyiez les choses à l'échelle du mastodonte ? La réponse était "un moyen comme un autre de passer le temps", et dans le cas de notre héros, "un moyen plus drôle qu'un autre de passer le temps". Ainsi vous auriez été dans l'erreur de vous offusquer pour ci-peu, quand même la paluche du bonhomme avait de bonnes chances de vous fracasser la mâchoire ; l'important était qu'il ne le faisait pas méchamment.


    Munster Fonduslip demeurait un homme difficile à cerner, au propre comme au figuré. Il avait, un peu à l'instar de Ging, sa façon bien à lui d'appréhender le monde. Ce qui le faisait passer pour le commun des mortels, au mieux comme un excentrique personne dont la grandiloquente destinée débordait sur la mentalité, au pire comme un vieil autiste. Le fait qu'il ne manifestait bien évidemment aucun effort pour réfréner son aspect "spécial" n'aidait en rien la compréhension du bonhomme. Mais s'il était un homme pour accepter les choses sans les comprendre, c'était bien notre autiste à nous. Celui qui depuis sa naissance n'avait pigé un broc des choses qui l'entouraient et qui pourtant, pour des raisons de moins en moins évidentes, s’efforçait de composer avec. Bien sûr que Ging ne comprit pas un traître mot de ce que débita Munster ; mais il n'en avait cure. Entre personnages excentriques ils se comprenaient naturellement.


    "JE T'AIME BIEN MON GARS, QUI ET COMBIEN QUE TU SOIS ! ALORS ENTRE DANS MON E...."


    Ging ou l'homme qui pouvait passer plus d'un mois à attendre que ses esprits rattrapent ses mots stoppa net sa réplique. Il fixa quelques instants Munster droit dans les yeux, et se retourna subitement pour s'installer au comptoir vide de barman. La miche droite en équilibre sur son ersatz de tabouret, le reste de spectateur pouvait le voir s'agiter tout seul ; criant parfois ses pensées qui de toute évidence devaient rester secrètes. Ces jappements saugrenus déchiraient le silence et finissait de scotcher les spectateurs partagés entre la curiosité et le malaise sur leurs sièges.

    Il était de notoriété publique que Ging était un gros faisan. Mais c'était précisément parce que sa débilité ne connaissait aucune limite qu'il pouvait en faire une force. Il était sans doute le seul homme à ne pas jouer avec les cartes qu'il avait, mais à s'en inventer d'autres. Se tortillant sur son siège de fortune, il se démenait de plus en plus, des gouttes de sueur s'amassant sur son front. Il était en train de faire ce pourquoi il n'avait pas été conçu. Il était en train de braver les tabous, de défier Dieu lui-même.


    Il était en train de réfléchir.
    Quand soudain...

    "CA Y EST ! JE SAIS COMMENT..."
    UN JUS DE FRUIT PEUT ETRE ?!


    C'est alors qu'un homme avec une noix de coco à la place d'une tête déboula dans la taverne, se prit les pieds dans le premier marine étalé et culbuta en avant, renversant ainsi les trois briques de jus de fruit qui s'ouvrirent sur Ging. Le colosse avait déjà brûlé des tavernes pour moins que ça et bu du lait de coco par pur plaisir. Mais il ne parut pas s'en offusquer. Ses pensées tourbillonnaient dans son esprit et lui brûlait les entrailles. Il était non seulement trop occupé pour s'en soucier, mais son corps bouillant mis tout au plus quelques secondes à faire s'évaporer le liquide. Il n'avait en fait pas cessé de fixer Munster depuis le début. Il se mit à avancer vers lui, les pensées embrumées, le bras tendu.



    Quand un excentrique personnage de plus apparut.




    Celui-ci cumulait à lui seul plus de marques d'extravagance que tous les autres réunis. Il avait un air inquisiteur et regardait tout le monde du haut. Au figuré puisqu'il apparaissait sans l'ombre d'un doute qu'on avait affaire là à un membre de la noblesse ; comme au propre, perché qu'il était sur son siège incrusté d'or et conçu pour être porté par quatre hommes. Les hommes en question d'ailleurs n'était que trois et ils devaient combler le vide laissé par leur camarde. On serait tenté de penser que le noble faisait ça par pur méchanceté, mais le fait que les porteurs peinaient, ainsi son siège commençait à pencher dangereusement. Pourtant, Jétépah D. Stinay se refusait à l'ordinaire. C'est pourquoi il avait passé vingt années à marcher avant de capturer un à un les hommes aux têtes de fruits pour en faire ses porteurs attitrés. Si l'homme-banane, l'homme-brugnon et l'homme-poire semblaient avoir acceptés leur destiné ; ce n'était pas du goût de l'homme à la tête de noix de coco qui mettait un point d'honneur à ne pas jouer les cartes reçues, sinon à vendre des jus de fruits bon marchés.

    Mais Jétépah lui-même n'était pas en reste. Sa tête féline avait la deuxième crinière la plus flamboyante que l'on ait vu sur un homme mesurant dans les trois mètres. Chose qui intrigua Ging. Mais il avait aussi exactement les mêmes traits que notre héros. Chose que irrita Ging. On aurait en fait pu le prendre pour son jumeau s'il n'y avait pas eu cette particularité.


    S'il avait la chance d'avoir la tête de Ging.
    Il se coltinait le corps de Munster.


    Le noble balaya la scène de son regard impérieux avec le plus de mépris qu'il pouvait dégager sans parler. Son regard se posa sur l'homme à la tête de noix de coco et il eut un sourire qu'il ne parvint à réprimer, puis il vit Ging. Sa mine se déconfit instantanément. Comment cet homme se permettait-il d'arborer ses délicieux traits ?! Et surtout comment faisait-il pour avoir les cheveux plus brillants que les siens ?! Il en fallait souvent moins, mais jamais plus pour que Jétépah décide d'emprisonner le pirate. Sur un simple geste de sa part, les dix hommes en costard l'escortant s'avancèrent d'un pas décidé vers Ging. C'est alors que le plan machiavélique que le capitaine avait mis en place quelques instants plus tôt au comptoir se mit en marche.


    Il sourit de toutes ses dents, fit un clin d’œil assez appuyé pour qu'un aveugle le devine au noble, et trébucha de lui-même sur un marine au sol avant de laisser tomber dans les griffes des larbins de Jétépah. Le tout, bien sûr, en agrémentant son action d'une réplique bien sentie histoire de rendre la scène plus vraie.


    "NON MON DIEU ! JE SUIS TELLEMENT SOUS... SOUL ? SAOUL...?...BOURRE QUE JE NE PEUX OFFRIR AUCUNE RESISTANCE ! JE VAIS ME FAIRE CAPTURER ! SI SEULEMENT UN CHIC TYPE POUVAIT VENIR ME SAUVER... IL MERITERAIT SANS DOUTE DE DEVENIR LE SECOND DE MON EQUIPAGE !"



    Et il feinta l'inconscience, un sourire aux lèvres, et un plan sacrément rusé en tête.

    Spoiler: