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[B]orn On A Different Cloud

« Paires. »

Il étalait sur sa table ses cartes, les montrant dignement. Ce n’était pas un jeu parfait, mais il avait mené le bluff jusqu’ici en pensant nous avoir avec deux têtes identiques. L’homme à ma droite se mit rire bruyamment, me regardant avec des yeux brillants en lançant sa main sur le tas de billet au centre, hurlant presque :

« Deux paires ! Hahahaha ! »

Je fronçai les sourcils en me caressant la moustache. Les yeux étaient tournés vers moi, impatient de voir si je pouvais faire le poids ou alors perdre en bonne et due forme. Mes adversaires n’en pouvaient plus, haletant de savoir si la somme de 500 milles berries allaient être emporté par quelqu’un. Je les fixai tour à tour, pas certaine de devoir montrer ce que j’avais dans ma main. J’avais tous les risques de me prendre une sacrée raclée si l’un d’eux estimait qu’il n’avait pas envie d’être bon joueur… Et à Las Camp, des bons joueurs, y’en avait pas des masses. Abaissant un peu mon chapeau sur la tête pour cacher mes traits féminins, me raclant la gorge pour prendre la voix la plus masculine que j’avais, je posai mon jeu sur la main en lâchant d’une voix froide :

« Suite. »

Ils clignèrent des yeux quelques secondes. Le premier à ma droite se leva pour vérifier que je disais vrai. Le second pris la suite pour confirmer. Le troisième râla après la chance de l’avoir abandonné, vidant d’une traite son verre. J’approchai la main du trésor au centre, attrapant l’une des liasses en étant prête à filer comme le vent pour ne pas me faire attraper par l’un de ses abrutis qui auraient bien voulu me dépouiller de mon dur labeur. Mais le quatrième retourna la table brutalement, envoyant l’argent, les verres et tout ce qu’il y avait dessus valser par terre. J’écarquillai les yeux, baissant la tête. Un bar de pochtron à Las Camp, c’était un endroit encore plus dangereux que Grand Line.

« Toi bonhomme, t’ira pas loin ! »

Oh, bien sûr, vous devez être particulièrement surpris de le voir m’appeler « Bonhomme ». Encore plus d’avoir lu plus tôt que je parlais de « caresser ma moustache ». Et n’ayant ni attribue masculin, ni barbe, doutez-vous bien que j’avais pris la peine de m’habiller en homme avant de venir jouer dans un des bars le plus malfamé de l’île. Depuis que Savanah avait mis les voiles avec mes affaires et mon argent, je tentais tant bien que mal de me refaire un portefeuille respectable. Mais être abandonné dans un des endroits les plus malfamés du monde, ça n’aidait pas à se remplir les poches.

« Les tricheurs, on aime pas ça. »

Je relevai les yeux, les plantant dans ceux de mon adversaire. L’homme devait bien faire deux mètres vingt et quelques centaines de kilos. Autant dire que s’il lui prenait l’envie de m’écraser de sa grosse paluche, il n’allait pas hésiter bien longtemps. Ce qui était plus embêtant, c’était qu’il m’accusait d’avoir triché alors que pour une fois, j’avais vraiment joué franc. Pas ma faute si la chance me souriait pour une fois. Même si ma situation n’annonçait rien de très bons à venir. Les mauvais perdants, y’en avaient à la pelle dans le coin. Les mauvais joueurs, au moins le double. Et les grosses brutes capable de te péter les cervicales en un claquement de doigt, encore plus. Dans ce genre de situation donc, une personne plus ou moins raisonnable aurait simplement pris ses jambes à son cou en espérant qu’aucun des gus ne le rattrape. Mais je n’ai jamais été réputé pour être une personne vraiment raisonnable.

« Tu me traites de tricheur, connard ? »

Je me relevai d’un bond, faisant face à mon agresseur en envoyant la chaise voler d’un coup de pied. L’objet s’écrasa contre le mur le plus proche et éclata en mille morceaux.

« Je te conseille de tenir ta langue si tu ne veux pas finir comme le siège, là. Compris ? »

Ma voix grave, mon aplomb, tout ça, c’était du bluff. Ça ne pouvait être que du bluff, surtout au vu de ma petite stature et de mes os aussi fragiles que le verre. Et fallait croire que niveau bluff, je n’étais pas aussi douée que je ne le pensais. L’homme eu un sourire mauvais et fit craquer ses phalanges contre ses paumes tandis qu’une lueur malsaine passa dans ses deux petits yeux perçant. Bordel, j’étais mal.

« Ok, pour ton aplomb, on te laisse la vie sauve. »

Ahah, très bonne nouvelle.

« Mais t’inquiète que tu vas bouffer, mon p’tit. Bob, attrape-lui les pieds. »

Le dit Bob s’avança vers moi et poussa d’un pied les objets qui le gênaient. Il arriva à mon niveau. L’autre homme m’attrapa par les bras et m’immobilisa avant que je n’ai le temps de m’enfuir, Bob choppa mes chevilles et tous deux me firent quitter la terre ferme. Une voix tonitruante coupa court à tout cela :

« Joe, Bob ! Qu’est-ce que je vous ai dit ? Pas de bordel dans mon bar…. »

Un espoir, infime. Mais un espoir quand même. Je m’attendais à ce qu’ils me lâchent. Il n’en fut rien.

« Allez faire ça dehors. »

Ils éclatèrent de rire et prirent le pas vers la sortie. Passant la porte à battant, ils allèrent dans la ruelle adjacente. Je me débattais en hurlant au possible, appelant au secours les passants qui me regardaient sans vraiment s’intéressaient à ce qui m’arrivait. Ils approchèrent de la poubelle et commencèrent à me balancer, chantant une petite chanson de pirates pour me motiver à plonger la tête la première dans la benne à ordure. Et à la une. Et à la deux. Et à la ….

« AAAAAAAAAAAH ! »

Un cri suraigu, pas aussi masculin que tantôt. Je passai à travers le couvercle en plastique fermé et tombai pile dans les déchets. Un déchet parmi les déchets. C’était symbolique. Ils pouffèrent de rire encore plus fort, pliés en deux par ce qu’ils venaient d’entendre. Ils s’époussetèrent et firent demi-tour, me laissant dans ma poubelle. En chutant, ma jambe était tombée sur une caisse pleine de bouteille en verre. Verre qui se brisa comme ma jambe, faisant rentrer des petits éclats dans ma peau à travers le pantalon. J’étouffai un hurlement, me pinçant la lèvre en retenant mes larmes. Bordel de chien, ça faisait vachement mal. Et ça puait. PUTAIN DE BORDEL DE CHIEN !
Me relevant péniblement, Je sortis de la poubelle en me hissant à la force de mes bras, faisant passer une jambe puis l’autre pour tomber de l’autre côté. Impossible de me tenir, j’amortis néanmoins ma chute au possible et m’adossai contre le mur le plus proche.

« Rah. Bordel… Bee !!!! »

J’entendis un caquètement au fond de la ruelle, sortant d’un carton en s’approchant de moi. Il arriva à mon niveau sous sa forme animale et me regarda. Il fit tomber le sac de sur son dos pour que je puisse me fournir les premiers soins. Au vu des plaies ouvertes et de la fracture, je n’étais pas sûre de pouvoir me soigner sans m’évanouir.

« Va chercher un médecin, plutôt. Je t’attends ici. »

Il hocha la tête et décolla immédiatement en jasant à tout va pour attirer l’attention.
La journée finissait vraiment mal.
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[Premier post ! Si pas assez de trucs pour faire un post ou aut' chose => MP.]
AVANT TOUT ;
Il y aura deux sortes de musiques, celles juste mentionnées (sous la forme suivante :"Écris sur et inspiré par") et les musiques que je jugerais plus importantes (qui seront sous la forme du lecteur Youtube). Si je ne force personne à bien entendu les écouter, je demanderai aux éventuels correcteursd'essayer de le faire pour les musiques jugées importantes, car j'essaie de les choisir minutieusement et cela peut permettre parfois de faire comprendre des choses seulement effleurés dans le texte ou au contraire, les démultiplier. Bref, je vous enjoins à le faire, mais vous êtes seuls maîtres à bord.
Écris sur et inspiré par ça (pour la scène de baston foireuse).

« Une paire de couches. »

Le vendeur regardait l'énergumène baraqué devant lui avec circonspection.

« Une paire de couches, j'ai dis, z'avez pas entendu ?
- Euh si, si, mais euh c'pour votre... votre enfant ?
- Bwo ho ho, ah bah nan, c'pour moi bien sûr !
- Euuuuh... hein ? Pardonnez-moi je recommence : HEEEEIIIIIIIN ?
- QUOI ÇA SE VOIT PAS QUE JE SUIS NOUNOU ?! »

Non, apparemment cela ne se voyait pas. Mais à en juger par la bouche sans dents de son interlocuteur après un bon coup de poing dans les gencives, les bonnes manières et la haine de la violence de notre héros ne se voyaient pas non plus. Furibard en manque de couches, Robb agit de la seule manière qu'il connaissait, non, qu'il idolâtrait : il vola le magasin. Mais attention : de manière funky. Il commença à hausser son épaule droite dans un rythme imaginaire que lui seul entendait dans sa tête, puis se retourna pour être totalement dos au comptoir tout en continuant cette damnée danse scapulaire. Levant ses pieds sur les pointes, il tourna sur lui-même tout en se déplaçant entre les rayons, renversant les produits entreposés du magasin, faisant bouger son fessier d'une manière si indécente que les chippendales les plus huilés pouvaient aller se rhabiller. Le Montagnard se laissa glisser d'une impulsion du pied vers les plus fantastiques rayons pour les parents débutants. A lui un monde de biberons, de tétines, de bouteilles de lait en poudre ! A lui une armée de vendeurs professionnels s'occupant du bambin à l'adolescent qui lui faisait face. Ils avaient des glawis, Robb le reconnaissait. Cependant, ils ne faisaient pas le poids. Ils voyaient leurs visages patibulaires prêts à en découdre, leur armement fait à la va-vite constitué de produits de la boutique et il savait que sa funkytude les balaierait.

Quel enfoiré aurait pour autant refusé leur challenge ? Il comprenait leurs sentiments en tant que Papa. Alors chacun des camps se prépara à la bataille par un long regard constipé de circonstance. Les balais miniatures pour gamin devinrent des lances guerrières, les nounours subirent les derniers outrages pour devenir des gants de boxe et l'matos de dinette se transforma en de puissantes armes de jets. Les quelques clients qui étaient restés s'assemblèrent en une tribune imprévue et curieuse devant cet affrontement à la fois étrange et commun. Nous étions à Las Camp, un lieu souvent attaqué par les Pirates, un lieu où le truand côtoyait la petite famille sans histoires. Les rues de la ville étaient des hybrides : moitié criminel, moitié civil, mi-connard, mi-brave. Une ambivalence bien sentie qui expliquait sans aucun doute l'attention toute sordide qu'avait les habitants de l'île.

Les guerriers s'élancèrent d'un seul élan, faisant parler leurs techniques du dimanche.
Robb Lochon pelleversa avec eux.

***

« Aaaah putain, la tôle qu'on s'est pris...
- Tu veux pas plutôt dire la pelle qu'on s'est pris ?
- Ouais, y a d'ça aussi. 'Tain, mais regardez-moi ça, il a saccagé l'magasin, y a plus aucun rayon qui tient d'bout !
- Et i' nous a volé pleins d'trucs aussi. Des couches... euh... des biberons. Du lait en poudre. Des bonbons, des nounours... Tiens, des couvertures aussi.
- Oh putain les mecs...
- Quoi ?!
- I' nous a aussi volé la caisse.
- Quel enfoiré...
- Euh, attendez, c'quoi ces bandages sur ta gueule Lazlo ?
- Hein ? Ah ouais j'avais pas vu. Mais toi aussi t'en as, j'te signale Lars !
- Ah ? Ah, c'vrai.
- I' nous aurait soigné ?
- 'Faut croire.
- Bizarre ce gars. »

***

La chaleur. Écrasante. Harassante. Un Montagnard dans les îles du Sud. Une loque plus du tout huilée, mais en sueur. Il ne faisait plus qu'une danse : celle de la pluie. Il ne rackettait plus les honnêtes commerçants, il faisait l'aumône d'un truc pour se protéger l'cigare. Robb Lochon était mal en point, tel un fromage offrant sa croûte à la canicule, produit laitier retournant à son état d'origine. Dès qu'une ombre pointait sur son chemin, son corps semblait pourtant retrouver toute sa superbe et il tressaillait d'une allégresse toute rythmique, s'efforçant à sortir quelques petits pas énergiques, mais sitôt revenu sous la chaleur-mère-de-tous-les-maux-du-monde, le corps massif du Docteur s'affaissait de nouveau, pantelant et nauséabond. L'homme avait l'air si horrible que toute approche de bambins se révéla infructueuse, pire, terriblement blessante pour son cœur de Papa. Tout le monde savait que les gosses étaient de véritables peaux d'vaches sortis des jupes de leurs mères et de l’Ère des Couches, mais là ça tenait carrément d'un coup d'pied aux valseuses de son honneur plutôt que de la simple émancipation enfantine. Ainsi, au comble de son besoin d'amour parentale, il n'avait trouvé que la fameuse scène du "maman, regarde le monsieur tout bizarre". Si, vous savez, cette fameuse scène où la maman s'empresse d'accélérer le pas gamin sur ses talons, en lui disant "ne regarde pas le monsieur", causant tourments et douleurs au pauvre gus en question qui fondait comme neige au soleil. Le problème avec cette attitude cependant, c'était qu'elle s'adressait à un éminent adepte de la Réponse. Si la question ici n'appelait surtout pas de réplique et tenait en l'énoncé suivant : "Est-ce que ce pervers va venir m'attaquer ?" Robb tenait à offrir une solution à ce problème tacitement posé : "je vais te botter le cul Moukère Abhorrée Maladivement, car je m'en vais t'Admonester la répartie Négatrice de tes préjugés !"

Ce qui en soi ne veut pas dire grand chose et ne présente pas grande logique (mais qui sonne bien), vu que le Docteur allait en effet répondre à ses préjugés sur les types en sueur approchant des enfants avec un grand sourire. Le genre de types en sueur qu'on ne connaissait ni d’Ève ou d'Adam et qui se proclamaient poto de votre mioche. Le genre de types qui étaient donc légitimement refoulés à grands coups de talons aiguilles dans les parties suivant un instinct conservateur féminin primaire et, ne nous le cachons pas, plutôt de bon aloi. Oui, Robb Lochon donna un coup de pelle à la mère du petit Billy-Joe, mais c'était seulement une méthode de guérison un peu spéciale. Comme il l'expliqua en effet plus tard à son gosse pendant qu'ils s'offraient un moment glace, il devait traiter sa maman contre sa "putain de paranoïa de merde". Revigoré par la fraîcheur de la crème glacée, le Montagnard continua à déambuler tout en pirouettant dans les rues, faisant fuir les jeunes couples effrayés et faisant rester les grand-mères, vielles vamps nostalgiques du temps jadis. Après leur avoir tatané la gueule pour leur apprendre qu'on ne vampirisait pas le temps d'un papa même pour danser, leurs porte-monnaies en poches, le Docteur continua son chemin.

La journée aurait pu toujours être ainsi : à taper la discut', à taper la mégère, à s'déhancher de façon coquine... mais un évènement imprévu changea la donne. Un évènement imprévu qui était jaune. Un évènement imprévu qui dansait tout comme lui. Un canard dodelinant d'la tête. Pas le genre de canard qui était un putain de salopard chiant, nan... le type caneton d'amour qu'on embrassait et qu'on ne mangeait finalement qu'avec un grand regret tant sa chair était aussi délicieuse que ses petits coin-coins. Petit Canard dodelinant cancana des ordres et exigeait apparemment qu'on le suive. Un amour de palmipède que Robb suivit bien entendu, tout en imitant sa démarche. Pourquoi "bien entendu" ? Parce qu'il ne fallait pas oublier que personne de sain d'esprit n'aurait osé suivre un canard inconnu dans la rue. Heureusement pour la jeune femme blessée et son curieux compagnon, l'étrange sauveur ne l'était pas. Malheureusement pour elle, il était docteur. Se rapprochant en continuant toujours à imiter le volatile, l'énergumène se mit au travail préliminaire de réflèxion-conversation.

« Hmm... je peux déjà voir que ce n'est pas une angine vu vos plaies, ma toute douce. Oh pardon, on ne se connait pas assez pour cela, ma mignonne. Je vais t'appeler Gamine, c'sera plus simple. 'Pis, j'te tutoie, j'ai envie, tiens. Bon, Gamine, normalement, j'devrais t'faire passer un entretien pour savoir dans quelles circonstances tu as cassé ta pipe... j'veux dire, tu vas pas mourir, hein, faut pas croire, enfin, sauf si je continue de te parler -j't'assure que tu as l'air très intéressante hein- tu pourrais me dire d'ailleurs quelle est ta couleur préférée ? Moi, c'est le jaune fuschia, une couleur fort méconnue du grand public, pourtant sublime. 'Faut la voir toute pimpante la couillonne, elle... ah, te soigner ? Ah ouais. J'pourrais le faire ça... J'pourrais l'faire ouais ! Ah bah par contre faut t'opérer, sinon tu vas un peu mourir. Ce serait ballot hein ? BWO HO HO ! Bon, alors, attention ça va piquer un peu. »

Dit-il en brandissant sa pelle d'un air triomphant.

Règle n°3 du Doc-Montagnard : souviens-toi, quoique te dises tes patients, c'toi le Médecin, oh yeh !

Derrière lui, un doux chuintement métallique de mauvaise augure, ainsi qu'une ombre massive apparurent en une danse métamorphique que Robb n'aurait peut être pas la chance de revoir...

***

Pendant ce temps, dans un certain bar...

« Joe, Bob, vous me dites que vous avez laissé un gars vous plumez au poker ? Et vous n'avez même pas les couilles de l'buter ?
- Boss Gunn, on l'a foutu dans les poubelles pour lui apprendre, ça... ça suffit pas ?
- Tu demandes... si ça suffit ? Est-ce que j'ai l'air d'une petite femme qu'on ennuie, Joe ? Est-ce que j'ai VRAIMENT ! *Coup* L'AIR ! *Coup* D'UNE PETITE FEMME QU'ON ENNUIE ?
- N...non, Boss, nan.
- Nan, Joe et je vais te dire pourquoi : les femmes, au moins... ON LES EMBRASSE AVANT DE LES BAISER ! Alors, tu m'retrouves ce petit enculé et tu m'le ramènes ici. Personne fait chier Ben Gunn. PERSONNE !
- Chef, vous devriez surveiller votre tens-
- TA GUEULE BOB, TA... GUEULE ! BOUGE TON GROS CUL ! ALLEZ-Y ! »

La journée commençait vraiment mal...
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L’ombre du mur me faisait un bien fou, elle me permettait de garder la tête au frais, de rester consciente un peu plus longtemps malgré la douleur. Elle palliait à cette chaleur écrasante qui m’épuisait depuis notre arrivée sur l’île, qui tapait trop fort sur les têtes de ses habitants et qui les rendait bêtes et méchants. Les quelques bonnes âmes ne faisaient jamais longs feux dans le coin : soit elles partaient, soit on les tuait, soit elles étaient perverties comme les autres.
Avec Savanah, j’avais pris un aplomb certain, une aisance à la communication pour aller vers les autres. Mon caractère s’était endurci, mais plutôt positivement, ou du moins, je l’espérai. A Las Camp, j’avais l’impression d’être de ces parias, parfois pire qu’eux, souvent plus faible. D’être obligé de me la jouer plus vicieuse, plus maline, moins femme.
C’était l’enfer.
Mon enfer.
Depuis notre accostage, je regrettai chaque jour un peu plus d’avoir posé pied ici, priant tous les dieux existants pour pouvoir en partir. Le problème restait le même chaque matin : je n’avais pas assez de fond pour pouvoir m’enfuir, je ne pouvais me permettre d’embarquer avec ces imbéciles heureux et prendre le risque de tomber sur des vrais brigands, ou pire encore. Les réveils étaient durs. J’en déprimai. Il n’y avait rien, si ce n’est désolation et sadisme gratuit selon les endroits. Le paradis des abrutis en puissances, de ces parasites qui naissaient ici avant de gangréner les autres terres. Je ne voulais pas être parmi eux, de ceux-là. Je ne pouvais pas. C’était m’exposer. Depuis le début, je m’exposais. Je prenais le risque d’être mise dans le même sac qu’eux, que l’on me reconnaisse un jour, que l’on m’évite parce que j’avais foulé cette terre.
Il n’y avait rien de pire que de vouloir s’en sortir à tout prix, d’avoir envie de quitter une terre, de refaire sa vie ailleurs, de sortir du trou qu’on avait soi-même creusé et de ne pas pouvoir y arriver.

Une douleur vive me sortit de mes pensées. J’avais passé ma main sur l’une de mes plaies ouvertes, essayant tant bien que mal de sortir les éclats de verres qui y étaient. Je manquai de tourner de l’œil. Ma tête heurta le mur derrière, qui me permit, l’espace d’un instant, d’oublier la souffrance qui irradiait ma jambe depuis dix bonnes grosses minutes. Je me penchai pour relever la jambe de mon pantalon, et voyant que le membre avait enflé, je pris l’initiative de la couper simplement. Le vêtement déchiré, je constatai la couleur violacée de mon mollet, ainsi que le sang qui perlait vers ma cheville pour enfin gouter vers le sol.
Une violente nausée me prit à l’estomac. La bile me monta aux lèvres. Je me retins de vomir de justesse, prenant une grande inspiration pour retrouver mon calme. Difficile d’être calme avec une plaie béante et un os en morceau, même pour une personne habituée… J’ouvris le sac que Bee m’avait laissé, j’en sortis une bande que je nouai autour de mon genou pour réguler la circulation. Il ne fallait pas que j’empêche le sang de passer, mais tout du moins contrôler le flux qui s’écoulait par ma blessure pour éviter de me vider de mon sang. Pour peu qu’une artère soit endommagée... Ce que je trouvai extraordinaire, c’était d’être toujours consciente malgré l’hémoglobine et la souffrance qui émanait de ma jambe. En temps normal, j’aurais purement et simplement tourné de l’œil, mais là, je me trouvais étonnamment douée. Et puis, avec un self-control… Je n’étais pas médecin, mais avec toutes les tuiles qui m’étaient tombées sur le coin de la figure, j’avais appris à limiter la casse. Maintenant, il me fallait être patiente, j’étais certain que Bee ne m’abandonnerait pas ici, et qu’il trouverait un moyen d’amener quelqu’un jusqu’à moi qui pourrait m’aider.

Je fermai les yeux quelques secondes, les rouvrant en entendant des bruits de pas approchant. Un peu dans le coton, les sens brouillés, la tête qui tournait, je ne distinguai pas qui venait à moi, mais le caquètement qui suivit me rassura immédiatement. Bee était revenu. Je fis un sourire et remarquai une silhouette se penchant vers ma blessure pour l’observer… Un médecin qui… commença à parler. Plissant les yeux, cherchant à voir le regard de l’homme qu’avait trouvé Bee, son discours m’apparut tout de suite comme saugrenu. « Ma toute douce » ? « Angine » ? Naturellement que ce n’était pas une angine… Relevant le regard vers lui en fronçant un sourcil, je n’eus même pas la force de l’envoyer se faire foutre, lui avec ses surnoms. On ne m’appelait pas « ma toute douce » ou « ma mignonne » impunément. Y’avait des coups de pied au cul qui se perdaient… si seulement j’avais pu me mettre sur mes deux jambes, il s’en serait pris assez pour faire remonter son derrière au niveau de son nez.
Et il parlait, parlait, parlait, s’en s’arrêter, se donnant des droits. Visiblement, il était médecin. Un médecin bizarre, mais fallait pas espérer trouver mieux. Déjà, quelqu’un qui acceptait de suivre Bee était forcément une personne étrange.
Mais alors lui, c’était le pompon.
La cerise sur le gateau. Déjà que j’étais pas mal dans la merde avec tout ça, fallait en plus qu’un couillon de la lune vienne me soigner. S’il arrivait à me remettre d’aplomb, je supporterai éventuellement ses discours infinis… EVENTUELLEMENT. Je me raclai la gorge et émis un grognement pour lui faire comprendre que sa couleur préférée, je n’en avais rien à taper et que de toute façon, le violet était une teinte beaucoup plus jolie que le jaune fuchsia. D’autant plus que le jaune fuchsia n’existait pas.

« Ah bah par contre faut t'opérer, sinon tu vas un peu mourir. Ce serait ballot hein ? BWO HO HO ! Bon, alors, attention ça va piquer un peu. »

La luminosité, l’action, les mouvements rapides, tout ça ne m’aida pas à comprendre ce qu’il allait faire. Piquer un peu ? En tout cas, il avait l’air de brandir quelque chose pour le faire aboutir sur moi. La suite, ce fut à Bee de s’en charger, qui lui avait assez de conscience pour réagir. Sa transformation se fit en un grand fracas, tandis qu’il enfonçait sa main dans le sol pour envoyer sur l’homme un morceau de terre gros comme un couvercle de poubelle, surtout d’enchainer sur la suite pour attraper le médecin dans sa grande poigne d’acier. Il y eut un grand bruit, faisant disparaitre la silhouette du toubib de mon champ de vision.
Je secouai la tête, cherchant à rester consciente, à savoir ce qui se tramait. Bee était devenu soudainement agressif, et difficile d’imaginer que ça puisse être sans raison : Probablement que le médecin avait cherché à me faire du mal en tentant de m’assommer avec un objet contondant. Et ça signifiait fracture du crâne et mort certaine dans mon cas.

Me trainant sur le sol, l’adrénaline prenant le pas sur le reste, j’eus assez de force pour me relever et m’approcher du combat qui se préparer. Et la fureur de Bee contre l’incompréhension du médecin avait visiblement l’avantage. Parce qu’il le tenait fermement par la taille, amenant son bras armé à deux pas de son visage pour lui présenter le canon de douze qui s’y trouvait. Histoire qu’il lui fasse la bise, tout ça.

« Bee ! »

Le robot se tourna vers moi, lâchant le toubib qui tomba trois mètres plus bas, pour se précipiter dans ma direction, vérifiant si j’allai bien. Je tenais sur une jambe, lançant un regard fâché vers mon camarade :

« Si tu le tue, il ne pourra pas me soigner ! »

Il secouât la tête, pointa son gros doigt d’acier vers le bonhomme plus loin en essayant de justifier son action. Je l’interrompis :

« Il n’est pas au courant, c’est juste ça ! Laisse-moi lui expliquer, d’accord ? »

Le robot reprit sa forme animale, un poil boudeur, m’aidant à prendre appui sur lui pour me porter jusqu’au médecin. Je me présentai à ce dernier en lui tendant la main histoire de conclure cette rencontre, qui aurait pu me couter la vie, en bonne et due forme :

« Je ne m’appelle pas ‘ma douce’, ‘ma mignonne’ ou ‘gamine’ mais Lilou. Et j’ai besoin de soin. Mais si vous cherchez encore à m’assommer, je vous préviens que je n’aurais plus la force d’empêcher mon ami, ici présent, de vous faire la peau. »

Des menaces ? Non. Une certitude.

« Je ne tiens pas à entretenir de mauvais rapport avec la seule personne capable de me sauver la vie ici. Bee vous a attaqué parce que j’ai la maladie des os de verre, et que votre… "méthode d’anesthésie"… n’était visiblement pas la plus adaptée pour une patiente comme moi. »

Le grincement de porte derrière, porte que j’avais franchis quelques minutes plus tôt, ne m’annonçait rien de bon.

« Et si vous pouviez faire très très vite, ça m’arrangerait. Bee, tu surveilles ? »
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Écris sur et inspiré par ça.

Une ombre massive s'étendit sur le Médecin et sa patiente tandis qu'il brandissait sa pelle en vue de l'anesthésier. Quoi, encore un abruti de con-pensant qui pensait lui dire comment faire son métier ? Ah nan, ah nan, ah nan ! Assez de coquecigrues nom d'une péripatéticienne borgne ! Se retournant pour coller une rouste bien méritée à l'impudent qui voulait l'empêcher d'exercer sa médecine, Robb Lochon ne vit qu'un rocher fonçait sur lui. Le temps se suspendit. Le Docteur soupira. Il remarqua que ce n'était pas un rocher, mais un important morceau de terre qui fusait sur lui. Il savait qu'il ne serait pas assez rapide pour l'éviter, alors en son fort intérieur, le Montagnard pleura. Ses sourcils froncés se rehaussèrent lentement en une mimique d'incompréhension envers son sort, ses yeux se fermèrent de bon cœur et sa bouche se tordit en un sourire désespéré qui demandait au Ciel : "MAIS POURQUOI BORDEEEEEL ?!"
Spoiler:
***

La poigne du machin qui lui avait lancé le pan d'sol n'était pas des plus tendres et la bosse que le dit projectile avait fait sur son front le lançait. Pour compléter l'tableau, voilà que monsieur le lanceur le tenait en joue avec un canon. Génial. Les citadins étaient décidément tous des tarés frôlant le nervous breakdown. Retrouvant une vision plus précise, le Montagnard perçut enfin la tronche métallique de son opposant et put constater de la couleur jaune bien flashy que son créateur lui avait donné. Ce type devait vraiment avoir eu les yeux dans l'coltard quand il eut l'idée saugrenue de filer un pigment aussi nique-coquillards à son... à sa... mais c'était quoi aufaite ce truc ? Un petit temps de réflexion s'impose. Demandons son avis à Mathilda. Aussitôt dit, aussitôt fait : après ses curieuses pensées, Robb jeta un coup d’œil à son petit doigt, ami de toujours qu'il présentait aux enfants sous un nom féminin pour les amadouer et jouer avec eux. Toujours maintenu, l'auriculaire Mathilda gigota un peu pour lui exprimer ses hypothèses. Alala, quelle petite maline cette Mathilda ! Elle avait sans aucun doute raison, ce bidule tout jaune pétouille devait être vu sa carrosserie un de ses fameux cyborgs que lui avait décrit le Vieux Gin. Il se souvenait bien après tout de ses histoires sur son ancien aide de camp... comment s'appelait-il déjà ? Kona ? Ah nan ! Kobra Sanchez ! Le bougre avait été autrefois capturé et utilisé comme cobaye par un savant fou pour transformer l'un de ses bras en Kärscher surpuissant !

Mais d'où venait ce vil brigand cybernétique qui venait lui chercher des noises ? Quel était son motif ? Est-ce que... il pouvait faire caca ? Tant de questions se bousculaient dans son esprit tordu et il espérait que la jeune fille y répondrait vu qu'elle semblait avoir un lien avec Force Jaune. Pour répondre au proverbe "quand on parle du monstre marin, on en voit la nageoire", la gamine qu'il devait justement soigner arriva pour lui prêter main forte, en sautillant bon gré mal gré jusqu'à eux. Arrêter le dénommé "Bee" - c'est quoi ce nom pourri ? C'parce qu'il est jaune que tu l'appelles Abeille c'est ça ? - fut une tâche trop facile pour elle, ce qui subodorait bien sa thèse du lien entre Bee et... qui d'ailleurs ? Robb s'interrogeait au moment où une chute de trois mètres venait le réconcilier avec le sol, sol qui l'accueillit les bras ouverts tant il l'avait manqué.

Il en avait marre.

Ses DEUX bosses le lançaient maintenant. Fichtre... Diantre. Ventre saint-gris ! La boîte de cassoulets recyclée elle allait arrêter de lui courir sur le flageolet sinon ses jolies pognes allaient lui pétarader un feu nourri à la gueule ! Nan mais oh, d'puis quand on tabassait le cigare à papa hein ? Les cigares, c'est le plaisir des paters d'abord. En plus voilà que l'ouvre-boîte le pointait d'son gros doigt mécanique ! C'était le pompon. On s'rebellait contre l'autorité parentale et en plus on faisait preuve d'impolitesse ? ÇA. ALLAIT. CHIEEEEER ! Cependant, contrairement à ce que le Médecin aurait pu penser, aucune agressivité n'explosa.

Non. Robb se figea net en voyant le Cyborg Bee se muait de nouveau en sa forme de canard. Et ce n'était pas la surprise qui régnait dans sa caboche, mais belle et bien la plus grande des admirations !

« Un robot-canard... un cyborg... il est peut être chiant, mais... C'EST TROOOOOP COOOOOOOOOL !! »

Alors c'était la jeune femme qui était l'inventeur de Bee ? Celle qui avait crée un Cyborg ? Sa place dans l'échelle paternel eut une sacrée promotion suite à cette révélation. Apparemment, la gamine avait des choses importantes à lui dire, sans doute la raison qui avait conduit à ce petit accrochage avec monsieur calibre 12. Se mettant en tailleur et serrant la main énergiquement de la mioche -mais pas trop quand même- le Montagnard écoutait attentivement, ne pouvant s'empêcher de rétorquer.

« Je ne m’appelle pas ‘ma douce’, ‘ma mignonne’ ou ‘gamine’ mais Lilou.
- Ouais bah c'pas parce que tu t'appelles Leeloo que j'vais m'empêcher d't'appeler "gamine", Gamine. L'prends pas pour toi, c'pareil avec tout l'monde. Jolie nom au passage ma grande, moi c'Robb. Ça c'est Mathilda dit-il en lui montrant son petit doigt.
- Et j’ai besoin de soin.
- Moi j'pense que t'as besoin surtout de sirop pour la toux, parce que c'te connerie c'est super bon. Mais hein, ça n'engage qu'moi. Et ouais, j'vais t'soigner.
- Mais si vous cherchez encore à m’assommer, je vous préviens que je n’aurais plus la force d’empêcher mon ami, ici présent, de vous faire la peau.
- Bwo ho ho, comme t'veux Gamine... Leeloo.
- Je ne tiens pas à entretenir de mauvais rapport avec la seule personne capable de me sauver la vie ici.
- Ah bah ouais, ce serait ballot ! 'Pis une fifille mimi comme toi, m'enfin, c'serait du gâchis ! 'Faut pas qu'tu meures, accroches-toi à la vie Gamine !
- Bee vous a attaqué parce que j’ai la maladie des os de verre, et que votre… "méthode d’anesthésie"… n’était visiblement pas la plus adaptée pour une patiente comme moi.
- Ah, charmante saloperie ça. T'sais, t'es une rareté Leeloo, l'genre de cas où un doc' exulte et chiale en même temps. J'comprends du coup mieux l'embrouille. Tu d'vrais lui caler un système de parlotte à c't'engin, m'est avis que ça faciliterait le schmilblick à l'avenir. J'te vois déjà filer un mauvais côlon dans l'futur sinon Gamine ! Bon, t'm'excuse, mais avant d'te soigner, j'ai justement un 'tit truc à voir avec Mr. Coincoin... Bwo ho ho... »

Le canard recula instinctivement en voyant le paternel se grimer en un être démoniaque au sourire maléfique qui faisait craquer les doigts de sa main d'une manière sinistre. Avant qu'il n'ait même eu le temps de commencer sa transformation, plus vif que bébé pour remplir sa couche, Robb saisit l'hybride par les hanches, le tourna et leva la main parentale dans le ciel pour ménager son effet. Celle-ci brillait au contact du soleil radieux qui irradiait cette belle journée, révélant toute la superbe du claquement tonitruant qui se provoqua la seconde suivante sur le fessier robotisée de l'animal. On ne faisait pas chier Papa, SINON PUNITION ! Qu'importe l'âge, le rang social, le moment et le lieu, la Fessée devait être respectée. Une fois brandie, il n'y avait nul moyen de l'arrêter, elle était l'instrument de la Justice Parentale, le dernier recours de l'Autorité contre la tyrannie infantile. Délaissant sa main rouge et gonflée, il souleva la fille telle une princesse en faisant attention à sa papatte cassée, décocha un sourire tout fier à Bee, puis décampa comme le salopiot qu'il était. La réflexion allait commencer. Il devait trouver un endroit calme et suffisamment spacieux pour exercer.

Elle avait réussi à limiter l'hémorragie, mais le problème de sa jambe restait. Arrivé près d'un kiosque, Robb Lochon prit des exemplaires de la gazette dans ses dents et s'enfuit de plus belle, Bee en version robotique sur ses talons, visiblement partagé entre l'envie de le cogner et la crainte de perdre et de blesser son propriétaire. Il la déposa finalement dans une ruelle et l'allongea sur les papiers de journaux dépliés, avant de sortir son matos de Médecin. Le Docteur-Montagnard dressa un bilan rapide et continua ses observations à haute voix, fulminant dans sa barbe :

« Jambe cassée en de multiples endroits, verres brisées dedans, risques d'infection, légère commotion à la tête... T'aurais franchement dû m'laisser t'anesthésier avant tu sais, tu vas souffrir le martyr. T’espérais quoi ? On est pas dans un hosto', j'suis un médecin en vadrouille, on fait ça dans une ruelle, tu croyais que tu s'rais traité comme une princesse ? Rien à péter d'ta maladie moi, j'allais pas te briser l'crâne pour autant... alalala, ces citadins... V'faites trop les p'tites connasses à la moindre occaz'. J'vais commencer... et ça va pas te plaire. »

Les Docteur-Montagnards étaient habitués à œuvrer avec les moyens du bord, mais ce n'était pas souvent le cas de leurs patients. Si Robb avait en effet un anesthésiant local, avaient-ils vraiment le temps de s'en servir ? Combien de précieuses minutes perdrait-il ? Et le risque du malaise vagal, elle y avait pensé la précieuse ? Ah bah ça non, hein, bien sûr ! Le Montagnard fit donc la seule chose qu'il pouvait faire avec un pareil patient : il lui colla un coup de pouce bien sentie qui l'endormit aussi sec, technique qu'il avait appris d'un drôle de petit bonhomme sur l'île Torino un Mardi. Ou peut être était-ce un Jeudi pluvieux ? Arf, il ne s'en souvenait plus. En tout cas, Bee semblait approuver l'idée. Ce qu'il ne savait pas c'est que cet endormissement ne durerait à peine que quelques minutes. Sortant des pinces très fines de son attirail, le Médecin s'évertua à jarter tous les morceaux de verres un par un, aussi minutieusement et aussi rapidement que possible. Par chance, elle avait déjà commencé le travail et les cassures étaient suffisamment nets pour qu'on repère tous les morceaux. Lilou émergea malheureusement quelques minutes après au moment terrible de la désinfection, qui était ici la plus rudimentaire, mais la plus efficace pour notre toubib. Lui enfilant sans qu'elle n'ait le temps de protester une bonne rasade de gnôle dans l'gosier, lui carrant ensuite sa propre mimine dans la bouche pour qu'elle la morde -Robb savait en plus que ça lui ferait sûrement plaisir- il versa sur ses plaies une giclée bien sentie d'eau-de-vie.

Ils hurlèrent à l'unisson tous deux.

Comme un crétin, il lui avait filé la main qui avait fessé Bee.

Il était temps à présent de fermer les plaies. Il valait mieux qu'elle ne voit pas sa peau se faire recoudre par le Montagnard, aussi, il lui fila à nouveau un coup de pouce, qui fit cette fois-ci grogner l'animal. Le Pirate lui murmura quelques mots tandis qu'elle sombrait à nouveau dans l'inconscience qui se voulaient rassurant :

« Toi, pas de problème. Moi, Super Papa Docteur. Être suprême. Moi protège toi. Dors. »

***

Lorsque Lilou émergea, l'horizon avait depuis longtemps changé de couleur, l'après-midi étant à présent bien tassé et commençant à laisser place au soir. Depuis, Robb avait appris qu'il ne se trouvait pas dans les îles du Sud comme il le pensait, mais bel et bien à West Blue, la chaleur l'ayant trompé. Un grand plâtre entourait la jambe blessée et des bandages ceignaient la tête de la patiente qui s'était frappé le crâne bien plus fort que ce qu'elle croyait. Lui souriant amicalement et la redressant doucement en l'appuyant contre le mur, le Montagnard lui fit un récapitulatif des évènements qu'elle avait loupé ensommeillée.

« On a bien dormi Lilou ? J'voulais pas t'réveiller, tu t'es réellement mis à pioncer c'te fois. Tant mieux, ça a dû t'faire du bien. J'me suis occupé d'toi et Bee peut témoigner, j'ai bien fais mon boulot. La rééducation sera longue, mais t'devrais guérir facilement, 'pis tu dois avoir l'habitude bwo ho ho ! Par contre, va falloir que tu m'expliques un truc... »

Affichant une mine neutre, il leva devant elle les deux types qui l'avait précédemment jeté, fortement amochés à présent.

« C'qui ceux-là ? DES ADMIRATEURS BWO HO HOOO ? 'Va falloir que tu m'mettes enfin au parfum de c'qui t'es arrivé aussi gamine ! »

***
« Mais qu'est-ce qu'ils peuvent tous les deux bien foutre ? J'VAIS QUAND MÊME PAS DEVOIR Y ALLER MOI-MÊME SI ? »
  • https://www.onepiece-requiem.net/t4674-attention-papa-va-te-montr
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« Jambe cassée en de multiples endroits, verres brisées dedans, risques d'infection, légère commotion à la tête... T'aurais franchement dû m'laisser t'anesthésier avant tu sais, tu vas souffrir le martyr. T’espérais quoi ? On est pas dans un hosto', j'suis un médecin en vadrouille, on fait ça dans une ruelle, tu croyais que tu s'rais traité comme une princesse ? Rien à péter d'ta maladie moi, j'allais pas te briser l'crâne pour autant... alalala, ces citadins... V'faites trop les p'tites connasses à la moindre occaz'. J'vais commencer... et ça va pas te plaire. »

J’allai souffrir, mais c’était une chose dont j’avais l’habitude. Serrant les poings à son annonce, je lui fis mon plus beau sourire pour le montrer la confiance que je mettais en lui et en ses capacités de médecin, aussi pour le rassurer quant à ce qui allait m’arriver. Souffrir, je connaissais. C’était une sensation, un sentiment, une douleur puissante qui faisait partie intégrante de moi, de ce que j’étais. Comme si, par le biais de la maladie qui régentait ma vie depuis ma naissance, j’étais faite pour souffrir, endurer, en pâtir. Aujourd’hui, j’avais acquis une certaine résistance à la douleur, subjective, certes, mais un seuil relativement plus élevé, proportionnellement à ce que j’endurais, par rapport aux autres. Lorsqu’un individu Lambda se brisait le doigt, généralement, il se mettait à pleurer, à s’arrêter de travailler le temps de se remettre, à prendre ses dispositions, à s’adapter mais pour un lapse de temps assez court. Moi, j’avais appris à faire avec, plus besoin de temps pour m’en contenter, je savais me débrouiller sans. Je me reposais deux jours ou trois et je repartais sans demander mon reste, avec l’idée persistante qu’une blessure de ce genre pouvait se reproduire à n’importe quel moment.
Mais l’homme m’enfonça son pouce dans le cou sans que je n’aie le temps de dire quoique ce soit et je sombrai instantanément. Le noir envahi ma vue, je m’effondrai sur moi-même, plongeant dans une sorte de sommeil que je n’aurais sut qualifier. Potentiellement artificiel, étrangement… étrange.
Mais au bout de quelques minutes à peine, j’émergeai à nouveau en sentant une douleur dans mon mollet, douleur qui me ramena à la dure réalité. Le médecin me regarda avec un air presque désolé de me savoir éveillée à cet instant. Il continua pourtant à faire son boulot, m’enfonça une bouteille de gnole dans la bouche pour m’obliger à en boire. Je manquai de m’étouffer sous la surprise, mais il me fourra sa main dans la mouche et me versa ensuite le produit sur la jambe. Une vive douleur, puissante, irradiant de mon gros doigt de pied au haut de ma jambe, me fit serrer la mâchoire. Je manquai de tourner de l’œil sous cette sensation, mais me raccrochai à la réalité avant que Robb ne me contraigne encore à repartir dans les limbes par le biais de son pouce magique.





« Mh… »

Nausées. Picotement dans le ventre. Mal à la tête. Tout ça à la fois. Je me sentais mal, mes jambes étaient lourdes. Ouvrant les yeux doucement, j’eus du mal à me faire à la luminosité. Combien de temps avais-je dormi ? Au vu de la lumière rougeoyante du soleil. Fin d’après-midi ? Début de soirée ? Je sentis une main m’aidait à me relever et à me mettre contre le mur, le visage du médecin se dessinant progressivement tandis que je plissai les yeux et forçai sur ma vue pour mien le discerner. L’homme se mit à me parler, vite, bien, longtemps. Trop longtemps, à un point ou j’avais du mal à le suivre. Me concentrant au mieux pour comprendre ce qu’il me disait, je mis un temps fou à analyser tous ses mots tant ma tête me cogner :

«On a bien dormi Lilou ? J'voulais pas t'réveiller, tu t'es réellement mis à pioncer c'te fois. Tant mieux, ça a dû t'faire du bien. J'me suis occupé d'toi et Bee peut témoigner, j'ai bien fais mon boulot. La rééducation sera longue, mais t'devrais guérir facilement, 'pis tu dois avoir l'habitude bwo ho ho ! Par contre, va falloir que tu m'expliques un truc...
- Muihhh ? »

Un regard derrière lui pour voir ce dont il me parlait, je vis les silhouettes massives des deux types qui m’avaient préalablement mise dans cet état. Mon souffle se coupa sous la surprise, le médecin renchaina immédiatement avec une blague idiote qui me fit grincer des dents :

«C'qui ceux-là ? DES ADMIRATEURS BWO HO HOOO ? 'Va falloir que tu m'mettes enfin au parfum de c'qui t'es arrivé aussi gamine !
- Mh, merde… »

J’étais moins dans le coltard, tout à fait consciente des problèmes qui arrivaient. Gros comme une maison, qu’ils étaient. Voir comme une base marine. Mais pour le coup, je ne comprenais pas cet intérêt à vouloir me faire la peau à ce point : je n’avais pas touché l’argent, ils m’avaient foutu dans une poubelle, laissée pour morte et blessée relativement gravement… Y’avait anguille sous roche… que dis-je ! Baleine sous gravier !

« Des admirateurs… Tu as vu juste, Robb. Des admirateurs qui n’ont pas apprécié que je les plume au poker et qui m’ont accusé de tricher... Ils m’ont choppé et m’ont jeté dans la poubelle derrière le bar, là où tu m’as trouvé. »

Bee écoutait attentivement. En comprenant qu’ils étaient responsables de mon état, son air niais et mignon se transforma en un masque de colère. Un masque de colère de canard. Il caqueta bruyamment en battant des ailes, s’approchant des deux individus en les menaçant de ses plumes déployés et de son bec.

« Putain, Bob ! Chef va pas en croire ses oreilles quand on va lui dire qu’c’est une fille qui nous a arnaqués !
- Ta gueule, Joe ! Toi, Blondie : Joue pas les héros et tire-toi de là avant qu’on te dérouille. Et laisse-nous la fille. »

J’agrippai le T-shirt du médecin, parce que je sentais la tête me tourner, d’une part, mais aussi pour ne pas qu’il obéisse aux ordres. Je voulais qu’il reste. Non, j’avais besoin qu’il reste. Regardant mes deux agresseurs d’un air mauvais, j’évitai habillement de croiser les yeux de mon toubib, de ce Robb, pour ne pas avoir à me justifier. J’aurais voulu fuir, là, prendre mes jambes à mon cou. Mais visiblement, c’était très mal parti, et ma seule chance de m’en sortir était que le gars qui m’avait sauvé la vie soit avec moi, encore un peu. Au moins le temps que Bee se débarrasse des deux zigotos et qu’on puisse partir de l’île.
Le dénommé Bob attrapa Robb par le col de son haut et le regarda droit dans les yeux. Bee s’arrêta net de bouger, conscient à présent que les deux autres ne rigolaient pas, extrêmement méfiant et prêt à agir dès que l’occasion se présenterait.

« Allez Blondie, obéis !
- Lâchez-le ! Il vous a rien fait !
- Toi, tu la fermes ! »

Il me pointa de son gros doigt en me sommant de l’écouter. Je me renfrognai et un rictus de colère apparut. Je fronçai le nez, visiblement frustrée et sur le point de craquer. La tête qui tournait toujours et des nausées prenantes, je ne pouvais agir par moi-même. Je ne voulais pas pour autant que la seule personne qui avait daigné m’aider jusqu’ici se fasse blesser par ma faute. Fermant les yeux en lâchant le vêtement de mon coéquipier de mésaventure, je poussai un long soupir. La situation n’aidait pas à rester calme, à ne pas attirer l’attention… Pour le coup, il n’y avait vraiment pas le choix…

« Bee… S’il te plait, occupe-toi d’eux. »

Le canard me regarda et je lus dans ses yeux combien il était heureux que je lui permette de « s’occuper » d’eux. Il émit un petit « coin » de remerciement et d’affirmation, se retournant vers ses deux adversaires en les scrutant attentivement. Le dénommé Joe éclata de rire en regardant le canard, se tenant les côtes tellement il trouvait l’ordre grotesque : qu’est-ce qu’un vulgaire canard pouvait bien lui faire, à lui, le grand, le gros, le massif Joe Jtancoldeux ? Ou pire ? Comment un petit oiseau dans son genre arriverait à faire du mal à Bob, Bobby, Bob la Brute ou encore, Bobby Gemettapé ? Non, décidément : j’avais énormément d’humour…

« Bwehehehe, Bob, elle demande à un Canard de nous… »

Ou pas.

« De nous… »

Il regardait la créature s’étendre sous ses yeux, se relevait et surtout, relever ses quatre mètres pour le surplomber de sa hauteur. Ses deux yeux turquoise contrastés avec sa couleur jaune, le bruit métallique qu’il faisait en tendant la main vers l’avant lui fit froid dans le dos. Pire encore, lorsque sa main se décrocha tout bêtement pour laisser place à un cercle profond et noir, une perle de sueur tomba du front à son nez pour enfin s’écraser sur le sol. Ses yeux s’écarquillèrent d’horreur. Le visage de Bob s’emplit de la même inquiétude que pour son coéquipier. Le bilan était catastrophique, qu’importait ou est-ce qu’ils regardaient : l’horizon était sinistre pour eux, et même les coups de leur chef Ben Gunn semblaient plus doux à côtés de ce canon de douze qui lui visait le visage. Il déglutit péniblement et sa bouche s’ouvrit en grand :

« BOOOOOOOOOOOOOB !!!
- TA GUEULE JOE, ET COURS !
»

Bob lâcha le médecin d’un coup et fit volte-face, son coéquipier sur ses talons. Bee ne prit même pas la peine de tirer tant leur fuite avait été d’une rapidité surprenante. Il les regarda filer, ne laissant derrière eux qu’un nuage de terre retournée sur leur passage. J’éclatai de rire, mais ma tête me tourna à nouveau et je m’arrêtai aussi tôt gardant un sourire satisfait. Reprenant la conversation, je fis un sourire désolé à Robb :

« Je m’excuse de te mêler à tout ça, Robb. Merci beaucoup pour tes soins… Je te dois quelque chose ? »

Bee se mit à genoux à côté de nous et nous regarda, attentif. Il reprit sa forme hybride et me montra son dos, m’aidant à me relever, prenant appui sur ma jambe encore valide, pour me hisser sur mon coéquipier. Je tendis la main vers Robb en continuant à parler :

« Si ça ne te dérange pas, il vaudrait mieux changer d’endroit, pour ne pas qu’ils nous retrouvent avec plus d’alliés. Ça m’embêterait que tu sois blessé par ma faute, alors autant s’éloigner de l’épicentre du problème. Dis-moi ou est-ce qu’on te dépose ? »

*.*.*.*

« Vous… vous vous foutez de ma gueule ?
- C’était horrible ! Le médecin était là, un de ses copains… Surement un couple de tricheur, chef !… Et il l’a soigné et là… Il y a un canard qui s’est interposé et…. Le… Le… Le canard… !
- AAAAAAAAAAAAAAH OU CA !???
- JOE, CALME-TOI ! QUEL CANARD ?!
- Le canard de la fille !
- QUELLE FILLE ?!
- Celle qui nous arnaqué !
- C’était une fille ?! Vous êtes en train de me dire que vous vous êtes fait plumé par une *coup* putain *coup* de *coup* bordel *coup* DE GONZESSE ?!!!
- Aie ! Pardon chez, pardon ! Pitié !
- Un canard-robot, dieu, c’est horrible !
- Ok ! Donc vous êtes en train de me dire qu’une fille vous a plumé, que vous n’avez pas été foutu de la tuer et qu’elle a un canard qui se transforme en robot… VOUS VOUS FOUTTERIEZ PAS UN PEU DE MA GUEULE PAR HASARD ?!!! *Gling ! Bang ! Paf ! Ouille ! Aie aie aie ! Pitié ! Bam ! Bam ! Bam !* … Hum. Ok, Joe, tu vas me chercher la fine équipe à l’ouest, ils doivent être à la décharge.
- Zui zef, tzou tzuitze zef !
- Toi, Bob, tu files à la cave me récupérer mon fusil de chasse. S’il y a un canard, on va le cuisiner ce soir.
- Chu che chuite chef ! »
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La décharge. Un endroit que Robb détestait déjà lorsqu'il l'avait vu se profiler à l'horizon. Son opinion des citadins ne faisait que drastiquement couler vers le fond depuis qu'il était arrivé dans cette ville et ce que tous ces fous faisaient pour meurtrir leur cité ainsi n'arrangeaient rien. Leurs déchets formaient réellement une montagne nauséabonde, une montagne d'immondices qui était pour lui comme pour n'importe quel personne du peuple des Montagnards, une insulte à la beauté des glorieux sommets de Sakura et de tous les sommets du monde. Les habitants de son village révéraient plus que tout les Montagnes, car elles avaient été leurs maisons depuis le Commencement du Grand Hiver et des Temps. Elles leur avaient offerts nourriture et protection au milieu du froid et elles les avaient forgé au fil des siècles, les rendant plus forts, aptes à survivre. Autrefois voyageurs nomades, à la vue du royaume de Drum de jadis, leur cœur était resté figé dans la glace de l'île pour ne jamais en sortir. Ils avaient ressuscités grâce à la vigueur de Grand-Père Blizzard, apprit la prudence de Grande Sœur Avalanche et avaient décidé de vivre éternellement à la cité riante et blanche de Winterfell. A jamais ils y naitraient et à jamais ils y mourraient. Comme disait l'un de leurs plus vieux proverbes : "Montagnard ne trépasse pas, à moins que l'hiver ne lui caresse le bras".

Les monceaux d'ordures exhalaient l'odeur pestilentielle et fétide du crime, une odeur qui allait parfaitement à Las Camp et qui, grâce à la chaleur ambiante était en passe de faire tourner la tête à notre Médecin. Ce n'était pourtant pas faute d'avoir vu des blessures ignobles ou senti des fromages putrides, mais la propreté de la montagne ne lui avait jamais préparé à ce genre d'effluves. Quoiqu'il se souvenait de la fois où il avait dû affronter un artiste martial prônant l'utilisation de la crasse à tous les niveaux. Assis sur le sol, la petite troupe s'était réfugié là dans le silence le plus total, espérant avoir échappé à leurs poursuivants. La petite Lilou devait se reposer et Robb revoyait déjà la scène de leur départ. Elle sur le dos du canard, lui demandant de la laisser crever avec ses problèmes. Un refus net à base de tambourinage de poings et de pieds sur le sol en gueulant des "Me laisse pas, t'es vraiment pas sympa gamiiiiine" avait eu mystérieusement le don de lui rabattre son caquet et de les faire compagnons d'infortune. De même, avant qu'il ne s'enfuit comme des fillettes apeurées, le Montagnard était resté imperturbable quand les deux bougres s'étaient réveillés pour les menacer. Et si leur volonté de les étripailler n'avait fait que le pousser à être en pétard, il savait que l'heure des gnons n'était pas encore venu pour eux. D'autres choses importaient d'abord.

Oui, bien que le Médecin en avait gros, l'heure n'était pas à laisser éclater son ire, même s'ils avaient osé ricaner sur sa splendide tignasse. Comment ça blond ? Il était albinos, bordel de chien ! Il savait déjà ce qu'il devait faire, son âme de paternel et ses mimines de bûcheron lui ayant criaient ce qu'il devait accomplir pour eux. Se rapprochant du couple étrange que formait la jeune femme et son compère biomécanique, il s'accroupit devant les deux énergumènes sans rien dire, puis se mit à faire quelques assouplissements et autres extensions d'acabit douteux. Sans ciller, tout en croisant sans cesse leur regard, il continuait avec une mine neutre à accomplir une drôle de gymnastique dans le silence, alternant la gestuelle classique avec des mouvements visiblement tirés du break dance. Un coup de coupole où l'on carre ses bras en angle droit sur le côté, tête en bas, puis on fait un p'tit tour sur soi-même grâce à une impulsion des jambes ou un petit moonwalk et c'était reparti pour des échauffements des jambes-en-se-couchant-presque-dessus. Autant dire que le Daddy était aussi souple d'esprit que de corps. Après avoir continué son petit manège pendant une bonne dizaine de minutes, il consentit devant l'état d'énervement de l'une et d'incompréhension de l'autre de passer enfin à table.

« Tu te souviens de ce que tu m'as dit quand on s'est enfuit ? Tu parlais comme si tout cela ne me concernait pas. Mais Lilou, tu devrais savoir une chose : je ne renonce jamais bwo ho ho ! Si, moi, celui qui t'as soigné, te tournait le dos, qui t'aiderait ? Je refuse de te laisser. Et je refuse de laisser un de mes précieux enfants se faire taper par ses petits camarades ! C'est mon rôle en tant que Médecin de te garder en vie et c'est mon rôle en tant que Papa de veiller à ta sécurité ! Tu dois affronter tes problèmes et cesser de fuir : je retourne là bas et je veux que tu viennes avec moi. »

Si le côté paternel de Robb Lochon en avait irrité plus d'un jusqu'à l'internement en maison spécialisé, force était de reconnaitre au moins une chance à ce côté parental excessif : le Montagnard était un homme sur qui l'on pouvait compter. Il n'était ni le plus fort, encore moins le plus intelligent, mais il ne renonçait jamais. Le renoncement au plus froid de l'hiver est signe de défaite. Et la défaite contre la Mort était inacceptable pour les Médecin-Montagnards. Inconcevable même. A présent, le Papa présentait son dos à ses deux compagnons, un dos qui pouvait supporter bien des tracas de jeunots. Un père incapable de s'occuper des problèmes de ses enfants ? ça n'existe pas Lilou ! Alors, lentement, sans se retourner, Robb Lochon se mit en route.

One Piece OST ~~ Overtaken

Sans reculer, sans craindre un seul instant pour sa vie, le Daddy Cool marchait avec un seul objectif en tête, un seul but : le combat. Il était l'heure de la salade de gnons, du festival de mandales, de la baston brutal où les doigts se brisent à force de frapper. Plus question d'être coulant, le temps était venu de sévir. Fini les pardons et salut les punitions !

***

« Impossible... »

Joe n'était pas un enfant de chœur. Il ne l'avait jamais été. Depuis le berceau, on lui avait collé le surnom de "Big Punch" tant pour la puissance de ses coups, que pour sa silhouette massive. Pire, à douze ans, il régnait sans partage sur sa rue, professeur ès pugilat et maître du coup de boule. Mais ce qu'il avait devant lui, ce qu'il découvrit avec Blondie, ce fut autre chose que la peur qu'il inspirait à cette époque : c'était une terreur primitive, qui glace un animal face à son prédateur. Oui, Robb Lochon inspirait la peur, non pas la peur du Cruel, mais celle de la force pure et intolérable.

Joe Jtancoldeux s'était cru brutal.
Robb Lochon l'était davantage.

Chaque malfrat, chaque homme de main qu'avait envoyé Joe via Escargophone pour les ramener s'était vu copieusement défoncé. Ils tombaient les uns après les autres comme des mouches et on en retrouvait parfois un enfoncé littéralement dans le bitume. Le Montagnard avançait inexorablement, marchant même parfois sur le fou qui avait tenté de l'arrêter. Joe comprenait à présent le genre d'hommes qu'il avait insulté. Pour lui, tous les porte-flingues qu'il lui envoyait ne représentait rien ; il n'avait pas d'adversaires.

Pas d'adversaires autre que son patron.

Alors, à cet instant précis, tandis qu'il voyait Blondie marchait inéluctablement vers lui, tandis qu'il voyait sa propre tête enfoncé dans le bitume, Joe, pour la première fois de sa vie, fit la chose intelligente.

Joe s'enfuit.

Il en avait trop vu. Un canard-robot et maintenant ça ? C'en était trop pour lui. Joe s'enfuit en dépit de toute sa vie à Las Camp, en dépit de tout ce qu'il avait construit à force de magouilles et d’arnaques. Mais si Robb n'était pas très rapide, sa pelle l'était.

Joe n'eut pas le temps d'entendre le sifflement strident d'une pelle qui tournoie sur elle-même à vitesse grand v. A la place, Joe entendit les os de ses jambes se briser. Puis, incapable de réagir, impuissant, l'homme de main fut bientôt recouvert de l'ombre gigantesque d'un père en colère.

« Je... Je... pardonne-moi !
- NON. »

La voix fut douce, mais brute et dur comme le granit. Lorsque le poing du Docteur vint briser les lignes carrées et mal dégrossies de son visage et même lorsqu'il sentit sa face s'enfoncer dans le sol, ce qu'il trouva le plus humiliant était le ton de cette voix.

***

Le père furieux continua sa route sans un regard pour celui qu'il venait littéralement d'écraser. Depuis qu'il s'était mis en route, il n'avait eu qu'une vision : la porte d'un bar. Et maintenant qu'il était devant, il ne pouvait plus tenir.

Un "Daddy Punch" plus tard et la porte en bois se plia sous la force des phalanges de notre paternel, les gonds cédèrent et virevoltèrent, éjectés.

Ben Gunn n'avait eu le temps que de se mettre à couvert derrière le bar pour éviter une porte d'une toise et demie qui fonçait sur lui. Et lorsqu'il vit la silhouette musculeuse du médecin passait la porte, au fond de lui, il sut qu'il avait fait une sacrée gourance.

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« Il parait qu'il y a ici un sale gosse qui tape ses petits camarades, JE SUIS VENU LUI FOUTRE UNE GROSSE FESSÉE ! »


Dernière édition par Robb Lochon le Lun 6 Aoû 2012 - 17:52, édité 1 fois (Raison : une répétition)
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Robb était un homme en tout point étrange. Il n’y avait pas vraiment de mot pour le décrire, mais chacune de ses réactions me donnaient du fil à retordre. Son comportement n’avait rien de spécialement logique, ni d’évident, il était une bizarrerie incarnée. Quoi d’autre ? Nous ne nous connaissions pas, nous ne savions rien de l’autre, mais Robb s’engagea, en tant que médecin et papa auto-proclamé, à me venir en aide pour me sortir de ma galère.
Son geste, bien qu’incompréhensible parce qu’il ne me viendrait jamais à l’idée de venir au secours d’une personne que je ne connaissais qu’à peine alors que ses ennemis venaient toujours plus forts et plus nombreux, montrait qu’il était courageux, téméraire, à la limite du suicidaire. Probablement avait-il oublié que nous nous trouvions sur Las Camp, l’endroit le plus malfamé des Blues, ou s’enchainaient les malfrats et les brigands. Et dans les faits, s’en prendre à un gars qui, outre ses mauvaises manières, tenait les rênes d’un petit réseau de petites frappes pour se faire de l’argent, qui avait des relations, c’était hautement suicidaire.

Mais à n’en pas douter que lui et moi n’étions pas nés sur le même nuage.
Dans mon monde, s’attirer des ennuis revenait à se fourrer dans de grosses galères sans nom et prendre la fuite le plus rapidement possible pour éviter de finir en charpie. Dans le sien, c’était affronté un univers pour en ressortir victorieux et qu’importait la manière, le mieux étant d’y aller de front, sans préparation et à découvert.

Rien qu’à voir les coups qu’il distribuait, les poings serraient, l’air fâché, les mandales qu’il envoyait pour répondre à l’envahisseur ; Robb cachait en lui une colère que je n’aurais su deviné, mais une colère à l’encontre de ces enfants capricieux qu’il entendait bien remettre à leur place de sales gamins mal élevés. Rien de profondément méchant, juste d’extrêmement honnête. C’était une humeur passagère, comme celle de ces parents irrités par leurs enfants un peu trop sadiques par instant.
La juste fessée d’un père, je n’en avais jamais fait l’expérience. Parce qu’un père, je n’en avais jamais eu, que la justice n’avait jamais fait son œuvre dans ma vie, et que personne ne se serait véritablement permis de me mettre une fessée lors de mon arrivée chez Harry. Yumen était plus dans la violence expéditive qui ne punissait en rien mes agissements. De celle qui passait et soulageait les nerfs, rien de plus, rien de moins.
Alors, j’admirai. Sa poigne, son élan, sa façon de faire. Je le suivais avec l’aide de Bee, sans vraiment savoir pourquoi est-ce que je louai sa force de caractère et sa résolution à vouloir rétablir l’ordre sur une île comme Las Camp. De l’ordre, ici, il n’y en avait jamais vraiment eu, et la seule loi se résumait à celle du plus fort, celle qui avait la plus grosse, celle qui mettait des coups de pieds dans la gueule pour se faire respecter.

L’animal régnait en maitre. L’enfant sauvage avait pris le pouvoir. Mais une fessée pleine d’autorité allait remettre les choses en place.

Il défonça la porte à battant du bar ou se trouvait notre enfant capricieux. Porte qui sorti de ses gonds et fila droit sur le ventre gras et rebondit de notre ennemi. Un silence pesant après le fracas énormes, les hommes autour qui regardaient l’assaillant avec les yeux ronds, et la voix tranchante de mon médecin qui en disait long sur les choses à venir. Son poing fermé faisait ressortir les veines de ses bras, son air furieux effrayé les habitués, sinon les intimait à ne pas bouger avant d’y être obligé.

« Coin ? »

Bee passa entre les jambes du toubib pour admirer la scène de plus près. Je pris appuis contre le mur le plus proche, ne passant que la tête dans l’ouverture pour admirer à mon tour. L’animal affichait une tête d’ahuri qui fit un drôle d’effet dans la salle. On entendit pouffer avant que du fond de la pièce, un craquement sinistre suivit d’une explosion furieuse ne coupe court à toute situation comique :

« GRAAAAAAAAAAAAAAAAHH ! »

De sous sa porte et autres meubles qu’il avait pris au passage, Ben Gunn sortit, toutes armes en l’air en hurlant à plein poumon. Doigts sur les gâchettes, il se mit à tirer en direction de de notre médecin préféré. Tel un reflex inné, j’attrapai Robb par le col de son T-shirt et le poussa pour l’envoyer épouser le sol. Comme un autre reflex, Bee prit sa forme métallique. Ses quatre mètres frôlaient le plafond du bar, mais sa carrure d’acier encaissait les balles sans bronchait. Il regarda avec un dédain prononcé Ben, qui, devant cette formidable transformation perdit pour un temps ses moyens.
Reprenant rapidement ses esprits, il hurla :

« SORTEZ VOUS LES DOIGTS DU CUL BANDE DE COUILLONS ET FAITES LUI LA PEAU !!!! JE VEUX DU CANARD ET DU CONNARD A LA BROCHE POUR LE DINER !!! »

En deux temps, trois mouvements, les habitués sortirent armes et couteaux, sourires carnassiers et regards sadiques avant de se ruer vers mon coéquipier en acier. Bee, à moitié baissé à cause de la hauteur du plafond, s’enfonça dans la pièce pour se retrouver au milieu et pouvoir envoyer valser ceux qui l’approchaient de trop près.
Ceux ne se chargeant pas de Bee allèrent vers Robb, toujours à terre, pour le trainer sur le plancher et le menacer de leurs armes à feu. Il me fallait réagir. J’attrapai le tabouret à ma gauche en pénétrant dans la pièce, sautillant jusqu’au premier que je vis pour lui assener un grand coup sur le coin de la gueule. Je suivis le mouvement pour envoyer ce qui restait de mon meuble dans la tronche du suivant et terminer par coller une mandale bien sentie dans le ventre d’un troisième.

Bee remarqua ma présence et la difficulté de ma situation. Il arma son canon et tira sur les deux derniers gus qui me faisaient face et qui étaient prêts à me faire la peau. Ils se reçurent dans le dos un boulet qui les envoya danser plus loin. Je me baissai pour l’éviter. Une douleur me lança dans la jambe alors que je rencontrai le sol à mon tour. A côté du toubib, je lui fis un sourire qui se voulait complice.

Nous n’étions peut être pas nés sur le même nuage, mais chez moi, lorsqu’une personne qui vous vient en aide n’hésite pas à risquer sa vie pour sauver la vôtre, on n’hésite pas non plus à lui rendre la pareille.
Question de valeur.

« Je te laisse la main, Robb. »

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[Oune post qu'il est long !]
FLASHBACK, quinze ans plus tôt, GrandLine, Royaume de Sakura, village de Winterfell.

Un salon. Une mère et son fils. La même discussion qui revient, encore et toujours.

Les mêmes avertissements.

« Les Pirates ne sont pas des héros, tu sais.
- Dans les histoires y a des bons et des méchants Pirates, non ? Moi j'serais un bon Pirate !
- Oui, c'est vrai. Mais les Pirates sont aussi des personnes égoïstes, ils font ce qu'ils veulent. Ils suivent la loi du plus fort qui est souvent la leur.
- T'auras beau essayé encore et encore de me dissuader d'devenir Pirate, ça ne marchera pas. Je t'écouterais pas c'coup-ci maman !

Des bruits de pas, une porte qui claque. Un Montagnard qui va à la taverne et qui fredonne quelque chose en rapport avec des "Big Bisous". Une mère inquiète qui regarde un portrait.

- Ce crétin veut désespérément partir à l'aventure. Tout comme toi. Question crétinerie, c'est visiblement tel père tel fils. J'devrais peut être lui montrer des photos de Pirates après leurs pendaisons... ou criblés de balles huhuhuhu. Ça, je sens que ça le ferait bien réfléchir. ♥ »

Bon, pas si inquiète que ça.

BACK IN TIME.

Nombre de citadins que Robb avait rencontré lui avaient reproché sa brusquerie et sa violence naturelle, lui avait raconté des bigoteries comme quoi, selon eux, la fessée n'était pas le meilleur moyen pour punir un enfant. Ni élever la voix. Pour ces crétins, il fallait que l'enfant comprenne son erreur de lui-même et l'assimile. Ce n'était que pures fadaises, le Montagnard le savait bien pour se souvenir de l'enfant et de l'adolescent qu'il avait été : un bambin-furoncle. Un gamin si odieux, si emmerdeur, que lui claquemurait l'clapet prenait des allures de chansons épiques ; tant chieur dans la catégorie des élites qu'il entrainait le découragement et le désespoir des parents. Ces foutus hippies se voilaient la face et n'avaient jamais eu à affronter le véritable visage des bambins : manipulateurs, pervers, sadiques et parfois cruels. Le Papa, lui, avait découvert cela pendant qu'il s'occupait des orphelins de Snowtown. C'était des enfants démunis, sans repères, ne connaissant ni le Bien, ni le Mal et se conduisant comme des bêtes sauvages pour le simple et violent plaisir de sentir qu'ils bénéficiaient de la puissance des Hommes. On tirait les cheveux, on griffait, on arrachait les ailes des insectes et on torturait les animaux parce que l'on s'ennuyait et rien d'autre.

La fessée et la discipline étaient les instruments salvateurs de la Justice Parentale et la vérité faisait parfois beaucoup plus mal que le mensonge ; les enfants n'étaient pas des anges, tout comme leurs parents. Les réprimander était naturel, les fesser nécessaire et les punir obligatoire. C'était le fardeau des adultes, c'était le fardeau des pères. Figure grave et sévère, qui semblait toute puissante, rude bonhomme qui se devait d'être aimant, tout en punissant, combien de paters avaient jamais détesté ce qu'ils faisaient ?

Robb détestait lui. Ni meilleur qu'un autre, ni plus honorable, il avait pourtant décidé, fou comme seul un Montagnard pouvait l'être, de continuer sur la voie difficile de Papa autoproclamé du monde entier.

Parce que cette garderie appelée "monde" avait besoin d'un surveillant.

Pour se racheter. Pour éviter des tragédies. Des orphelins. Pour ne plus jamais penser... "plus jamais".

Parce qu'il aimait le sourire des enfants, aussi, tout simplement.

***
Écris sur et inspiré par ça .

Sa colère était impavide, les veines sur ses bras saillaient et son cœur tambourinait dans sa poitrine. Un vieux son teinté de violence qui remontait tel l'ancien couplet d'un hymne guerrier. Ce tambour de guerre battant qui n'avait jamais vraiment cherché à se taire, réclamant toujours plus de sang à répandre sur la neige. Le battement de ce que son peuple nommait un Stearc. Un homme abrupt, sévère, rude. Un homme-guerrier qui ne pouvait se défaire de la violence et de la colère. Qui ne pouvait céder. Un homme qui criait avec les loups et guerroyait dans des tourbillons de blanc et rouge. Robb Lochon banda ses muscles, s'avança dans la pièce, avide de punir. Cette sensation familière qui ne l'avait jamais quitté le rassurait, car il savait alors qu'à la toute fin, il n'aurait aucune pitié pour Ben Gunn. Mais la vérité était qu'ainsi il était effrayant. Les yeux ardents d'une rage froide, ses poings brandis comme des blocs de granits, le Montagnard revoyait l'expression horrifiée de Joe lorsqu'il lui avait enfoncé la ganache dans le sol. Père et Médecin et Violent. Quel enfant en voyant ce visage oserait l'approcher ? Parfois même un fou était sain d'esprit sur certaines choses. Et aucune folie n'aurait pu cacher aux yeux du pater qu'il inspirait une peur douloureuse.

Il n'avait jamais pu se défaire de cette colère terrible qui l'habitait. Cette colère qui l'avait rendu si violent autrefois. Alors, il avait décidé de partir de chez lui pour aider tous les enfants du monde. Pas parce qu'il était un héros, mais parce qu'il fallait que quelqu'un se dresse. Quelqu'un de terrible, qui engendrerait la peur par son simple nom, un homme effrayant sur lequel on pouvait compter en dépit de tout et à qui, au final, on pouvait faire confiance. Le Montagnard sourit intérieurement en dévisageant les malfrats du bar. Une seconde, il avait hésité. Oui, Robb Lochon avait les yeux ardents d'une rage froide, mais ce n'était pas avec ces yeux qu'il voyait le monde. Il avait des pognes de granit qui pouvait faire souffrir, mais elles étaient aussi capable de tendresse. Et si son cœur tambourinait au rythme du combat, personne ne pouvait nier qu'il faisait souvent fi de l'hymne des casus belli.

Il se retrouva bien vite à terre, sauvé par Lilou qui l'avait empêché de se faire trouer la paillasse, puis ce ne fut qu'hurlements, rage et calibre de douze. Il ne prêta pas attention à Bee, car il savait que le caneton biomécanique pouvait bien se payer une tranche laqué de fessier humain assez facilement. Non, tout ce qu'il vit ce fut Lilou pendant qu'il était tiré. Si gentille, si courageuse Lilou. Fille-femme en verre, aussi forte que la glace. Il vit quelqu'un de bien plus faible que lui être bien plus courageuse. Alors, le père sourit. C'était pour elle qu'il se battait. C'était pour eux. Tant pis pour le reste, tant pis pour la suite. Donner toujours, c'est ce qui faisait qu'on était père.

Il était un Médecin qui parcourait les Blues pour soigner les infections.
Un père qui fessait les enfants-furoncles et revenait mettre de l'autorité où il n'y en avait plus.
Il était violent, brusque, parfois cruel. Pirate.

Pirate et déterminé.

Elle tomba à ses côtés et lui offrit un sourire. Son visage se détendit imperceptiblement et il le lui rendit, car il savait à présent ce qu'il fallait faire, envers et contre tous. Donnant une petite tape dans sa mimine pour signifier qu'il prenait le relais, le Docteur se hissa sur ses jambes.

Two Steps From Hell ~~ Invincible

[B]orn On A Different Cloud 116631imgrobb

Des hommes se relevaient, d'autres avançaient, Bob sur leurs talons. Le Pirate fit un signe de main à Bee pour qu'il s'écarte, ne voulant pas que le copain de Lilou soit pris dans son combat. Il était l'heure que Papa se déchaîne. C'était le temps des fessées virulentes et des croupions saignants. On criait à quiconque que Las Camp était l'endroit où régnait la Loi du plus fort, où celui qui avait les plus lourdes paluches devenaient le grand manitou. On disait que seul celui qui collait ses petons le plus fort dans la tronche l'emportait. On hurlait bien des choses, mais question décibels, il n'y avait qu'un pater qui savait réellement de quoi il en retournait ! Il porta ses mains au niveau du visage, révélant une allumette flamboyante et sa dernière cigarette. La lumière de la flamme dansa un instant sur son visage, dessinant des ombres sur ses traits détendus et flattant sa mâchoire carrée. Attendre. Les laisser s'approcher. D'un même mouvement, la plupart se jetèrent sur lui et seul une silhouette immobile légèrement en biais, clope au bec, leur répondit. Les hommes de Ben Gunn surent alors qu'ils avaient sous-estimés leur adversaire. L'gus qu'ils avaient en face d'eux n'était pas le même genre de petite frappe qui hantaient les rues de leur ville. Le dos massif de Robb Lochon, ses bras puissants et écorchés de toute mesure de graisse, son buste de taureau tout en robuste musculature, ainsi que ses jambes inébranlables étaient tant d'obstacles insurmontables à gravir pour ceux qui n'avaient connu que geignards porte-flingues et décérébrés pitbulls.
C'est à ce moment précis que les crocs d'une peur primaire se plantèrent, lorsque le Médecin sembla soudain, lui, seul contre tous, emplir la pièce. Bob Gemetappé avait vu bien des choses étranges aujourd'hui, mais le plus bizarre était bien cet incompréhensible magnétisme qui le faisait fléchir sous le regard courroucé du paternel. C'était bien ce picotement étrange sur la nuque et dans sa poitrine qui lui rappelait quelque chose qu'il avait oublié, une terreur primale, une terreur qu'il avait tenté comme tant d'autres d'enfouir.

Dans cet homme, il revoyait son propre père.
Il revoyait cette figure sévère qu'il n'avait connu que quelques années avant qu'il s'enfuit, allant refaire sa vie ailleurs.
Bob comme les autres hommes de Ben Gunn, soumis à une sorte de torpeur qu'ils ne comprenaient pas saisirent aussitôt le danger que représentait ce type qui pouvait vous faire flancher juste en se tenant là. Ils couraient toujours, mais la confiance et la soif de sang avaient laissé place à l'étonnement et la panique. Il était si grand. Pourquoi ne l'avait-il pas vu tout à l'heure ? Pourquoi avait-il cru bien faire trois têtes de plus que lui avec son bon deux mètres et moult brouettes ? Les questions n'étaient pas l'genre de la maison pourtant et honteux comme un enfant penaud, l'homme de main redoubla de violence en brandissant son poing comme il l'avait toujours fait. Le Montagnard ne s'écarta que de quelques centimètres et darda sa propre main qui s'enfonça rapidement dans le corps de Bob avec le bruit caractéristique d'os qui se rompaient. Il y eut d'abord un instant de flottement où Bob ne comprit pas que ses côtes venaient d'être brisés, puis le sang perla par sa bouche tandis que ses compagnons le voyaient s'envoler et s'écraser lourdement sur la table même qui avait vu Lilou perdre quelques temps plus tôt, la fendant aussitôt en deux. Un coup extrêmement douloureux, il le savait. Avec une précision chirurgicale, le Médecin savait parfaitement allier violence et connaissance du corps humain. Observant que les autres galopins s'étaient arrêtés, Robb Lochon consentit à approcher, avançant de sa démarche lourde, ne cillant pas.

Les hommes de Ben Gunn frémirent, tandis que le Papa et sa présence semblait les enlacer, tandis qu'un petit sourire mi-figue mi-raisin s'élargissait sur son visage.

« Méchants garçons. »

Ne perds pas le contrôle.

***

Les hommes ont des démons tapis au fond de leur cœur. Meurtre, violence, guerre, de tous temps, ils avaient montré que rien ne pouvait les empêcher de commettre atrocité sur atrocité. Robb était de ces hommes-là pour qui la bataille était l'unique moyen d'obtenir ivresse et plaisir de vivre. Du moins au départ. Le Montagnard avait réussi à remonter la pente, à lentement dépassait cette interminable montagne qui était son propre monstre. Son croquemitaine. Face aux hommes qui sortaient épées et pétoires, il épousa sa violence, épousa sa folie, renonça à ses derniers semblants de raison, rejeta ses dernières entraves. On s'accordait des rôles pour vivre. Tel était Pirate ignoble, tel autre bandit notoire au grand cœur, telle femme mère aimante, telle autre mégère acariâtre, chacun y allait de sa petite étiquette, mais ici à Las Camp, elles tombaient toutes, révélant les vrais visages derrière les sourires affables et patibulaires. A Las Camp, ceux qui n'étaient pas des truands, truandaient. C'était comme ça.

***

Robb Lochon, au milieu d'un bar aux meubles détruits se caressait la moustache, les volutes grisâtres effaçant par intervalle ses yeux toujours aussi décidés. La lumière tremblotante des ampoules faisaient tanguer la scène de carnage qu'il avait laissé en clair-obscur, les brutes qui avaient martyrisé Lilou gisant à plat ventre sur le plancher, roués de coups et marqué de la Marque Rouge, l'empreinte honteuse d'une fessée cul nu production Made In Winterfell.

Il restait cependant un dernier bambin furoncle à punir. Trop apeuré par la force qu'il avait vu en œuvre, Ben Gunn s'était caché dans sa cave, agrippant fermement son fusil dans le fol espoir d'échapper à sa punition.

Une respiration bruyante vint soudainement souffler sur sa nuque, le faisant sursauter et trébucher dans un spasme d'inquiétude incontrôlable... et en un instant, le Montagnard fut sur lui.

Les enfants ont peur du noir.

Pas les Papas.

***


Il était à sa merci. Son fusil avait bien essayé de cracher ses dragées, mais la pelle du Montagnard avait dévié les projectiles aisément dans un concert d'étincelles et fendu par la même arme et main. Assis sur le sol de son bar, pour se défendre, il ne restait plus qu'une chose au malfrat. Une chose qui avait de tout temps réussi ; les mots :

« Tu vas faire quoi hein ? Tu te radines chez moi, tu défonces tous mes gars et tout ça pour quoi ? Pour QUI ? Une sale tricheuse que tu connais ni d'Eve ni d'Adam et que tu as rencontré aujourd'hui !
- ...
- Ah, il fait moins le malin le bon samaritain tout de suite... Te prends pas pour un héros, Blanche Neige... j'ai vu comment tu t'es occupé de mes gars.
- Je hais la violence.
- Tu m'en diras tant hahahahahahaha ! T'as tellement bien maravé mes types que tu m'as impressionné Blondie. Bosse pour moi. T'auras tout ce que tu veux. Conquiers Las Camp à mes côtés. Avec toi, je pourrais réussir.
- Je hais la violence... contre les enfants. J'ai longtemps cru être différent des types comme toi, 'm'étais persuadé qu'j'étais meilleur que'que part. Pas que j'étais un gars bien, ça non, mais au moins quelqu'un qui pouvait changer la donne. En mieux j'veux dire. Bah tu sais quoi, mon petit ? J'pense toujours que c'est l'cas.
- Hein, mais attends, ça a aucun putain d'sens ta réflexion là ?! J'croyais que...
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- Tutututut, c'pas aux p'tiots de discuter les avis des grands. Ouais, j'suis violent. Terrible. Effrayant même. Et alors ? Y a des nounous comme ça aussi.
- Y a aucune nounou comme ça, espèce de taré !
- J'demande pas de pardon. Faible sourire. Après tout, c'est tout comme t'as dit, j'suis pas un héros... J'SUIS UN PIRATE !
- Pauvre con, tu vas un jour t'en mordre les doigts, foi de Ben Gunn, je te retrouv-

Le papa était las. Las d'un tel bambin-furoncle. Las d'essayer de sauver les apparences ; fini la parlotte, que s'accomplisse enfin la Justice Parentale. L'ayant levé par le col et le soulevant du sol pour le hisser à son niveau, leur regard se noyèrent l'un dans l'autre une seconde. Instinctivement, Ben comprit. Il discerna une lueur étrange dans l’œil du paternel.

Il avait fait son choix.
Son terrible choix.
Il tenta encore les mots.

- Pitié ! Ne me tues pas !
- Pitié ? PAS AUJOURD'HUI ! CA C'EST POUR LILOU, ORDURE ! »

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Il arqua son poing comme on prépare une baliste pour tout détruire, son bras s'hérissant de puissantes veines où coulait le son des tambours de guerre et les jointures menaçant d'exploser émirent un craquement sinistre.

Les dernières choses que virent Ben Gunn avant de sombrer dans l'inconscience fut l'ombre massive d'un poing...

Puis la silhouette d'un monstre s'armant d'une pelle.

***

Écris sur et inspiré par ça.

Ben Gunn et ses hommes étaient désormais dehors. Tous. Le Docteur finit d'installer le dernier bandage sur la tête de Joe, avant de se retourner vers Lilou et Bee, qui assistait depuis trop longtemps à un déferlement de violence brute. Avec un petit sourire contrit, il reporta son attention sur le bar.

La bonne odeur d'alcool qui ornait désormais l'édifice tira un soupir tristounet au bon Montagnard qu'il était, conscient que gâcher autant d'alcool lui vaudrait sans doute une punition de ses drôles de Dieux tôt ou tard. Alors, le Docteur lâcha sa dernière cigarette qui virevolta dans les airs quelques secondes avant de remplir son office.

Lorsqu'il revint vers Lilou, les flammes dansaient derrière lui, auréolant son cheveu blanc d'une couronne surnaturelle. Cœur de feu, Fils de la Neige. Le Papa s'arrêta devant le duo et offrit un sourire jusqu'aux oreilles assez incongru étant donné les circonstances :

« Bon bah c'est fini Lilou ! I't'fera plus d'mal ! »

Ses yeux dérivèrent sur les hommes de Ben Gunn que la lumière intense des flammes ne rendaient pas plus beaux.

Il les avait tous soignés. Ou plutôt, avait fait le nécessaire pour qu'ils restent en vie, sans pour autant les soulager de leur douleur ou de leur blessures.

Un Médecin-Montagnard refuse de perdre contre la Mort, refuse de la donner.

Robb leva les yeux et dévisagea le firmament.

Il avait brisé tous les membres de Ben Gunn, un par un. Il mettrait des mois, peut être des années à s'en remettre tant il l'avait corrigé. Mais il ne mourrait pas.

Il ne lui offrait pas ce luxe.

Aujourd'hui comme toujours pour le Montagnard, le ciel était décidément trop calme en dehors de GrandLine...
[Et comme c'est un long post, j'offre une petite image :
Spoiler:
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