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La Sorcière et le Corbeau

« Le sandwich. Fais très attention sinon tu crève. N’OUBLIE PAS LE SANDWICH ! ET SANS CORNICHONS ! »

Rowena se souvenait encore des mots, ou plutôt insultes, de son capitaine daignant l’autoriser à quitter leur bastion à l’île de la Gueule de Requin. Le corsaire Joe Biutag était un homme difficile, exigeant, avide et de manière générale très caractériel. Mais la scientifique savait mieux que quiconque qu’il suffisait de glisser les termes “or” et “argent” dans la discussion pour qu’il finisse par coopérer gracieusement. D’autant plus que le vil Cafard n’aurait pas pu rêver mieux que se débarrasser temporairement de la cornue pour pouvoir avoir un brin de vacances et se dorer la pillule tranquillement dans son phare. Ainsi elle l’avait laissé en compagnie de son souffre-douleur préféré, Elijah Croqdur, que Joe nourrissait sadiquement avec les anciens drogués qui squattaient le bâtiment. Rowena avait laissé tout ce beau monde et avait embarqué, ou s’était imposé, et voguait à présent droit vers son nouvel objectif : MégaVéga.

- Arrivée imminente. On jette l’ancre dans trente minutes ! Cria un quartier-maître aux matelots dans les cordages.

Ils allaient bientôt accoster. L’île était dans sa ligne de mire, enfin si on pouvait appeler décemment ça une île… MégaVéga était en réalité un complexe posé sur l’eau, artificiel, construit pour et par la Brigade Scientifique de la Marine. La base est nommée G-7 dans le jargon, et représente tout le fleuron de la technologie du Gouvernement Mondial. C’est là que sont développées la plupart des armes de pointe, des accessoires pour cyborgs ou Pacifistas, des armées d’ingénieurs et de chimistes travaillant d'arrache-pied pour les bonnes grâces de Végapunk. Mais Rowena n’en avait cure, elle ne passerait pas entre les murs immaculés de MégaVéga pour se complaire en ravissant l’éminence grise de la Brigade. Elle venait en oiseau de mauvais augure pour se rappeler en leur bon souvenir. Il y a un siècle, Végapunk avait chassé son grand-père, Caesar Clown. Elle avait toujours vécu dans son ombre, comme un être prisonnier d’une malédiction qu’elle n’avait pas mérité. Mais elle avait décidé que ce temps était bientôt révolu.

La grande porte des remparts encerclant le complexe s’abaissa, aussi majestueuse qu’un pont-levis de château. Le capitaine du navire, un colonel grassouillet qui par un phénomène inexpliqué semblait toujours avoir une cuisse de poulet dans la main, lançait des ordres à ses matelots-dockers pour correctement coordonner le débarquement. Leur vaisseau transportait essentiellement du matériel de laboratoire mais aussi énormément de pièces de construction pour des projets divers. Prototypes de cuirassés, sous-marins, artillerie lourde voire armes chimiques, tout se développait à MégaVéga. Rowena avait longtemps exercé comme scientifique royale au Sultanat de Pétales, sur East Blue. Mais les laboratoires du sultan Pavois n’étaient pas aussi équipés que la base G-7. La cornue continuait d’admirer le bâtiment, postée sur le pont, comme si rien autour d’elle n’existait. Les matelots n’osaient pas l’approcher, ni même parler d’elle par crainte d’un mauvais sort. Un instant plus tard ils avaient mouillé l’ancre, et les travailleurs s'affairaient à descendre tant bien que mal d’imposants caissons scellés. Dans son coin, le capitaine rognait l’os de son poulet et aidait à l’inventaire. Rowena décida d’enfin descendre à quai, les pans de sa longue robe noire ondoyant avec la brise et donnant l’impression qu’elle glissait à chacun de ses pas.

Rowena mit pied à terre, dardant du regard la porte du complexe dans lequel il lui tardait de s’inviter. Sans attendre, elle pressa le pas pour remonter le quai vers l’immense blanc ivoire flambant neuf où elle trouverait tous les principaux laboratoires et quartiers de la Brigade Scientifique. Tout autour d’elle les matelots s’activaient, mais d’autres gros bras en bleu de travail en provenance des hangars stoppaient le pas pour la regarder. Plus elle remontait, plus les gardes, soldats et ingénieurs marquaient un temps d’arrêt en tournant les yeux vers elle. Leur air… Certains étaient interloqués face à l’allure sinistre de la dame, d’autres affichaient une mine inquiète et se mettaient à chuchoter entre eux. Mais que pouvait bien vouloir cette femme en lieu sacro saint ? De quel droit cette démone osait-elle fouler son sol ? Les réactions ne se firent pas attendre.

- Je sais qui c’est. Elle traîne avec Joe Biutag, le Cafard.

Rowena continuait d’avancer, un sourire énigmatique et carnassier se dessinait sur ses lèvres à chaque fois qu’elle entendait un commentaire à proximité. Plusieurs voix s’élevaient parmis les laborantins et les charpentier. Les chuchotements devenaient brouhaha, et plus aucun d’entre eux ne parlait dans sa barbe.

- Elle a pas le droit d’être ici !

- Son grand-père était fou. Et elle ose venir ici ? Elle va se faire enfermer…

- C’était qui son grand-père ?

- Tu le sais pas ? Cette femme c’est la scientifique du Cafard, la descendante de Caesar Clown. Ce type a détruit Punk Hazard, voulait utiliser des bombes de gaz pour génocider des populations…

- On est sûr que…. que c’est… ?

- Oh oui. On l’a reconnu en plein milieu d'un stade sur Kikai no Shima. Elle a toisé tous les officiers présents dans les gradins.

Les revanchards s’étaient attroupés devant Rowena pour l’empêcher de passer. Mais sans leur porter aucune attention, elle ne s’arrêta pas. Continuant d’avancer, elle sembla les prendre au dépourvu en les bousculant, s’ouvrant elle même un passage en fendant la foule. Toutefois, ils n’avaient pas dit leur dernier mot…

- Clown ! Fit un gaillard en lui attrapant le bras. Dégage ! On veut pas de pourriture ici !

- Alors je vous suggère de prendre le premier bateau et de partir également. Répondit-elle, glaciale, en plongeant son regard dans le sien.

- J’suis pas le salop de corsaire qui te sert de jouet. On va te…

- SILENCE ! Clama une puissante voix métallique. Quelle est la raison de ce vacarme ?!
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Le balourd qui agrippait le bras de Rowena, un militaire trapu à la combinaison couverte de cambouis, lâcha immédiatement sa prise en entendant la voix tonitruante du commandant Mâchefer. Ce dernier avançait d’un pas décidé vers la cornue, émettant des sons de tintements et respirant lourdement au travers de son visage métallique. Il avait beau avoir les yeux couverts par deux coquilles de verre le faisant ressembler à insecte, il n’était pas sorcier de remarquer que l’officier était tout simplement furibond. Autour de Rowena, ses détracteurs en uniforme s’étaient mis au garde-à-vous ou avaient tout simplement décampé vers les docks. La scientifique soutenait le regard du militaire, ne le quittant pas des yeux jusqu’à ce qu’il arrive face à elle.

- Je ne m’attendais pas à un collier de fleurs et du champagne en guise d’accueil mais de toute évidence la courtoisie ça n’est pas votre fort.

- Vous n’êtes pas dans un complexe de plaisance, madame.

- C’est… c’est Rowena Clown, chef ! Beugla le marine qui l’avait attrapé.

- Silence ! Je ne t’ai pas autorisé à prendre la parole ! Lui répondit sèchement Mâchefer.

- Il dit vrai cependant. Je veux accéder à vos laboratoires, si vous pouviez faire trois pas de côté, que je puisse passer.

- Vous n’avez aucun droit ici, madame. Si c’est le Cafard qui vous a demandé de venir ici, vous pouvez repartir lui dire que…

- Je suis ici de mon propre chef. Comme je vous l’ai dit, je désire pouvoir travailler dans vos labos.

- Il en est hors de question ! Nos techniciens et ingénieurs travaillent sur des projets confidentiels, vous n’avez pas d’exigence à avoir.

- Quant à vous, vous ne pouvez techniquement pas me chasser de votre base. Votre navire de transit qui m’a amené ici est manifestement à l’arrêt.

Jetant un coup d’œil par dessus l’épaule de son Rowena, le responsable de la sécurité posa son regard en direction des quais. Malheureusement pour lui, et pour le groupe de marins acariâtres, la chimiste cornue avait raison. À quelques mètres derrière eux, les dockers continuaient de décharger d’énormes caissons et marchandises, se mettant souvent plusieurs à porter leurs lourdes charges. Ils mettaient un temps fou à descendre ne serait-ce que sur la terre ferme, sous l'inspection nonchalante de leur capitaine qui sirotait une poire de brandy. À chaque fois qu’un groupe déposait une caisse, les travailleurs s’arrêtaient momentanément pour s’essuyer le visage et boire une rasade d’eau ou de vin dans leurs gourdes respectives. D’ordinaire, l’alcool était prohibé par le règlements intérieurs des vaisseaux de la Marine. Mais visiblement certains capitaines étaient plus laxistes que d’autres, ou plus aveugles… Mâchefer laissa échapper un soupir, mécontent, avant de s’en retourner vers son interlocutrice.

- Matelot ! Rugit l’homme de métal à un docker qui passait à quelques mètres. Dans combien de temps le navire sera prêt à quitter quai ?

- Quatre heures, monsieur ! Répondit promptement l’intéressé avant de se remettre en marche.

Rowena se contentait de sourire impérieusement, continuant de fixer le commandant Mâchefer de ses perçantes prunelles. Ce dernier ne se laissait pas impressionner et, ordonnant aux curieux alentours de décamper, reprit :

- Soit, vous ne pouvez repartir pour le moment. Vous allez donc attendre que votre esquif de transit soit de nouveau opérationnel et vous quitterez les lieux sur le champ. Mais vous n’allez certainement pas rester ici.

- J’écoute. Vers quel coin sombre et absolument inintéressant allez-vous me parquer ?

- Évidemment, l’accès aux laboratoires et chantiers vous est formellement interdit sous peine d’emprisonnement immédiat. Vous resterez confinée dans un salon privé de l’aile ouest et avez autorisation de vous rendre au restaurant-mess du bâtiment, à vos frais bien sûr.

- Voyez-vous ça ! De belles heures en perspective, un salon privé et une cantine. Me revoilà en maternelle

- Je n’ai pas terminé. Vous serez sous l’étroite surveillance d’un de nos ingénieurs qui aura pour ordre de ne pas vous quitter d’une semelle.

- Une duègne, je suis bel et bien redevenue petite fille. Répondit Rowena en levant ses yeux au ciel.

Le commandant Mâchefer sortit alors un escargophone dans lequel il marmonna quelques ordres que Rowena ne put entendre. Ils patientèrent quelques minutes, le commandant en profitant pour ordonner aux curieux autour d’eux de se remettre au travail. Sous son masque de fer, la scientifique arrivait à entendre sa respiration bruyante, comme si chaque inspiration ou expiration le faisait souffrir. Rien qu’à l’écouter, on avait l’impression qu’il supportait tous les maux du monde. Après avoir attendu presque quatre minutes dans un silence d’église, Mâchefer toussota de soulagement lorsqu’il vit se présenter celui qu’il attendait. Rowena inspecta le nouveau venu. Il avait l’air d’avoir un peu plus de la vingtaine, un visage angélique, des yeux de jais et un nez en trompette. Sur sa tête, il avait renvoyé en arrière sa tignasse brune et la laissait onduler pour lui donner un air décontracté. Malheureusement pour lui, il l’air de tout sauf à l’aise dans la situation actuelle....


- Rowena Clown, repris Mâchefer, je vous présente le jeune homme qui aura pour charge de vous surveiller : l’ingénieur général Corvo Blackwood.

La cornue fixait le garçon qui n’avait toujours pas prononcé le moindre mot, le dardant de ses yeux dorés. Elle esquissait un large sourire.

- Enchantée.
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