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Les artisans de la paix

Les artisans de la paix 110

Bang.

Eh bah putain, manquait plus que ça. Certains se jettent à terre, d’autres restent bien assis à leur place, continuent de bouffer, ou de jouer à leur partie de cartes déjà bien entamer, sans se soucier le moins de monde de la balle qui vient de faucher le type juste à côté de moi. En plein dans la gorge, il se la tient en se tortillant et crache du sang à plus savoir quoi en foutre. Je le regarde une seconde, planqué contre un mur, je sais très bien que si je m’approche du pauvre, je me fais buter à mon tour. Ça vaut pas le coup, tu penses pas? Derrière moi, un autre type vient se greffer au mur, sous les fenêtres qui viennent d’être prises d’assaut par les tirs. Du coin de l’œil, j’aperçois l’aubergiste, toujours debout un torchon à la main, qui soupire en voyant une de ses bouteilles se faire exploser et répondre son nectar sur le sol.

« Venez, » qu’il me lance.

J’hoche la tête, ce type là est quasiment un local, il sait ce qu’il fait. Clayton. Y’a pas cinq minutes, je jouais aux cartes avec lui. Je crois même que j’étais entrain de gagner, fait chier. Il m’attire un peu plus loin, on longe le mur, ça tire, tellement que les clients qui s’en foutaient commencent à avoir les chocottes. Je crois bien qu’ils ont l’habitude qu’on cible une seule personne à la fois, qu’aurait fait une connerie. La, ça tire à l’aveugle. Dehors, une voix bien rauque résonne.

« Alors Melvin, paraît qu’on héberge des chiens du gouvernement dans son taudis? »

L’aubergiste peste et crache au sol. Tu vas quand même pas me dire que je suis déjà grillé? A côté de moi, Clayton marmonne dans sa barbe, et continue de m’entraîner vers l’arrière-boutique. On a nos flingues sortis, mais aucun de nous ne tire. Mon petit doigt me dit qu’à la moindre riposte, c’est tout le bâtiment qui part en fumée. On arrive dans un local qui pue l’alcool et la soupe à plein nez, un mélange que je recommande pas trop, ça shlingue. Clayton siffle, ça fait un bruit strident, aigu, couvert par les coups de feu qui ont repris derrière nous. Une planche de bois s’envole à côté de moi. J’entends des bruits de sabots, devant nous. Mon pote pète la vitre d’une fenêtre d’un coup de crosse, plonge au travers. Je le suis, je m’érafle, pas grave. Derrière nous, un des types nous remarque, ça gueule, ça tire vers nous. Sans perdre une seconde, on grimpe sur les montures que mon gars sûr vient d’appeler, des braves bêtes, je sais pas comment elles font pour pas se barrer avec tout ce boucan. Je sens les balles siffler dans mon dos, j’ai du sable qui s’infiltre dans mes yeux, mon cache-poussière manque de foutre le camp. Je fourre une main dans ma poche, je vérifie que j’ai bien tout. La photo, froissée, est toujours là?. Puis je tire à l’aveuglette à l’arrière, sans grand espoir de faire mouche, et on s’enfonce dans le désert, éclairé seulement par la Lune qui pointe déjà le bout de son nez, et moi, je me demande bien ce qui va me buter en premier : le froid, la soif, ou le plomb.
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Les artisans de la paix 210

Marie-joie. Un petit moment auparavant.

Je suis exténué. Je t’ai épargné tout ça, c’était vachement chiant. J’avais oublié à quel point ça me les briser, les cours, les entraînements. On se croirait dans l’élite. Pas que j’en ai fait partie, hein, mais à force de suivre à la trace des officiers véreux, on se rend un peu compte de leur train-train quotidien. Heureusement que ça coïncide avec ma permission, je me vois mal pointer le bout de mon nez au bureau après ça.

Je te passe les détails, les entraînements au Rokushiki, c’est barbant, c’est martial, les instructeurs sont des gros cons shootés au peu de responsabilités et de pouvoirs qu’ils ont sur leurs élèves, mais c’est fini, et maintenant, je peux enfin me vanter d’avoir un petit arsenal de techniques dans mon répertoire. Il était temps, d’ailleurs, j’avais pas l’air con à côté de mes collègues. Aux Cipher Pols, c’est has-been de marcher, tu comprends? Maintenant, on utilise le soru, c’est plus classe.

Bref. Tout ça pour dire que c’est derrière moi, et que je m’en vais profiter d’un bon repos, bien long, j’ai accumulé les perms depuis quelques temps. Depuis que je suis inspiré, en fait. Faut que j’écrive. Autre chose que des rapports, tu comprends? Il se passe tellement rien, en mission, que j’ai rien à y mettre. L’autre jour, je me suis renseigné sur la météo précise de chaque jours passé à filer un lieutenant de la marine, pour tout bien consigner dans le rapport final. On s’amuse comme on peut, te moque pas. Là, au moins, non seulement je vais pouvoir me reposer, mais en plus, je vais peut-être même avancer dans mon bouquin. Ouais, ça va être cool. Rien ne pourra gâcher ça.



A part la sale gueule du type qu’attends devant la porte de ma piaule, visiblement. Je le reconnais. Enfin, je reconnais son genre. Son petit costume, son petit attirail. Son chapeau. Pas comme le mien. Je renifle un bon coup devant lui, avant de lui dire bonjour.

« Bizarre, ça sent comme une odeur de journaliste. Un genre d’odeur de tabac froid bien dégueu, tu sens rien, toi?
- Bonjour, monsieur Lewis. »

Il lève la main pour serrer la mienne. Je l’ignore, et j’enfonce la clef dans la serrure de ma porte. Je veux juste me poser moi, et en plus, je crois savoir qui l’envoie. Et j’aime pas ça, ça me met déjà en rogne.

« C’est votre père qui m’envoie. »

Waow, je tombe des nues, alors ça, si je m’y attendais ! Je zieute le gars vite fait.

« C’est super, que je réponds, tu lui passeras le bonjour. »

J’ouvre, et je referme la porte derrière moi du pied, mais un truc coince. Sa main, en fait.

« Il a besoin de vous. »

Je souffle du nez. Ce culot. Il a même pas le cran de venir me voir en personne, faut qu’il envoie un de ses larbins du journal.

« C’est une question de vie ou de mort, qu’il continue.
- C’est super. Dit lui bonne chance de ma part.
- Il vous demande de venir le voir, à son bureau, au plus tôt.
- Je suis très occupé en ce moment.
- Vous êtes sûr?
- ‘sûr.
- Il insistera.
- Qu’il vienne.
- Il ne quitte plus son bureau.
- Tu vas pas me lâcher, hein?
- Non.
- Eh bien, amuse toi bien dans ton couloir mon pote. »

Je claque la porte, il retire sa main au dernier moment. Me voilà tranquille. Mon chez moi, c’est pas grand-chose, mais c’est déjà ça. J’ai un fauteuil confortable, un lit confortable, une bouteille de whisky pas trop dégueulasse, et une machine à écrire. Je t’en ai déjà parlé, une antiquité, le machin. Mais ça marche. Et l’avantage, c’est qu’elle ressemble pas à celles qu’on utilise pour taper nos rapports. Je me sers un verre, puis je vais pour m’installer. Je jette un œil par le petit trou de ma porte avant, pour me rendre compte que l’autre con est plus là. Parfait.

Je fais craquer mes doigts. Il me faut une idée. Un titre. Allez Thomas, réfléchis. « Une question de vie ou de mort ». Pourquoi pas. Ça pourrait être l’histoire d’un journaliste, qui… Et merde. Déjà qu’il parasite ma vie, voilà que le père parasite mon imagination maintenant. Fait chier.


*


Les bureaux d’un journal, à Marie-Joie, c’est toujours quelque chose. Ça court, ça discute, ça répond à une multitude d’appel, on s’y perd, on étouffe presque. Ça tourne toujours à fond, parce que faut être le premier sur le coup. Crime, événement, rumeurs, tout y passe. Les bureaux du Cipher Pol, mais en pire. Je me demande encore ce que je fais là. Je m’allume une clope, en plus ça me permet de fondre dans le décor. Si t’es pas fumeur, t’es pas un vrai journaliste, visiblement. L’endroit baigne dans une sorte de fumée permanente, style aquarium. J’arrive quand même à me repérer vite fait, avec les vagues souvenirs que j’ai de l’endroit. Le bureau de mon père, c’est vers le fond. C’est un des rares à avoir quatre murs autour de lui, plutôt que de bosser dans l’open-space. Le veinard. Ça paye, d’être un vendu. Je trouve la porte où y’a son nom d’inscrit dessus, et je la pousse sans même toquer.

« Salut Isaac », que je fais.

J’interromps une conversation avec une jolie employée, je crois, tant pis. Je prend place devant son bureau en bois massif, sur un petit fauteuil encore plus confortable que le mien, chez moi. Mon père fait signe à la fille de se barrer.

« Tu es venu. »

Il se gratte sa barbe grisâtre. Il fait peine à voir. Il a maigri, il a des cernes sous les yeux, il se coiffe même plus.

« T’as une sale gueule, que je lui dis.
- Pourquoi?
- Pourquoi t’as une sale gueule? J’en sais rien, moi.
- Pourquoi tu es venu?
- Tu me l’as demandé.
- Depuis quand tu fais ce que ton père te dit?
- Je m’ennuie. Ça peut pas être pire que de traîner chez moi à rien faire.
- Hmpf. J’ai quand même peine à croire que tu sois venu jusqu’ici…
- Moi aussi. Tu ferais mieux d’accoucher avant que je change d’avis.
- C’est Grace.
- Quoi, Grace?
- Ta sœur est dans de beau draps, voilà quoi. »

Avec ça, il me file une photographie abîmée, tout en sepia. J’ai pas vu ma sœur depuis un moment, mais j’arrive quand même à la reconnaître, au milieu de plusieurs types dont la tronche me revient pas.

« Ça a été pris où? Que je demande.
- Hat Island. North. C’est un des employés du Journal Mondial qui me l’a envoyé. Un ami.
- Et?
- Et ces types, sur la photographie, ce ne sont pas des tendres, Thomas.
- Et? Grace est grande.
- Certes.
- Tu t’en branles, en fait. Putain, t’as pas changé. C’est juste que la fille d’Isaac Lewis, qui traîne avec ces bandits à la con, ça la fout mal pour la réput’.
- A mon âge, on ne change pas.
- Bon ! Que je fais en me levant. Je me casse, tu me donnes un peu la gerbe et je m’en voudrais de dégueulasser un si beau tapis.
- Comme tu veux. Mais garde la photographie. »
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Les artisans de la paix 310

Bon, je suis pas encore mort. C’est déjà ça, tu trouves pas? On a trouvé refuge dans le creux d’une falaise, où on a pu faire un petit feu, à l’abri. La fumée devrait pas trop être voyante, là-dedans, mais aux premières lueurs, on fout le camp. Clayton nettoie son six-coups, dans un calme absolument. Moi, je me réchauffe près des flammes, et ça fait bien cinq minutes que j’ai les yeux rivés sur ce cliché de malheur. Quel con je suis. Il m’a pas fallu longtemps pour que ma curiosité grandisse et que je me mette à fouiller un peu, à creuser sur les gars qu’on voit dessus. De la sacrée racaille, tu peux me croire. Cinq millions de prime pour l’un, quinze pour l’autre, et le troisième type qu’est à côté de ma sœur, inconnu au bataillon, mais y’a peu de chance pour que ça soit un ange. Qu’est-ce qu’elle peut bien foutre avec ces types, franchement? Et voilà que je me retrouve à crapahuter sur cette île de mort, comme le grand frère que j’ai jamais été. Heureusement que j’ai mon pote, là, un guide sacrément utile et débrouillard. Un frère chasseur de prime. Je t’ai pas dit, mais c’est ce que je suis maintenant. En tout cas, depuis que j’ai débarqué. Officiellement, je suis là pour chopper la tête de Clint Rupert, le premier type de la photo, une gueule cassée, avec un nez écrasé de chien battu, et une jolie petite prime sur le front. Clayton, il est là pour la même chose. Un chasseur de prime aguerri, qui a choisi Hat Island comme terrain de chasse. Faut dire que c’est l’île parfaite, surtout depuis que notre bon gouvernement a choisi de mettre la main mise dessus. Ça fait bien deux ans, deux ans que ça traîne et que ça résiste, que ça se bat à tout les coins de rues, et ce genre de conflit, ça génère des opportunités, en plus de générer des cadavres. On est censé se partager la prime, si on crève pas avant. Je lui dirai bien que l’argent, je m’en branle, mais faut que je garde ma couverture.

On s’est rencontré à peine débarqué, dans une taverne du coin. On a sympathisé. Entends par là qu’il parle pas beaucoup, et que quand il l’ouvre, c’est pas pour dire de la merde. Efficace, je l’ai tout de suite bien aimé. On s’est enfoncé dans l’île, au bout de deux jours, pour se retrouver dans la petite ville paumée au milieu du désert qu’on vient de fuir. J’ai plus son nom, c’est pas important. Mais notre homme était censé être passé par là, il y a peu. C’était notre seule piste. Pas très fraîche, évidemment. On a quand même eu le temps d’avoir vent de son passage, et de savoir qu’il était repartie aussitôt, les chevaux chargés d’armes et de contrebande en tout genre. Ce type là, Clint, il alimente le conflit, et fournit du matos à ceux qui résistent encore et toujours à l’envahisseur. Et évidemment, il traîne surtout là ou la gouvernement ose pas trop encore foutre les pieds, à cause de types comme celui qui vient d’essayer de nous flinguer. Ces gars-là ont pas encore compris qu’ils se battaient pour une cause perdue, et que la civilisation allait tôt ou tard leur tomber dessus. C’est qu’une question de temps, de mois même, mais ces types là n’abandonneront jamais, comme des chiens à qui on peut pas reprendre l’os fétiche sans qu’ils ne montrent les crocs. Et au milieu, y’a Grace.

J’ai toujours été proche d’elle. Dans ma famille, proche, ça veut dire éloigné mais pas trop. Ce qui est déjà beaucoup, crois moi. J’ai pas eu de nouvelles depuis quelque temps, mais c’est habituel, je me suis pas posé de question. Elle fait sa vie, moi la mienne. Mais y’a fallu que mon père viennent foutre son nez là-dedans, et maintenant, je m’inquiète. A quoi je joue, sérieux, au chevalier blanc? Fait chier. Non seulement c’est ridicule, mais en plus, je me fous dans la merde. A deux, au milieu d’une île qui a jamais été aussi sauvage que depuis qu’elle s’est faite annexer, à la recherche d’un type armé, avec une pelletée d’homme à ses bottes, et je me suis même pas sûr de retrouver ma sœur avec lui. Le journaliste qui a pris la photographie, lui, il aurait pu m’aider, c’est peut-être ça que tu te dis? Pas de chance, c’est le premier qui est crevé pendant l’attaque. La gorge en sang, c’était lui. J’étais à deux doigts de commencer à le bassiner et à lui soutirer ce qu’il savait.

Quel pétrin, sérieux.
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Les artisans de la paix 410

On galope depuis le début de matinée. Comme prévu, on a foutu le camp dès les premières lueurs du soleil. On a effacé au mieux les traces de notre passage, et avec un peu de chance, le vent et le sable nous aideront. Je recale mon chapeau sur mon crâne, c’est pas l’habituel, trop agent secret, je l’ai troqué pour un chapeau en cuir qui m’aide à me fondre dans le décor, ici. Mon manteau fait peine à voir, mais il empêche les grains de sable de venir me les briser, c’est tout ce que je lui demande.

Je rallume une clope, j’en propose une à mon compagnon de route, qui refuse. Il fume pas, qu’il me fait comprendre d’un signe de tête. Ça me fait penser qu’on se connaît pas bien, lui et moi. On a passé la nuit dans un silence quasiment constant, épuisé et aux aguets, et depuis que je l’ai croisé en débarquant ici, on a quasiment causé que de boulot. Je sais rien de lui, à par son nom et son taf. C’est peut-être mieux comme ça. D’après lui, on prend à peu près la direction d’un campement avancé de la marine. Un des bastions qui symbolisent leur avancée dans le désert. Officiellement, toute l’île a été pacifiée depuis un moment, mais dans les faits, ça se discute encore. Même si ces bandits et pistoleros sont des vestiges du passés, ils en démordent pas. Et ils ont l’avantage d’être chez eux.

« C’est qu’une question de logistique, que me lance Clayton comme s’il avait lu dans mes pensées. Avec plus de moyens, y’aurait déjà un drapeau blanc et bleu planté en plein milieu de l’île.
- Hm hm. »

Je réponds pas. Faut croire que les patrons, ce qui les intéressent, c’est de pouvoir dire dans les journaux et sur la paperasse que l’endroit nous est affilié, et si les faits diffèrent, rien à foutre. Je tire sur ma clope, et je me dis que comme il a l’air un peu plus causeur qu’hier, c’est peut-être le moment d’en profiter.

« Vous êtes vraiment d’ici? Que je lance.
- Vraiment.
- Pas patriote?
- Du tout.
- Le changement, c’est pas un problème?
- Quel changement? A l’époque, on manquait de se prendre une balle à chaque coin de rue. Je vois pas trop la différence, » qu’il rétorque en m’adressant un léger sourire.

J’ai rien à redire. Le soleil commence à sacrément taper. Y’a quelques heures, je me gelais les miches, et voilà que je me les crame, maintenant. Quelle foutue île.

« Et puis, qu’il reprend tout seul, je suis peut-être bien parti un long moment.
- Ras le bol du pays?
- Je voulais voir un peu de verdure.
- Et pourquoi revenir, si c’est pas indiscret?
- Dans les journaux, on nous promettait du changement, alors j’étais curieux. Je te cache pas que j’ai été un peu déçu, mais au moins, c’est pas le boulot qui manque. »

Il dévie un peu la trajectoire, on prend la direction d’une falaise, pas très haute, qui devrais nous offrir un point de vue pas dégueulasse. A quelques lieux d’ici, en contrebas, je peux discerner un mince filet d’eau qui se dessine, une des rares rivières qui parcourent l’endroit.

« Avec de la chance, m’indique Clayton, on y sera avant la nuit. On se pose, on fait boire nos chevaux, et si possible, on chevauche à nouveau jusqu’à Fort Mercier, qui se trouve en amont, un peu plus haut. »

Pas moyen de distinguer l’endroit d’ici, on en a encore pour une sacrée trotte, et mon petit doigt me dit qu’on nous colle toujours au train, de plus ou moins loin. Je te l’ai dit, ces gars là sont comme des chiens, j’en suis persuadé. On fait demi-tour, on se rapproche du sol, et on reprend la direction au galop. Évitons de trop perdre de temps.
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Les artisans de la paix 510

Fort Mercier. Il fait peine à voir, crois moi. C’est plus une ruine qu’autre chose. En fait, c’est littéralement une ruine, qui a servi de base à cette place plus ou moins forte. Ils y ont installés des canons, ont tenté de reconstruire vaguement la grande porte, et les murs, dans un mélange de pierres et de bois. Ça me rassure pas des masses, et quand je vois la gueule des soldats qui passent, je vois que eux non plus y croient pas trop, à leurs fortifications. La plupart ont même pas envie d’être là. Être envoyé ici, je crois bien que ça relève de la punition. Le seul qu’à pas l’air de sombrer dans la déprime, c’est l’officier en charge du lieu, un type un peu bien en chair, a l’air un peu bourru, mais arborant un regard définitivement résolu. Sans ce type, je pense que l’endroit aurait déjà été déserté. Ils nous a accueillit dans le bâtiment qui lui sert de quartiers, non sans une once de suspicion dans le regard. Déjà, en s’approchant du Fort, on a bien failli se faire fusilier, avant que mon pote ne s’annonce. Faut croire qu’il est un peu connu, dans le coin. Et quand il leur a montré sa carte de chasseur de prime, et moi ma contre-façon, ça a tout de suite détendu l’atmosphère. Enfin, autant que possible, j’ai quand même toujours cette impression désagréable qu’au moindre mouvement de travers, ces soldats vont se chier dessus. Pas top pour assurer la défense d’un des bastions les plus avancés de l’endroit.

On s’assoit à un bureau tout simple, couvert de plans et de paperasses. L’officier s’assoit lui aussi, et ordonne à un de ses hommes de rapporter de quoi nous rafraîchir la gorge.

« J’me présente pas à vous, m’sieur Reed.
- Pas besoin, en effet, Officier Howard, » répond Clayton.

Ces deux là se connaissent, je suis la seule inconnue de l’équation.

« Tommy Lee, que je me présente.
- Je sais, c’est écrit sur votre carte, rétorque Howard.
- Effectivement. »

Il joint ses mains sur son ventre, sa chemise prête à craquer.

« Je vous demanderai bien ce que vous venez faire là, mais je le sais déjà. Et je vous déconseille de continuer.
- Clint. Rupert. Quinze millions. Des infos? »

Je t’avais dit que ce Clayton, il avait pas le temps. Je me répète, mais je l’aime bien.

« Un pas de plus dans sa direction, et c’est la mort pour vous. Attendez quelques jours, que nos renforts n’arrivent. A ce moment là, on pourra s’enfoncer un peu plus dans le désert. Avant ça, c’est du suicide, même pour quelqu’un comme vous.
- Je ne pense pas que nous ayons le temps, répond simplement Clayton, je veux plus qu’il nous file entre les doigts.
- Rupert, hein? Pourquoi lui? Il reviendra pas vers les côtes avant un moment, de toute façon.
- Pourquoi ça?
- Parce que comme tout ces enfoirés, il rejoint le cœur du désert.
- Y’a rien, là-bas. Il sera bien forcé de refaire surface pour faire vivre son business.
- Le désert est plus vivant que jamais, au contraire. »

Comme pour illustrer son propos, il sort d’un sac en toile un fusil, un peu rouillé et couvert de suie, mais en état de marche.

« On a trouvé ça sur l’un de ces bandits. Ça vient pas d’ici, et ça vient certainement pas de nous. Des comme ça, on en a vu des dizaines, voir des centaines. Ces cons se sont organisés. Non seulement ça, mais ils reçoivent de l’aide extérieur, des hommes, des armes. Quelqu’un souhaite pas vraiment nous voir débarrasser cette île de ces insectes. Pas besoin de vous faire un dessin. »

Pas besoin, ouais. Putain mais dans quoi Grace s’est fourrée. Dans quoi MOI je me suis fourré, non mais sérieux.

« Je peux pas vous aider, qu’il reprend, désolé. Et même si je pouvais, je pourrai pas me résoudre à envoyer au casse-pipe une aide qui pourrait m’être précieuse. »

Il marque une pause, Clayton bronche même pas, il est dans ses pensées, moi dans les miennes. J’aurai pu être pénard, dans mon fauteuil, un petit verre à la main. Mais non, je suis dans ce trou paumé. Quel con. Mais si j’étais pas venu, j’aurai fait un piètre frère, tu penses pas? Ma famille est déjà assez flinguée comme ça, pas besoin d’en rajouter. On se regarde tout les trois dans le blanc des yeux, comme des cons. Y’a que la sonnerie de l’escargophone posé sur la table qui vient briser le silence dans lequel on était tous entrain de s’enfoncer. Howard s’en empare, s’éloigne un peu en nous tournant le dos, marmonne, s’énerve, soupire, puis raccroche. Il revient vers nous, pose ses deux mains sur la table, un peu désemparé.

« Des troupes s’avancent. »

Il adresse un signe de tête à l’un de ses gardes, qui s’empressent de sortir du bâtiment. A peine quelques secondes plus tard qu’un son de cloche retentit dans tout le fort.

« Je vais vous dire un truc. Si vous tenez tant que ça à vous jeter dans la gueule du loup, restez ici ce soir. Si au levé du soleil, on est encore debout, je ferai mon possible pour vous aider. »
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