Ne pas Vendre la Peau du Mouton
Feat Tatiana
Fatigue insolente...
Le poids de l'inconnu sur tes épaules, la peur siégeant dans ton crâne, tordant tes poumons, écrasant ton cœur. Tu avais franchit tes frontières, outrepassé les interdits pour fouler l'horizon de ta démarche cassante. Et si tu l'avais fait en exprimant une volonté étouffée depuis plusieurs années maintenant, tu n'avais aucun sens de la planification, aucun objectif concret si ce n'était celui de savourer le plaisir de la découverte.
Mais face à ces étendues d'eaux infinis, à ce ciel arrogant percé uniquement par quelques mouettes, tu étais perdue... Tes maigres économies ne t'avaient servi qu'à quitter Zaun, tu n'avais aucune destination en tête et le passeur un peu véreux sur les bords s'était évertué à t'extirper les quelques ressources qu'il te restait avant de te jeter sur la première île un tant soi peu habitée.
Tu étais ainsi livrée à toi même, sans connaissance, sans talent particulier. Tu étais endurante, forte même, mais clairement, il te manquait de la matière grise pour penser au delà du bout de ton nez. Il n'y avait que l'instinct qui guidait tes pas et celui-ci peinait à fonctionner après avoir pensé une vingtaine d'années à être étouffé. Il était comme une vielle machine qui prenait du temps à démarrer, ne manquant pas de te provoquer quelques maux de crânes au passage.
Tu arpentais donc les rues du village portuaire aux antipodes des villes surchargées de Zaun. Tout y était beaucoup plus calme, bien moins peuplés. L'air n'était pas vicié et était si pur qu'il venait même à brûler tes poumons encrassés par une vie de labeur à respirer les fumées puantes des machines industrielles. Le plus perturbant était la présence rayonnante de ce soleil dans les cieux, venant à éclairer chaque personne, chaque être, chaque brin d'herbe. Là où tu avais travaillé, celui-ci n'avait jamais pu percer la folie humaine, se faisant arrêter aux premières vapeurs noirs qui stagnaient au dessus de vos têtes.
En bref, ce monde, bien que totalement inconnu, était semblable à un doux paradis en comparaison de ton terrain de jeu. Mais un paradis, une brebis égarée pouvait se sentir en danger... Une brebis ? Plutôt un mouton au vue des circonstances.
T'arrêtant alors devant un bâtiment plus grand que les autres, que tu supposais être une auberge,tu tentais de déchiffrer les panneaux. Malheureusement pour toi, l'on t'avait apprit à obéir par voix orale, tu n'eus que très peu de temps pour te cultiver si bien que tu n'avais que des bases partielles de l'écriture ou de la lecture. Pas suffisant pour cerner les quelques détails qui se perdaient entre les lignes... Haussant les épaules, le ventre grondant et les muscles implorant le repos, tu pénétras dans l'auberge sans un sou en poche.
Peut-être aurais-tu pressentir que ce n'était pas une bonne idée que de consommer sans avoir de quoi payer... Que cela ne pouvait que t'attirer des problèmes. Tu n'étais peut-être pas maline mais tu aurais clairement pu le prévoir avec un peu plus de volonté...
Malheureusement pour toi, en plus de rien connaître des coutumes locales, tu vins à te retrouver une heure plus tard dans un bourbier sans nom, alors que quelques hommes certes moins baraqués que toi mais plus nombreux, commençaient à t'entourer, quémandant payement pour les services dont tu avais gracieusement profité au vue de l'assiette léchée jusqu'à la dernière goutte.