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Rue de la tenaille

Peu de temps après les évènements qu'on dénommera "L'attaque des Z", Grimmjack vadrouillait encore dans Honnoji. Bien qu'il était en grande partie responsable de la protection de cette cité, celle-ci lui donnait encore du fil à retordre. Car le chasseur de prime avait été mission pour un fait simple mais qui lui causait du tort : trouver la rue de la tenaille et rendre ainsi la pareille au marchand qui l'avait transporté gratuitement ici. Chose qui n'était pas aisée pour un pauvre gars de la campagne perdue dans une ville de plusieurs milliers d'habitants ...


Honnoji, qu'elle cité ravissante. Ses rues pavées et enivrées d'une riche culture, ses quartiers commerçants, ses spécialités locales qu'elles soient culinaires ou artisanales et son peuple ... Très peu à l'écoute d'un pauvre étranger perdu comme moi ... C'était un sentiment de bien être quand je me pavanais sur ces boulevards qui n'étaient pas les miens, bras ballottants, sifflotant gaiment.

Je voulais bien y rester encore un peu plus longtemps dans cette ville mais j'avais une mission à accomplir et non des moindres : retrouver cette FICHUE "Rue de la Tenaille" ! Cette même rue qui m'avait perdu à plusieurs reprises, qui m'avait fait rencontré le jeune lion-forgeron et la renarde et qui m'avait positionné en première ligne lors de l'attaque des ces forbans de ZZZ Pirates ! Et après tout ça, elle m'échappait encore !

Heureusement que j'étais un homme de paroles et que j'avais tenu promesse à ce vieux marin qui m'avait transporté. Sinon, j'aurai abandonné depuis longtemps !

Et cette carte qu'un matelot de la 9ème division m'avait refourguée ... Je n'y comprenais rien. Les lignes étaient trop petites et effacées pour être bien visibles. Ni le nord, ni le sud, ni aucun points cardinaux y étaient inscrits pour pouvoir se repérer. J'avais beau la tournée dans tous les sens, je galérai grave !

- Hummm .. Je devrai arriver à la place Nagasa ... Et suivre la rue Kissaki ...

Je leva les yeux de cette carte pour trouver une pancarte avec les noms indiqués dessus. "Place Yokote", "Rue Menuki". Raaaaaaah ! Encore raté ! Je n'en pouvais plus ! Cela faisait des heures que je tournais en rond ! Alors que j'étais déjà en train de m'affaler sur mon sort, poser contre le rebord d'une fenêtre, je vis une personne qui pouvait peut-être m'aider et qui ne me considérait surement pas comme un "Yokai" - une créature étrange - comme on me l'avait fait auparavant.

- Euh ... Excusez moi Monsieur le Matelot, je recherche la Rue de la Tenaille, savez-vous ou elle se trouve ?

A ce stade la, des indications n'étaient même pas suffisante : j'allais surement me reperdre dans ce dédale de rues ! Non, ça aurait été plus simple s'il m'accompagnait directement ...
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S’il y avait bien une chose pour Garrett qui relevait de l’impossible, c’était bien de parvenir à rester en place sans faire de vagues lors d’une traversée en mer. Son valeureux supérieur, le Commodore Gastrôpwalpwal avait quitté le QG d’East Blue avec ses hommes, en direction de Shimotsuki. Bien évidemment, Garrett, en bon subordonné qu’il était, l’avait accompagné. Ou plutôt, avait été contraint d’embarquer dans le gigantesque vaisseau après un bon coup de pied au cul. Naviguer n’était pas son fort, il fallait bien avouer qu’à bord, il s’ennuyait à mourir. Borné qu’il était, il pensait dur comme fer que la terre ferme était bien plus intéressante que l’océan, un comble pour un homme-poisson. Mais disons qu’il s’y sentait bien plus libre. La mer avait beau être vaste, il ne pouvait l’arpenter que dans un navire de guerre, qui, bien que gigantesque comparativement à la plupart des bateaux, restait tout de même limité, et finalement, il en faisait rapidement le tour. Alors, comme à son habitude, il avait bravé l’ennui par sa stupidité et son hyperactivité et avait ainsi trouvé de quoi s’occuper dans l’arsenal du vaisseau.

À la tombée de la nuit, il s’y était faufilé alors que son accès était formellement interdit. Il s’était amusé à bidouiller toutes sortes d’armes à feu, mais une fausse manipulation avait marqué une énième de ses conneries. Un tir était parti contre son gré, et la balle s’était logée dans un paquet d’explosifs. Heureusement pour sa vie, l’arsenal ne partit pas tout bonnement en fumée, mais prit tout de même feu après une explosion. À coups de torchons et sceaux d’eau il avait tenté d’étouffer les flammes, mais les dégâts ne pouvaient plus être dissimulés. En plus de le sonner, le bruit assourdissant de l’explosion l’avait rendu à moitié sourd. Les remontrances du Commodore – qu’il entendit à moitié – furent vives et sévères, et en plus des assignations aux tâches ménagères qu’il lui ordonna, il l’obligea à faire des rondes toute une journée durant une fois arrivés à Shimotsuki.

Sur le papier, faire des rondes n’était pas une punition, mais pour Garrett et son hyperactivité fringante, c’était bien là la pire des sévices qu’il pouvait subir. Qualifier l’ennui qu’il ressentait de « mortel » n’était pas suffisant, disons qu’il était plutôt infernal, horrifique, cauchemardesque. En plus de cela, Gastrôpwalpwal lui avait explicitement ordonné de se tenir droit comme un piquet, quand bien même son dos faisait des siennes, et surtout d’être respectueux avec tous les habitants de Shimotsuki qu’il croiserait. En clair, de faire ce qui était tout bonnement impossible.

Après seulement quelques heures, ses bras parvenaient tout juste à tenir sa vieille carabine et ses oreilles n’avaient pas cessé un instant de siffler. Ainsi, la première personne qui s’arrêta pour lui demander quelque chose fit malheureusement les frais de son exaspération grandissante et de sa surdité débilitante.

- Q-quoi ?! On est pris en tenaille ?! gueula l’homme-poisson qui n’entendait qu’à moitié ce que l’on racontait. Vite, faut s’mettre à l’abri !

Il attrapa par le bras l’homme-momie qui n’avait rien demandé de tel et l’emporta dans son élan vers une ruelle à proximité. Jeté comme un malpropre dans la rue étriquée, le bonhomme afficha derrière ses bandelettes une mine déroutée et confuse, se demandant ce qu’il avait bien pu dire de si maladroit pour se retrouver un instant d’après dans une telle situation. Garrett, parfait ahuri qu’il était, avait dégainé son fusil et faisait des va-et-vient des deux côtés de la ruelle pour vérifier qu’aucun bandit ne les avait pourchassés. Ce n’était pas un hasard si les mots qu’il avait réinterprétés en bon malentendant l’avaient immédiatement éloigné de l’ennui infernal des rondes. C’était comme si son cerveau avait choisi d’entendre la seule chose qui aurait pu le tirer des affres de l’abattement.

L’homme-momie, après s’être remis de ses étranges émotions, s’était remis d’aplomb et avait cette fois-ci pris soin d’articuler encore plus et de parler de vive voix, comme s’il s’adressait à un vieux monsieur en fin de vie. Après plusieurs vaines répétitions, les mots, pourtant simples, finirent par s’agencer dans l’esprit stérile du requin-citron.

- Aaaaaah ! conclut Garrett les yeux écarquillés en tapant son poing dans sa main, signe de l’éclair d’intelligence qui venait de le traverser. La rue de la Tenaille ! Fallait le dire tout de suite ! L’homme-momie l’avait évidemment dit tout de suite. Eh ben… Qu’est-ce que j’en sais qu’où que c’est moi ? J’ai une gueule de carte ?

Il s’apprêta à faire volte-face, agacé qu’on l’interpelle pour ce genre de futilités, mais les paroles du Commodore Gastrôpwalpwal tonnèrent dans son esprit, semblables à la voix d’un dieu vindicatif. « Être respectueux avec tous les habitants qu’il croiserait », c’était bien là l’ordre qu’il lui avait donné. Ordre qui venait de tomber à l’eau après un simple renseignement demandé par le premier venu.

Sa fierté et son admiration envers le Commodore luttèrent en lui de longues secondes, le faisant trembler de tout son long sous les yeux effarés de l’homme-momie, qui réalisait avec dépit que parmi tous les marins de Shimotsuki il venait de mettre la main sur le plus dégénéré de tous.

- Bon, souffla finalement l’homme-poisson en balançant ses mains à ses hanches. Je vais t’y accompagner, à cette rue de la Tenaille ! Mais, s’écria-t-il brusquement en levant l’index, il y a une condition ! Il faut q’tu m’payes un cocktail après ça, parce que j’ai S-O-I-F ! Compris ?

Après avoir allègrement fait chanter un citoyen, Garrett s’élança hors de la ruelle, sans même attendre de réponse explicite. Et ainsi, l’homme-momie et l’homme-poisson partirent pour la rue de la Tenaille, pour le meilleur et sûrement le pire.
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Coursier improvisé

Grimmjack fut la rencontre d'un charmant - quoi qu'un brin particulier - matelot de la marine qui l'accepta de l'aider dans sa quête.


Et bien quel soldat dévoué était ce numéro la ! Un brin particulier certes, mais dévoué ! C'est ainsi que je fis la rencontre de ce jeune matelot et après qu'il m'ait poussé sur côté en faisant les cent pas arme à la main comme si une escarmouche allait avoir lieu, nous nous mîmes d'accord et faisions la route ensemble.

Les termes du contrat étaient simple : je devais lui payer cocktail et lui m'accompagnait pour ne pas que je me perde. Le marché fut conclus ! Je n'avais pas beaucoup de sous sur moi mais assez pour récompenser de braves marines qui aidaient les pauvres citoyens en détresse !

Je lui donna la carte qu'il examina attentivement. Lui aussi ne semblait pas distinguer le nord du sud sur ce fichu plan mais d'un pas déterminé et sûr de sa destination, il m'emmena à l'endroit escompté ! Je ne pouvais m'empêcher d'observer cet étrange jeune homme. Il avait son uniforme déchiré, une peau jaunâtre tel un poiscaille défraîchi, de longs piques sur le crâne (coupe que j'adorais au passage) mais surtout ... Une chose qui me faisait tilter un instant.

- Nyahahahahaha ! Quel joli fusil vous avez la monsieur le soldat. Vous devez être quelqu'un d'important pour avoir une arme à feu sur Shimotsuki ! Je me sens nettement plus rassuré !

Un sourire satisfait, bien qu'un peu flippant pour le commun des mortels, s'afficha sur mes lèvres. Je me haleta de suivre le gaillard en ballotant les bras sifflotant un air sordide que j'appréciais tant.

Après une petite dizaine de minutes de marche, nous arrivions enfin dans cette fameuse "rue de la tenaille". L'ambiance était ... Particulière ! Il fallait dire qu'un campagnard comme moi n'était pas habitué de voir autant de gens s'amuser dans une si petite rue ! Des salles de jeux, des bars privés, des maisons closes ... Je crois que nous étions tombé dans le centre du divertissement de la ville ! Quel quartier épanoui et bien famé !

Il y avait bien ces gens habillés en kimonos et tous armés de sabre qui nous dévisageait ... Il fallait dire que mon compagnon avait un style assez particulier, cela devait surement être ça ! D'ailleurs, une fois arrêté devant l'adresse indiqué, je m'adressa à l'un d'eux, lui tendant la lettre que le vieux marin m'avait confié.

- Bonjour mes braves gens ! Je viens à la place du vieux marin qui m'a confié cette lettre et ...
- Les gaijin n'ont rien à faire sur notre territoire. Dégagez.

Il y eu un petit moment de blanc. D'autres hommes armés s'étaient approchés, tous nous dévisageant. Certainement une coutume locale pour accueillir les étrangers.

- Il doit y avoir un malentendu messieurs ...

Les hommes devenaient de plus en plus menaçant envers nous. Cela faisait aussi parti de leurs coutumes ?!

- ... C'est que je devais vous transmettre cette lettre quelques jours plus tôt mais j'ai du combattre des pirates après m'être perdu et ... Il y en avait un qui avait un gros serpent et ... J'ai eu un peu de retard et ...
- T'es sourd le yokai ? Je t'ai dis de foutre le camp ! Insistait-il en empoignant le manche de son sabre.
- Attends grand-frère ! Je crois que c'est ce drôle d'homme-momie qui à combattu Aiko Zenki l'autre soir, il pourrait nous être utile ! Et ce vieux marin dont il parle pourrait être Podyaurt, notre contreba... Coursier, notre coursier ! Il devait se présenter il y a quelques jours aussi !
- Oui voila, j'oublie tout le temps son nom ! C'est bien ça, je viens de la part de Podyaurt ! Ce charmant marin qui m'a transporté ici ! Nyahahahaha !

Quoiqu'il en soit, il semblait que le malentendu se réglait gentiment ! J'étais fier de moi ! Moi qui bravait de jours en jours ma timidité pouvait dès maintenant avoir des interactions sociales avec de parfaits inconnus ! Et dans la joie et la bonne humeur bien sur !
Après avoir prit et lu ma lettre, le grand frère et quelques uns des autres hommes présents se concertèrent ensemble.
Malgré la distance qui nous séparait, je pouvais entendre quelques bribes de leur conversation. "Une momie c'est cramé !""Mais non, depuis l'attaque des ZZZ il est considéré comme un héros ici""En plus il est accompagné d'un soldat""Quoi de mieux pour passer incognito !"

Je me retourna vers le matelot de la marine et leva mon pouce en l'air accompagné d'un grand sourire - toujours aussi flippant pour autrui - avant que les hommes revinrent vers nous.

- Bien, c'est ok. Pour rembourser ta dette a Podyaurt, tu vas remplir sa tâche de contreba... De coursier. Prends ce sac et emmène le à Kawaii. Tu le donneras à Aoshi et seulement lui ! Tu as 2 jours. Ah oui ... Et interdiction de regarder dans le sac ... C'est courant chez les coursiers .... C'est comme, euh ... C'est comme le secret professionnel !

Il me jeta ensuite un sac d'une dizaine de kilos avec un plan et les indications à suivre. Expressément, la bande d'hommes armés nous poussa rapidement en dehors de la rue de la tenaille en nous encourageant et en se marrant.
Bien ! Maintenant je me devais de régler ma dette envers ce cher matelot qui avait été témoin de toute la scène et dont la seul action qu'il avait fait était de se curer le fond du nez d'un air vide et absent !

Alors que je le comptais l'emmener dans le bar le plus proche pour lui payer son cocktail, un éclair de génie traversa mon esprit.

- Attendez, dites moi ... Comment vous vous appeler déjà ? ... Bien, monsieur Carotte, ça vous dirait de m'accompagner jusqu'à Kawaii pour effectuer la course ? Car, c'est que le chemin est .... Dangereux ! C'est ça ! Surtout que j'allais me perdre mais que j'avais trop honte de l'avouer. Et je vous paierai non pas UN cocktail, mais DEUX après le service rendu ! Marché conclu ?

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Deux cocktails ? L’offre était alléchante et méritait d’être considérée. Aux yeux de Garrett, deux cocktails représentaient un sacré cadeau, d’autant plus qu’avec cette chaleur accablante, il se desséchait sur place. Cet homme-momie était ô combien généreux, il avait suffi de cette proposition pour que le requin le considère immédiatement comme un ami. Garrett ne connaissait pas bien Shimotsuki mais il comptait sur sa débrouille et son flair pour les mener à bon port.

- Eh bien soit ! Ça me va comme deal !

Les rondes l’ennuyaient à mourir et il avait bien envie de s’amuser un peu. Quoi de mieux que de partir en vadrouille avec un copain et de terminer la journée non pas par un mais deux cocktails ? Garrett s’en réjouissait d’avance et sentait l’excitation lui monter au nez.

Ainsi, l’homme-poisson sourd et l’homme-momie perdu s’en allaient de bon train en direction de la ville de Kawai. Son compagnon de route se prénommait « Cul-de-Jatte », en tout cas c’était ce qu’il avait compris. En plus d’être couvert de bandelettes et d’avoir une drôle d’allure avec ce long chapeau qui trônait sur sa tête, ce Cul-de-Jatte avait également un drôle de nom. Comme quoi, il concordait bien avec Garrett et son extravagance. Sans être pour autant aussi excentrique que loin en termes de caractère, Cul-de-Jatte était original et c’est sans doute cette similarité qui, sans pouvoir l’expliquer, créait chez Garrett un sentiment de complicité. Lui qui parfois se sentait bien seul – même s’il n’avait jamais compris exactement quel était ce sentiment qui l’accablait –, trouver un camarade n’était pas pour lui déplaire.

Cul-de-Jatte emboîtait le pas de l’homme-requin et ce, probablement à tort. Car, à force d’arpenter les rues et villages de Shimotsuki, s’il y eut bien une chose qui ne daigna pointer le bout de son nez, ce fut bien la ville de Kawai. Les deux camarades tout feu tout flamme s’étaient perdus en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. D’autant plus qu’ils commençaient à fatiguer, Garrett en avait marre de marcher, c’était bien là une activité trop coûteuse pour lui, et le soleil n’en finissait pas de le faire souffrir ; Cul-de-Jatte, lui, s’était retrouvé avec les bandelettes trempées de sueur à force d’être balloté à droite à gauche par son compagnon de fortune, alors qu’il tenait dans ses bras un sac d’une dizaine de kilos.

Garrett avait retiré le haut de son uniforme et l’avait enroulé en bandana sur son front – en prenant soin de ne pas abîmer sa géniale coupe de cheveux – pour se protéger des rayons du soleil. Torse nu, un fusil dans le dos et un bandana accroché autour du crâne, voilà qu’il ressemblait bien plus à un voyou qu’à un fier soldat de la Marine.

- Dites-moi monsieur Carotte, c’était comme ça que Cul-de-Jatte appelait son camarade requin, vous êtes sûr que Kawai est aussi loin ?

À cela, Garrett se retourna en affichant un grand sourire carnassier bon à foutre la trouille à un môme et leva l’index en prenant un air professoral qui ne lui seyait guère.

- Fais-moi confiance Cul-de-Jatte, en fait, si on est venus ici, c’est pour demander à cette vieille mamie là, où se trouve la ville qu’on cherche, lança-t-il en pointant du doigt une pauvre dame plus proche de la mort que de la vie.

Ainsi, Garrett s’avançait vers la petite mamie paisiblement assise sur un banc et qui tenait sa canne en observant le ciel, d’un air serein propre aux personnes âgées. Mais, la seule présence de l’homme-poisson à l’énergie débordante, voire dégoulinante, suffit à l’extirper violemment de sa tranquillité.

- Yo ma p’tite dame ! Alors comme ça on s’la coule douce ! J’ai une ‘tite question ! Moi et mon copain Cul-de-Jatte ici présent, jugea-t-il important de préciser en pointant son pouce derrière lui pour désigner son ami, on cherche la ville de Kawai. Tu peux nous dire où que c’est steu’plaît ma p’tite dame ?!

Pour lui, le ton était charmant et avenant, pour la vieille dame comme pour n’importe qui sur cette planète qui aurait assisté à la scène, c’était une agression. Clairement. La mamie resta stupéfaite, la bouche grande ouverte, estomaquée du fait qu’on lui parla de cette manière pour la première fois de sa vie. C’était même à se demander si elle avait compris quoi que ce soit de ce que le démoniaque requin venait de lui demander. Pour s’assurer qu’elle avait bien compris ou qu’elle n’avait tout simplement pas rendu l’âme, Garrett fit claquer ses doigts devant son visage en agrémentant son geste odieux de « Hé oh ! » répétitifs pour tenter de la tirer de son sommeil éveillé.

Mais il n’y eut aucune réponse, seulement des pas, qui se firent entendre d’un peu plus loin. Garrett, à moitié sourd, n’entendit rien et était obnubilé par la mamie qu’il s’apprêtait à violemment secouer pour l’extirper de son mutisme incontrôlé. Seul Cul-de-Jatte entendit les pas se rapprocher et tourna la tête dans leur direction. Il observa ce qui s’approchait quelques secondes durant, avant de se retourner vers son camarade avec un air inquiet.

- Euh, monsieur Carotte… Je crois que…

Il n’eut pas le temps de terminer sa phrase qu’une dizaine de samouraïs armés avaient fait irruption et toisaient les deux camarades avec des regards de tueurs. L’un d’eux, plus costaud que les autres, s’avança d’un pas et agrippa la poignée de son sabre rangé en guise de menace.

- Maudits voyous, qu’est-ce que vous essayez de faire à ma grand-mère ? Vous essayez de la voler ?!

Il fallut une voix forte pour Garrett comprenne finalement que d’autres invités s’étaient joints à la fête. Le requin releva la tête et afficha un sourire benêt, croyant à tort que ces nouveaux arrivants pouvaient lui donner la réponse que la mamie était incapable de formuler.

- Ah ! Vous tombez bien ! Alors en fait, c’que j’demandais à cette p’tite dame, avant qu’elle s’transforme en statue, c’était que…
- Regarde Akio ! s’exclama soudainement un des gaillards en s’adressant à celui qui s’était avancé. Celui-ci porte une arme à feu, ce sont des bandits il n’y a plus de doute ! Tuons-les !
- Hm ? s’interrogea Garrett qui n’entendit que la moitié de ce qui venait de se dire.

Ainsi donc commençait l’aventure de Cul-de-Jatte et monsieur Carotte. Épuisés, perdus, chargés d’une cargaison de dix kilos, voilà désormais qu’une bande de samouraïs voulait leur faire la peau. Probablement qu’il ne leur restait qu’une seule option face à cette sordide situation : la fuite.
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Carotte et Cul-de-Jatte

Grimmjack venait d'être embarqué dans une nouvelle aventure; Heureusement pour lui - qui avait été fraichement désigné comme livreur plus tôt - il n'était pas seul. Car c'était ce charmant soldat Carotte qui l'accompagnait dans cette nouvelle mission.


- Keuf, keuf, toussais-je après un grand effort physique, elles sont vachement bizarres leurs traditions, ne trouvez-vous pas monsieur Carotte ?

Je me relevais après une courte pause à genoux. Mes bandelettes étaient pleines de sueurs et ça dégoulinait de partout. Mon cher et nouvel ami Carotte semblait lui aussi épuisé. Il fallait dire que ces samurais rencontrés précédemment nous avaient drôlement accueillis.

- Entamer un marathon à peine rencontré ... Il n'y a qu'à Shimotsuki qu'on peut voir ça ! Nyahahahahaha ! Venez mon brave, il est temps de vous payer votre premier cocktail !

Toujours de bonne humeur - et un brin crédule - je tapais l'épaule de mon camarade d'une manière amicale. Ce charmant monsieur avait tout l'air d'être assoiffé.
Il n'y avait qu'un petit bémol dans mon plan ... Je crois bien qu'on s'était perdu après cette fameuse course.
Encouragé à l'idée de récupérer son du, Carotte suivit le pas. Et d'une décision commune, les deux hommes prirent une direction totalement aléatoire, se persuadant l'un à l'autre qu'elle les mènerait à leur destination.

[...]

- Dites monsieur Carotte, n'aurions du pas tourner à gauche lors de la précédente intersection ?
- Ne t'en fais pas Cul-de-Jatte, à force de marcher tout droit, on ira bien quelque part !

L'optimisme de ce garçon était revigorante ! Même si cela faisait plusieurs heures que nous marchions, que le soleil se couchait et que cette dite intersection se trouvait à huit kilomètres en contre-bas, la confiance de Carotte me rendait capable de braver tous les cataclysme !

- Regardes Cul-de-Jatte, je te l'avais bien dis ! S'exclama-t-il en pointant une zone éclairée au loin.

Carotte ne le savait pas encore, mais il devenait de plus en plus - à mes yeux - l'incarnation même de la classe quand il s'exprimait avec tant de confiance ! Moi qui était si timide ... Fasciné, je le suivais alors sans un mot, tout aussi curieux de savoir sur quoi allait-on tomber

Il avait bel et bien raison ! Après avoir élagué un buisson d'un coup de faux, nous tombâmes sur une ravissante auberge de montagnes. Ce genre d'auberge - qui par chance - accueillait les visiteurs égarés tels que nous et leur proposait un bon bain chaud !

- Bonjour jeune femme ! La tenancière avait la soixantaine, mais l'optimisme de mon compagnon était contagieuse. Nous voudrions deux "Virgin Cocombrinho" à savourer dans vos magnifiques bains chauds !

Cette journée avait été particulièrement éprouvante, il était normal pour moi de payer un temps de repos à l'ami qui m'avait généreusement accompagné. Après avoir sorti ma maigre bourse et extrait les misérables pièces qui s'y trouvait, l'aubergiste nous conduisit vers les vestiaires.
Les règles pour la baignades étaient simples : pas de vêtements, pas de chaussures, les effets personnels à l'entrée et ne pas courir aux abords du bassin. Monsieur Carotte fit répéter plusieurs fois la vieille fame a cause d'un problème d'audition. Mais après une bonne dizaines de minutes, nous étions changés, le colis devant les bains, et prêt pour la détente !

[...]

- Dis moi Cul-de-Jatte, je peux te poser une question ?

Alors qu'on se prélassait délicatement dans les eaux thermales, cocktail à la main, Carotte semblait s'interroger sur moi.

- La tenancière ne t'as pas dis de te mettre à poil ? Pourquoi t'es pas encore tout nu ? Faisant référence à mon corps complètement embaumé. Pis ça te gène pas pour te baigner ?
- Ah, ça ! Nyahahahahaha ! Disons que ... Je ... Un peu gêné de lui parler de ma maladie, je préférais éviter le sujet. Je suis pudique ! Et puis j'ai transpiré toute la journée dans ces bandages, il fallait bien que je les lave aussi ! Tiens Carotte, regarde toutes les bulles que j'arrive à faire dans l'eau !

Comme un enfant le ferait, je m'étais glissé sous l'eau et lâchais tout un tas de bulles plus grandes les unes que les autres. C'était un de mes jeux préféré et, dans mon enfance, ma mère était souvent impressionnée par ce talent incroyable ! (Même si elle n'était surement pas très objective ...)

Alors que je m'amusais, Carrote put entendre de l'agitation dans les couloirs adjacents aux bains.

- Ils doivent être dans le coin ! C'est la seule auberge à des kilomètres à la ronde !
- Ces salopards ... S'ils croient s'en tirer après avoir agressés ma mamie !

Bloup, bloup, bloup. Les bulles continuaient à profusion. Sauf que, tôt ou tard, j'étais à cour d'air et je remonta la tête pour respirer. C'est à ce moment que mon compagnon me prit à parti et, tout excité, me disait :

- Cul-de-Jatte ! Les samouraïs de tout à l'heure sont revenus. Et tu sais que ce veut la tradition dans ces cas la ?!
- Euuuuuuuuh .... Non ...
- Qu'on joue à cache-cache !

Tout content, j'applaudissais des mains. Carotte m'encourageait à me cacher avant que lui même se planque. Il mit sa tête sous l'eau et ne bougea plus. Peu inspiré, j'observais les environs.... Il n'y avait vraiment rien de bien pour se cacher ! Il ne me restait plus qu'une solution !

La porte des bains s'ouvrit, laissant apparaitre deux des fiers guerriers. Ceux-ci entrèrent et scrutèrent la zone. Un d'eux me dévisagea et se rapprocha de moi. Gloups, m'avait-il démasqué ?! Je me concentra pour ne pas bouger d'un pouce et resta figé sur place, les mains en l'air.

- A part un étrange épouvantail, il n'y a rien ici ...
- C'est bizarre, il y a des affaires semblables à ce qu'ils portaient à l'entrée...
- Prenons les et continuons. Si elles sont bien à eux, ils doivent être dans les parages.

La porte se referma derrière eux. Ouuuuuf ... Ils ne nous avaient pas démasqués. On avait encore gagné cette manche ! Heureusement car à force de rester statique, j'étais à deux doigts de chopper des crampes !
Je me rapprocha alors de mon compagnon de voyage. Ce qui me surpris le plus, lui qui s'était caché sous l'eau brumeuse, c'était l'incroyable durée d'apnée qu'il avait ! Un véritable athlète ce Carotte !
D'un signe de la main, je lui disais de remonter.

- Bien joué monsieur Carotte ! Nous avons encore gagné ! Par contre, je crois qu'ils sont partis avec nos affaires ... Et le colis que nous devions transporter à Kawaii ... C'est encore une de leur tradition ?

Encore une nouvelle coutûme, qui fut plutôt contraignantes, car mon cher Carotte n'avait pour habit qu'une seule serviette autour de la taille ...

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Boite perdue

La culture locale, c'était quelque chose que Grimmjack adorait lors de ses voyages ! C'était fou de voir à tel point les comportements et les coutumes pouvaient être différents d'une île à une autre ! C'était aussi dans leur coutume de nous emprunter nos vêtements ?


- Regardes Cul-de-Jatte ! Des traces de pas ! Vu la profondeur, ils devaient portés des armures ... Tu sais ce que ça veut dire ?! S'exclamait Carotte en se retournant vers moi.
- Et bien ... Que les armures sont lourdes ?
- C'est ça ! Ça veut dire que les samurais qui ont pris nos affaires sont passés par la !

D'après les dires de mon nouveau camarade, pister les samurais après notre petite partie de cache-cache était aussi une grande tradition locale. C'était dingue la richesse de la culture de Shimotsuki ! Cela n'avait rien à voir avec Alba, mon île natale !

Carote qui était tout content de découvrir une piste se mit à la suivre sans tarder. Fallait dire qu'il n'était vêtu que d'une serviette de bain et que la nuit tombait doucement. Il avait donc tout interêt à retrouver son uniforme ... Surtout s'il ne voulait ne pas se faire gronder par son supérieur en rentrant à la base.

Dans mes cas, mes vêtements avaient une valeur sentimentale. C'était le manteau et les accessoires de mon père que je n'avais jamais connu. Puis ce chapeau que je portais si fièrement d'habitude épousait parfaitement la forme de mon crâne bandé. Vous savez la difficulté de trouver un couvre-chef parfaitement à sa taille ?!

- Regardes par la !

Un peu plus loin, on trouvait nos affaires au bord du sentier. Carotte accourut pour se rhabiller tandis que je fouillais dans les environs. J'étais tout de même apaisé d'avoir récupérer mes vêtements, content d'avoir réussis une nouvelle coutume, cependant, un truc me chiffonnait...

- Monsieur Carotte ... Il n'y a aucune trace du colis ici... Disais-je d'un air déçu.
- C'est pas grave mon ami ! Le plus important, c'est qu'on se pelle plus le cul ! Et puis le vieux Pot-de-yahourt qui t'as confié le colis t'en voudras pas, t'as fais du mieux que tu pouvais ! Répondit-il en lâchant une tape amicale sur mon épaule.

Une fois de nouveau vêtu, nous repartîmes donc en direction de la capitale. Cette fois-ci, on faisait bien attention de suivre la route principale, histoire de ne plus se perdre.
Malgré tout l'entrain de mon camarade, je ne pouvais m'empêcher de penser à l'échec de ma mission, ce qui me mettait un coup au moral.

- Tu sais quoi, pour te remonter le moral, tu ne me paieras pas qu'un deuxième cocktail, mais un troisième ! Y'a que dans l'alcool que les vrais hommes noient leur chagrin !

Carotte avait l'air convaincu. Alors s'il l'était, je l'étais aussi.
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