Un nouveau moussaillon chez les Lucky Goats

~Le sommeil est une denrée rare en ce monde~

Le temps était calme, l'obscurité de la nuit voilait l'horizon, forçant tout homme à sombrer dans un sommeil de plomb, bercé par le flot des vagues venant frapper la coque robuste du navire. Seule une poignée de marins restait, veillant sur la sécurité de leurs camarades et gardant cap sur la prochaine destination. Tout était calme, pas un mot entre les différents individus, seulement le bois grinçant et se tordant au contact humide de l'océan. Ce bateau marchand portant plusieurs dizaines de marins à son bord était aussi hôte d'un étrange clandestin, discret, Canigi était présentement sur le navire depuis une semaine. Les yeux plissés, il s'efforçait de rester éveillé, craignant l'instant où il allait être découvert. Il ne dormit en tout que deux nuits, forcé de bouger constamment pour éviter le contact visuel avec n'importe quelle personne présente. Bien que plutôt spacieux, le navire ne lui offrait pas d'endroit où dormir, il sut malgré tout trouver le sommeil d'une manière bien étrange, mais pour le coup, indétectable. Canigi attachait une corde à sa taille, et une autre au niveau de sa nuque, afin de ne pas avoir un seul point de pression évitant toute blessure, et il attachait l'autre bout de ces mêmes cordes au balcon du bateau, présent à l'avant, le laissant suspendu au-dessus des flots. C'était là une technique bien étrange mais ingénieuse, ça fonctionnait, mais cela avait un coup. D'une part le sommeil n'était pas du tout réparateur, il était presque plus douloureux qu'autre chose, mais obligatoire pour ne pas perdre la tête. D'autre part les vagues frappant la coque venaient parfois l'asperger, le réveillant en sursaut, et à partir de là, il était impossible de se rendormir, la douleur des cordes lacérant son dos et l'humidité parcourant son corps forçaient le jeune homme à remonter sur le pont. Au fil du temps, il prit ses marques, connaissant l'heure du "changement", lorsque les marins passaient le relais à l'équipe de nuit pour garder le cap sur leur destination, qui était par ailleurs inconnue pour Canigi. Il était condamné à les suivre sans pour autant savoir où il allait se retrouver. Il savait quand partir dans la réserve pour se restaurer, où se cacher lorsque des marins s'aventuraient dans des zones recluses du bateau, il avait prit le rythme et était maintenant parfaitement à l'aise avec son cadre, bien que la fatigue était toujours permanente. C'était là le seul manque qu'il ne pouvait combler d'aucune manière. Un jour, alors que le navire vint à croiser une autre embarcation marchande bien plus petite, ils jetèrent l'ancre. Après une succession de signaux de divers types, dressage d'une voile colorée, signaux lumineux en direction de l'embarcation, ils finirent par s'approcher et s'arrêter à proximité de leur bateau. Une échelle de cordages fut jeté contre la coque du voilier marchand, indiquant aux individus sur l'autre navire de prendre place afin d'entamer des négociations :

"- Mon ami ! Je suis honoré de vous croiser en mer aujourd'hui, peut-être pourrions-nous faire affaire ?
- Avec plaisir, qu'avez vous à m'offrir ?"

Les deux comparses dialoguèrent jusqu'à prendre la direction de la cale où se trouvait quelques unes des ressources marchandes. Après plusieurs minutes d'entretien, ils sortirent en s’esclaffant, tous deux heureux d'avoir pu faire affaires en pleine mer. Les tonneaux et les cargaisons s’enchaînaient, tandis que de l'autre côté c'est des bourses complètes d'or qui circulaient. Une fois la transaction effectuée, les deux navires reprirent chacun une direction opposée. Le bateau était dorénavant autant rempli d'argent que de vivres, si ce n'est plus. Bien que de petite taille, l'embarcation précédemment rencontrée venait de presque dévaliser la boutique mise à disposition par les marchands. Les jours passèrent, et toujours aucune terre en vue. L'équipage n'avait encore rien à craindre, il restait bien assez de nourriture pour l'ensemble des individus présents, le problème était plus pour Canigi, la fatigue et la douleur des cordes qu'il utilisait pour dormir devenaient de moins en moins supportable. Il allait devoir rapidement trouver une solution alternative s'il ne souhaitait pas devenir fou. Un soir, une tempête éclata, les vagues dansantes s'écrasaient de plus en plus violemment sur la coque du navire, elles l'accompagnaient sur plusieurs mètres de hauteurs, avant de chuter et percuter une seconde houle, arrosant l'ensemble du pont où les marins circulaient. A cet instant, Canigi était à bout de forces, voilà maintenant quinze jours qu'il était rendu sur le vaisseau marchand, et la folie commençait à le submerger. Il était face à la dure réalité de la vie, lui qui n'avait ja-ja-jamais navigué, il se trouvait face à un mur, seul, sans le moindre secours, le moindre allié, il en venait à avoir des hallucinations, voyant son fidèle compagnon Pyro à ses côtés :

"Pyro !... Je suis fatigué, j'ai mal au dos, j'ai.. Tu me manques, ma routine me manque, mon travail me manque, je pense que j'ai fais une erreur... Je n'aurais jamais dû agir comme ça, je regrette..."


Ses paroles vinrent à attirer la curiosité d'un des marins. Les bruits semblaient venir de la cale, et cette voix ne semblait clairement pas familière. Le marchand dégaina sa lame, et la tenu droit devant lui, fermement serrée entre ses deux mains, s'approchant doucement, pas après pas en direction de la caisse en bois d'où semblaient venir les bruits. Canigi était assit derrière celle-ci, il tenait ses jambes, serrées contre son buste, essayant de se faire le plus petit possible, bien qu'à ce moment précis son esprit divaguait totalement. Alors que l'homme armé n'était plus qu'à quelques pas de croiser le regard du jeune homme, un bruit sourd retentit. Un silence profond traversa l'entièreté du navire avant de laisser place à une déflagration. Une explosion terrifiante vint perturber les marchands dans leur périple. Le souffle fut si violente que l'homme proche de Canigi chuta, perdant l'équilibre suite aux secousses. Un cri de terreur retentit jusque dans la cale, il s'agissait d'un des marins prenant conscience de la situation :

"DES PIRATES ! NOUS SOMMES ATTAQUÉS !"

Sur ces mots, le matelot rejoint au pas de course ses camarades sur le pont sans prendre le temps de découvrir ce qui se cachait dans la cale, jugeant probablement cette découverte mineure face à l'ampleur des événements. Les quelques marins parti se coucher plus tôt dans la soirée ont, à leur tour, rejoint le reste de l'équipage sur le pont. La coque était perforée, le bruit qui troubla l'équipage auparavant n'était autre que la confrontation d'un boulet de canon projeté par les assaillants contre la proue. Il fallait faire vite, la tempête continuait de faire rage, et ils n'avaient pas le temps de réparer la coque du bateau avant d'avoir terrassé ces pirates. Canigi lui était toujours dans la cale, plongé dans ses hallucinations, il était loin de se douter de ce qu'il était en train de se passer. Le vaisseau pirate se rapprochait dangereusement jusqu'au moment où il était à portée d'abordage. Des silhouettes sombres sautèrent alors tour à tour, frôlant d'une seule foulée le plancher du bateau marchand. Ils étaient tous alignés, les bras croisés, cinq individus aux apparences hétéroclites, ils restaient immobiles jusqu'à entendre l'ordre d'une voix enrouée, synonyme d'expérience et d'ancienneté :

"Tout le monde à son poste et n'oubliez pas ! Le temps c'est de l'argent, MON ARGENT !"

Ils partirent tous dans des directions différentes, certains avaient pour rôle de s'occuper de l'équipage tenancier du navire, et d'autres des cargaisons, une organisation finement menée, mêlant rapidité et efficacité, c'était là l'oeuvre d'un équipage de pirates, plus particulièrement de pirates spécialisés dans le vol. Les minutes passèrent, l'affrontement battait son plein, entre les bruits de cris et les croisements de fer, bientôt plus aucun marchand n'était à même de se battre, bientôt plus aucuns vivres à bord, mais aussi bientôt plus de bateau, étant donné que le trou dans la coque n'était toujours pas annihilé. L'un des pirates finit par entrer dans la cale pour saisir les derniers biens se trouvant au fond de celle-ci. Canigi l'entendait, bien qu'il ne contrôlait plus rien, il reconnaissait des bruits de pas arrivant dans sa direction. Il se redressa alors, et se tourna vers cet individu.

"Pyro... Tu es venu me chercher..."


Sur ces mots, Canigi se jeta avec le peu de forces qu'il lui restait sur la personne qu'il pensait être son ami le plus cher, il plaça ses bras autour de son cou et le serra contre lui, avant de perdre connaissances, et tomber à ses pieds. Le jeune garçon venait sans même le savoir de jeter son destin entre les mains d'un équipage pirate. Qu'allaient-ils faire de lui ? Comment le pirate qu'il venait d’enlacer allait réagir ? Personne sur ce bateau n'était encore capable de le dire, et certainement pas Canigi qui lui pensait être en sécurité dans les bras de son compagnon.
    Un nouveau moussaillon chez les Lucky Goats Zopave10
    Navire des Lucky Goats

    ~ Un nouvel équipage, pour une nouvelle vie ~

    "Hey ! Ramenez-vous la belle au bois dormant se réveille !"

    Canigi ouvrait les yeux pour la première fois depuis maintenant trois jours. Il se frottait les paupières, fronçant les sourcils à cause de la luminosité trop forte. La gorge sèche, le corps tout engourdit, le jeune garçon ne comprenait rien, il ne savait ni où il était ni qu'est-ce-qu'il s'était passé. Il se redressa sur le lit sur lequel il avait été déposé au préalable, puis releva la tête vers celui qui alerta ses camarades précédemment. Le soleil traversant la porte gardait l'individu dans l'anonymat, Canigi rebaissa la tête, ne supportant pas cette trop grande source de lumière au réveil. Il en profita pour analyser la situation et le lieu dans lequel il se trouvait, tout en entendant de multiples bruits de pas se rapprocher petit à petit de la cabine.
    Le sol était endommagé, et au vu du bruit provoqué par le bateau sur l'océan, la cabine n'était pas la seule zone endommagée du bateau, le bois grinçait dans tous les sens, comme s'il s'agissait d'une épave. Ça ne faisait aucun doute, Canigi n'était dorénavant plus sur le bateau des marchands, mais bien sur celui de ces étranges individus dont il ne connaissait pas encore l'identité. Il restait sur ses gardes, bien que l'environnement dans lequel il se trouvait était clos, qu'il était affamé et qu'il mourrait aussi de soif, suite à son long sommeil. A cet instant, la porte s'ouvra d'un coup, frappant violemment le mur, cinq personnes avançaient et s'agglutinaient dans le petit périmètre qu'est la cabine, tous plus curieux les uns que les autres sur l'identité du garçon. Canigi les regardait avec de grands yeux ronds, ne comprenant rien à la situation, tous avaient des visages inconnus, il n'en reconnaissait aucun provenant du bateau des marchands. L'un d'entre eux, bien plus vieux que les autres s'avança, regarda le jeune Tsuyo dans les yeux et entama la conversation :

    "Dis-moi petit, qui es-tu ? Et comment t'es-tu retrouvé sur ce bateau marchand ? Nous sommes d'accord pour dire que tu ne faisais pas parti de l'équipage, tu étais caché n'est-ce-pas ?"

    Canigi resta bouche bée face au vieil homme, il ferma les yeux, fronça les sourcils et essaya de se rappeler des derniers instants avant de perdre connaissance. Il se rappelait s'être caché dans la cale, mais c'est comme-ci ses souvenirs avaient été effacés, il n'arrivait pas à faire le lien entre ces hommes et la suite des événements. Le vieil homme fit un pas de plus en avant, et répéta ses questions. Canigi restait silencieux, cherchant éperdument à trouver une réponse à cette énigme, que pouvait-il s'être passé après qu'il ait commencé à se cacher dans la cale ? Soudain, Canigi remarqua l'absence de l'un de ses biens, les lunettes présentes autour de son cou habituellement avaient disparu. Il rouvrit les yeux et fixa le vieil homme face à lui d'un air menaçant.

    "Où les avez-vous mise ?
    - De quoi parles-tu ?
    - Je ne me répéterai pas !"

    L'un des hommes présent derrière le vieux loup de mer commença à dégainer son arme, et pointer le bout de son sabre en direction du garçon.

    "Vous voyez bien qu'il ne cherche pas à coopérer, laissez-moi lui trancher la gorge à cet avorton !
    - NON ! LUI MON AMI !"

    Un autre individu vint bousculer le premier et s'interposa entre les deux. Il fouilla dans la poche de la longue veste dont il était vêtu, et en sortit une paire de lunettes d'aviateur, celles de Canigi. Il lui tendit, arborant un grand sourire destiné au jeune Tsuyo. Contrairement au précédent, ce personnage avait l'air bien plus sympathique, il semblait apprécier Canigi pour des raisons encore inconnues. Le Rhétalien attrapa les binocles, puis les réinstalla autour de son cou. Il releva la tête afin de voir la personne qu'il devait remercier, mais quelque chose le dérangeait.

    "Tu.. Euh.. Tu...ressemble à un.. pouce ?"

    Le visage de son interlocuteur se transforma, passant d'un individu adorable à un véritable démon, il serra les poings et se jeta sur Canigi dans l'unique but de mettre un terme à sa vie. Heureusement, habitués par ce genre de situations, les partenaires du "pouce" le saisirent à plusieurs, et l'extorquèrent hors de la cabine afin de le calmer. On pouvait entendre des insultes et des menaces s'éloigner petit à petit en fond sonore. Le jeune garçon restait toujours dans l'incompréhension la plus totale, rien ne semblait réel, autant la précédente situation que cette mémoire qu'il n'arrivait pas à raviver. Le vieil homme toujours présent avec deux de ses acolytes s'exprima alors :

    "Tu sembles troublé ? Quand nous t'avons recueillit tu étais déjà inconscient, mais Martin, celui qui ressemble à un pouce, lui nous a dit que tu t'étais jeté dans ses bras avant de t'évanouir, tu ne rappelles pas non plus de cela ? Si tu nous expliquais qui tu es, et pourquoi tu étais dans cette cale, ça pourrait peut être répondre à beaucoup de questions tu ne crois pas ?"

    Sur ces mots, Canigi eut un flash, un frisson parcourra son corps, se souvenant petit à petit de chaque instants qui précédèrent son évanouissement. Il prit alors conscience que ce n'était pas Pyro qu'il retrouva dans la cale, mais bel et bien Martin, l'homme pouce, qu'il enlaça. Il prit aussi conscience qu'il était sur un navire pirate, dont Martin fait parti, et qu'ils l'ont donc emmené avec eux. La situation s'éclaircissait pour le jeune garçon, mais à présent, étant mort de faim et de soif, il n'avait d'autre choix que de répondre aux interrogations du capitaine, et d’obéir au doigt et à l’œil, il n'avait pas les moyens de s'opposer à qui que ce soit, il était trop faible, bien trop fragile pour se battre, si cela était nécessaire. Il prit donc soigneusement le temps de répondre à chacune des questions du Capitaine, jusqu'à ce que celui-ci soit satisfait, néanmoins, il restait sur ses gardes, étant un pirate et sachant qu'il n'était plus sur le bateau des marchands, Canigi devait s'attendre à ce que leurs intentions soient mauvaises. Après plusieurs minutes, Walter, le capitaine, invita le jeune Tsuyo à sortir prendre l'air sur le pont, il lui proposa également de manger et boire, se doutant que celui-ci en aurait besoin. Le jeune homme accepta l'invitation, il suivit les différents individus à l'extérieur de la cabine et en profita pour analyser leurs physiques ainsi que le lieu dans lequel il se trouvait afin de prévoir toute situation malencontreuse. Une fois sur le pont, Canigi remarqua les multiples trou dans le sol, le mat fissuré, les portes et fenêtres cassées. Il ne put alors s'empêcher de demander à son hôte la raison pour laquelle il n'avait pas encore réalisé de réparations sur son navire, ce à quoi il lui répondit :

    "Nous avons bel et bien un charpentier, tu l'as d'ailleurs vu tout à l'heure, il s'agit de Daegan, celui qui t'as pointé avec son épée, et qui souhaitait te trancher la gorge. Mais les coûts de réparations sont trop élevés, l'achat de matériaux, c'est bien trop cher pour ce que c'est, et puis je me dis que tant qu'on ne coule pas, c'est qu'on en a pas besoin !"

    Le jeune Rhétalien trouvait cette façon de penser très étrange et singulière, mais il laissa dire, ne voulant pas risquer d'offusquer son interlocuteur, comme lorsqu'il s'est adressé à Martin. Walter indiqua la direction de la table à Canigi, l'invitant à s'asseoir et manger ensemble, afin de faire plus amples connaissances. Tous s'assirent autour du jeune garçon et le fixèrent. Une situation forte oppressante, surtout ce silence qui semblait durer des heures et des heures. Alors qu'il lui tendait son assiette avec un morceau de viande, le capitaine s'exclama :

    "Dis-donc j'espère que tu ne manges pas trop, parce que si tu me coûtes cher, je serais obligé de te faire passer par-dessus bord ! Hahaha !

    - Tu dis ça pour rigoler papy, mais je suis sur que tu le ferais !"

    Cette voix là, c'était celle d'Aria, une petite fille haute comme trois pomme, la petite fille et bras-droit du capitaine. Elle ne semble pas très féroce comme ça, mais Walter préférait tout de même mettre en garde Canigi, elle peut s'avérer très surprenante armée de sa batte. Canigi commença à dévorer la viande, appréciant chaque bouchées et sentant l'aliment se poser comme un poids dans son estomac qui était resté vide bien trop longtemps. Il tourna la tête en direction de trois des six pirates, et s'adressa directement à eux :

    "Vous avez pas l'air très bavards vous, laissez-moi devinez, vous êtes les marrants du groupe !"

    Daegan, le charpentier et bourrin de l'équipage, dévisagea Canigi tout en arrachant un morceau de chair à l'os présent dans son assiette :

    "Joues pas aux rigolos, on est pas là pour être potes, lui à ma gauche c'est Edward, et oui il parle pas, il est muet, pour ce qui est de cet abruti à ma droite, c'est Victor, l'être le plus stupide présent sur ce bateau.
    - Hey ferme bien ton clapet avant que je le ferme moi-même en t'empalant avec ma lance, c'est bien clair ?.. Plus sérieusement, moi je suis le stratège de l'équipe, Edward c'est le navigateur, et Daegan, l'idiot avec une grosse épée.
    - Répète un peu pour voir abruti ?"

    L'ensemble de l'équipage soupira, voyant pour la énième fois les deux brutes du groupe se balancer des noms d'oiseaux au visage et se chamailler comme des enfants. Canigi resta muet face à cette situation, elle lui rappelait étrangement les confrontations entre son père et son frère. Un coude vint heurter le sien, comme pour attirer son attention :

    "Toi pas très gentil avec moi tout à l'heure, moi avoir sauvé toi, moi vouloir encore câlin de toi."

    C'était Martin qui semblait vouloir faire la paix avec Canigi, mais ses pratiques étaient étrange, d'une part il parlait bizarrement, et en plus il voulait régler le conflit avec un câlin, une façon de faire on ne peut plus douteuse. Le jeune Tsuyo accepta malgré tout, profitant de cette ambiance détendue et amicale pour baisser sa garde et apprécier l'instant présent avec ses nouveaux camarades de voyage.
    Le repas était à présent terminé, chacun était sur le point de reprendre son poste, c'est alors que Walter interpella Canigi, stoppant la totalité de l'équipage dans leur élan :

    "Que fais-tu sur les mers Canigi, que recherches-tu ? Je t'ai posé bien des questions, mais je pense que celle-ci reste la plus importante, afin de déterminer si tu as ta place sur ce navire, ou si nous devrions te jeter par-dessus bord ! Hahaha
    - Arrête avec cette blague papy, on est tous conscient que tu le feras réellement !
    - Je souhaite devenir rapide, le plus rapide. De cette manière je deviendrai inarrêtable et pourrait affirmer mes choix contre tous, et appliquer ce que j'estime comme étant juste."

    Un silence glaçant prit place quelques instants, le pouls du garçon s'accéléra. Tour à tour quelques pirates de l'équipage levèrent la main, pour une raison totalement inconnue. Quatre d'entre eux avaient la main levée, on pouvait compter Edward -le navigateur muet-, Martin -l'homme pouce et médecin de bord-, Victor -le stratège-, et Walter -le capitaine radin-, suite à cet acte, Walter prit la parole et s'adressa au jeune homme :

    "Bien, tu peux rester. Nous avons voté, et nous t'accueillons dans l'équipage des Lucky Goats. Saches qu'il y a plusieurs règles : Tout gain est à moi, je te paierai en fonction de si j'estime ton travail méritant, autrement je garderai l'argent. Je suis le capitaine, et je décide ainsi. Aria est mon bras-droit, tout ordre de sa personne ou de la mienne ne seront donc incontestable. Nous estimons à quatre contre deux que ton aide nous seras utile, nous te confierons donc prochainement une mission à réaliser pour nous, si tu réussis, tu seras officiellement membre à part entière de l'équipage."

    Sur ces mots, tous prirent une direction opposée et partirent s'occuper, certains dans les cabines pour faire le ménage ou la vaisselle, d'autres sur le pont pour le ménage, et d'autres encore à la barre ou sur le nid-de-pie afin d'assurer le cap et surveiller les alentours. Canigi, lui, décida de se joindre à Aria, ayant travaillé dans la restauration, il se pensait légitime d'aider cette jeune fille aux tâches ménagères ainsi qu'à la réalisation de plats en tous genre pour l'équipage, dans les cuisines. Tant dis qu'elle s'occupait du changement des draps dans les différentes cabines, elle lui demanda d'assurer la plonge, puis ensuite commencer la préparation de plats pour le soir. Canigi s'exécuta sans broncher, prenant presque plaisir à retrouver les sensations d'entant. Il attrapa une première assiette, et commença à la frotter à l'aide d'une éponge, encore recouverte de restes de la veille. Il continua, malgré les conditions de travail déplorable, puis une fois qu'Aria passa derrière lui pour vérifier son travail, il en profita pour l’interpeller :

    "Dis-moi Aria, désolé de te poser cette question, ça ne me regarde probablement pas, mais qui étaient ces marchands, et pourquoi les avez-vous attaqués ? Il y avait une raison valable, ou cet équipage est simplement en équipage de pirates voleurs ?"

    Aria ne broncha pas, elle semblait garder son calme, comme-ci l'acte était justifié, Canigi continuait de la fixer, elle décida alors de rétorquer :

    "Si nous les avions attaqué, c'est parce que nous avions nos raisons, nous ne faisons pas cela gratuitement. La raison est que ces marchands sont acteurs d'arnaques répétées sur les mers mais aussi sur les terres, lorsqu'ils arrivent quelque part, ils font en sortes d'avoir des ressources rares, par exemple vendre de l'eau dans un désert, afin de faire monter les prix, et ainsi doubler voir tripler la valeur de certaines ressources par rapport à la valeur marchande dans leur pays.
    - Oui mais c'est parfaitement légal, ils profitent juste de leurs connaissances des marchés, je me trompes ?
    -... Oui.. Mais eux ils tuent la concurrence, ils se renseignent sur qui sont les autres possesseurs de tel ou telle ressource sur le marché, et il l'assassine, pour avoir le monopole."

    Canigi était bouche bée, il resta silencieux un instant, puis la remercia pour sa réponse qui semblait franche malgré tout. Il continua par la suite son travail, ne doutant aucunement de la parole de sa nouvelle partenaire.


    SUITE ET FIN DANS LE PROCHAIN POST ~