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[Panaris Island] Harsh Spanking

HARSH SPANKING'S QUEST
Starring Ging & Rockfor
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[Panaris Island] Harsh Spanking 725302Panaris


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Certains juraient l'avoir toujours su. D'aucuns en avaient un nébuleux reste de songe prêt à s'évaporer à la moindre tentative pour s'en souvenir. Une antique civilisation aujourd'hui disparue avait même qualifié ce jour. "Raaah putain Maman faudra pas rester dans les parages" qu'ils l'avaient nommé. Mais la vérité est que personne n'aurait pu prédire ce qu'il allait se passer. Immergée dans les flots paisibles de South Blue, elle sommeillait. Unifiée de mille rouages s'imbriquant avec une perfection absolue, ce fut le plus modique qui se mit à tourner. Un deuxième le rejoint presque instantanément dans sa spirale. Puis le troisième. Et bientôt le bruit de ces engrenages vrombissant déchaina la mer. Alors la tour oubliée de Panaris émergea. Puis le monde s'agita.


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"Un jus de tomate s'il vous plait !
-Euh.... C'est à dire que...."


Le tavernier était bien embêté. Il ne pouvait tenir le regard du jeune homme assis à son comptoir lorsqu'il cherchait ses mots. Ou plus exactement comment les agencer entre eux. C'était pas tant qu'on essayait de répondre en alexandrin aux clients souriants, mais Denis le barman avait de la bouteille -si je puis dire. Il tenait son bar depuis des temps immémoriaux, si bien qu'il pouvait d'un simple regard savoir à qui il avait affaire et parfois même ce qu'il allait consommer. C'était son expérience qui parlait. Et là, elle lui disait clairement de ne pas avouer avec désinvolture que c'était pas dans le genre de la maison de servir des jus. De tomates ou même de canneberge, c'était pas le fruit le problème. C'était le jus. Si Denis avait appris quelque chose durant ces longues années de service, en plus du fait que les recettes de la vente de ses alcools servaient exclusivement à payer les dégâts causés par les mecs bourrés -et que par conséquent il finirait ses jours comme un clochard dans un établissement pourri-, c'était d'écouter son instinct. Non, attendez. C'était d'écouter les types qui s'asseyaient à son comptoir avec six sabres à la ceinture, et à fortiori quand c'était après avoir ramassé la gueule à l'ensemble de la clientèle pourtant peu fréquentable. Même s'il arborait un sourire ingénu. Alors oui, Denis était bien embêté. Il s'essuya son front humide de sueur, déglutit une dernière fois ; et à défaut de lui servir son jus de tomate, il lui proposa ce qu'il avait de mieux en boutique. Une rumeur.


"Dis... t'as entendu parler de cette tour qui...."



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"Alors comme ça, tu sais pas qui on est ?!
-Euh.... C'est à dire que...."



Le tavernier était bien embêté. Il avait contre toute attente réussi à garder son bar intacte ce soir-là ; sans compter les chaises, les tables, le seul cadre accroché et le piano, qui était maintenant beaucoup plus facile à transporter mais aussi plus dur à assembler. Les murs, eux, tenaient toujours debout, bien qu'ils semblaient sur le point de se mettre d'accord pour arrêter les frais. Denis s'en sortait pas trop mal pour une soirée de pleine lune. Il avait connu pire. Et ces soirs en question avaient presque tous commencé par une arrivée inattendue. D'ailleurs il ne s'attendait pas à les voir arriver ceux-làs. Huit étranges personnages dont le seul but semblait de faire passer son voisin pour un type banal à coté de lui. Ca marchait tellement bien que les passants détournaient le regard lorsqu'ils les croisaient. Le barman passa sa main tremblante dans ses cheveux, oublia de se recoiffer avec, puis déglutit bruyamment. Il avait du mal à trouver un endroit dans son établissement où regarder, la plupart dudit édifice était occupé par une main ou ces étranges agglomérats de métaux -sans aucun doute létaux- qui en faisaient office. S'agissait de pas déconner avec les gonzagues s'il voulait finir ses jours comme un clodo dans son bar pourri. Mais il n'avait pas besoin de capter les pupilles aussi dilatées que frénétiques de ses interlocuteurs pour les savoir fous à lier. Denis ne savait plus quoi faire. Plus quoi penser. Alors il arrêta tout bonnement. Quand don expérience parla.


"Dites... vous avez entendu parler de cette tour qui..."



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"Psst. Psst. Un chat, ça t'intéresse ?!
-Euh.... C'est à dire que...."



Le tavernier ne savait même plus s'il aurait dû être bien embêté. Certes, de violents relents le gagnaient à mesure que l'odeur du bonhomme embaumait ses sinus, mais quelque part au fond de lui, il eut le malheur de se dire qu'un type qui se trimballait des chats aussi mignons ne pouvait pas être foncièrement mauvais. C'était l'erreur commune que beaucoup de gens faisaient à l'approche du vendeur de chats. "Il a pas eut de bol dans sa vie" qu'on se disait. "Je me demande s'il les vend cher" qu'on en venait à penser. Jusqu'à bien sûr qu'on se rende compte de l'écume perlant des babines desdits félins qui montraient qu'on pouvait avoir la rage et rester adorable. M'enfin l'homme avait appris avec le temps -et les innombrables ventes infructueuses implicites- que les gens n'étaient pas prêt à payer pour se faire mordre. Il avait donc changé de méthode. Il était devenu plus tactile dans ses ventes, plus...convaincant. S'il souriait aux clients potentiels c'était d'avantage pour dire que les attaquer seraient une technique commerciale comme une autre et pas pour témoigner de la vie de bohème qu'il menait depuis à peu près toujours. Alors, quand il sourit à Denis ; ce dernier tourna très vite le regard. Et enquilla.


"Dites... vous avez entendu parler de cette tour qui..."



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Le tavernier jeta un dernier coup d'oeil à la pendule. Tous ses muscles se relâchèrent dans un soupir aussi long que l'avait été sa journée. Il s'apprêtait à plier boutique, presque un sourire sur les lèvres, avec la moue de celui qui se rend compte être satisfait de sa journée. Oh, il avait connu bien pire...


"UN STEAK DE LION ! ET MAGNEZ VOUS, J'AI LES CROCS !
"Dis... t'as entendu parler de cette tour qui...."
"TA GUEUUUUUULE !



...ou peut être pas finalement.



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C'est parce que Ging était en train de dévisser le comptoir de Denis du sol pour le lui coller sur la tronche qu'il n'entendit pas parler de Panaris. Cette tour sortie de nul part la nuit dernière mais qui ce soir dansait pourtant avec les nuages. Personne ne savait qui l'avait construite, pas plus que pourquoi. Tout ce que les rumeurs de tavernes pouvaient vous dire dessus, c'est qu'elle était infinie. Que ses différentes parties bougeaient subitement et aléatoirement, mues d'une propre volonté. Celle de vous entrainer dans un de ses nombreux pièges mortels. Mais juste après, et c'est la raison pour laquelle tout le monde se rue sur elle avant que le gouvernement en entende parler, on vous parlait du fabuleux trésor qui dormait au sommet... Certains pensaient que c'était le sabre légendaire après lequel ils couraient, d'autre que c'était une accréditation de la marine pour être reconnue comme organisation officielle. Y'en a même qui croyait dur comme fer que c'était le chat de la prophétie, celui que le monde s'arracherait à des sommes exorbitantes.

Ging, lui, espérait juste que ça se mange.



Dernière édition par Ging "BAM" Dong le Lun 7 Mai - 14:57, édité 1 fois
    Il existe une règle d’or, somme toute logique, qui dit qu’un endroit où se regroupent personnages cons et dangereux d’apparence était un lieu, certes souvent con et dangereux, mais largement assez digne d’intérêt pour qu’on ait raison de s’y pointer. Seulement voilà, selon toute vraisemblance, je n’avais ni l’air dangereux, ni l’air con. Je crois. Aussi, lorsque tentant de me débarrasser de Rhyne pour la journée, j’avais finalement réussi à atterrir tout près de ce bar et que, dans les quelques heures que j’ai passé là, j’avais pu croiser plusieurs fois des individus étranges, je me tâtais d’à mon tour y faire un saut. Mais comprenez bien que par raison de crédibilité, je ne pouvais décemment pas y aller seul. Et si Rhyne m’accompagnait généralement dans tous mes mauvais plans, si elle n’hésitait pas à se donner des faux airs de femme cruelle, quand il s’agissait de s’assumer conne, y avait plus personne. J’vous jure. C’était bien une femme, aussi jeune soit-elle, j’vous l’dis. Bref, j’avais besoin d’un nouveau sujet pour me suivre là où je comptais aller. Autant vous dire que je n’ai pas hésité le moindre instant. Car quand pour la première fois de ma vie, alors qu’il rentrait dans le fameux bar devant lequel je campais depuis une bonne partie du jour, j’ai croisé Ging "BAM" Dong, il ne me fallut pas 5 secondes pour savoir qu’il était con, dangereux, et qu’il me plairait bien. Aussi, je débarquais à sa suite dans le fameux lieu duquel étaient déjà sortis les divers individus que le monde m’avait permis d’apercevoir. Et à peine y avais-je posé le pied qu’un sourire amusé éclaircissait mon visage. Car j’aime les gens qui bousillent des bars pour de la viande de lion.

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    Ça avait d’abord été cet étrange énergumène, baragouinant Dieu sait quoi sur un éventuel jus de tomate qu’il aurait apparemment oublié de demander, portant 6 sabres à la ceinture, l’air innocent. Lui semblait juste con. Aussi, lorsqu’il m’aborda pour me demander si, par hasard, le barman m’avait donné du jus de tomates, je restais perplexe un instant. Mais si j’sais un truc, c’est que rester perplexe longtemps, c’était rarement un bon plan. Surtout devant un semblant de bretteur idiot. J’connaissais bien la situation, j’avais une bretteuse idiote en permanence collée au cul.

    "Ecoute mon gars, j’te suis trop supérieur pour qu’on m’refuse du jus d’tomates à moi. Si le petit peuple ne veut pas que t’aies ton jus, alors je ne te…"
    "Non, parce que tu vois, j’ai oublié de redemander à Denis le barman après qu’il m’ait parlé de Panaris et…"
    "Panaris ?"
    "Merde ! TOI AUSSI TU CONNAIS ? TU NE ME VOLERAS PAS MON SABRE ! TAIOOOOOOOOOOOOOOOooo…"


    S’il fallait apprendre au bonhomme qu’on dit « Taïaut » et pas « Taïo », force était de reconnaître qu’il m’avait laissé dans un état de curiosité avancé alors qu'il s'enfuyait rapidement en direction des quais. La fameuse Panaris (dont le nom ressemblait à une marque d’ananas en sirop plutôt qu’à une tour comme je l’apprendrais plus tard) m’intriguait et j’hésitais presque à entrer dans le bar pour demander au gérant de m’en apprendre un peu plus sur la question. Mais il y a une règle qui dit « Quand tu vas dans un bar commande ou dégage ». Et comme je n’avais pas la moindre intention de commander, j’étais forcé de rester las, là, devant la porte d’entrée, en attendant de voir si, par le plus grand des hasards, le futur ne m’apporterait pas plus d’informations.

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    Je dois vous avouer avant de poursuivre que je n’avais jamais réellement imaginé le futur sous la forme d’un groupe de huit énergumènes, chacun plus ou moins inquiétant et/ou débile que son voisin. Eux étaient clairement dangereux ET cons. Et foutre qu’ils étaient bruyants.

    "Euh... Dites-moi..."
    "MOI !"
    "Bwahaha, t'exagères Patrick !"
    "Hey, j'vous ai raconté la blague de l'oiseau?"
    "FAIS GAFFE SERGINE HEIN, TU ME FAIS ENCORE UN COUP PAREIL ET J'TE FOUS MON PIEU ENTRE LES DEUX YEUX !"
    "Vous savez ce qui fait "Ouille ouille ouille" ?"
    "Hey? HEY ? L'un de vous sait ce qu'est Paranis?"
    "Tu sais, si tu veux vraiment savoir... PARS A NICE !"
    "Bwahaha, t'exagères Patrick ! ...mais c'est quoi Nice?"
    "Nan Sergine, pas les yeux sur ton visage."
    "Est-ce que quelqu'un a les résultats de la bataille de chien d'hier?"
    "Nan sérieux, vous êtes au courant ou pas?"
    "Nan, j'les ai pas moi."
    "Nan Sergine, pas ce pieu là non plus ♥"
    "HEY MAIS, POURQ..."
    "Ouais, ça m'dit vaguement quelque chose. T'sais, Denise, c'est la tour là."
    "...UOI IL PARLE DE LA MEME COULEUR QUE MOI LUI?"
    "C'est un oiseau il a des grosses couilles ! Du coup, quand il parle ça fait "Ouille Ouille Ouille !", bwahaha !"
    "Ouais, c'est l'barman qui nous a parlé de ça. Apparemment, c'est une tour cool qu'elle est bien quand on monte en haut. Parce qu'apparemment, dans cette tour, c'est assez le bordel pour qu'on puisse aussi monter en bas. Bref, c'est là où on va quoi."
    "Nan, serre un peu plus Sergine ! T'es trop plate, c'est chiant !"
    "Ah bah, ça, ça doit être une connerie du narrateur, même si j'crois pas qu'on ait le même size."
    "Le mieux, pour monter en bas, C'EST D'ETRE UNE DANSEUSE !"
    "P'tain, mais quel enfoiré ce narrateur ! La discussion est déjà assez bordélique comme ça pour qu'en plus il foire son code couleur !"
    "Bwahaha, t'exagères Patrick !"
    "Mais... MAIS..."
    "Qu'est-ce qui se passe monsieur?"
    "Ecoutez madame, je n'suis pas sûr qu'il soit très intéressant de nous encombrer de personnages inutiles dans cette histoire..."
    "Ouais, m'enfin, apparemment, c'parce que son capitaine a pas voulu lui filer le code couleur des PNJ ou une connerie du genre."
    "Vous avez pas compris? Vous préférez la blague de la couille qui s'est perdue dans le train?"
    "Vous seriez pas Arnaud Tsa..."
    "EH QU'FO QU'T'ECOUT'EUL ROI QUANTIPARL MAMIE ! ET QU'VA T'Y VOUS Y FALLOIR FERMER VOS MEUL PARQ'SINON J'VOUS Y COUILLE EUL'FRONT !"
    "Hein?"
    "Hein?"

    "Hein?"
    "Hein?"
    "Hein?"
    "Hein?"
    "DEUX !"
    "Z'êtes sur qu'il sait parler patois?."
    "ON S'CASSE !"

    ...

    Suis-je vraiment obligé d'expliquer la situation? Tout ce que j'avais appris de cette discussion, c'était une courte information sur Panaris : une tour cool et bordélique. La curiosité eut raison de moi. Je m'avançais d'un pas déterminé en direction de l'entrée du bar. Ce connard de Denis me cracherait bien toute l'histoire. Et ordonné cette fois.


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    Arrivé à la porte du bar (bordel, elle était longue l'ellipse), alors que je m'apprêtais à rentrer, un individu étrange posait le pied dehors. Et pas que le pied d'ailleurs, vu qu'il s'accompagnait d'un plutôt gros panier dans lequel plusieurs chats tout mignons se tenaient la patte. Enfin... Mordaient chacun la patte du voisin. Pas très pacifique, mais si mignon. Le type lui, était quand même vachement moins agréable à regarder que ses chats. Et après avoir croisé le mec aux tomates, puis le groupe d'andouilles voilà que je commençais enfin à comprendre l'intérêt de Panaris : le mec qui se tenait devant moi, lui, était bel et bien dangereux. Mes trois rencontres se complétaient parfaitement. Une même dose de vilains et de gros cons, un lieu méconnu... S'il n'y avait pas un éventuel trésor et quelques énigmes dans l'coin, j'voulais bien vendre mon chapeau. Mais comme de toute façon, c'est moi qui fixe les règles, que j'eu raison ou non, mon couvre-chef raffiné resterait sur ma tête.

    "Psst. Psst. Un chat, ça t'intéresse ?!
    "Non."
    "Même pas le... CHAT DE LA PROPHETIE ?"
    "Non."
    "Bon, bah j'irais chercher le chat-trésor tout seul alors. Salut."
    "T'sais mon gars, le seul concerné par une prophétie ici, c'moi."
    "Donc tu sais que le trésor de Panaris, c'est bel et bien le chat?!"
    "Pardon?"


    Et voilà le trésor. Je n'eus pas plus de temps pour obtenir des informations supplémentaires venant de la part de ce vendeur de chats qui, disparaissant dans le vent, s'éloignait vers une destination inconnue avec, apparemment, la ferme conviction que ce qu'il cherchait se trouvait bel et bien à Panaris. Je doute que ce soit un chat. En vérité, je doute qu'il y ait quoi que ce soit. Mais pour une nouvelle fois prouver que je valais mieux que tout le monde, je devais trouver ce qui se cachait dans cette étrange tour dont on ne savait rien sinon qu'au moins 2 clodos et un groupe s'y dirigeaient déjà. Je vis passer Ging "BAM" Dong devant moi. Et j'entrais à sa suite dans le bar.


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    "TOI ! A partir d'aujourd'hui, j'suis ton capitaine. Alors grouille-toi d'venir avec moi, compagnon. Y a un endroit que j'aimerais bien visiter et j'sens que toi et moi, on va bouffer du lion."

    • https://www.onepiece-requiem.net/t4587-marcheur-blanc-orgueilleux
    • https://www.onepiece-requiem.net/t4401-rockfor-egry-un-bonhomme-qu-il-est-moisi
    "BWEHEHEHEHE. TU ME PLAIS BIEN TOI ! J'AIME TON STYLE ! ALORS CA MARCHE, JE TE SUIS !"





    Bien sûr, Ging n'avait pas la nécessité physique d'exploser les tympans des penauds situés dans un rayon de trois kilomètres pour répondre une telle banalité. Mais en même temps c'était à un homme de principe que l'on avait affaire là. Des principes peu nombreux, mais bien casse-couilles. Parmi lesquels figurait le "si mon voisin gueule, alors je gueule plus fort". Comme vous pouvez vous en douter, cela posait quelques problèmes dans la vie de tous les jours. On se souvient notamment de l'épisode avec le marchand de poissons même si, paradoxalement, les spectateurs préfèreraient l'oublier. Mais c'est vous dire si les principes que s'établissait Ging, lors de ses fameuses réflexions métaphysiques sur l'existence...de ses grosses cuites donc, importaient à ses yeux. Seulement, pas autant que bouffer du lion. Ca non.




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    Le voyage avait été qu'une suite de clichés qu'un aveugle sourd muet faisant le poirier en haut d'un volcan en éruption aurait pu deviner. Tout d'abord, les deux nouveaux compères avaient réquisitionné, non sans bander les muscles de Ging face au visage pas frais du propriétaire venant de se réveiller, une barque. Une parmi la pléthore accostées aux quais. Au début l'embarcation improvisée navire avait fait la bonne impression qu'a l'objet du larcin que l'on vient juste de commettre. Mais avec l'adrénaline qui retombe, c'est la raison qui remonte. Et bien sur, ils étaient déjà perdus en mer quand ils se rendirent compte -à peu de chose prêt au même instant- qu'il y avait un trou en plein milieu du canot. C'était entre le moment où Ging poussait sa soixante dix septième plainte quant à la vorace faim qui le rongeait et celui où Rockfor se faisait gober la tête par une mouette géante, sortie de nul part bien entendu. S'en suivrait une course poursuite folle, où Ging, pris de panique quant à l'idée de rester loin de toutes sources de nourriture, se mettrait en chasse de la bestiole. Après des évènements forts, des rencontres exotiques, et la découverte du frère jumeau de la mouette géante qui avait survécu à l'accident de maquereau ; Ging arriverait enfin sur Panaris pour porter rescousse à Rockfor, en faire son vassal et bouffer le steak de lion qui l'attendait tranquillement en haut. Enfin...c'était comme ça que Ging voyait les choses en tout cas.



    "ALORS QU'EST CE QU'ELLE GLANDE CETTE CONNASSE DE MOUETTE !" cria-t-il en brandissant le poing vers les cieux.


    Seule la canicule lui répondit. Une longue et harassante réponse, sans pause ni respirations, et qui ne semblait pas prête de passer à la conclusion. Alors il se rassit dans la chaloupe. De l'eau jusqu'aux mollets, une expression désabusée sur un visage blême, son ventre criait famine. Il n'avait plus à coeur de boire l'eau s'infiltrant. Il préférait laisser les choses se faire. Et contre toutes attentes, elles se firent. Avec le hasard d'une mouette qui vous défèque sur l'épaule gauche, le colosse daigna tourner la tête derrière lui. C'est alors qu'il vit la gigantesque silhouette de la tour de Panaris sans aucun doute visible depuis l'île. Le reste ne fut qu'une formalité à vrai dire. Le forban avait troqué son attitude blasée pour une impatience puérile. Avant même qu'on ait eu le temps de lui dire combien les chances étaient infimes pour que le trésor de Panaris soit un steak de lion, il était sorti pousser la barque. Ses immenses jambes brassaient l'eau avec une telle force que leur fier embarcation fendait les flots droit sur la tour ; et son agglomérat de navires stationnés autour.



    A mesure que nos deux compères arrivaient sur les lieux, ils pouvaient percevoir ce brouhaha de contestation naissant parmi les hommes restés spectateurs ou encore assureurs de retraite imprévues et potentiellement dangereuses. Toujours est-il que dans les faits, ils se contentaient d'être ceux qui gueulaient sur le type en train d'escalader la paroi de la tour alors que les quelques entrées accessibles à la base témoignaient de l'irrégularité du chemin. Il était effroyable de voir à quel point les pirates pouvaient attacher de l'importance à ce genre de comportement tout au plus mesquin, quand derrière ils violaient et pillaient. Mais chaque homme avait ses limites. Et elles se situaient pas loin de la tricherie lésant des membres de son équipages. Ging l'avait compris en tentant de stabiliser son ersatz de navire à coté des vrais qu'avaient les concurrents. Il avait entendu les membres s'inquiéter pour leurs capitaines et seconds partis par les entrées qui semblaient s'être refermées directement après leur passage. Cette aventure plaisait de plus en plus à Ging. Il remonta et tenta tant bien que mal de rester debout dans cette barque s'enfonçant lentement dans la mer. Puis il se mit à susurrer.




    "TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR !"


    Puis, à le marmonner.

    "TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! "

    Puis, à le dire.

    "TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! "

    Et finalement, à le gueuler.

    "Psst. Psst. Ca t'intéresse un ch...

    "TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! TRI-CHEUR ! "


    Sur quoi, son sang ne fit qu'un tour, il attrapa la première chose qui lui vint en main et la décocha de toute ses forces sur le varappeur en devenir. Les lieux s'étaient soudainement fait prendre d'assaut par un silence religieux tandis que le chat propulsé à la vitesse du son n'avait même pas l'opportunité de miauler. Personne ne savait vraiment comment réagir tandis que le mignon chaton percutait la tête de l'homme -griffes dehors-, le faisant ainsi tomber vers une mort plus que potentielle. Mais là où les gens eurent vraiment l'air gêné, j'entends par là à peu près le moment où leurs regards se perdirent sur leurs chaussures, ce fut quand le chaton en chute libre dans les airs vint se faire gober sec par une salope de mouette géante. Sortie de nul part. Une expression de terreur se répandit dans l'assistance. On n'entendait que la lourde déglutition des spectateurs affolés et le ballotement des vagues contre la tour. Puis la claque de la main de Ging contre l'épaule du vendeur de chats mis un terme -peu préféré- au silence qui régnait. De sa voix grasse, il dit innocemment :


    "BWEHEHEHEHE ! T'AFFOLES PAS GARS' ! JE T'EN REPAYERAIS UN ! MAIS LA JE SUIS OCCUPE."



    Tandis que Ging prenait ses bras pour des rames et amenait la barque où siégeait son capitaine Rock' vers la dernière entrée ouverte de la tour, les deux chatons restant dans le carton du vendeur de chats se firent des miaulements d'incompréhension. Ging et Rock' entraient dans la tour et les boules de poils à pattes regardèrent leur maitre, vendeur et seul homme à avoir daigné s'occuper d'eux. Ils écarquillèrent de concert leur grand yeux ronds et brillants, et miaulèrent en direction du vendeur sans réaction. Il les avaient recueillis et élevés ensemble depuis plusieurs années. Des années de galère pour lui comme pour eux à passer les nuits à agresser les passants pour tenter au moins d'en vendre un. Mais si le vendeur ne faisait pas fuir la clientèle au premier regard, le chaton repéré par la grosse bourgeoise s'arrangeait toujours pour prouver dans les instants qui suivaient qu'il était bel et bien porteur de la rage. C'est ce qu'il aimait le plus chez eux. Le filet de bave qu'ils n'arrivent jamais à retenir lorsqu'il vous attaquait. Tandis que la dernière entrée de Panaris claquemurait définitivement la tour au loin, le vendeur de chats réalisa quelque chose. Depuis l'instant même où chacun d'eux lui avait sauté au visage pour lui crever les yeux, il n'avait jamais songé, ne serait-ce qu'un instant, à les vendre. Il était peut être le seul à pouvoir se faire mordre par des chats atteints de la rage sans en mourir. Mais ils étaient aussi les seuls êtres à l'avoir accepter lui.


    Il vit la porte se refermer complétement et resta un moment sans bouger sur sa chaloupe. Mais un miaulement le ramena à lui. Il posa d'un geste que beaucoup attendaient plus doux son carton dans son embarcation. Il se mit à examiner sa marchandise, fouillant la fourrure des bêtes à la recherche de parasites, retroussant leurs lèvres pour voir l'état de leurs crocs. Il les regarda attentivement quelques minutes, comme s'il cherchait à mémoriser de force chacun de leur poil. Un grognement sourd mais teinté de positif s'échappa de sa bouche. Ses doigts vinrent pour les caresser, mais il se fit mordre par les deux qui s’efforçaient de creuser la chaire avec leur maigres forces. Le vendeur de chats eut une pensée stupide en les voyant tirer sur ses doigts. Il pensa, bien malgré lui et en un court instant, qu'ils tentaient de le garder ici. Il grommela de nouveau dans sa barbe. Après quoi, il jeta un coup d'oeil à la mouette en train de voler à plusieurs centaines de mètres d'altitude. Elle était à peu près au niveau du sommet de la tour. C'est alors que le vendeur de chats retira sa main des deux chatons entrain de couiner...


    ...pour la poser sur la première des quelques milliers de pierres que composaient la tour.



      Il fit vachement sombre tout d'un coup. Non pas parce que l'entrée de pierre derrière nous s'était brutalement refermée, ni parce que la crinière flamboyante de mon nouveau compagnon de route avait perdu de son éclat, non. Mais uniquement parce que cet abruti, en baillant, avait réussi à éteindre l'unique torche qui éclairait la salle dans laquelle nous venions d'atterrir. De mémoire, il me semble pouvoir dire qu'après quelques courtes minutes de marche dans un long couloir, nous avions posé le pied dans un espace vide et circulaire, affichant plusieurs nouveaux chemins sans la moindre indication. En bref, une salle carrefour clichée comme on peut en voir dans les bouquins et autres produits commerciaux destinés à faire vendre en racontant une histoire de labyrinthe. A la différence près que celle-ci constituait probablement la salle centrale vers laquelle convergeait toutes les entrées de Panaris. D'autant que l'un des passages qui se présentaient à nous était clairement affiché comme la direction à prendre. Aussi, lorsque que Ging poussa son bâillement et que la flamme qui brûlait sur la torche au centre de la pièce, soit à deux mètres de lui, frémit jusqu'à disparaître, nous laissant dans l'obscurité la plus totale... Bah on était salement emmerdé. Déjà que je ne misais pas fort sur notre sens de l'orientation, v'là qu'on plus on devait y aller à l'aveugle. On n’était pas sorti, j'vous l'dis.

      "Mais POURQUOI TU BAILLES, PUTEUH BORGN'DE PUTEUH BORGN' !"
      "Bwahaha, t'exagères Patrick !"
      "Hey, mais c'est pas moi !"
      "BORDEL MAIS... QU'EST-CE QUE VOUS FOUTEZ LA VOUS ?"
      "Hein?"
      "Ah, c'est l'mec du bar de la dernière fois ! Mais il hurlait pas en patois?"
      "Ah tiens ? C'est vrai ça. Hm... J'suppose qu'à force de côtoyer l'autre grand con, j'commence à m'habituer à hurler dans un bon parler. Cool."
      "Ça t'arrange plutôt, t'étais trop mauvais en patois."
      "Attendez, y a toute votre clique là?"
      "Bah... Ouais."


      Je tournais la tête rapidement vers là où je savais être Ging en espérant qu'il réagisse, mais voilà que je me rappelais qu'il n'avait encore jamais rencontré ces huit pécores qui semblaient à leur tour avoir rejoint la salle carrefour. Une interrogation simple me vint alors en tête : comment, alors qu'au moment où nous rentrions dans la tour par la dernière entrée, ces quelques gus avaient réussi à se retrouver au même niveau que nous, alors qu'ils sont censés avoir de l'avance? Rassurez-vous, la réponse m'apparaîtrait plus tard. En attendant, je me rassurais sur un point : nous n'étions pas les seuls perdus au rez-de-chaussée de Panaris. D'un autre côté, je n'avais nullement envie d'à jamais rester bloqué au sous-sol de cette tour avec une bande de cons bruyants et sans intérêt. Que faire?


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      "Bah putain, si j'avais su qu'il y avait un escalier au début de la bonne sortie et qu'il suffisait juste de vérifier si on se cassait la gueule en choisissant un chemin, j'aurais volontiers laissé mon collègue se manger la marche dans l'panard. Mais puisque vous avez tenu à l'faire, j'vous remercie les gars. Par contre, maintenant qu'on y voit clair, on va ptêtre vous laisser non?"
      "Mais on t'a toujours pas raconté ce qui s'est passé après que j'ai rencontré Sergine, le quatrième membre du groupe, il y a 6 ans !"


      Je lançais un regard désespéré vers Ging qui, comme moi, n'avait visiblement plus qu'une envie : tout sauf rester avec ces mecs. Il nous avait certes sorti de la salle circulaire, mais bordel, c'qu'ils étaient chiants. A priori nos ennemis, ils n'en étaient pas moins sympathiques. Comme s'ils pensaient qu'ils étaient les seuls à être intéressés par ce qui se situe en haut de Panaris. Celui qui semblait être leur chef racontait depuis déjà un sacré bout de temps, alors que nous montions à travers de longs escaliers, comment ils les avaient tous rencontré mais, croyez-le ou non, j'ai rarement entendu histoire plus vaine. Et nous avancions lentement. Trèèès lentement. L'explication de leur lenteur, et donc du fait qu'ils se soient retrouvé au même moment que nous dans la pièce circulaire un peu plus tôt, trouvait sa source dans un simple fait : la somme de l'ensemble de leur QI devait difficilement atteindre celui de mon compagnon d'aventure, lui-même n'en ayant pas un très développé. Aussi, et plusieurs fois, furent-ils persuadés qu'un passage secret se cachait sous chacune des marches et derrière chacune des pierres qui composaient la tour, alors que nous n'étions encore qu'au bas de celle-ci. Ils eurent beau chercher, ils ne trouvaient rien, et Ging et moi perdions notre temps à écouter les salades de leur dirigeant. Pourquoi ne partions-nous pas, me direz-vous. Eh bien, à ce fait, un seul éclaircissement s'impose : s'ils n'étaient pas bien malins, ils avaient chacun l'air plus dangereux que son voisin. Oooh, ça ne m’inquiétait pas plus que ça, et je suppose que Ging non plus mais tout d'même, inutile de se les mettre à dos. J'étais parvenu à convaincre le grand bonhomme qu'ils pouvaient être utiles car ils connaissaient surement l'emplacement de son fameux steak, mais plus le temps passait plus il s'impatientait. Tout comme moi, en vérité. C'est la principale raison pour laquelle je décidais de les laisser là pour le moment.

      "Bon, c'pas tout ça les gars mais..."

      Puis soudain, un bruit.


      Alors que je me situais vers l'avant de la file que les huit hommes, Ging et moi composions, un tremblement de grande force se fit ressentir, en même temps que le son bruyant de rouages et de pierres qui s'écrasent au sol ou dans l'eau... Le bruit d'un espace entier qui se déplace. J'appuyai brutalement mon chapeau contre ma tête, cherchant la source de cette explosion sonore, n'écoutant plus les bonhommes crier d'excitation, de peur ou de curiosité. Je plongeais le regard vers le haut de l'escalier, là où nous nous dirigions, perplexe à l'idée de ce qu'on pouvait y trouver qui puisse causer ce genre de boucan. Je me mis à courir droit, persuadé que l'origine du problème venait de ce que nous cherchions à atteindre. J'aperçu cependant rapidement que je grimpais seul. Je me retournais alors en direction du groupe que je venais de laisser, afin d'hurler à mon partenaire de me rejoindre. Mais alors que je m'apprêtais à prononcer son nom, je ne le vis plus. Face à moi, à peine quelques mètres plus loin, il n'y avait plus que du vide.

      Littéralement.

      Toujours en tenant mon chapeau, de peur qu'il s'envole à cause du courant d'air, je m'approchai du vide. Quelques marches seulement. Quand j'arrivai enfin sur le dernier morceau de pierre sur lequel je pouvais poser mes pieds, je suis resté bouche bée. Devant moi, le monde se déplaçait. Ou plus exactement Panaris bougeait. Le morceau de tour dans lequel je semblais être pivotait autour d'un semblant d'axe que je ne pouvais pas voir, tandis que, plus bas, j'apercevais Ging et les huit bougres dans la partie de tour qui venait de se détacher de la mienne. Celle-ci, alors que de loin, leurs visages semblaient aussi ébahis que le mien, finit par passer au-dessus du morceau dans lequel je me trouvais pour s'emboîter quelque part plus haut, dans Panaris, là où je ne pouvais les voir. Le vent soulevait ma veste blanche alors qu'il s'engouffrait dans l'escalier, tandis qu'enfin, la tour s'arrêta de se mouvoir. Je ne pouvais plus revenir en arrière. Face à moi, il n'y avait que du vide et -oh tiens- le vendeur de chat qui s'accrochait à la paroi de cet étrange lieu, visiblement bien décidé, vilain tricheur, à passer par l'extérieur pour arriver à ses fins. Je recoiffais mon chapeau comme à l'accoutumée avant de repartir dans l'escalier. Je ne savais pas ce qui m'y attendait et j'y allais seul, Ging ayant disparu avec les autres andouilles dans un nouvel espace. Je finirais bien par le retrouver, de toute façon. Je venais tout juste d'entrer dans Panaris et déjà, les premiers problèmes pointaient le bout de leur nez. Un sourire amusé se dressa sur mon visage alors que je gravissais les marches qui me menaient vers le sommet de cette tour mouvante. Une seule conviction habitait désormais mon esprit. Pour la première fois de ma vie, je pouvais prouver que je valais encore mieux que des hommes.

      Car je pouvais montrer aujourd'hui que je valais mieux qu'un environnement.

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      Le croquant moyen, sans doute par assimilation avec n'importe quoi d'autre en ce monde, a la fâcheuse tendance à penser que la connerie possède des limites. Mais c'est la même espèce qui pense pouvoir faire cohabiter, même abstraitement, les cons et les mathématiques. Ils se figurent que lorsqu'on ajoute un con à un préexistant, cela ne fait toujours que deux cons. Mais ça, c'est un raisonnement à la con, puisque la connerie n'est pas additionnelle. Ô non. Elle est exponentielle.




      _______________________________



      A nouveau plongés dans une obscurité extirpant la flamboyante chevelure adamantine de Ging aux mémoires, les neuf comparses -par procuration- semblaient faire la gueule. Cette singulière impression ne trouvait pas sa source dans le mutisme général momentané, mais bien dans sa comparaison avec les us et coutumes qu'arboraient fièrement et assidument les protagonistes en question. Alors forcément, quand personne ne gueulait, on enchainait malaise sur malaise et l'ambiance finissait inévitablement par violemment puait du cul. Heureusement, il était un homme que tous les gaz du monde n'auraient su importuner.



      "BWAHAHA ! A UN MOMENT, J'AI CRU QUE LES MURS AVAIENT BOUGE ! "


      Il y avait fort à parier que même s'ils s'étaient retrouvés dehors, les corbeaux n'auraient pas oser interrompre le silence religieux qui venait de prendre d'assaut la tour de Panaris. Il était établi depuis quelques années déjà, et plus précisément un incident qui reste aujourd'hui encore gravé dans de trop nombreuses mémoires, que la Berry Jackpot Team Crazy Legend League ne brillait pas par son intelligence. Comme en témoignait son sobriquet aux sonorités chaotiques. Et pourtant même Patrick Goulet (ou le vieux à la tignasse en rose comme il aimait qu'on l'appelle), lui-même réputé pour ne pas être une flèche au milieu de gros débiles, eut une malheureuse pensée qu'il n'avait pas eu depuis bien longtemps. Il se dit, malgré lui et sans arrières pensées, que Ging "BAM" Dong était tout de même un sacré con. La réflexion que son cerveau maladif avait fait germer demeurait, comme le pensait-il à ce moment, de moindre importance. Pourtant elle commença à se répandre dans son esprit comme le faisait si bien l'alcool dans son sang. Et sans qu'il s'en rende compte, elle pris possession de lui, motiva chacune de ses actions et accessoirement scella son destin.



      "Hey le grand ! C'est moi ou t'as l'air d'être un gros c...


      [FLASH]


      La pièce fut soudain baignée d'une lumière aveuglante qui aveugla les protagonistes au centre de la pièce. Ils eurent le même réflexe incontrôlé qu'ont tous les hommes en cette situation, ils se replièrent sur eux-mêmes aussi vite qu'ils le purent pour laisser leur rétine se calmer dans l'obscurité. Il n'y avait que Ging qui n'avait pas bougé d'un iota. En plein milieu de la pièce ovale, il n'avait ni fermé ni même baissé les yeux et s'était contenté d'affirmer de sa voix tonitruante que sa crinière avait bien plus d'éclat que ça. A mesure que les autres s'habituaient à la lumière, ils purent voir toute l'installation qu'occupait l'imposante pièce. Des Den Den Mushis de toutes les tailles étaient installés sous tous les angles. Le plus imposant d'entre eux était agrippé au plafond et à l'envers, laissant tomber ses deux yeux se contentant de fixer droit devant lui. Mais le plus singulier demeurait ces neuf semblant de présentoirs disposés en ligne face au mur principal et sur lesquels étaient soigneusement déposé des Den Den Mushis d'une autre espèce. C'est alors que la principale de ces bestioles, scotchée à la voute, se mit à diffuser des images. Cadré des cuisses au nez, un homme prenait la parole avec un plaisir non dissimulé.


      "Krrrhkrrrrh. Krrrrhhrrkkrrh. Ahem. Test. Test. Un. Deux. Les roses sont rouges. Je suis génial. La tomate n'est pas un légume. C'est bon Johnny, touche plus à rien ! Bonsoir et bienvenue dans ma demeure ! Si vous êtes ici, c'est n'est pas par hasard. Putain Johnny ! Je t'ai dit de ne plus y toucher ! Comment ça c'est pas de ta faute ?! Je veux pas le savoir ! Non, je veux pas acheter tes sandwichs ! Tais toi maintenant ! Ahem. Pardonnez moi très chers hôtes, j'ai quelques soucis depuis que mon directeur des ressources humaines est parti. Sa femme à fait une fausse couche, et il est parti s'installé chez sa soeur à East Blue. Ca a été une semaine éprouvante pour tout le monde. Je ne dis pas qu'il n'a pas bien agit, attention. M'ENFIN UNE LETTRE DE TEMPS EN TEMPS, CA COUTE VRAIMENT ?! Oh putain Johnny ! Comment ? C'est moi qui ai parlé trop près ? Ha bhe au temps pour moi alors. Mais revenons en à ce qui nous intéresse. Comme je viens de vous le dire, vous n'êtes pas là par hasard. Vous avez tous été choisis par des forces qui vous dépassent pour tester vos capacités. Un seul pourra repartir avec le trésor qui sommeille au sommet de cette tour. J'attends de grandes choses de vous. Excepté pour le grand type et son pote en costume. Vous, je sais pas trop ce que vous foutez là. Essayez de nous offrir un spectacle de qualité."




      "HEIN ?! KESS C'EST ?! QUI PARLE ?! MONTREZ-VOUS ! "



      De nouveau un silence pesant. Tandis que chacun tentait de monter sa théorie sur les évènements qui faisaient que Ging s'agitait dans tous les sens, se prenant les pieds un peu partout et manquant de s'étaler une bonne douzaine de fois ; le moins con du groupe des débiles s'approcha du colosse en lui demandant de se calmer.


      "Dis moi toi, tout à l'heure j'ai vu que tu avais été le premier à te relever après le flash.
      "BWAHAHA ! CES TRUCS DE LOPETTES NE M'ATTEIGNENT NULLEMENT. "
      "En tout cas, tu devrais retrouver la vue dans quelques heures.
      "BWAHAHAHA ! TANT MIEUX, SINON J'AURAI BIEN ETE EMMERDE ! "



      "...Enfin bref. Voici la première épreuve qui vous départagera dans votre glorieuse quête de notoriété ! Vous voyez s'afficher vos noms sur l'écran ! Dans quelques secondes, une musique connue mondialement comme celle écrite par feu Brook le roi de la soul va défiler. Vous devrez chanter dans les Den Den Mushis qui calculeront votre timbre de voix, votre rythme et vous donneront une note sur cent. Celui qui aura la moins bonne note devra arrêter son voyage ici. Seul les autres pourront continu... "


      "Cratch" fit le Den Den Mushi qu'on donna à Ging lorsque celui-ci le serra dans sa main.


      "JE CROIS QUE LE MIEN EST DEFECTUEUX ! ON PEUT M'EN DONNER UN AUT... "


      "VOUS ÊTES DISQUALIFIE !"



      "INJUSTICEEEEEEEE ! "


      "Hey le grand ! C'est moi ou t'as l'air d'être un gros c...



      [BAM]



      Et la glorieuse quête de Panaris prit un tournant inattendu...

        "D'OU QU'C'EST PAS UN LEGUME, HEIN?! HEIN ?!"
        "MAIS PUTAIN TU VAS FERMER TA GU...

        [BAM]
        ... Ah, il doit pas être loin lui."

        Signe incontestable et évident de la présence de mon compagnon de route, ce bruit devenu familier m'égayait un peu la poire, à défaut de me soulager les cerises qui depuis peu, en avaient un peu marre d'entendre parler de tomates. Car oui, messieurs, j'entendais depuis désormais quelques bonne minutes parler de cet étrange et doux fruit que l'on peut manger en salade, cuite ou crue, farcie ou en bien d'autres façon, principal produit d'une bonne quantité de sauces par exemple. Mais merde, j'suis pas l'cuisinier ici. Le sabreur qui se tenait là avait réussi à m'en faire un exposé assez détaillé durant les quelques minutes que nous passions ensemble. S'il m'apparaissait sympathique et pratique pour passer le temps et qu'il avait le mérite d'être assez sot, sa passion pour les tomates qu'il croyait dur comme fer être un légume avait eu raison de moi, d'autant qu'il hurlait désormais depuis bien cinq minutes à la tronche des escargophones qui, m'est avis, n'en avaient pas grand-chose à foutre.

        [BAM]

        "Encore? Mais p'tain, c'est qu'il doit vraiment pas être loin. Lord Tokechup, tu veux bien m'aider à bousiller c'te porte? S'tu veux leur casser la gueule, mieux vaut commencer par arriver jusqu'à eux."


        ________________________________



        [Quelques 10 minutes plus tôt]

        Escaliers. Putains d'escaliers. A croire qu'il n'y avait rien d'autre dans cette tour, ou que je tournais en rond. Dans cet endroit, les murs bougent, le sol se soulève et malgré ça, j'étais toujours coincé dans ce putain de même couloir, dans cette putain de même montée. A n'en plus finir. Faudra qu'on m'explique pourquoi j'ai décidé de lâcher mon bon Ging et les autres andouilles. Autant être séparés des seconds ne m'apportait que de la satisfaction, autant perdre mon allié débonnaire et dénué d'esprit m'avait pas mal foutu les boules. M'enfin, j'avais appris à le connaître : il finirait bien par manifester sa présence d'une quelconque gueulante ou d'un acte assez rigolo qui, sans pour autant avoir la moindre justification, aurait le mérite de m'indiquer sa position. En attendant, je gravissais sans cesse les marches de Panaris et commençai à désespérer d'arriver quelque part quand soudain...

        Je le vis.

        Le premier homme du bar, lui, là, l'abruti aux six sabres qui, allez savoir pourquoi, marchait au pas. Genou levé à chaque nouvelle foulée, regard cadré vers l'horizon, il était seul et une fois de plus semblait franchement con. Je n'ai pas saisi tout de suite que je posais le pied dans une nouvelle salle, mais quand je me sentis bouger sans même l'avoir remarqué pour me mettre au pas derrière le bonhomme, je dois avouer que la perplexité m'est montée au nez. Tournant la tête à droite, à gauche, toujours au rythme d'une musique invisible, je tentais désespérément de savoir où je me trouvais désormais, tandis que le bonhomme qui me précédait, lui, se mettait à chanter.

        Et c'est au moment où j'entendais à peine sa voix sortir de sa bouche que je compris. Mes yeux se posèrent sur deux escargophones situés là, sur le mur à notre gauche. Nous étions dans une sale lumineuse, uniquement composée de blanc, propre, qui contrastait énormément avec les escaliers. Le mouvement tonitruant de la tour tout à l'heure avait salement attaqué mon audition pour la journée, et le vent qui s'engouffrait dans l'escalier n'avait en rien arrangé la chose vu qu'il avait permis à mes oreilles de se boucher. Frappant tant bien que mal du plat de ma main contre mes oreilles, je compris peu à peu que l'abruti qui m'accompagnait s'était, tout comme moi, prit au rythme du chant que chantaient les escargophones. Allez savoir pourquoi, il paraissait vachement envoutant. Mais surtout, il tournait en boucle.

        "HEY MEC, FAUDRAIT PEUT-ETRE FAIRE QUELQUE CHOSE POUR ARRETER C'TE MUSIQUE !"
        "HEIN ?"

        "AH MERDE ATTENDS, J'AI L'OREILLE BOUCHEE !"
        "HEIN ?"
        "VOILA C'EST BON ! TU DISAIS ?"
        "HEIN ?"
        "AH OK ! JE DISAIS QU'IL FAUDRAIT FAIRE QUELQUE CHOSE POUR ARRETER C'TE MUSIQUE !"
        "IL FAUT FAIRE DES CHOSES POUR ALERTER VERONIQUE ?"
        "MAIS NAN, PATATE !"
        "En salade, fraîche et découpée, pour accompagner des pâtes ou en sauce, la tomate "J'ai dit patate mec, pas tomate." peut aussi être farcie -sinon moi c'est Thomas Tokechup- mais dans c'cas, ajoutez "Hey mais, écoute moi !" un peu d'herbes de..."

        ________________________________

        [Quelques minutes plus tard]

        "... mais dans pareille situation, je ne saurais vous conseiller que de rajouter un tout petit peu de sel de céleri, ça va mieux avec le jus de tom..."
        "Krrrhkrrrrh. Krrrrhhrrkkrrh. Ahem. Test. Test. Un. Deux. Les roses sont rouges. Je suis génial. La tomate n'est pas un légume..."
        "COMMENT CA PAS UN LEGUME ?"


        ________________________________

        [Juste une courte minute avant le BAM, parce que ouais, les ellipses elles sont pas longues avec Rockfor Egry.]

        Si j'entendis à peine le discours du mec à l'escargophone vu que l'autre gueulait, j'avais au moins compris qu'il permettait l'arrêt de la musique qui, contre mon gré, nous faisait danser. Je ne me permettrais pas de généraliser au niveau du gré de ce fameux lord Tokechup qui semblait prendre pas mal de plaisir, lui, à marcher au pas, mais il avait arrêté lui aussi pour se concentrer sur sa gueulante. Ce garçon, visiblement pas bien malin et passionné de tomates me faisais m'interroger sur les réelles raisons de sa présence dans Panaris. D'après le mec du discours, toutes les personnes ici avaient été choisies pour atterrir dans l'coin. Je n’avais pas perçu grand-chose, mais cette phrase était tellement improbable qu'elle m'avait attaqué l'oreille dès le départ. Le groupe d'andouilles, les quelques autres duos qui sont rentrés dans la tour avant nous, probablement le vendeur de chat à qui on avait subtilisé la place et ce mec. Thomas Tokechup. S'il n'ouvrait pas la bouche dès qu'il lui en était permis, il est probable qu'il apparaîtrait comme un homme normal, à l'exception des six sabres qui pendaient à sa ceinture.

        "J'VAIS VOUS ECLATER LA GUEULE BANDE DE PETITS GOUGNAFIERS !"
        "Voulez pas chanter plutôt? Y en a déjà un qui a été disqualifié, 8 qui trichent, un qu'a pas écouté et les quelques autres chantent vraiment comme des pieds, donc..."
        "Cherche pas mec, je ne chante pas pour des gens inférieurs à moi."
        "Mais..."
        "D'OU QU'C'EST UN LEGUME, HEIN ?"



        ________________________________

        "Bah, et comment on fait pour ouvrir la porte? Et quelle porte? On est où là au fait?"
        "Sinon Jean-Pierre, j'ai entendu parler d'un canard qui chante et danse vachement bien, c'est ptêtre lui qu'on aurait dû inviter."
        "Panaris, grande tour, voler ton sabre, tout ça. Ça t'dit rien?"
        "Ah non. MAIS NE T’AVISES PAS D'ESSAYER DE VOLER MON SABRE ! TAIOOOOOOOOOOOOOOOOOO !"


        Putain mais... Deux fois que ce mec me fuit pour m'avoir mal comprit. Je ne l'ai même pas vu filer, et encore moins découper la porte à une vitesse éclair, vu que j'avais le regard posé sur les escargophones. Soupirant une nouvelle fois, je m'apprêtais à prendre sa suite, laissant là les émissaires baveux des organisateurs quand un nouveau BAM retentit. De plus en plus près. Ging était tout proche. J'accélérais le pas et pris le sabreur en poursuite. Et c'est seulement quelques marches plus loin que j'arrivais dans une nouvelle salle. Gigantesque. J'apercevais mon compagnon de fortune au centre, sabre dégainé, et visiblement ne comprenant pas où il avait atterrit. Moi non plus d'ailleurs. Je constatais simplement que nous n'étions pas seuls. M'approchant de Lord Tokechup, je lui soufflais à l'oreille que je n'avais aucunement l'intention de lui voler quoi que ce soit, mais qu'il valait mieux rester à plusieurs. L'endroit ne m'inspirait pas confiance. Ni les quelques autres groupes qui étaient arrivés avant nous dans la salle. Tous pirates, ou au moins criminels, certains féroces, d'autres distraits. J'apercevais à la fenêtre le vendeur de chat, s'accrochant à l'extérieur, espionnant d'un air... irlandais ce qui se déroulait ici. La salle, circulaire, était visiblement un étage à elle seule de la tour de Panaris et n'était bordée que de deux fenêtres. Propre, pour le moment, entièrement blanche pour un tiers, rouge pour un autre et dans des tons foncés pour la dernière. Elle semblait être l'assemblage de plusieurs morceaux de la tour, normalement dissociés, qu'on avait réuni dans un but précis. But inconnu qui me laissait franchement perplexe. Je jetai un œil rapide aux alentours et visiblement, chaque groupe venait d'une porte en particulier. Seule une d'entre elle était restée fermée. M'enfin, plus pour très longtemps, car au moment précis où je m'apercevais qu'elle n'avait pas encore été utilisée, celle-ci vola en éclat.

        [BAM]

        "ENCORE UNE POUR ME FAIRE CHIER ?"
        "Ah bah si, c'est ça, t'es franchement un gros c..."
        "TA GUEUUUUUULE !


        Un sourire amusé surgit sur mon visage alors que le soulagement de retrouver une personne relativement normale dans l'coin se faisait sentir. Je m'apprêtai à indiquer à Lord Tokechup de me suivre jusqu'aux nouveaux arrivants, ou au moins jusqu'à Ging quand soudain m'apparut la fameuse raison de cet immense lieu. Je ne sais pas qui a foutu la merde en premier, mais clairement, les organisateurs ne l'ont pas bien vécu. Et ils ont dû revoir leurs plans. Il n'y a pas que les morceaux de salle qui avaient été rassemblé.

        L'ensemble des participants aussi.

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        Il y a des hommes qui, derrière une épaisse couche de crasse, cachent un coeur froid et avarié. Il y a des hommes que vous ne préfériez jamais voir sourire. Et il y a des hommes qui n'en n'ont jamais envie. Mais parfois il arrive qu'un de ces gars, haïs comme la peste, gratte une poubelle à la recherche d'un repas. Ses ongles carnassiers déchiquettent alors le garde-manger avec la même rage qui ne l'a jamais quitté. Quand soudain on entend.



        Miaou.


        __________________________________________________________


        Jusqu'ici, Ging n'avait jamais réalisé l'importance d'un sens comme la vue. Au mieux ça aidait à repérer de la bouffe sur le marché. C'est pourquoi il lui fallut attendre de la perdre, pour une vulgaire question de principe dont lui seul avait le secret soit dit en passant, afin de prendre conscience qu'il était effectivement bien emmerdé sans. Le plus dur au début fut de savoir où regarder et comment se tenir. Il tenta quelques poses repoussant à chaque fois les limites de l'exotisme -voire de l'indécence- si bien qu'à lui seul il réchauffa la pièce en moins de temps qu'il n'en fallait pour déboutonner sa chemise. Et c'était pas plus mal puisque quand tous les importants protagonistes restant dans la tour entrèrent dans la pièce, on sentit comme un léger courant d'air. Puis une extrême tension.



        "Hum ! Raaaaa ! Slurp ! Pardon. Excusez-moi je crois que j'ai pris froid avec tout ça moi. Faut que vous sachiez que c'est quand même du boulot d'organiser un truc comme ça. Hein, jveux dire, il me semble pas qu'on se soit pas foutus de votre gueule sur ce coup-là. Hein ? Alors chers candidats... du moins pour les légitimes... je vous prie, je vous implore de restaurer la noblesse que ces lieux méritent. A moins bien sûr que vous préfériez voir ces pique-assiettes de passages repartir avec ce que vous êtes tous venus chercher..."




        Alors les participants se tournèrent à l'unisson en direction desdits pique-assiettes qui, par un fâcheux concours de circonstances, se trouvaient être nos héros Ging et Rockfor. L'on avait d'une part le compagnon d'infortune de l'homme au costard blanc, Thomas Tokechup, un jeune homme dont la fougue lui promettait un avenir radieux dans le commerce de la tomate. Cela avait été une aubaine que ce curieux personnage se tourne très jeune vers le fruit-qui-ressemblait-beaucoup-trop-à-un-légume plutôt que vers le sabre. Il avait préféré les coeurs de boeufs aux meitous, et le rouge tomate au rouge sang -même si je vous l'accord la différence n'est pas flagrante. Jusqu'à ce qu'il entende parler de la tomate suprême, celle dont le gout ineffable pouvait annihiler tous les maux de ce monde. Alors, et avec une ironie mordante, il décida d'une part de se mettre en quête de ce légume fruit et d'autre, de distribuer de sévères mandales à tous ceux qui se mettraient sur sa route. Malheureusement pour beaucoup le jeune Tokechup avait souvent mis un point d'honneur à ignorer tout véritable indice -aussi grand soient-ils- pour se lancer à bras le corps dans ce qu'on avait coutume d'appeler "des plans foireux". Pour indication, Panaris était tout de même le vingt-troisième plan foireux dont lequel le jeune homme s'était épris. Et cette expédition demeurait de loin sa plus sensée. Aussi la route de Thomas avait été sinueuse ce qui, par un procédé mathématique d'une simplicité que même Ging pouvait appréhender, avait eut pour effet d'agrandir la "route" du bonhomme et par conséquent d'accueillir plus d'hommes pour s'y mettre en travers. Ou même en biais. La dessus il faisait pas de distinctions. Si vous n'aimiez pas les tomates, vous étiez un ennemi. Par contre si vous aimiez trop les tomates... eh bien vous étiez un ennemi aussi. Alors oui, la liste d'antagonistes que s'était forgée l'électron libre Thomas aurait pu servir à momifier un colosse comme Ging. Mais c'était pour une seule et unique raison.



        __________________________________________________________


        "Tu as bien compris Thomas ? Tes sabres ne sont pas fait pour tuer. Mais pour découper. Des tomates. En rondelles. Ou en dès à la limite.
        -Oui maître ! Ne vous inquiétez pas, je ramènerais la tomate suprême au village !
        -Si jamais tu pouvais me ramener un meitou ou deux en chemin...
        -Deux meitous, c'est noté !
        -Huhu ! Bon petit...

        __________________________________________________________


        Chez les Tokechup la seule forme de vie qu'on s'autorisait à tuer -et on était même pas bien sûr que c'en était bel et bien une-, c'était la tomate.


        "BLWARF"


        En revanche, et Ging le comprit assez vite, on avait rien contre un ou deux taquets dans la mâchoire.




        Pour dire vrai, Ging n'avait pas compris grand chose. Il n'était déjà pas le genre de type à écouter les interventions -organisateurs d'évènements ou pas- pas plus qu'il n'était homme à ressentir les auras meurtrières d'amis qui n'en étaient peut être pas finalement. La cécité n'aidant pas, il dut sentir les phalanges de Thomas encastrer sa mâchoire pour réaliser qu'on l'attaquait. Aussi quand en se relevant il essuya le filin de sang perlant de sa gueule -on ne pouvait décemment pas appeler ça une simple bouche-, il se dit qu'il était possible qu'il ne se trouve pas dans un simple restaurant immersif qui finirait par lui offrir son steak tant convoité après un spectacle faisant intervenir les clients. Cela le mit en boule. Les veines de son bras droit gonflèrent subitement. Ses sourcils se froncèrent violemment. Le coup de gueule semblait inévitable. Jusqu'à ce que la fouge du jeune Tokechup en décide autrement. Bondissant à trois mètres de haut avec une agilité qui n'avait rien d'un légume, il pivota dans les airs pour expédier son talon dans la tempe du colosse qui n'eut d'autre choix que de voler dans le décor. Quand les pieds du sabreur regagnèrent le sol, un silence religieux s'était distillé un peu partout chez les participants. Ce n'était certainement pas donné à n'importe qui d'envoyer valser notre héros comme s'il s'agissait d'un simple personnage secondaire. C'était en quelque sorte manquer de respect à l'histoire. Et ça n'allait pas durer.


        La rencontre de la carcasse du géant et de l'épais mur avait laissé une impression mitigée à Ging et soulevé un nuage de poussière le dissimulant aux autres. Tous étaient dans l'expectative. Ils attendaient de voir l'état du bonhomme à qui ils avaient affaire avant de prendre une décision. Pour la berry jackpot team crazy legend league, cela avait semblé être une bonne idée de se débarrasser de celui qui semblait être le plus pourvu en muscles. Seulement devant la démonstration de force du bambin faisant la moitié de sa taille, ils ne purent s'empêcher de ruminer leur stratégie. Que se passerait-il si ce type décidait de dégainer ? Ses sabres ne servaient-ils qu'à faire beau ? Les esprits déjà dérangés de la ligue s'échauffaient peu à peu sous la réflexion et l'on s'attendait à voir sortir de la fumée de leurs oreilles. Doucement, discrètement, chaque membre s'arma de la puissance de feu expliquant le comment de cette désolation traçant le sillage de ces compères. Et lorsque, parce que le rire gras du capitaine pirate retentit sans prévenir, ils firent feu de tous cotés sans se soucier de l'architecture, de la cible où même si leurs armes n'étaient pas malheureusement pointées dans leur propre direction, on comprit le pourquoi d'une telle désolation.


        Les lieux s'embrasèrent dans une lumière aveuglante. La pléthore de canons crachaient leur obus dans toutes les directions déchiquetant la cloison comme s'il s'agissait de papier, balayant des pans entier de l'enceinte à travers toute la pièce. La puissance de feu était telle que les murs qui tenaient encore debout semblaient gagnés du même brasier ardent qui ne tarderait pas à mettre fin à toutes vies encore présentes. Parmi elles, Thomas bondissant de mur en mur à la recherche d'un temps mort, où d'une occasion d'approcher l'un des responsables de ce carnage. S'il ne se dépêchait pas d'agir, même lui ne pourrait pas survivre sur une mer de flammes. Après avoir évité une énième mort imminente, il fondit d'un bond grossier mais vif sur deux des membres avant de les assommer du fourreau de son sabre sans penser à se mesurer. Et quand il se tourna vers les acolytes restants, il entendit ce désagréable son que font les rouages d'une arme à la fin du temps de chargement. Pour confirmer ce qu'il savait déjà, il vit les non-moins désagréables sourires des six comparses qu'il restait. Il n'eut pas le temps de les maudire. Le déluge reprit. Et la pièce s'aviva. Pour la dernière fois.


        Ce serait une bataille de nerfs. Les cartouches et les fusées incandescentes que ces instruments de morts tiraient étaient les dernières qui leur restaient. S'ils arrivaient à court de munition avant d'avoir eu leur adversaire, il ne faisait pas l'ombre d'un doute du sort qui leur serait desservi. Même en sachant cela, leur cible était bien trop rapide et agile pour se faire avoir. Seulement ils n'avaient guère le choix, il fallait attaquer et attaquer sans cesse jusqu'à ce qu'il fasse une erreur. Alors ils auraient leur chance. Le décompte de leur balles remplissait leur esprit tandis que les douilles martelaient le sol en un vacarme assourdissant. Chaque mouvement de Thomas était décortiqué, anticipé, et imaginé. Pourtant dans quelques secondes ils allaient être à court de munitions et leur destin serait scellé. Ce fut celle qui commandait la ligue qui baissa les bras en premier. Il ne lui restait qu'une balle. Elle se refusait à la tirer. La tirer signifierait mettre un terme à tout ceci. Elle regarda tour à tour ses compagnons d'infortunes qui l'avaient tantôt irritée, tantôt mise hors d'elle-même. Eux ne s'occupaient pas d'elle, trop occupés qu'ils étaient à déverser leur arsenal sur l'image rétinienne que laissait Thomas derrière lui. Alors qu'elle s'apprêtait à perdre espoir, elle remarqua quelque chose. Aucun de ses membres ne semblaient tirer la gueule. Fallait dire qu'ils étaient assez cons pour ne jamais pressentir ce qui pouvait leur arriver. Mais elle préféra croire que c'était autre chose qui les maintenaient debout. Elle préféra croire que c'était elle. Alors Lyndra Félicia ne connut plus jamais le doute. Elle releva la tête. Exhiba son sourire dégueulasse. Ferma les yeux. Et tira cette dernière balle.



        "BLWARF"


        Personne ne sut vraiment ce que Ging foutait au milieu de la salle baignant de flammes. Pas plus que comment il avait fait pour y arriver avec seulement quelques blessures secondaires et la fin de sa crinière en train de brûler. Mais c'est lui qui, en se prenant le dernier obus, mis en quelque sorte un terme à cette apocalypse. Il était temps. Les murs tremblants promettaient de s'effondrer d'une minute à l'autre. Mais surtout la fin qui le tiraillait depuis plusieurs heures déjà allait finir par le foutre en boule pour de bon. Il ne prit même pas la peine de dissiper le nuage de fumée créé par l'explosion.



        "SI VOUS AVEZ FINI DE JOUER, Y'A UN TYPE QUI MERITE DEUX OU TROIS MANDALES !"




        Il était fascinant pensait Lyndra. Cet homme avait clamé sa phrase avec une telle ardeur qu'on en oubliait son humiliation de toute à l'heure. Mais était-il vraiment un homme ? Y'avait-il vraiment des hommes réfutant en bloc toute once de peur ou d'inquiétude ? Ne fallait-il pas être plus qu'humain, ou peut être moins justement, pour laisser sa crinière flamboyante flamboyait de trop ? Elle se faisait happer par les flammes et cela n'avait l'air de le déranger. Il avait perdu la vue et subit une cinglante défaite quelques minutes en amont face à un adversaire qui prenait des gants. Mais cela ne l'empêchait en aucun cas de revenir à la charge. Et avec une confiance contagieuse. La connerie du semi-géant avait l'art et la manière de déteindre sur les autres. Il croyait tellement en lui qu'on était forcé de le suivre. Ce fut en réalisant cela que Thomas se surprit à éprouver de la sympathie pour le personnage. Une sympathie qui dorénavant ne lui vaudrait plus aucun ménagement de sa part. Après tout, ils étaient de la même espèce. Celle pour qui le courage se mêlait à la débilité. Aussi le jeune garçon n'y alla pas par quatre chemins, il fondit en ligne droite pour bondir la semelle en avant bien dirigée vers le pif du colosse. Un coup de pied sauté qui avait déjà fait ses preuves et dont notre héros en gardait un vague souvenir. Seulement cette fois, Ging fit un effort pour concentrer son ouïe -de loin le sens qu'il appréciait le moins- pour pressentir l'arrivée de Thomas. Alors ses muscles se bandèrent. Et il décocha son poing à l'endroit où il pensait cueillir la trogne du garçon. A une vache près. Une vache anorexique puisque son coup caressa la joue de Thomas qui, alors dans les airs, stoppa net tous mouvements. Dès que son pied toucha le sol, il s'empressa de reculer. Le visage blême, la respiration haletante ; il dévisagea Ging. Ce dernier avait une parfaite impression d'ahuri, et il ne fallait pas avoir des talents de détective pour comprendre qu'il n'avait rien pigé à l'action. Il était resté le bras tendu dans le vide à attendre. Cela ne fit pas rire Thomas à vrai dire. Celui-ci ferma plutôt les yeux. Il pris une longue bouffée d'air et croisa les bras pour empoigner deux de ses sabres. Qu'il dégaina.




        "Je suis désolé... mais je compte pas mourir aujourd'hui.
        "BWAHAHAHA ! ATTENDS QUE JE T'ATTRAPES, ON VA EN REPARLER !"



        Ging ne put pas le voir, et il serait de toute façon surement passé à coté, mais le regard du jeune Thomas changea du tout au tout au sortir de ses armes. Manifestement ces six lames, soit bien plus qu'il n'en fallait habituellement, n'étaient pas là pour la décoration. Le sabreur resta quelques instants sans bouger. Il semblait prendre du plaisir rien qu'à avoir ses armes dans les mains. On le vit même frissonner. D'excitation, d'appréhension, peu de gens auraient pu le dire. Mais au moment précis où la chair de poule le quitta, une pression écrasante s'abattit dans les environs. Même Ging ne put l'ignorer. Pas plus qu'il ne put restreindre l'un de ses sourires carnassiers. Et alors que chaque instant pouvait être son dernier, il se dit quelque part que c'était une chance qu'il soit aveugle. Cela rendait le tout bien plus excitant.


        Thomas fut le premier à bouger. Il propulsa subitement son sabre vers la carotide de Ging qui eut juste le temps de courber la tête pour y laisser la partie de ses cheveux toujours en proie au feu. Seulement le jeune homme avec un penchant pour la tomate se retrouvait déjà dans le dos de son ennemi, rattrapant la lame qu'il avait lui-même expédiée pour l'abattre sur...




        *Khyyyyaaaaa*



        Soudain déboulèrent du plafond la mouette géante aux prises avec le vendeur de chats perché son dos qui, la serrant à la taille, semblait comprimer son ventre de toutes ses forces. Ils se ramassèrent sur le sol, emportant dans leur rouler-bouler Ging et Thomas. Les gens restèrent interdits une seconde devant cette scène pas facile à imaginer, et encore plus dure à vivre. Mais l'animal se releva presque instantanément, faisant face à cet incongru personnage qui lui avait sauté sur le râble pour des raisons pas franchement évidentes du point de vue de la bestiole. Elle gueulait, battait des ailes et se démenait comme un diable d'une demi-tonne. Le vent qu'elle fit suffit à souffler les restes de brasier de la pièce. C'était un sacré morceau. Mais le vendeur de chats était précisément du genre à pas le lâcher. Le morceau. Et il importait peu qu'elle puisse le décapiter d'un seul coup de bec bien placé. Dans cette agitation qui allait crescendo, on vit Thomas se remettre debout un peu plus loin. Ses yeux s'écartèrent d'une manière qu'on aurait pas pensée humaine lorsqu'il remarqua qu'il lui manquait un sabre. Il ne mit cependant pas longtemps à le retrouver. Il était là, bien en évidence, à moitié enfoncé dans l'épaule gauche de Ging. Le lion le retira d'un coup sec sans autres formes de procès et l'envoya complètement au hasard dans la pièce. Le destin voulut que ce soit la mouette qui se le prenne. Le pommeau cognant contre sa tête, elle tourna un regard méchant vers celui qui était responsable de cet acte. L'homme était anormalement grand se dit-elle. Et curieusement silencieux. Mais elle ne réfléchit pas plus loin. Et l'attaqua.


        Le raffut qu'elle faisait sur le chemin la menant à Ging lui signalait sa position avec presque la même exactitude que ce bon vieux temps où il pouvait voir. Alors il s'avança lui aussi vers elle. D'un pas calme. Des petites foulées. Il se mit à inspirer et expirer avec de plus en plus de force. Sa plaie béante laissait choir d'importantes flaques de sang sur son chemin. Cela aurait pu l'inquiéter. S'il n'avait pas été aussi enragé. Ses pieds nus martelaient les débris de murs ou les dalles en morceaux sans vaciller. Sa tête était haute. Ses épaules droites. Il prit une ultime inspiration. Ses muscles et lui jubilaient rien qu'à l'idée de enfin pouvoir donner un vrai coup. Une giclée de sang jaillit de sa blessure. La chaire de son bras contracté se déforma. Et le crissement de ses doigts serrés résonna.


        Lorsque la mouette se réveillera, elle n'aura de souvenirs de cette journée que le cri rauque d'un lion ardent.


          Ce fut concrètement la deuxième fois de la journée que la mouette passa à travers le plancher, et ce, d'une manière parfaitement similaire que la première, à une vache près, vu qu'au lieu d'aller de haut en bas, elle empruntait le chemin inverse, qu'elle n'avait plus un, mais deux larrons accrochés aux basques et cette fois dans un état de conscience sensiblement moins élevé qu'au moment de l'aller. Certains d'entre vous me diront "C'est pas qu'à une vache près ça !". A ceux-ci, je répondrais qu'une vache c'est gros, mine de rien. Admettons qu'elle soit limousine et vous êtes bien niqué. D'autres me poseront surement la question "Mais quelle idée a eu cette mouette de remonter à l'étage du dessus, inconsciente, qui plus est?" et à ceux-là, j'expliquerais simplement qu'elle ne l'avait pas tout à fait de son propre gré vu que bien aidée par le joyeux punch de mon ami Ging "BAM" Dong. Plusieurs petits filous essayeront bien de sortir du lot en demandant pourquoi il y avait DEUX personnes accrochées à la mouette, mais il me suffira de déclarer que je m'étais moi-même agrippé au volatile en compagnie du vendeur de chat, bien décidé celui-là à ne pas laisser filer sa proie. Evidemment, les plus malins seront ceux qui se posent la question à laquelle moi-même je n'ai pas de réponse, à savoir comment j'en étais arrivé là, tout en échappant à la cohue monumentale qu'avait provoqué le groupe d'abrutis. Eh bah messieurs, mesdemoiselles, pour répondre à ça, j'ai la plus simple explication possible : c'était pas moi, j'ai un alibi, j'étais au cinéma. Car oui, voir Ging se battre, c'est un peu comme regarder un film flamboyant dans une salle sombre.

          Bref, revenons à la situation présentée, et donc à l'étage du dessus si vous le voulez bien. En fait, deux étages au-dessus, pour être précis, vu que Ging avait eu la fâcheuse tendance de ne pas lésiner de sa puissance avec son coup d'poing. Le simple fait de traverser le plafond alors que j'étais collé au dos de la mouette ne m'avait pas vraiment été bénéfique puisque, constitution normale l'y obligeant, mon corps avait souffert un chouïa de cette chute vers le haut. Et plus précisément, m'avait assommé. ALORS OUI, EVIDEMMENT, MESSIEURS, TRAITEZ-MOI DE LOPETTES MAIS JE VOUS TRAITERAIS DE SALAUD. Et ça fait salopettes. Aussi, quand je me réveillai, je mis un certain temps à comprendre comment le vendeur de chats pouvait en tenir un alors que quelques secondes plus tôt, encore, il n'avait là que ses longs ongles/griffes pour seule garniture sur ses mains. Le petit être, en vérité, tout juste sorti de la mouette géante, boulottait son sauveur à coups de griffes et lui mordait les mains, mais ce dernier, souriant avec une tendresse qu'il n'avait jamais démontré jusqu'alors, semblait prendre plaisir à se faire mordiller par celui qui rejoindrait bientôt sa petite tribu personnelle. Pendant qu'il s'extasiait devant son nouveau chat, je jetai un œil curieux à la pièce qui nous entourait. Concrètement, il s'agissait d'une gigantesque baie vitrée. Toute la salle, y compris le sol, n'étais que verre. Une impression désagréable de marcher sur du vide infesta mon corps alors que je regardais le sang de la mouette souiller le sol transparent. Au plafond, il semblait y avoir une sorte d'embout bizarre qui signifiait probablement que l'endroit n'était pas encore le dernier étage. Enfin, je posai les yeux vers le trou quelques mètres plus bas, par lequel je pouvais entrapercevoir, parfois, le duel perpétuel qui animait encore mon compagnon d'aventure et Thomas. Tantôt, on voyait même un membre de la Berry jackpot team crazy legend league passer pour échapper à la bataille. Mes pensées divergèrent vers les autres trop nombreux concurrents qui avaient tous été assommé, voir tués, par l'énorme déluge sanglant que le groupe survivant en bas avait provoqué. Puis un "Miaou" strident. Et mes yeux se reposèrent sur le vendeur de chats qui camouflait son petit protégé dans son étrange manteau.

          "Je suppose qu'après le carnage que j'ai constaté en bas, il ne reste plus que 4 groupes de participants. Psst. L'objectif des organisateurs était clair dès le départ. Ils étaient 16 au départ, à la fin, il n'en restera qu'un. Par con..."



          "PSST BORDEL. C'EST QUOI CA ?"
          "JEAN-PIERRE, QU'EST-CE QUE T'AS FOUTU PAUV' TACHE ?"
          "Bah, j'sais pas, ça m'paraissait de circonstance !"
          "Rah, mais arrête moi ça tout d'suite, ça enlève tout le drâme !"
          "Ah perso, j'trouve ça de circonstance."

          "C'est pas les organisateurs, justement?"
          "RIEN A BATTRE DE CE QUE TU PENSES !"
          "Ca risque d'être compliqué t'façon, j'ai oublié comment on stoppait la fonction musique sur cet escargophone de circonstance."
          "Faudra que tu m'expliques pourquoi cet escaragophone serait DE PUTAIN DE CIRCONSTANCE !"
          "C'est pour faire rire les gens, ça s'appelle un running gag, c'est circonstanciel !"


          [BAM]

          "C'EST PAS MOI !"
          "Mon ami Jean-Pierre nous a hélas quitté aujourd'hui... nous accordons nos condoléances à sa femme et ses enfants, Frank, Denis et Tacos."
          "Tu disais donc?"
          "Que le groupe d'abrutis, ce sabreur, le grand et toi, puis moi, sommes les derniers survivants du jeu dangereux de cette tour. Et comme j'ai l'intention d'en sortir vivant, je veux être sur que les autres me le permettent. Donc on en arrive au temps de se battre, toi et moi."
          "Ca s'tient. Mais tu sais, celui qui sait se battre, dans l'groupe, c'est plutôt l'autre grand con, hein, moi j'suis juste le chef, le roi d'un monde. Enfin, bientôt quoi. Non? HEY !"
          "Ah, petite rectification, ses enfants s'appellent Jean-René, Roger Jean-Paul et Gregoire, finalement."

          Mon réflexe me sauva la vie, vu que la griffe du bonhomme passa entre mon chapeau encore en l'air et ma tête que j'avais brusquement baissé pour éviter le coup. Reculant vivement de deux pas en arrière, je vis dans les yeux du vendeur de chats qu'il n'y avait plus la moindre lueur de sympathie. Il était là pour me vaincre, m'achever s'il le faut. Il réattaqua. Prêt cette fois, j'exécutai un semblant de roue vers le côté afin d'échapper à son coup qu'il enchaîna sur une sorte de retourné acrobatique visant à m'envoyer son pied dans la tronche. Il n'avait rien de la vigueur de Thomas mais rivalisait assez largement avec la mienne, tout comme il m'égalait au niveau de l'agilité. Je n'aurais jamais pu penser ça de cette homme si rabougri et si étrange. Mais il avait escaladé Panaris à mains nues, et de tous les tricheurs, il était le seul à avoir réussi à poser le pied à l'intérieur. Une véritable prouesse quand on connait la physionomie de la tour. Il m'harcelait, là, de coups et d'autres, et je n'arrivai encore à esquiver qu'à l'aide de pirouettes assez exceptionnelles. Les quelques rares occasions qu'il me donnait pour contrer se soldaient généralement par un échec, comme lorsque mon pied rasa ses jambes bondissantes de près, m'empêchant alors de le faucher. Alors que ce jeu d'esquive perdurait, il se mit soudain à siffler un "Psst" furtif. Cela ne me posa pas de problème au départ.

          Mais il en enchaîna un deuxième. Et à ce moment précis, il bloqua mon esquive et manqua de me planter sa griffe dans le visage. Son visage s'orna d'un sourire malicieux et, haletant, je cherchais à comprendre comment il avait pu si facilement lire mon prochain mouvement. Il fonça de nouveau vers moi. Je glissais entre ces jambes et me relevais pour tournoyer au sol afin de me remettre debout rapidement. Il lança sa griffe vers mon cou mais je bondissai rapidement pour poser mes deux pieds sur son bras et prendre appui sur celui-ci pour sauter derrière lui. Je tournoyai rapidement sur moi dans l'espoir de lui envoyer un coup de coude, mais il n'était plus là. Par contre, ses griffes prirent possession de ma cuisse droite sur un "Psst" rapide. Sur une roulade en avant, je me replaçais devant lui, blessé. J'avais l'impression de me battre dans le vide, à cause du verre tout autour de nous. Lui esquissa un nouveau sourire et reparti à l'assaut. Un nouveau "Psst", une esquive plus lourde mais toujours efficace. Puis encore et encore, il ne cessait de siffler ce bruit troublant, et systématiquement désormais, il anticipait mes mouvements. Et lorsque ma jambe refusa de me porter plus longtemps dans un effort si soutenu, que partout j'étais griffé et que ma tenue blanche était désormais trouée et tachetée de sang à plusieurs endroits, j'haletais, haineux envers ce bonhomme qui suivait tous mes gestes. Et soudain, je compris. Ce "Psst", c'était le tempo. Et il n'avait fait que comprendre le rythme de mes mouvements. Et s'y adapter. Mes yeux s'écarquillèrent à l'idée qu'une personne puisse aussi bien lire dans l'esprit des gens mais la logique même voulait que ce soit possible. Tout le monde possède son propre rythme lorsqu'il bouge. Le corps se déplace selon une musique régulière que lui dicte le cerveau. Mais comprendre la "musique" des autres et un art bien compliqué. Je n’étais pas tombé sur le meilleur adversaire pour moi. C'était plutôt le contraire. Il me regarda d'un air hautain et j'affichai un sourire amusé. Cela faisait bien longtemps. Que je n'avais vu personne d'en bas.

          Il s'apprêta à dire quelque chose, mais il n'en eut point le temps. Son chat venait de débarquer droit de son manteau pour lui planter sa patte dans le visage. Et le vendeur de chat hurla sa peine avant d'extirper tant bien que mal la griffe que son nouveau protégé lui avait enfoncée dans l'œil droit. Il posa sa main sur son organe meurtri et tenait son chat par la peau du cou. Malgré toute la peine que ce dernier lui ait infligée, le vendeur se contenta d'aller s'asseoir contre l'un des murs de verre et de déposer le petit animal entre ses cuisses pour le calmer. Ce dernier reprit ses vieilles habitudes en griffant et mordillant son possesseur. J'assistais à cette scène pour le moins pittoresque alors que le sang de ma cuisse continuait de couler. D'un geste vif, j'arrachais la cravate de mon col pour la nouer au-dessus de ma plaie et couper l'écoulement du sang. J'sais pas pourquoi j'ai fait ça, je ne savais même pas que ça marchait. Mais c'était bigrement instinctif. Comme si je ressentais là l'esprit de mon père alcoolique qui avait l'habitude de ce genre de situation. Je souriai en pensant et lui, et justement, je me rappelai à ce moment précis ce que je foutais là. Je n'pouvais pas m'abaisser en dessous de l'homme qui se dressait face à moi, pas même à son niveau. Je valais mieux que lui, 15 fois mieux que lui, 100 fois ! Aussi, je me relevais difficilement et, renforcé par cette idée, me mis à foncer vers le vendeur de chats. Il leva les yeux vers moi rapidement. Il voulut se relever, mais le chat le griffa à nouveau, et pour la première fois, dans un accès de colère, il vint forcer le petit être à rentrer dans son manteau au lieu de l'y mettre délicatement. Il tenta de se remettre debout le plus rapidement possible, mais ça ne lui suffit pas. Car bondissant sur lui, je l'attrapai par la taille. Et traversai la fenêtre. Vers le vide.

          _______________________

          "LEVEZ L'ANCRE JE VOUS DIS !"
          "Je sais bien que le capitaine vous a confié le navire avant d'entrer avec les deux autres, soi-disant parce que vous êtes le navigateur... MAIS VOUS N'ALLEZ PAS L'ABANDONNER, SI ?"
          "JE NE VEUX PAS NON, PETIT ! Mais regarde... CETTE TOUR S'ENFONCE ! ET L'ILE SUR LAQUELLE ELLE REPOSE S'ENFONCE AUSSI ! Aussi fort que soit le capitaine, il aura déjà bien du mal à se sortir d'une bataille contre tous les fous qui viennent d'entrer, mais si, par-dessus le marché, il coule, alors ne te leurre pas, il n'y aucune chance de revoir ton capitaine bien aimé ! Maintenant, va prévenir les autres, nous partons, si nous ne voulons pas couler nous aussi !"
          "Mais... Il est primé... Nous devons l'attendre... Qu'est-ce qu'on va devenir sans lui, hein? Ils sont tous là-haut... Tous..."
          "Ils sont morts bonhommes. Que ce soit maintenant ou tout à l'heure, ils sont morts. Tous autant qu'ils sont, dans cette tour, si Panaris plonge, aucun ne reverra jamais le jour. Maintenant, prépare ce bateau. Le capitaine ne supporterait pas de perdre tout son équipage ici."


          Le navigateur de l'équipage des Flowflowlow, daigna poser un dernier regard sur la tour alors que sa base disparaissait déjà dans les flots. Il accorda une dernière pensée à cette équipe de joyeux lurons qui avaient débarqué tous ensemble, terrorisant la plupart des équipages avec leur arsenal. Il repensa à son capitaine et à la prime qui était sur sa tête. Il le croyait fort. Mais quand il avait vu ce jeune homme aux six sabres débarquer, il s'était soudain mis à penser que son capitaine n'était pas le plus puissant de tous. Quand il avait vu ce vendeur de chats escalader la tour à main nues jusqu'à ce qu'on le perde de vue, il sut que son capitaine n'était pas le plus débrouillard. Et quand il avait vu débarquer ce dandy blanc et le grand gaillard qui allait avec, il fut persuadé qu'il n'était pas le plus con. Il le savait, son capitaine avait déjà surement rendu l'âme là-haut. Mais autant bercer le matelot d'espoir. Le navigateur se retourna et hurla à l'équipage qui se tenait encore là de nouveaux ordres. Il était désormais le capitaine des Flowflowlow, qu'il le veuille ou non. Et il arrêta de penser à tous ceux qui, dans la tour, finiraient remplis d'eau. Car un capitaine n'a pas à se soucier de ce qui est mort.

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          Tout le long de la chute, mes yeux étaient restés fermés. Aussi quand mon corps fut soudain plongé dans l'eau, je ne compris pas vraiment ce qui m'arrivait. Lâchant là le vendeur de chat, je remontai au plus vite à la surface. Arrivé à celle-ci, j'inspirai du plus profond que je pouvais et ouvris les yeux pour comprendre pourquoi je n'étais pas mort d'une si longue chute. Et je me rendais compte que nous n'étions pas en mer, mais bel et bien sur une sorte de petite mare, à l'air libre. Un espace carré, resplendissant de verdure. Je n'avais pas encore vu d'endroit si beau sur Panaris. Nous étions arrivé sur une portion mouvante de la tour. Un sacré coup de bol, faut croire, car quelques secondes plus tôt ou plus tard, il aurait été fort probable que cette parcelle salvatrice se serait située ailleurs. Abasourdi par ce paysage qui s'offrait à moi sans explication, je ne mis pas longtemps à me souvenir du luron qui m'avait accompagné dans ma chute. Il se hissait tant bien que mal sur la terre ferme à l'autre bout de la mare, laissant l'eau ensanglanté derrière lui. Le vendeur de chats finirait sa vie avec un seul œil, cette certitude était mienne à présent, et surement pensait-il la même chose. Mais lui préféra extirper son chat de son manteau et le prendre dans ses bras à nouveau, m'ignorant là royalement. Ce n'était pas pour me déplaire qu'il me délaisse ainsi. J'inspectais rapidement ma griffure à la cuisse. L'eau avait surement du la désinfecter un minimum. Je poussai un long soupir de soulagement avant de me dresser sur mes jambes et voir si je pouvais encore marcher.

          "Le moins que l'on puisse dire, c'est que je ne m'attendais pas à voir certains d'entre vous arriver au sommet. Et surtout pas l'un des parasites qui n'étaient pas invités."

          Je me retournai en flèche pour apercevoir là un bonhomme propre sur lui. Il portait une longue toge blanche, agrémenté d'un petit drap de soie violette. Sous sa toge, un pantalon de cuir souple. Sur sa toge, nombreuses bijouteries. Plus particulièrement ce long et lourd collier doré qu'il portait avec grâce. Dans sa main, son sceptre d'or massif resplendissait. Un homme charismatique, sommes toute. Il faisait très noble.

          "Faudra qu'on m'explique pourquoi un pécore con comme toi est habillé de si belle manière."
          "C'est l'hôpital qui s'fout d'la charité, non?"
          "C'est en soufflant dans tes poils de cul qu'on fait des pépites de chocolat, non?"
          "... nan mais j'voulais di..."
          "MOI AUSSI J'PEUX FAIRE DES EXPRESSIONS INCOMPREHENSIBLES CONNARD, ALORS TU SERAS PRIE DE M'EXPLIQUER VITE FAIT CE QU'ON FOUT LA AU LIEU DE PARLER EN ENIGME, SINON J'T'ECLATE LA GUEULE."
          "..."
          "GROUILLE !"
          "OKAY, okay. Panaris est... une simple arme destinée à faire de moi et de mon collègue hélas inconscient désormais l'homme le plus réputé de South Blue pour avoir rassemblé là et tué toutes les nouvelles menaces de notre mer bleue. Le capitaine Flowflow, les valeurs montantes de la piraterie de South Blue, la Berry jackpot team crazy legend league, l'épéïste Thomas Tokechup ou cet étrange vendeur de chat que j'ai perdu de vue... Tous étaient répertoriés. Certains, pour être primé, d'autres parce que leur trop important arsenal les dressait à l'état de terroriste, l'un pour son inéluctable talent à l'épée, jugé dangereux, l'autre pour pouvoir répandre des virus à travers les mers par le biais d'animaux... Tous les hommes présents dans cette tour aujourd'hui sont des hommes dangereux. Tous... excepté toi et ton grand con d'ami. Sans vous, notre plan aurait été parfait. Un par un, les groupes nous aurait tous quitté. Un par un, ils se seraient résigné à atteindre ce fameux sommet sur lequel il n'y a rien. Un par un, nous les aurions décimé. Sans vous, notre plan était parfait. Sans vous, dès demain, nous serions les maîtres incontestés de South Blue. Mais vous étiez là. Et adieu mon beau plan. Adieu ma prime. Adieu mes rêves. Alors parce que je ne peux pas vous battre tous loyalement... Parce que je suis bien incapable de pouvoir dire "J'ai vaincu !" et ainsi obtenir avec honneur ma récompense... Alors je suis bien obligé de procéder comme ceci. Et dans à peine quelques minutes désormais, toutes les personnes encore vivantes sur Panaris seront noyés. Et personne ne saura jamais ce qu'il est advenu de nous tous. Ni vous, ni moi. Puisqu'aucun ne sera témoin de mon échec. Aucun."
          "Nan, mais j'm'en fous de ça, il est où le cadeau qu'est promis à celui qui arrive en haut?"
          "Hein? Mais il n'y a jamais eu de cad...ah..."


          Je vis les griffes du vendeur de chat se retirer du cou de l'organisateur. Je vis l'œil restant de cet homme qui respirait une fureur sans bornes. Je vis l'organisateur s'affaler au sol, se tenant la gorge, agonisant, crachant le sang qui lui montait jusqu'à la bouche. Il souffrait. Et le vendeur de chats aimait ça. Il voulait qu'il souffre. Puis l'homme au sol s'éteignit. Et l'homme aux griffes se détourna.

          "C'est à cause de lui. Je suis venu ici pour gagner quelque chose. Et j'ai échoué. Moi je n'ai fait que ce que cet homme avait prévu. Ton nom?"
          "Rockfor Egry. Et mon pote, c'est Ging quelque chose. Mais faudra lui redemander à l'occaz."
          "Alors bien joué Rockfor Egry et Ging Sans-nom. Vous avez vaincu Panaris. Alors que moi, j'y ai tout perdu. Bonne chance pour vous sortir de là. M'est avis que ce ne sera pas chose aisée, désormais."


          Il ne lâcha plus un mot. Et sans vraiment m'en rendre compte, je préservais moi aussi ce silence. Le sommet sur lequel nous étions s'encastra finalement tout en haut de la tour, reformant là l'entité que nous avions au-dessus des yeux au moment où nous rentrions dedans, un peu plus tôt dans la journée. Désormais je la dominais. Roi de Panaris. Ça sonne bien, je trouve. Le vendeur de chat s'approcha du bord de la tour. Je le suivais des yeux, curieux. Et sans même que je puisse dire quoique ce soit, il plongea. J'en suis resté coi. Il m'avait accompagné depuis un certain temps, finalement. Le voir disparaître de ma vue si vite me fit comme un vide. Je l'aimais bien ce vendeur de chat. Mais je ne regarderais pas sa chute. Préservons les vaincus. Je marchais autour de la mare, en direction du petit bâtiment qui se situait au bout, dans l'espoir d'y trouver de quoi descendre. Puis mon pied frappa quelque chose. Je baissai les yeux pour voir. Et compris. Mes mains attrapèrent la petite forme poilue. Le jeune animal avait vu sa vie le quitter. Et le vendeur y avait assisté, impuissant. La chute et les éclats de verre avaient eu raison du petit dernier de ses chats. Je poussai un soupir puis... laissai tomber la carcasse. C'EST SALE LES ANIMAUX MORTS. CONNARDS DE PORTEURS DE VIRUS ! DEGAGEZ DE MON CHEMIN !

          Et c'est en fuyant ainsi le tout petit cadavre que je m'élançai en direction du bâtiment, boitant légèrement à cause de ma blessure à la jambe. La tour s'enfonçait sous nos pieds, je le sentais. Dans quelques courtes minutes seulement, l'eau aurait remplit Panaris. Dans quelques minutes seulement nous serions définitivement hors d'état de nuire. Mais quelques minutes, ça me laissait largement le temps de retrouver Ging. Très largement.

          _______________________

          [Quelques jours plus tard, dans un bar qu'il a un bon tavernier.]

          "Et donc votre capitaine est mort et la tour s'est enfoncée vous dites? Donc en fait, tous ceux qui sont rentrés dans Panaris ont perdu la vie, c'est bien ça?"

          Le nouveau capitaine de Flowflowlow regarda le patron de bar qui leur avait donné l'information concernant la fameuse tour. L'homme ici présent avait mené tous ses clients à l'abattoir. Et, comble du destin, il ne le savait même pas.

          "Exactement. Panaris s'est enfoncée dans les eaux et je doute que quiconque ait survécut. Resservez-moi une bière, patron. J'en ai bien besoin."
          "Bien entendu, bonhomme. N'empêche, j'suis bien curieux de savoir exactement ce qui s'est passé dans cette tour. J'serais bien gré de l'entendre."
          "Psst. Je peux vous raconter moi, si ça vous chante."
          "... vous ?!"
          "Moi."
          "Bah alors? Qu'est-ce que vous attendez? Racontez-nous !"
          "C'est entendu. Mais achetez-moi un chat d'abord."
          • https://www.onepiece-requiem.net/t4587-marcheur-blanc-orgueilleux
          • https://www.onepiece-requiem.net/t4401-rockfor-egry-un-bonhomme-qu-il-est-moisi
          Le crissement des engrenages s'engouffrant dans l'eau déchira le ciel et hérissa le poil du lion ardent. Ce furent les premiers étages de la tour qui s’effondrèrent tout d'abord, ballotant tous les protagonistes en son sein comme de vulgaires jouets avec lesquels on ne veut plus s'amuser. Puis ce fut au tour des étages supérieurs. Les inébranlable piliers que même les rouages du temps n'auraient su entailler craquèrent comme de simples allumettes. Les flots s’engouffrèrent dans un typhon écarlate finissant de détruire ce qui existait encore dans les salles. Dans quelques secondes Panaris ne serait plus qu'un mauvais souvenir.


          Et au milieu de ce chaos, il y avait un homme.
          Un homme qui ne pigeait pas un broc à ce qui se passait.

          "BWAHAHAHA ! FAUDRAIT VOIR A FAIRE UN TRUC POUR MA BLESSURE. SI JE CONTINUE A PERDRE AUTANT DE SANG, MÊME MOI JVAIS FINIR PAR CREVER ! BWAHAHAHA !"


          Un homme pour qui le concept de mort était éminemment étranger, comme beaucoup d'autres d'ailleurs -pour n'en citer qu'un, autant citer le plus important, y avait aussi ce problème d'hygiène. Mais il allait très vite avoir l'occasion de se rattraper, puisque à l'allure où filait les choses, il ne pourrait pas échapper à un bain. Le tout était de ne pas s'y attarder des heures parce que, et là même Ging avait quelques doutes sur la question, les poumons d'une moitié de géant avaient beau distancer ceux d'un humain lambda, ils étaient pas non plus fournis avec des branchies. Le raz de marée déferla dans la pièce avec assez de vitesse pour harponner Thomas et assez de force pour culbuter Ging. Le torrent tourbillonnant s'accapara les lieux en quelques secondes, pétrissant les quelques protagonistes qui restaient dans la pièce et mettant un point final aux querelles qui les tourmentaient une minute en amont. Si la rancune s'attachait plus au capitaine que le font des sangsues, il reconnaissait avoir pour l'heure d'autres chats à fouetter. Et c'était pas du petit chat. Ôla non. C'était le bon gros félin qui vous faisait regretter de vous être levé ce matin. En l’occurrence, une noyade imminente. Pas le genre de mort dont avait rêvé Ging, et pourtant il avait comme des suspicions quant à la réciprocité de la chose. Parce que sans vouloir dramatiser, la situation commençait à gravement puer du cul tout de même. Aveugle et secoué dans tous les sens, le forban perdait assez de sang pour écœurer un squale et Tahar Tahgel en même temps. A vrai dire, et ce même s'il ne comptait pas spécialement calancher ici et maintenant, il ne savait que faire. Perdre espoir était une chose impossible pour cet homme, autant perdre la vie devenait de plus en plus la conclusion logique. Il ne lui restait à présent que quelques secondes avant que ses poumons n'arrivent à saturation, avant que la quête de Panaris prenne fin. S'il ne faisait rien, on ne raconterait pas les incroyables aventures de Ging "BAM" Dong et sa joyeuse clique de pieds-nickelés aux enfants pour les endormir. Personne n'entendrait jamais parler de lui. Cette idée lui fit peur. Et il ouvrit les yeux.






          Il vit alors la dévotion. Plus exactement ce fut une nébuleuse entité blanchâtre qui s'imprima sur sa rétine pendant la demi seconde où ses quinquets purent capter la lumière. Une lumière aveuglante. Immaculée. Celle qu'on comprenait par sa chaire et son instinct. Celle qui redonnait espoir. Celle qui nous sauverait tous. C'était Rockfor Egry dans son parfait costume blanc. Il n'avait pas hésité à parier sa vie pour tenter de sauver celle d'un homme qu'il ne connaissait que depuis quelques heures tout au plus. Par caprice ou idéal, il avait plongé au cœur du typhon, bravant la houle sanguine et domptant les flots. Il en avait dans le froc pensa Ging. Son compagnon empoigna son bras pour le hisser vers le haut afin d'emprunter le passage par lequel il était sans doute arrivé. Seulement le colosse résista, sachant d'instinct qu'il n'aurait pas le temps de sortir par les voies conventionnelles. De plus les membres de la ligue pour qui notre héros s'était pris d'affection erraient toujours dans la pièce inconscients. Eux ne disposaient pas d'une seconde de plus. Rock s'empressa d'aller les récupérer, tandis que Ging, lui, prenait place devant l'un des murs qui s'étaient cloisonnés autour des participants après le dernier mouvement de la tour.


          Le lion ardent ne flamboyait pas avec l'intensité à laquelle il nous avait habitué. Blessé, sur le point de s'évanouir, il semblait moins grand, surtout face à cette démesurée cloison d'argile. Sa blessure le faisait souffrir. Tous ses muscles le tiraillaient. Il n'arrivait plus à penser. Ne voulait plus penser.


          Pourtant il se souvint de quelque chose.


          C'était la première fois qu'il entendait la foudre déchirer les cieux. La maison vrombissait sous le déchainement des dieux. Une pluie battante martelait le toit précaire de la demeure et menaçait à chaque instant de le percer. L'une de ses mères était absente. C'était elle qui le rassurait quand il avait peur. C'était elle qui lui faisait oublier tous ses malheurs. Dans le salon baigné de la faible lumière du feu, il tentait de cacher ses tremblements du mieux qu'il pouvait sur son fauteuil. Son autre mère présente n'était pas une tendre, ni du genre à comprendre le concept de frayeur. Le lionceau ne se souvenait plus de la dernière expression d'amour, aussi infime fusse-t-elle, qu'elle lui avait accordé. Mais il priait pour qu'elle ne le remarque pas en train de sangloter. Ce qu'elle fit. Elle referma son livre d'un geste sec et sans dire un mot. Elle se leva dans le silence troublé que des mugissement du ciel et du tintamarre de la pluie diluvienne, puis elle fouina au dessus de la cheminée, occultant la lumière à l'enfant plus effrayé que jamais. Lorsqu'elle se retourna, le petit Ging d'un mètre à peine vit le livre que sa seconde mère, poète, avait depuis sa naissance. Elle vint s'agenouiller devant lui, le regarda avec une once de tendresse à la limite du perceptible, et entama la lecture.


          Le soufre brûle les poumons,
          Et flotte au vent, la bannière des grands lions.
          Les flots vibrent dans l'air,
          Propulsant une chanson guerrière.

          Brisons les sceaux de nos peurs,
          Piétinons de nos rires les erreurs.
          Nous n'avons rien perdu dans cette ère,
          Nous n'avons rien à gagner avec les prières.

          Nos visages ont perdu la couleur de la colère, vermeil.
          C'est la couleur douce et tendre du soleil.
          Qui brûlera nos ombres blotties en cette heure,
          C'est la couleur d'un lion, qui vient en cette heure.



          L'eau sembla alors danser autour du poing de Ging enfonçant le mur.


          ____________________________________________________________

          "Hep ! Marguerite ! 'Avis qu'tu d'vrais v'nir vouar !
          -C'est encore le voisin qu'a chié sur nos légumes ?! 'Va m'entendre c'lui-là !
          -Nan ! C'est.... C'est... C'est qu'j'trouve pas d'mots pour t'l'e décrire koua !
          -Jvais le faire pour toi alors. C'est deux types qu'ont les crocs et une bande de cons sur les bras. Alors préparez les lits et rajoutez des couverts.

          -OUAIS ! DES COUVERTS OUAIS !"




          L'histoire ne dit pas si Ging a finalement bel et bien eu son steak ou encore ce qu'il est advenu de Thomas Tokechup. Tout ce qu'elle raconte, c'est que y a un nouveau duo en ville. Un duo qu'il vaut mieux pas faire chier.