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La vache aux yeux bleus

Sur Saint-Uréa, une nuit comme une autre, elle rit avec légèreté, faisant fuir à son tour les petits bruits de la nuit. Son son s'égrèna dans un silence presque parfait.

Avec un temps de retard, une de ses mains se fit difficilement active et vint chercher la joue du jeune homme allongé avec elle. Ses empreintes s’égratignèrent par la suite, faussement langoureuses, contre le début de barbe aimé.
Néanmoins, approximativement lorsque son souffle à elle se recalma, elles furent rejointes par une paume qui ne lui appartenait point, désireuse peut-être que la mignoterie stoppe. Sans demander d’accord, Lydia noua alors lentement ses cinq doigts à ceux étrangers et laissa ceux-ci la guider vers un coeur qui battait bel et bien.

« Raconte-moi. Encore. »

Ordonna-t-elle finalement d’une voix cajoleuse.
La chipie avinée refusait maintenant de davantage se faire mouvoir, quitte à transvaser un peu plus de son poids dans son bras pour l’en empêcher. Son regard saoul, un tiers rieur, un tiers endormi, un tiers rêveur, fixait sinon l’autre qu’elle voyait déjà tous les jours.

L’alcool et la fatigue avaient perclu leur corps, rendant leurs mouvements lents et patauds. Ils avaient aussi anesthésié toutes pensées, outre celles sans grand intérêt qu’ils se partageaient jusque-là, inspirées par les étoiles, les nuages et le ciel vus par le prisme de leur état peu glorieux.
Au début, quand l’effet des bouteilles vidées ne s’était pas encore installé, le duo avait commencé par s’envoyer quelques dires trop sérieux au milieu d’une multitude de moments mutiques. Des regards grincheux ou boudeurs, aussi, puisque leur dernier entraînement ensemble n’avait satisfait aucun des deux pour des raisons différentes. Et puis, la boisson piquée dans les armoires de la demeure familiale avait fini par délier leur langue, rappelant à leur âme déjà en partie cabossée un bout de leurs souvenirs d’enfants depuis longtemps oubliés.

À présent, son jumeau moitié souriant, moitié grognon, terminait de lui conter à sa manière (pleine de ronchonnements et de phrases courtes) un événement d’antan auquel elle n’avait pas participé.
C’était le récit d’une simple rencontre qui datait et qui n’aurait en temps normal rien eu d’amusant ; mais qu’il était facile de s’émerveiller d’un rien distordu en si bonne compagnie alcoolisée, perdus, incapables de bouger comme ils l’étaient, au milieu d’une des pelouses trop bien entretenues du coin. Le seul danger qui les guettait sur ce terrain propret était un hostile sermon de la matriarche. Si elle ne contemplait pas leurs deux corps apaisés sans méchanceté du haut de sa fenêtre, bien entendu. Après tout ses aînés ne faisaient rien de répréhensible.

L’homme finit par faire un faible signe négatif de la tête, le menton tourné vers les astres nocturnes. Sans mirer son interlocutrice, il signala ainsi qu’il en avait marre de causer.

« À toi. »

Elle ne se fit pas trop prier.
Jamâl, ivre, nourri et fourbu par les exercices quotidiens ne l’écouta hélas pas babiller longuement. De peu actif compagnon, il se fit bien vite statue aux paupières détraquées. Son silence habituel se transforma prestement ensuite en une multitude de ronflements, tandis que sa soeur continuait à déblatérer mille petites âneries.

Elle ne se rendit en effet pas tout de suite compte qu’elle l’avait bercé. Ce ne fut qu’en s’interrompant au milieu d’un propos incohérent de plus qu’elle compris enfin qu’elle était seule ; ses petits bruits à lui n’étaient pas des réactions vivaces à ses inepties à elle.
Gagnée alors par la même torpeur qui avait eu raison de lui, un air attendri sur le museau, elle vint poser son front contre son épaule et s’endormit sur le champ.

La tête en l’air oublia de nouveau pour aujourd’hui qu’elle devait annoncer à son frère chéri une nouvelle d’importance. Plus que peu de soirs, et elle partait pour une mission en solitaire.
Elle avait assez la frousse de tout faire foirer, s’inquiétait de délaisser son adelphe, tout en étant possédée par une hâte excessive de s’y essayer. En temps normal du moins. Cette nuit en particulier, Lydia ne se remémora rien de tout ça et dormit simplement formidablement bien.


De trop courts et sereins jours plus tard, ce fut bel et bien sans sa moitié d’âme qu’elle monta à bord du «Vacherin». Le capitaine du vaisseau de transport d’animaux et de bien rares passagers, qui faisait des allers-retours entre Kage Berg et les îles environnantes, ne lui posa strictement aucune question lorsqu’elle paya son billet.
Peut-être avait-il, tout de même et plus que prévu, l’habitude de transporter des touristes désireux de se dépayser, même si le confort de son antre laissait sacrément à désirer.

Quand on s'incruste sans façon chez autrui ou qu’on va le massacrer guillerettement, c’est sinon parce qu’on se sent généralement plus civilisé que lui, donc plus apte que sa personne à régler ses tracas ou ceux qu’il entraîne, c’est bien connu. L’ordre de mission délivré précédemment à la cipher pol esseulée n’amenait pas d’exception à cette règle.
Elle n’avait que deux buts à atteindre pour cette fois, lui avait affirmé son coordinateur qu’elle quittait à peine. Le premier était de trouver pourquoi un pourvoyeur de rumeurs sur place avait soudainement disparu de la circulation au lieu de continuer à s’occuper paisiblement de ses bovins. Le second consistait à régler le problème d’une manière ou d’une autre, soit en ramenant l’innocente ouaille égarée à son bétail avec une gentille explication qui conviendrait à tout le monde, soit en nettoyant proprement l’endroit afin de laisser la possibilité à un autre de venir s’installer sans donner l’air de débarquer de nul part. Ou tout cela à la fois.

C’était simple comme bonjour et le duo de raisons pour laquelle on l'envoyait elle, un membre du cp 9, sur ce terrain si peinard plutôt que de confier la mission à un local n’était pas plus compliqué. Le lien familial, très léger, qui unissait le nouvel absent à un pirate obscur inquiétait tout d’abord certains. Par sécurité, afin de s’assurer que le petit cousin germain du côté de la tante de la mère d’un vilain forban des mers à la prime ridicule (ou quelque chose du genre) n’avait pas décidé que le sang même dilué comptait finalement davantage que les serments faits, il fallait donc discrètement enquêter quitte à torturer gaiment le fermier évaporé ou ses proches si nécessaire.
L’indic, même depuis sa chaumière paumée, avait sinon visiblement un minimum d’importance pour un inconnu du gouvernement. Autant mort que vivant cependant ; à croire que le type avait dû moucharder à propos d’autre chose que des bouses de vaches ou des insectes collants.

Tapotant nerveusement sur le bastingage du bateau qui allait la mener à bon port, Lydia tenta de se repasser en mémoire et par le menu la couverture qu’on l’avait aidée à créer pour l’occasion. Le portrait était limité, à l’instar du reste des informations sur la situation qu’on lui avait gracieusement donné, mais la jeune femme doutait d’avoir besoin de plus.
Ce n’était après tout pas comme si on l’envoyait infiltrer un repaire révolutionnaire. Ou une haute société paranoïaque.

Pour les prochains jours, et dès maintenant, elle s'appelait Aya, 24 ans, et était originaire de Logue Town. Fille de deux boutiquiers morts heureux, ses parents l’avaient laissée avec un peu de sous en poche. Péronnelle toujours en manque de voyages, fouineuse en puissance, actuellement gratte-papier au fin fond d’un placard qui faisait office de bureau (du moins quand elle bossait réellement), la donzelle fabriquée de toute pièce s’estimait de son côté reporter, que disait-elle, star de l’écriture en devenir !
Elle rêvait éveillée de prix et de reconnaissance pour son travail qu’elle percevait déjà fort acharné, sans réussir à reconnaître que son niveau de compétence ne dépassait pas celui de la mégère malhabile du coin. La toute gentillette, là, à ranger dans la catégorie de celles à qui on demande une unique fois d’arroser notre plante carnivore, ou de jeter un coup d’oeil sur nos chiens, lorsque l’on part en vacances. Et qui, à notre retour, nous gavent de petits potins tous plus inutiles les uns que les autres, puisque n’ayant strictement aucun lien avec nos préférences ou ce qu’on a précédemment requis, tout en nous cachant très mal qu’elles ont pris le temps de fureter dans nos appartements, dans le but d’assouvir leur curiosité maladive.

Elle n’avait pour résumer aucune des qualités de l’oeil sur le monde qu’elle espérait être. S’il fallait rajouter un énième petit couac au tableau, son argent disparaissant uniquement dans ses envies de bourlinguer passagères ou dans ses fringales de nourriture de temps en temps, elle ne possédait guère de matériel pour s’entraîner véritablement à le devenir. Outre son grand regard, ses idées de scoops futiles qu’elle ne savait pas à qui vendre exactement et un petit carnet, pour sûr. Néanmoins, et au final grâce à cela, elle avait le profil presque parfait pour jouer à l’espionne amatrice en faveur d’une association de mères-grands de sa connaissance.
En effet, les mamies désiraient comprendre pourquoi les pétunias d’un petit village paumé au milieu de nul part poussaient mieux que les leurs. La nièce du mari de la fille du voisin de l’une d’entre elles leur avait soufflé cette douloureuse vérité, paraissait-il, en revenant au pays après sa lune de miel à Kage Berg. Les anciennes avaient donc réuni quelques gâteaux lors d’une réunion d’urgence, pris leur air le plus désespéré, puis avaient embauché à moindre frais la semi-vagabonde friande d’informations inutiles dans le but de mettre la main sur le pourquoi et le comment. Lui promettant tout de même au passage de lui faire une publicité abondante au sein de leur groupe si elle leur ramenait mieux que « C’est grâce au temps et au purin ! » comme explication logique, ce qui n’arriverait jamais.
Ni Aya, ni les mamies n’existaient donc, en vérité. Mais vérifier leur réalité prendrait du temps, trop, pour beaucoup de monde, et les faux documents qu’on lui avait remis tromperaient assez bien n’importe qui. Normalement.


La fausse journaliste-mais-pas-vraiment ouvrit la bouche, tout en remettant derrière une de ses oreilles une mèche de cheveux doucement battue par la brise. Referma bien vite son clapet après une hésitation, en jetant un coup d’oeil à côté d’elle. Elle sourit ensuite rapidement, penaude. Comme pour s’excuser auprès du vent, seul présent, de l’avoir futilement importuné.
L’interrogation blagueuse qui lui était venue n’obtiendrait aucune réponse compréhensible. Pas même un grognement. Jamâl n’était hélas en effet pas apparu soudainement sur le navire qui puait le foin, les bestiaux mal parqués et la sueur, malgré son désir éphémère de le pouvoir le mirer.

Se détournant vivement de la flotte qui ressemblait à n’importe quelle autre mer, elle se décida à finalement fixer son attention sur les mouvements à bord de la coque de noix qui la transportait.
C’était véritablement sa première fois en solitaire ; elle n’avait pas le droit de se louper. Autant alors se mettre sur l’instant à bosser et à chercher, dans le spectacle qui s’offrait à elle, de quoi inventer quelques ridicules ragots sans intérêt. Tout bien faire, pour ne pas déjà laisser à son jumeau le temps de vraiment lui manquer. - Il occuperait dans le cas contraire bien trop ses pensées.
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Résignation et sombre pensées tournèrent en même temps que le liquide dans son verre. Les évènement tourbillonnaient dans sa mémoire, et il espérait les chasser à coup de whiskey haut de gamme, ou bon marché, peu lui importait le flacon, tant qu'il avait l'ivresse. L'homme de science, marin et guerrier était d'autre de ses prérogative, se questionnait sur sa capacité à encaisser les coups. Sur sa capacité à faire abstraction d'une réalité trop souvent mise de côté. Il avait échoué, lamentablement. Autant en tant qu'homme que scientifique. Il avait cru servir l'intérêt du plus grand nombre en armant les soldats de la mouette, mais là aussi, il avait échoué. Il n'avait réussit que de nourrir un peu plus le monstre créer par les gouvernement laxistes et corrompus, et leur cinq étoiles décadentes, décrépis, déconnectés de la réalité du terrain et de ses aberrations. Il avait assez fermé les yeux sur les dommages collatéraux, et sur les exactions de ses camarades, assez pour se sentir presque coupable lui même, de ses actes qui lui donnaient la nausée. Lui, le sergent de la scientifique de Kage Berg, était l'un des maillons d'une chaîne qui frappait le monde de son égoïsme et de toute sa malveillance parfois. Il ne pouvait plus cautionner les actes qu'il avait lui même commis parfois, même qu'il n'est tué que des hommes valides, et conscient du risque qu'ils accouraient, avait-il privé de père ou de fils, un innocent qui n'avait rien demandé.

Il renifla en se dirigeant vers les toilettes de la taverne, faisant descendre le restant d'opiacé en poudre présent dans sa narine droite, et le faisant tousser et cracher un molard bleuté dans l'évier des toilettes enfin atteinte. Une montée le prit en plein les water, et lui donna un regain de pêche, et un plaisir instantané qui atténuait la douleur de son âme torturée.

Il avait été jeté comme une chaussette sur cette petite île, un mouroir plus qu'une position dans la carrière d'un scientifique, devant aider à l'étude des effets de différentes vaches sur leur environnement. Le méthane était un gaz que l'on utilisait pour certaines missions du Cipher Pol, il fallait bien que quelqu'un s'occupe de le récolter, et de l'embouteiller, sinon comment arriverait-il jusqu'aux poches des espions ? Par magie peut être ? Sans doute ce que ne se demandait pas les agents de terrains, ne pensant pas au scientifique ou l'ingénieur dans son cas, responsable de courir après le derrière des vaches et leur excrément, pour le processus dont on vous laisser a user de votre imagination afin de le situer sur l'échelle des strass et des paillettes.

Les calculs étaient pas bon, Nox. Tu devais pourtant sortir ton épingle du jeu, et monter les échelons. Mais pour autant, est-ce que cette défaite t'imputait vraiment ? Tout aurait du marcher, tu le savais. Pour autant, le scientifique n'était pas la par hasard. Et quelque chose comme le destin ne lui semblait pas responsable. On avait voulu torpiller sa carrière, il en était sûr. Sa pensée utopiste, ses idées justes, étaient peut être ce qui dérangeait le plus les autres ? Sa paranoïa ne s'arrêtait qu'ou commençait la méfiance envers ses camarades, pour en avoir vu commettre des actes impardonnables.

Il ne s'était pas rebeller pour autant. Il avait fermer sa bouche, et avancer sur l'échiquier. Il était peut être l'heure de changer la donne, et de renverser le jeu lui même, en sortant des cadres prévus par la loi. Tout ça pour une vulgaire idée, une simple petite idée. Et pourtant, les idées ne sont elle pas le terreau des rêves les plus grands? Pour autant, des hommes mourraient pour elles, tuaient pour elles, se combattaient pour elles. Alors il devait avoir la force des ses convictions, il le savait.

Alors il devait changer de bord, et virer de cap, s'unissant à d'autres idéologies, à d'autres libertés, à d'autres individus comme lui, qui ne laissaient jamais passer une injustice.

Il entra dans les toilettes, et regarda la capsule emplit d'une poudre bleutée, qui laissait présager de la toxicité du produit. Son idée, n'acceptait pas  d'erreur, surtout pas celle de se droguer et de ne plus avoir le cerveau clair. La vue brouillée, les sens émoussés, tout ça c'était finis, aujourd'hui. Aujourd'hui il devenait un autre homme, il se le promit. Il jeta sans l'ombre d'un doute ni d'un regret, le contenu de la capsule dans l'eau. Il tira la chasse et sortis en repoussant ses lunettes à monture d'argent sur son nez, cachant son regard océan et déterminé. Plus une vague à l'horizon, c'était le morale au beau fixe, qu'il termina néanmoins la liqueur sur le bar, laissé là avant sa prise de conscience.

Il se trouvait à côté de sa place une petite dame, à l'aspect singulier, qui semblait avide d'en découvrir sur l'endroit, posant inlassablement milles et unes questions à l'aubergiste, gêné, qui se grattait l'arrière du crâne en signe de son désarroi.

- Et bien madame ? Arrêtez d'embêter le pauvre Giovanni, il ne sait pas très bien parler la langue. Qu'est-ce que vous voulez ? Je suis Nox de Beaufroi, sergent de la scientifique posté ici, j'peux vous aider ? Toujours flegmatique, son ton de voix posé, et ses faux air de soprano, le rendait doux comme un agneau.

Attention à l'eau qui dort, néanmoins.
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Outre quelques ronchonnements produits par un ou deux clients lorsqu’Armin, son guide chargé de leurs paquetages, avait pris son temps pour clore le seuil derrière eux, Lydia n’avait pour l’instant rien à redire sur l’auberge. Dans la grande salle, aucun meuble ne menaçait visiblement de s’effondrer, les araignées ne côtoyaient point franchement les humains en son sein et les gens n’avaient guère l’air de spécifiquement chercher de poux aux étrangers.
Comme décrit par le garçon qu’elle avait côtoyé durant leur périple du port jusqu’ici, le daron nommé Giovanni savait en plus l’ordonnance. À peine s’était-elle approchée du comptoir en bois ancien qu’au lieu de mots inutiles, le tavernier lui avait en effet servi une bière.

Par très mauvaise habitude, la cipher pol avait prestement fait le geste universel pour en obtenir une seconde avant de le regretter. Personne n’était là pour réellement l’accompagner cette fois. Son compagnon de route, peut-être trop jeune pour boire, était monté dans les parties de nuit poser leurs bagages. Il n’était plus de service à partir de maintenant puisqu’il avait accompli ce pour quoi il avait été payé sur les quais : la mener dans ce trou complètement perdu sans la laisser se perdre. Peut-être ne descendrait-il donc jamais.
Le temps de jeter un petit regard aux alentours afin de mieux mirer les rares clients qui remplissaient d'éparses tables - des habitués sans nul doute, à la vue de leur comportement -, et une auge au fumet délicieux était presque miraculeusement apparue elle aussi devant elle. En plus de cette stupide deuxième chope requise, bien entendu.

Autant finir par l’offrir à quelqu’un en espérant lancer une discussion. Si je ne la bois pas. Après tout, elle avait finalement rapidement trempé ses lèvres dans la mousse de la première et s’était découvert une certaine soif ; le long trajet passé avait été peu agréable. Cependant, l’idée de paraître trop avide de boissons ne l’avait que peu tentée. Son personnage n’était pas censé l’être. Était-elle capable de tenir au moins un minimum l’alcool, d’ailleurs ? Ce serait regrettable que non, non ?
La jeune femme avait relevé son museau, porté son attention entière sur le tavernier qui ne bougeait guère, occupé comme il l’était à des affaires d’aubergiste tel que nettoyer un de ses plans de travail. Vu qu’il faudra sans doute rester un minimum de nuits...

« Auriez-vous, s’il vous plaît, du temps pour un renseignement ou deux qui ne coûtent rien ? »

Avait-elle fini par demander en poussant de peu d’ongles, mais davantage de regrets, son verre en trop vers le barman interpellé de cette manière.
Ainsi donc avait commencé l’interrogatoire en règle du pauvre Giovanni qui n’espérait qu’une seule et unique chose : bosser en paix.

C’était sa moitié, normalement, qui se chargeait totalement du côté social de leur établissement. Les réguliers le savaient et les rares voyageurs étaient habituellement directement pris en charge par sa charmante personne dès la porte passée. Seulement, elle était occupée autre part à ce moment précis. Peut-être dans des lits à faire.
Aussi, lorsque les “une ou deux” questions de sa nouvelle cliente se transformèrent soudainement en une déferlante d’interrogations gazouillantes sur le coin, les fleurs, et les ma-gni-fi-ques points d’intérêt, le brave homme se retrouva dépourvu. En conséquence, il se montra d’autant plus soulagé quand Nox de Beaufroi, marin en poste sur l’île réapparu après bien trop de temps passé aux latrines, l’empêcha de perdre totalement pied en proposant de prendre sa place.

Il profita de l’occasion pour reculer d’un pas, heureux de ne plus avoir à grogner de menus propos sans intérêt et pas franchement compréhensibles par autrui dans le but d’essayer de se faire poli. L’ours qu’il était se dénicha dans le même temps une autre occupation utile, qui lui permettrait de faire mine qu’il était trop concentré pour devoir de nouveau répondre à la curiosité de la pipelette si nécessaire.
Ce n’était dans sa tête pas une fuite, non. Juste un repli stratégique nécessaire ; faire fuir une consommatrice à cause de son manque de bavardage n’était pas dans son intérêt. Il comptait donc sur Nox et sa matrone - avec de la chance bientôt revenue elle aussi - pour gérer l’inconnue comme il le fallait.

Pendant ce temps, Lydia appréciait l’interruption. Le jeune homme qui s’était rapproché du bar, récupérant une boisson qui lui appartenait à lui à une place vide proche de la sienne, paraissait fort… Serviable et agréable avec son air doux, son timbre calme et ses petites lunettes dont les branches se perdaient dans sa chevelure maltraitée.
L’offre qu’il avait exprimé fut acceptée avec un plaisir non feint par la donzelle en visite qui hocha légèrement la caboche ; l’ individu lui semblait déjà sans doute bien moins difficile à traduire que les ronchonnements du tavernier dépassé. Et s’il s’avérait qu’il devait devenir à son tour tôt ou tard aussi inintelligible, au pire perdrait-elle simplement de menus instants en profitant d’une jolie compagnie.

De plus, s’il faisait bel et bien partie de la marine - Kage Berg n’avait pas de comité scientifique si elle se souvenait bien du résumé qu’on lui avait remis, si ? - elle gagnerait tout de même automatiquement quelque chose, outre une vue non désagréable et son nom qu’elle possédait maintenant ; des informations sur un potentiel contact. C’était toujours cela de pris dans le cadre de sa mission.
Un sourire ravi étira ses lippes. Un éclat de rire naquit aussi courtement dans son regard, à l’idée qu’elle risquait de le désarçonner par l’une de ses interrogations :

« Quelle joie de croiser un vaillant soldat ici. » S’extasia-t-elle avant de babiller :
« On me nomme Aya. Comme je le demandais à monsieur… Giovanni, vous y connaissez-vous en fleurs et en arbres, sergent de Beaufroi ? Sauriez-vous où je puis observer de splendides spécimens dans le coin ? »

Qu’il répondit par un « Oui, pourquoi ? En cherchez-vous une sorte en particulier ? » surprit assez franchement la fausse mauvaise gratte-papier. Si bien qu’elle en perdit le fil de ses mots une seconde ou deux, pile ce qu’il fallait pour permettre à son interlocuteur de causer davantage.
De son côté, elle tenta prestement de camoufler son étonnement malvenu en reprenant une gorgée d’alcool. Peut-être aurait-elle dû se douter qu’elle risquait de faire fausse route puisqu’il travaillait ici. À la scientifique qui plus était. Était-il même né dans ce patelin au fait, pour y avoir été affecté ? Ce serait une sacrée aubaine…

« N’avez-vous pas de nom madame ?
- Bien sûr que si, mais à quoi vous servirait-il ? »
La pipelette haussa les épaules avec légèreté après avoir reposé sa boisson, souriante.
« Je préfère vraiment que l’on m’appelle par mon prénom. » Il m’est plus facile d’y réagir.
« Vous sentiriez-vous de votre côté insulté si je vous appelais sergent ? Une autre appellation a peut-être sinon votre préférence ?
- Cela ira, mais vous n’avez pas répondu à mes premières questions. »
Un faux soupir, clairement rieur, naquit sur ses lèvres à elle.
« Je suis en vacances. Non pour vraiment participer à une foire, mais parce que la nature m’intrigue bien davantage.
- Combien de temps comptez-vous rester ?
- Quelques jours, une semaine peut-être ? Un petit peu plus sans doute si tout m’enchante !
- Et que désirez-vous observer en particulier ?
- Vos fleurs et leurs couleurs ravissantes ! » Répondit-elle cette fois du tac-au-tac.
« Mais j’aimerais aussi goûter aux fruits de vos arbres s’ils en ont. Et vous-même, vivez-vous ici depuis longtemps ? Que pouvez-vous me dire sur ce qui nous entoure ? Est-il aussi doux de vivre en ces lieux qu’il y paraît ? Où me conseilleriez-vous donc de flâner ? »

Il se fit patient, le sergent de la scientifique Nox de Beaufroi. Trop diraient certains. La curiosité de la voyageuse ne paraissait pas vivement désirer se tarir, et portait finalement sur tout et mille petits riens. Cela allait de lui, aux vaches qu’elle paraissait craindre en partie - puisqu’elle demanda si les ruminants étaient un danger pour les promeneurs -, aux choses à éviter de faire lors des promenades en solitaire, en passant par les têtes à n’offusquer sous aucun prétexte d’après lui pour une étrangère qui ne voulait pas de tracas, tout en n’oubliant point les divers coloris de roses et de pétunias qu’elle pourrait espérer croiser, la mode sur place pour les coquettes, ou encore par exemple les cours d’eaux dans lesquels faire gaiment trempette.
Sur l’avant-avant-avant-dernier point notamment, il comprit assez aisément qu’elle s’était déjà légèrement renseignée ailleurs, quand elle l’aida à corriger un nom en riant doucement. Sans nul doute avait-elle appris quelques trucs auprès du guide trouvé au port dont elle vantait les mérites et se désolait qu’il devait déjà repartir bosser ailleurs chaque fois qu’ils revenaient sur le sujet. Elle le lui confirma sans sourciller à un moment ou un autre.

« Parlez-vous toujours autant ? » Finit-il par demander, après qu’elle eut décidé, bien du temps plus tard, qu’elle souhaitait lui payer une assiette aussi. Ce afin de le remercier pour tous les renseignements qu’il lui avait donné, ceux à venir, et pour son travail au service de la populace. Qu’elle n’aimait pas manger seule avait été sa seconde excuse insistante, quand il avait tout d’abord osé refuser.
« Sans doute pas. Il faudra que vous le vérifiez par vous-même. » Fit-elle mine de glousser encore. C’est bien trop éreintant, même pour moi. Il y avait de grandes chances pour que Jamâl chercha à l’assommer sans relâche, si elle tentait de s’y essayer trop longuement en temps normal. Si elle ne se donnait pas une migraine carabinée toute seule bien avant.

Arrêtant sa cuillère vide en l’air, la donzelle parut réfléchir une seconde ou deux. Désigna rapidement Nox avec son instrument, avant de le plonger dans sa pitance et de l’y laisser temporairement en paix.
« Que faire si je me perds dans l’immensité d’un champ ? Armin m’a bien dit que les mules à louer ici retrouvaient toujours leur chemin… mais et si je perds la mule ?
- Vous ne vous perdrez pas.
- Ne dites pas cela. Je l’ai déjà fait dans Logue Town. »
Avoua-t-elle avec une grimace. Son lieu de résidence depuis toujours, soit disant, comme il avait pu l’apprendre. L’endroit où s’était déroulée une toute autre mission, en vérité. Mais quelle importance ?
« Cherchez une maison, un bâtiment. Ses occupants vous redirigeront ensuite.
- Il n’y a pas de forbans dans la campagne environnante, n’est-ce pas ? Pas de vilains pirates ?
- Vous pouvez aller en paix.
- Croyez-vous sinon que votre dur labeur vous laissera une journée ou deux de répit prochainement ? »
Le changement de sujet surprit peut-être légèrement Nox qui sentit les problèmes arriver.

« Pourquoi ?
- Je serais tel-le-ment ravie et rassurée d’avoir votre compagnie un matin au moins.
- Mon rôle n’est pas d’escorter des civiles loin d’être en danger, madame. » Se raidit-il un peu.
« Vous pourrez vous débrouiller seule, je n’en doute pas.
- Quel dommage, sergent de Beaufroi. » Lui sourit encore Lydia, en faisant enfin mine de commencer à reprendre une bouchée.
« Vous auriez au moins pu vous rassurer quant au fait que je ne casserai pas d’autres oreilles que les vôtres à ce moment précis, en plus de revoir accompagné tous les jolis coins dont vous m’avez si galamment entretenue… »

Ops. La phrase lui avait échappé à moitié. La fatigue était potentiellement en partie responsable de ce petit oubli de sa part. Elle accompagna ses dires de battements de cils un temps en retard, afin d’essayer de les adoucir si nécessaire. Se sermonna intérieurement, songeant que ce n’était pas parce qu’elle avait peut-être épuisé la patience et un gros morceau des renseignements que l’homme avait à lui offrir, qu’elle se devait le dresser de trop contre elle en lui dévoilant un bout de ses pensées. Il n’était pas son frère.
Mais même s’il ne ressemblait guère à son jumeau, la présence à ses côtés du plutôt beau marin, puisqu’il en était bien un, pourrait en vérité réellement lui être fort utile à certains moments. Que ce soit pour découvrir plus efficacement les environs, ou en cas de tracas avec les habitants à quatre pattes du coin, notamment. En plus de lui tenir compagnie : il savait parler et échanger, la soirée l’avait prouvé et c’était agréable. Mieux valait donc ne pas énormément l’agacer si ce n’était pas déjà trop tard pour cela.

La patronne des lieux n'étant toujours pas là, il allait en tout cas être l’heure pour elle d’aller chercher où était sa chambre si personne ne la lui indiquait. Si possible avant de prononcer d’autres inepties. Enfin… Une fois leur tardif dîner terminé. Oh, et la seconde chope, de même, puisque le dénommé Nox avait un autre liquide à sa disposition et que l’aubergiste n’avait pas l’air de vouloir de la bière. Gâcher les bonnes choses n’était pas dans ses habitudes.
Et puis, finalement, deux n’était pas un si grand chiffre que cela, même pour des boissons alcoolisées. Si ?
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