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[W]anted Dead or Alive

« Lilou, je peux te poser une question ?
- Oui ?
- Tu étais ou, avant ? »

Silence.
Il parlait d’avant. Elle fronça un sourcil en jetant un coup d’œil au brun à ses côtés. Un grand garçon, bien fait et bien portant, une charmante tête brune aux yeux verts. Jerronimo la fixait, allongé sur le rocher chauffé de ce début d’été, les bras croisés derrière la tête et l’air attentif. Il avait attendu sept ans pour le lui demander, sept ans ou la curiosité avait fait son œuvre, jusqu’ici. Elle haussa les épaules, ne sachant pas comment se dérober :


« Pourquoi ?
- Je… J’ai envie de savoir. Tu sais tout de moi, de ma vie. Nous sommes amis depuis sept ans maintenant, j’ai le droit de connaitre ton passé. C’est comme ça qu’on fait, entre amis. On partage tout. Même le pire. »

Lilou sourit. Elle le trouvait tellement attendrissant lorsqu’il parlait comme ça. Lorsqu’il s’échinait à vouloir en savoir plus sur elle, lorsqu’il lui témoignait de l’affection. Elle avait mis sept ans à essayer de s’y habituer. Elle n’y arrivait toujours pas, malgré tous ses efforts pour rester dans la course. C’était dur de se laisser aller à la parole, simplement d’essayer, de parler. Ne serait-ce que d’en avoir envie. Après tout ce temps, elle avait cette boule dans la gorge qui la rendait muette. Et des idées noires parfois, qui la transformait, pour la rendre comme elle était : Froide, sèche, un peu comme ce métal, cette armure, qui la protégeait au sens propre comme au figuré.

« C’est pas intéressant. »

Jerronimo se releva, ramenant sa jambe à son buste en la regardant toujours, l’air fâché. Il n’était pas satisfait de cette réponse, encore moins qu’elle tente d’éviter le sujet. Il ne savait pas si ce qu’il faisait été bien, mais il voulait savoir.

« Tu n’y échapperas pas ! T’vas pas m’dire que jusqu’à ce que t’arrives sur l’île, tu n’étais personne ? C’est juste… Impossible. Il t’est forcément arrivé des trucs pendant c’temps ! Tiens, qui sont tes parents ? T’avais des amis ? Pourquoi tu n’avais que Bee ?
- Mh…»

Elle poussa un long soupir.

« Je ne sais pas. Je n’avais pas d’amis, pas que je sache. Et… C’est toujours confus. Bee m’a juste sauvé en m’amenant ici.
- Et tes parents ?
- Je n’ai pas de parents.
- On a tous des parents.
- Eh bah, pas moi. »

Elle prit une moue boudeuse, fronçant les sourcils tandis que les larmes lui montaient aux yeux. Jerronimo le remarqua et passa un bras sur ses épaules pour la blottir contre lui. Il ne voulait pas la vexer, ou lui faire du mal. Il ne pourrait pas. Il s’excusa à mi-voix, mais compris énormément de chose. Pendant toutes ces années ou Lilou était frustrée, à l’école lorsqu’ils étaient ensemble et qu’elle était simplement incapable de se lier d’amitié avec quelqu’un, ce temps à être détester, autant qu’à détester. Puis elle avait grandi, et était devenue affreusement belle.
Elle avait toujours été le vilain petit canard. Cela le fit sourire, lorsqu’il vit Bee à côté qui s’étendait sous sa forme animale au soleil, somnolant à moitié.


« C’pas que t’en as pas. C’est qu’tu les connais pas, c’tout.
- Ils n’ont pas voulu de moi. Ce n’est pas si compliqué à comprendre.
- De toute façon, t’y gagne au change, nan ? »

Il lui fit son plus beau sourire. Elle releva les yeux vers lui, un peu désespéré. Est-ce qu’elle y gagnait au change ? Elle ne pourrait pas y répondre, vu qu’elle ne pouvait pas comparer.

« Oui, oui. »

Il éclata de rire :

« Tu pourrais au moins faire semblant d’y croire ! »

Elle se mit à rougir, ramenant ses jambes à sa poitrine pour s’y blottir. Elle s’excusa à son tour, tandis que Jerronimo rigolait toujours à côté d’elle. Il l’avait embarrassé. Il le faisait toujours pour la taquiner. Il s’amusait de sa maladresse parce qu’il trouvait ça mignon. Elle le frappa pour qu’il arrête de rire. Il se calma et reprit :

« Et à part ça ? Tu étais ou avant d’être ici ?
- Je ne sais pas.
- Genre ? Pas du tout ? Y’avait des gens au moins ?
- Beh oui.
- C’était qui ces gens ?
- Des gens méchants. »

Jerronimo fronça un sourcil.

« Ils t’ont fait du mal ?
- Ils n’en ont pas fait qu’à moi.
- Oui, mais les autres, je m’en fiche.
- Et moi, je ne m’en fiche pas. »

Un silence. Le temps de comprendre.

« L’essentiel, c’est que tu t’en sois sortie, dit-il doucement.
- Mh. Et les autres ? Eux, ils ne s’en sont pas sortis. Ils n’ont pas eu ma chance. Tu ne trouves pas ça injuste ?
- Euh… Si.
- Alors, ne te fiche pas des autres.
- Tu ne peux pas non plus te pourrir la vie pour eux, Lilou. Tu n’avais que 8ans, tu ne pouvais pas savoir, ni les sauver tous.
- J’aurais dû essayer.
- Et quoi ? T’aurais débarqué là-bas pour leurs péter la tronche ? Alors qu’t’es même pas capable de me coller une droite digne de ce nom ? Ils t’auraient tué, de toute façon ! On ne peut pas sauver tout le monde… C’est pas humain. C’est pas possible.
- J’aurais quand même dû essayer.
- Que tu es têtue. »

Elle haussa les épaules. Oui et alors ?
Rongée par le regret. Par l’absence. Par le doute. Bon dieu, songea Jerronimo en se passant la main dans les cheveux, cette fille n’était pas croyable. Elle ne disait rien, ou trop peu, elle ne donnait aucun indice qu’aurait pu permettre de la comprendre, ne serait-ce qu’à peine. Elle était ce genre qui se fermer, comme une huitre, hermétique. Recroquevillée sur elle-même et incapable de parler. Tout ce qu’il avait appris aujourd’hui, il ne l’avait appris que parce qu’il l’avait forcé à parler.
Il se rendit compte que ça ne le menait à rien. Que ce n’était pas contre lui, de toute façon. Qu’elle n’en avait qu’après elle. Ça s’expliquait. Finalement, il ne pouvait pas dire la comprendre parfaitement. Il voulait pourtant essayer. Faire comme le vieux Harry, qui lui avait simplement ouvert sa porte, sans lui poser de question et qui avait compris qu’elle n’avait pas envie d’en parler. D’avant.
Ce qu’elle était, ce qu’elle avait pu être avant, ça n’avait aucune importance. Ça n’en aurait pas, tant qu’elle n’en donnerait pas. Et pour l’instant, elle n’était pas prête à partager. Lilou gardait ses secrets jalousement, farouchement, mordant la main qui voulait l’aider, cachant ses blessures pour ne pas qu’on ne la pense faible.
Il ne la trouvait pas faible. Parce qu’il en était amoureux. Mais c’était une toute autre histoire.


« Rentrons. »


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Lun 9 Avr 2012 - 16:53, édité 2 fois
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Le long chemin caillouteux menait droit au petit village, de l’autre côté des rochers qui longeaient la mer. Nous avions passé notre journée à nous baigner, comme ce que faisaient les adolescents de l’ile dès que les beaux jours approchaient. L’endroit d’où nous venions été baigné toute la journée de la lumière du soleil qui, par la même occasion, réchauffait les vagues qui s’écraser le long des hauts rochers. L’eau turquoise, la température agréable et surtout estivale, les vacances, donnaient à l’endroit un attrait certain, presque paradisiaque.
La nuit approchant, chacun rentrait chez soi en se promettant de revenir le lendemain. C’était le cas pour Jerronimo et moi-même, qui déambulions le long des côtes, Bee à nos côtés qui marchait sur ses petites pattes et qui avait du mal à se remettre de son bain de soleil.
Malgré le dernier sujet de conversation, j’avais trouvé ces moments agréables et ressourçant, de quoi m’apaiser un peu. Ne rien avoir dit à Jerro, mais avoir un peu abordé l’avant, ça m’avait fait du bien. Surtout de savoir que cela intéressé quelqu’un et puis,…

« Lilou ! Oh mon dieu, Lilou ! »

Et puis, je sortie de mes pensées, apercevant la silhouette ronde de la boulangère, qui courrait vers moi avec les joues rouges et les yeux plein de larmes. Elle manqua de me tomber dans les bras en arrivant à mon niveau, Jerronimo la rattrapa maladroitement tandis qu’elle tentait de regagner son souffle :

« Mme Inoue ? Qu’est-ce qui vous arrive ? »

Sa respiration saccadée de l’aidait pas à articuler. Pire, ses sanglots, l’horreur dans ses yeux, nous poussa à nous inquiéter.

« C’est… C’est terrible ! Il faut tout de suite que tu te rendes chez le Docteur Fukushima… »

Fukushima ? Je fréquentai assez ce médecin pour savoir qui est-ce qu’il était. Un chic type. Mais pour une fois que je n’étais pas dans l’obligation de le voir, je pouvais m’en passer…

« Euh… Mais pourquoi ?
- C’est Harry ! Il… »

Pas le temps de finir. Bee réagit immédiatement en entendant le nom du vieil homme. Sur mes talons, il prit la direction de la bâtisse du médecin du village. Je m’étais détournée de la boulangère d’un pas rapide, bondissant dès que le prénom « Harry » fut prononcer. Je ne savais rien des tenants et des aboutissants de cette affaire, ni ou est-ce que c’était censé nous mener, sur quoi est-ce que j’allai tomber. Sur l’instant, l’air affolé de Mme Inoue, l’indication de l’endroit où je devais aller et la présence d’Harry dans ces lieux me donnaient simplement le droit de m’inquiéter.
Ce que j’allai y découvrir ? Pas la moindre idée. Je songeai au pire, comme au meilleur. C’était-il fait mal à l’atelier ? L’avait-on attaqué ? Bon dieu d’bordel de merde ! En quelques minutes, j’avais franchi la place principale du village au pas de course, pénétrant dans le hall d’entrée du cabinet de Fukushima en enfonçant presque la porte. Des yeux se retournèrent vers moi, des yeux appartenant à des moustiques, des marins, qui étaient là, devant la petite chambre blanche que Fukushima réservé pour ses patients à hospitaliser.
Pas le temps de réfléchir, l’un des marines s’avança vers moi pour me prier de m’arrêter et de me présenter, je le poussai sans vergogne pour pénétrer dans la pièce ou Papi Harry devait logiquement se trouver. Et il y était. Là. Sur son lit d’hôpital. Le bras plâtré, le front bandé, la jambe enroulée dans un bandage, l’œil tuméfié. C’était pire que ce que je m’étais imaginée. Il n’y avait pas de meilleur. Un tabassage en règle. Je déglutis péniblement, m’arrêtant devant le tableau sous mes yeux qui se peigner progressivement. Je réalisai. Doucement. Très doucement. Et plus lentement encore, je sentais la colère monter en moi. Le vieil homme était inconscient, sommeillant, l’air presque paisible.

J’allai exploser, complètement. Fukushima m’attrapa par le bras pour éviter que je ne me rue sur le premier marine à porter, Jerronimo, qui rentra quelques minutes après moi, aida le médecin à me retenir, tandis que j’hurlai à plein poumon :

« Y’A PAS UN COUILLON POUR ME DIRE CE QU’IL S’EST PASSE, BORDEL DE MERDE ?!! »

Les deux marines présents reculèrent d’un pas, conscient que j’aurais été capable de les secouer moi-même si ça avait pu faire tomber un quelconque début d’information au sujet de cette affaire.

« Voyons Lilou, ce n’est pas de leurs fautes, me souffla Fukushima en me gardant contre lui.
- Je n’en ai rien à foutre ! Qu’est-ce qui lui ai arrivé ?!
- Tu vas commencer à te calmer, Lil... »

Une voix froide perça de derrière les deux autres représentants de la loi. Une silhouette trapue les bouscula, se présentant nous. Le Lieutenant Smith. Un petit homme rondouillard à la moustache touffue et aux petits yeux perçant. Je le regardai de haut en bas, ayant du mal à réaliser qu’une caricature comme lui puisse exister, même si je le connaissais déjà, parce qu’il était un client plus ou moins régulier. Il m’indiqua la sortie d’une main, m’intimant de le rejoindre dehors pour ne pas avoir à importuner plus longtemps le patient.

Il avait raison.
Rien n’empêchait, j’avais des questions à poser. Nous gagnâmes tous l’extérieur dans un silence complet. Une fois dehors, le lieutenant se tourna vers le docteur Fukushima pour le pousser à me parler de l’état de santé d’Harry :

« Il m’a été amené comme tel. Il a une jambe et le bras brisé, une commotion cérébrale et un cocard. Il était conscient tantôt, mais amnésique quant à l’incident ou l’agression. »

J’hochai la tête, déglutissant péniblement. Je sentis autour de ma taille la main de Jerro qui me portait son soutien d’un petit sourire confus.

« Que comptez-vous faire, lieutenant ? Dis-je sérieusement.
- Mener l’enquête, trancha-t-il. »

Ses petits yeux froids me transpercèrent. Il était décidé.

« J’ai quelques questions à te poser, Lilou.
- Très bien.
- Ou étais-tu aujourd’hui ?
- Mh… Avec Jerronimo, nous sommes partis nous baigner.
- Monsieur, vous confirmez ? »

Il s’était tourné vers mon ami, le regardant fixement pour avoir ses réponses. J’étais surprise : pourquoi me demander à moi ce que je faisais ? C’était tout de même assez évident que je n’avais ni l’envie ni les moyens de m’en prendre à celui que je considérai comme ma seule famille, non ?

« Oui, je confirme. »

Silence.

« Connais-tu des gens qui pourraient lui vouloir du mal ?
- Bien sûr que non.
- Harry est un homme très respecté ici. Vous le savez très bien Lieutenant, vous le connaissez. »

Jerronimo faisait preuve d’un aplomb que je ne lui connaissais pas. Soit, son aide me serait favorable.

« Mouais. Sais-tu s’il avait un rendez-vous avant votre départ ?
- Harry garde son agenda près de lui pour savoir qui il doit voir le jour-même. Je vous l’apporterai, si vous le souhaitez…
- Très bien. Mademoiselle Jacob, ne t’en vas pas de l’île, je te recontacterai si besoin. Fais-moi parvenir l’agenda rapidement. »

« Et c’est tout ?
- Comment ça c’est tout ?
- Je ne sais pas ? Genre, vous ne faites que ça ? Vous voyez bien qu’il a été tabassé, non ? On ne lui a rien volé ? Vous avez vérifié au hangar ? Vous avez demandé à d’autres gens ? Sérieusement, vous foutez quoi ? »

L’agacement dans ma voix était palpable, celui dans le regard du lieutenant encore plus.

« Laisse-moi faire mon travail et veille à ne pas être trop envahissante. Nous aurons ce qui ont fait ça à ton… Grand père. Je connais les gamines dans ton genre qui ne supporte pas de rester inactive dans ce genre de situation, mais sache que tout ce que tu tenteras pour nous aider ne fera que nous ralentir dans notre enquête. Maintenant, rentre chez toi, fais toi un bon chocolat chaud et file te coucher. »
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« Quel con, mais quel con celui-là ! Un enfoiré de macho, ouais ! Grrrr !
- Lilou…
- Ah non mais des connards j’en ai vu, mais des comme lui, JAMAIS ! Non mais pour qui il se prend ? « Fais toi un bon chocolat chaud et file te coucher, gnagnagnagna ! », Sale con ! »

Bee et Jerronimo se tenaient derrière elle, avançant en essayant de tenir le rythme de la jeune fille. Elle avait un pas pressé, entrainé, rapide. Elle était décidée à ne pas rester tranquille comme l’avait conseillé le Lieutenant, malgré les plaintes de ses deux amis qu’elle ne daignait même pas écouter. Jerronimo n’en pouvait plus, il courrait presque après elle, tentait de la calmer et de faire en sorte qu’elle ne fasse pas de bêtise. Mais il savait qu’il n’y arriverait pas, car elle ne supportait pas qu’on puisse s’en prendre à Harry.

Harry, c’était sa seule famille. Ce qu’il lui restait après tout ce temps. L’homme qui avait choisi de l’accueillir chez lui sans rien attendre en retour. Jerronimo ne savait rien de ce qu’elle avait enduré avant, mais il comprenait sa colère, sa fureur, sa haine. Il savait que si quelqu’un s’en était pris à elle, il aurait tout fait pour remettre la main dessus et lui faire bouffer ses dents à coup de pelle. Alors, s’il ne pouvait pas l’arrêter, il voulait être au moins sûr qu’elle soit en sécurité et qu’elle ne s’aventure pas trop loin. Il y avait toujours une limite à ne pas franchir dans ce genre d’enquête, et avec Lilou et sa chance légendaire, cette limite était trop rapidement dépassée.
Ils arrivèrent au hangar. La porte était encore ouverte. Il y régnait un silence pesant, en plus d’un capharnaüm impressionnant. Plus rien n’était à sa place, signifiant qu’une lutte avait eu lieu ici. Est-ce que les marines avaient relevé ça ? Probablement. Lilou fit le tour des étagères et constata qu’il ne manquait rien, si ce n’est le fameux agenda d’Harry.


« Il n’y ait pas. Pas dans les affaires, rien. On l’a sûrement pris. »

Jerronimo se gratta la tête.

« Tu as déjà lu son agenda ? Le matin, avant d’partir par exemple ?
- Je n’y ai pas pensé, fit-elle en se mordillant la lèvre. Il ne m’a pas parlé non plus d’un rendez-vous quelconque. Une journée banale. Il ne reçoit jamais de gens lorsque Bee n’est pas là, de toute façon. »

Il hocha la tête. Que pouvait-il faire d’autre ? Rien. Ranger. Peut-être. Demain. C’était tout ce qu’il pouvait faire. En tout cas, dès que l’enquête serait bouclé. Il alla vers la jeune fille et l’attrapa par les épaules :

« On a plus rien à faire ici. »




« Je ne comprends pas. Pourquoi Harry ?
- Il voulait peut être savoir que’que chose.
- Harry n’est pas du genre à garder des secrets qui mérite de lui casser une jambe. Un peu de sérieux, Jerronimo.
- Alors si c’est pas pour lui, c’pour quoi ?
- Aucune idée. Dis Jerro ?
- Ouaip ? »

Elle le regardait avec des yeux brillant, les joues un peu rosées, l’air craquant. Il eut du mal à garder son sérieux en la voyant ainsi, mais tenta de l’écouter pleinement :

« Tu peux rester dormir ici, ce soir ? »

Il sourit, rougit un peu et accepta d’un petit mouvement de tête.




Coiiiinsaletédepigeonschhhhhht




Criiic.

« Jerro ? T’as entendu ?
- Gnh…
- Je suis sérieuse, je crois qu’il y a quelqu’un ! murmura-t-elle. »

Elle le secoua vivement, à côté de lui, dans le noir, regardant vers la porte avec l’air probablement inquiet. Ils ne se voyaient pas, mais il devinait aisément qu’elle ne devait pas se sentir à l’aise. Pourtant, il n’y prêta pas attention, parce qu’à moitié pas frais, il préférait ne pas réagir pour ne pas être désagréable avec elle. Au réveil, il était toujours de mauvaise humeur.
Alors, lorsqu’elle le secoua encore plus fort pour qu’il se lève avec elle, il grogna et décida d’aller la rassurer.


« Ok, on va voir.
- On ? Tu ne veux pas y aller seul ?
- Non mais t’es gonflée toi !
- Hihi. Pas très courageuse. »

Criiic Hiiic.

Ok, cette fois, pas de doute. Jerronimo se redressa du lit et se leva. Lilou le suivit en se blottissant dans son dos. Cela lui donna de l’audace, l’occasion d’impressionner la fille qu’il aimait. Approchant doucement de la porte, il l’ouvrit précautionneusement et aperçu dans l’ouverture deux paires d’yeux qui les regarder fixement.
Il hurla.
D’horreur, de terreur, de surprise.
Et la porte s’ouvrit à la volée, l’assommant à moitié alors que Lilou manqua de se casser la figure. Une ombre fonça vers elle et la plaqua au sol. Une ombre, une silhouette dodue et recroquevillée, pas grande mais avec une poigne conséquente. Elle voulut crier, mais une main gantée l’en empêcha alors qu’on la traina sur plusieurs mètres pour lui faire remonter le long couloir jusqu’au salon.


« Elle va se taire la donzelle ouais !
- vazy, azomme la.
- Nan, il nous a dit de ne pas la blesser !
- Putain, vazy, zest bon… za zoule. »

Je me débâtai toujours, m’agitant dans tous les sens. D’un coup, une force m’envoya brutalement sur le canapé du salon, avant d’allumer la lumière qui inonda la pièce. Eblouis, je fermai les yeux à plusieurs reprises pour tenter de m’habituer à l’endroit. Les silhouettes se dessinèrent alors, progressivement, faisant apparaitre plus clairement les contours de nos agresseurs.

« C’est elle ?
- Une zolie rouquine, za peut qu’être elle. »

L’homme qui m’avait amené jusqu’au canapé était celui qui zozoter. Il était petit, sa posture le rendait encore plus petit, lui donnant par la même occasion des airs de rat. Son nez long, ses dents en avant, ses petits yeux vicieux, ses oreilles décollées n’arrangeaient rien au portrait. L’autre était filiforme et cadavérique, le teint blafard, des poches sous les yeux et les dents jaunies pas le tabac. Deux gus à la Pacheul Craspec (un truc New Jersyen). Jerronimo, à côté, retrouva peu à peu conscience, se tenant l’avant du crâne ou commençait à apparaitre une petite bosse rougeâtre.

« Z’est toi, 09121992 ? »

Oh bordel…

« Qui êtes-vous ?!
- C’est nous qui posons les questions, ma belle. Alors tu te contentes de répondre ou j’t’en colle une, compris ? »

Je lui jetai un regard furieux.

« Alors, z’est toi oui ou merde ?
- MERDE. »

Ils se regardèrent tous les deux. Puis reportèrent leurs attentions vers moi.

« Ecoute-moi, ma douce. Nous mentir ne serait pas une très bonne idée, surtout parce que nous pouvons nous débarrasser de ton petit copain à côté, de ton animal de compagnie, et de tout ce qui peut t’être cher. J’entends par là le village en entier. Il serait probablement préférable d’être un peu plus sympathique avec nous. On a pas le droit de te faire du mal, mais je te jure que j’ai la claque qui me démange depuis tout à l’heure. Alors, c’est toi ?
- … Mh.
- Zentille gamine. »

Il sortit une cigarette et la porta à ses lèvres.

« Où se trouve le robot ?
- Quoi ? »

Bee ?

« Le robot. T’as pas compris ? »
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Bordel, mais ils ne l’avaient pas ? Ils avaient dit que… Euh… attendez…. A moins que… N’étaient-ils pas au courant pour le fruit du démon ? Ces mecs m’avaient "clairement" donné le nom de leurs employeurs, je savais d’où ils venaient et ce qu’ils voulaient, je savais aussi qu’ils étaient envoyés pour me ramener, moi et Bee. Après sept ans, Yumen avait mis le temps pour remettre la main sur moi, et probablement ne saurait-il pas ou je suis si les gus ne rentrent jamais.
Ou était Bee dans ce cas ? Je penchai la tête sur le côté, essayant de trouver la robe jaune de mon ami. Il était allongé dans la cuisine, remuant faiblement. Le canard reprenait peu à peu conscience, préalablement assommée par mes adversaires qui n’avaient pas compris que le Canard était le Robot.

« Le robot, alors ? Le gros truc zaune qu’t’as piqué à notre employeur ? L’est où ? »

Silence. Un petit sourire perça mon visage, surtout lorsque je remarquai la silhouette massive du dit robot s’étendre de toute sa hauteur en se redressant derrière les deux compères.

« Peut-être qu’il est con, souffla Jerronimo en se redressant sur le canapé, se tenant le front d’une main.
- Non, personne ne peut être aussi con. »

Le rat fronça le nez sous la colère, il s’avança vers moi en fermant le poing et voulu me donner une droite, mais un truc l’emporta contre le mur d’en face, un objet que l’on nommait chaise et qui avait servi d’OVNI pour l’occasion. Un grand fracas, le siège se détruisit en rencontrant l’homme puis le mur, rendant l’âme à la suite. Le Rat se releva péniblement en gémissant après les échardes. L’autre cadavre se tourna vers l’envoyeur, s’attendant à voir un homme, prêt à attaquer et à se défendre.
Lorsque le robot le surplomba de sa hauteur, frôlant le plafond alors que baissé, il manqua de s’évanouir. Et lorsque Bee ferma son poing et l’écrasa contre la tête de l’agresseur, qui s’enfonça dans le plancher, manquant de passer dans la cave, il perdit connaissance purement et simplement tandis qu’une bosse poussait sur le sommet de son crâne. Le Rat, peu courageux, tenta de s’enfuir en hurlant à plein poumon, mais Bee l’enfonça à son tour dans le plancher, en appuyant fort sur son petit corps dodu.

« Bordel de merde, lâcha Jerronimo. »

Le spectacle avait de quoi effrayer et faire rire. Jerro n’avait jamais vu Bee en action, encore moins aussi violent. Ces deux gars n’étaient que de la vermine des bas quartiers. J’étais vexée qu’il pense pouvoir me ramener seulement avec de la petite fripouille.

« Merci Bee. Ça va ? »

Le robot haussa les épaules et s’accroupi dans la maison. Il n’avait pas l’autorisation d’entrer sous sa forme de robot logiquement, mais l’urgence justifiait la transformation.

« Ne t’inquiète pas. Harry ne dira rien si on répare tout à temps.
- Zortez-moi de là ! »

La petite voix aigüe et apeurée de l’homme-rat attira notre attention. Je me tournai vers Jerro en lui demandant d’aller chercher les marines. Il s’exécuta sans broncher, se levant péniblement avant de quitter la pièce en trottinant.
A moi de rester en tête à tête avec un gus assommé et un autre qui se débattait dans ses liens de bois. S’il espérait sincèrement s’en sortir…

« Ze- Ze… Ze ne dirais rien !
- Oh non ça s’est sûr. Et puis, si je te libère, ça ne serait pas drôle. Alors, vous allez rester coincer ici, tous les deux. Et nous allons attendre que la marine arrive pour vous arrêter et vous foutre en taule. Et pour peu qu’on apprenne que vous êtes sous les verrous, c’est le Yumen qui va pas être content et qui va tout faire pour que vous y restiez définitivement.
- Tu ne peux pas… !
- Si, je peux. Tu t’en es pris à Harry, non ?
- Z’était pour avoir dez informazions !!!
- Et ? C’était une raison pour lui briser les os, sale con ! »

Je lui attrapai l’oreille et la lui tordis pour appuyer mes propos. Il glapit, secoua la tête, tenta même de me mordre.

« Mais j’ai quand même une bonne nouvelle… »

Il se stoppa net puis me regarda avec des yeux pleins d’espoirs.

« Tu ne pourras pas transmettre les informations à Yumen, et qu’importe si tu le peux vraiment, je ne serais plus là lorsqu’il arrivera. Ce qui fait que vous n’avez que deux perspectives de vies : ou aller en prison ou alors vous faire démolir la gueule par votre employeur. Décidément, vous n’avez vraiment pas de bol, tous les deux… »

Son regard se mua en un masque de peur et de haine mélangé. Devant mon air ravi, il ne sût quoi dire, se contentant de gémir et d’articuler une insulte peu flatteuse.

« Je n’ai pas dit que ça serait une bonne nouvelle pour vous. »


Dernière édition par Lilou B. Jacob le Lun 9 Avr 2012 - 14:46, édité 1 fois
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I know you're coming in the night like a thief
But I've had some time, O Lord, to hone my lying technique
I know you think that I'm someone you can trust
But I'm scared, I'll get scared and I swear I'll try to nail you back up

So do you think that we could work out a sign
So I'll know it's you and that it's over so I won't even try.

I know you're coming for the people like me.


« Harry ?
- Lilou !
- Hé, comment tu te sens ?
- Bien mieux, bien mieux. Mais ce plâtre me gratte, c’est affreux ! Je ne sais pas comment tu fais pour supporter ça !
- Haha, bon courage alors ! »

Elle s’avança vers la chaise près du lit, s’y installa et posa sa main sur celle valide de son grand père.

« Le lieutenant Smith m’a dit.
- De quoi ?
- Pour les trous dans le salon. »

Elle sourit, un peu confuse. Pour le coup, elle s’attendait à une autre déclaration, certainement pas à des réprimandes pour des trous dans un salon. Se raclant la gorge, elle tenta de s’expliquer, mais Harry lui coupa la parole :

« Ne t’en fais pas. On réparera ça à mon retour, d’accord ? »

Elle ferma les yeux et hocha la tête.

« Tu les as attrapés, alors, hein ?
- C’est Bee qui a fait ça.
- Je suis désolé de ne pas avoir pu te protéger plus.
- Ce n’est pas de ta faute, tu sais bien. Merci d’avoir fait tout ça. Désolée qu’ils t’aient fait du mal.
- Je n’ai rien dit, sur toi ou sur Bee. Mais ils ont pris mon agenda, avec tous mes papiers et mon adresse. Dès qu’ils ont su par tous les membres du village ou tu étais… Rah, ça m’énerve.
- Je t’ai dit, ce n’est pas de ta faute. »

Il serra sa main, un peu troublé.

« Tu vas partir ? »

Un silence. Elle se pinça les lèvres, gênée, détournant le regard en faisant mine de réfléchir.

« Réponds-moi, Lilou. Ce n’est pas grave si tu pars. Tous les enfants font ça. Mais si tu pars pour nous protéger ou pour le fuir encore…
- Ne t’en fais pas, Harry. J’ai encore quelques mois devant moi avant d’y réfléchir sérieusement.
- Tu as le droit de voler de tes propres ailes. Tu as le droit d’espérer un avenir meilleur que ton passé. Je te demande juste de ne pas t’en aller parce que tu as peur pour nous ou pour toi. Fais-le parce que tu as envie de le faire, pas pour fuir continuellement. Regarde devant, découvre, crée. Fais ce que tu sais faire de mieux, Lilou. »

Sourire. Silence.

« Qu’importe qui tu deviendras, je serais toujours fier de toi. »
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