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Le navire de la brume

La nuit commençait délicatement à retirer son voile. Sur une mer d’huile, à la brume particulièrement tenace, se tenait « le vigoureux ». C’était un navire pirate armé pour le combat, doté d’un solide équipage de frères de la côte et d’officiers roués au service. Pour l’heure une partie de l’équipage se trouvait toujours en cale, profitant d’une mer calme pour dormir. Sur le pont, l’officier de quart veillait. C’était un trentenaire richement vêtu, un certain « Cotton ». L’homme ne faisait pas l’unanimité sur un navire de frères de la côte qui ne portaient pas l’apparat dans leurs cœurs. Alors que ce bon Cotton était à la lunette, il cru percevoir une voile au loin, perdue dans la brume matinale.

Il douta bien un instant, serrant sa lèvre inférieure entre ses dents en signe d’incertitude. Il appela finalement le second du navire, qui par chance était déjà levé et veillait au travail des gabiers de quart. Celui-ci s’approcha donc et attrapa la lunette.

- Deux quarts par tribord avant, dans la brume.

Le second attrapa la lunette avec expertise et commença à scruter la position indiquée. Dans le même temps il siffla un aide qui ne le lâchait pas et qui comprit aussitôt ce qu’il devait faire. Il s’approcha d’un marin affairé autour d’une grande corde plongée dans l’eau et qui semblait analyser le fond. Après s’être renseigné, l’aide commença à donner des informations qui résonnaient derrière la conversation du second et de l’officier de quart.


Cinq brasses en fond !


- Qu’avez-vous vu Monsieur Cotton ?
- Il m’a semblé voir un navire…


Sable et coquillage !


- « Semblé » ? Hm…
- Oui, Monsieur Landstorm.


Six brasses en fond !


Il scruta un temps l’horizon sans rien percevoir. Mais un doute le lancinait.  Cotton était tout sauf apprécié mais il était loin d’être un mauvais officier. Décidant de prendre la responsabilité, Benjamin donna ses ordres. Il faut dire qu’une bonne partie de l’équipage actif était en attente, voyant bien que quelque chose se tramait.

- Monsieur Cotton, ordonnez le Branle-bas de combat je vous prie.
- BRANLE-BAS DE COMBAT !

Et aussitôt, un gros marin à l’aspect rugueux attrapa un tambour noirci et commença à en jouer de manière répétitive.



Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac !
Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac ! Tac !



Dernière édition par Benjamin Landstorm le Lun 12 Juin 2017 - 16:17, édité 1 fois
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Aussitôt ce fut un véritable orage qui éclata sur le navire. La cale s’éveilla comme un seul homme, animée par les officiers présents. Tous sautaient des hamacs avec une vivacité et une rigueur toute militaire.

PRESSONS ! PRESSONS LES GARS ! SUR LE PONT ! SUR LE PONT !

Tandis que les hommes en cale s’apprêtaient avec célérité, ceux déjà sur le pont commençaient à rejoindre leurs postes et vérifier leurs armes. Les gabiers grimpèrent dans les voiles comme des singes se ruent vers les arbres fruitiers après plusieurs jours de famine. Le dernier acteur de ce théâtre émergea de la cabine principale : le capitaine, William Henley, fit son apparition sur le pont apprêté comme il se devait.

EN HAUT LES GABIERS !
EN DOUCEUR ! EN DOUCEUR SUR LES PALANS !

C’était un homme grand, aux cheveux tirés vers l’arrière dans un improbable catogan. Il avait l’œil vif et l’expérience de la mer. C’est lui qui avait formé son second, Benjamin Landstorm. Il y avait entre les deux hommes un respect réciproque. Landstorm voyait en Henley un marin de légende, Henley voyait en Landstorm le futur de la piraterie. Il attrapa la lunette qui était déjà passée de mains en mains depuis le début de cette matinée.

- Qu’est-ce que c’est ?
- Suspicion de navire capitaine. Deux quarts par tribord avant, à moins d’un mile. Répondit laconiquement Benjamin.
- Suspicion vous ne l’avez donc pas vu Benjamin ?
- L’officier de quart l’a vu.

Cotton acquiesçait gravement tant il doutait d’avoir réellement vu quelque chose.

- Qui a donné l’ordre du branle bas ?
- Moi, monsieur.

Landstorm, droit dans ses bottes, regardait l’horizon avec intérêt. Son intuition l’avait peut-être trahie mais il préférait largement avoir tort que de se faire surprendre avec la moitié de l’équipage en cale.

- Vous avez bien fait Benjamin. Restez en alerte.

Les deux officiers tournèrent les talons. Henley resta quelques temps en avant du navire. Il scrutait toujours l’horizon agrémenté d’un épais manteau brumeux. Quelques longues minutes s’écoulèrent ainsi avant qu’il ne décide lui même de tourner talons. On entendait toujours derrière lui les hommes hurler des ordres au-dessus du brouhaha ambiant.

DÉGAGEZ !
ASSEZ LAMBINÉ !
TIENS BON LES PALANS DE VERGUE !
PARÉS À VOS PIÈCES !
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Finalement prit d’un remord, il replaça la lunette sur son œil. Fort heureusement pour lui car il parvint à capter au loin, des détonations à travers la brume. L’épais brouillard s’illuminait par endroits en de magnifiques gerbes or et rouge. Son sang ne fit qu’un tour, sa pupille se compressa et il hurla à la mort en homme qui sait quand il est nécessaire de donner du coffre.

- A COUVERT ! A COUVERT !

L’ordre fut répété à l’envie pendant que tout l’équipage, comme un seul homme, sauta à plat ventre sur le pont du navire. Benjamin avait sauté par réflexe et si vite qu’il s’en était endolori les genoux. Mais il n’eut pas le temps de s’en émouvoir. En effet, le sifflement d’une multitude de boulets leurs parvinrent. Une seconde plus tard, le pont du navire subissait une bordée. Le bois du vigoureux volait en éclats, les oreilles sifflaient, on entendait les hurlements des infortunés qui recevaient des éclats divers dans leurs carcasses.

La bordée finie, les hommes furent ramenés à la réalité par les officiers. Benjamin était déjà debout et hurlait des ordres à qui voulait bien l’entendre.

- TOUS A VOS POSTES ! MONSIEUR HOLLAR RAPPORT DES PERTES !

Et inlassablement, l'on pouvait percevoir en toile de fonds des ordres lancés à la volée par des officiers à cran.

TIMONIER TIENS BON LA ROUTE !
GABIERS TENIR BON LE HUNIER !
VOUS LÀ-BAS ! DONNE LA MAIN AUX ECOUTES !

Les ordres pleuvaient en tous sens dans une mécanique parfaite. Les hommes ne semblaient pas plus émus que cela par cette attaque si impromptue. Benjamin s’était rapproché de Henley, les deux hommes semblaient couverts de sciures de pieds en cap.

- Calibre dix-huit.
- Au moins capitaine.
- Si nous voulons le toucher il faut s’approcher. Canons tribord en batterie.
- Très bien.

Benjamin s’élança aussitôt tandis que le capitaine remontait le pont vers la poupe d’un train vif.

- Monsieur Harlem ! Amenez-nous dans le vent !

DANS LE VENT CAPITAINE !

Le quartier maitre s’approcha à son tour pour prendre ses ordres.

- Amenez-nous à portée de fusil.

Et Henley continua inlassablement sa route, distribuant les ordres avec exactitude et sang-froid. De son côté, Benjamin n’était pas en reste et corrigeait inlassablement les mouvements de tous ceux qu’il croisait afin de gagner un temps précieux. Sous le pont, l’effervescence était réelle du côté tribord. Le maitre canonnier donnait de la voix et toute sa troupe s’affairait autour des bouches à feu. A ce niveau, les hommes étaient pour la plupart torses nus et sentaient bon la poudre mêlée à la transpiration.

Sur le pont supérieur, l'activité était intense également.

- Postez vos tireurs dans les hunes !

Benjamin remontait également le pont du côté bâbord avec la vigueur de sa jeunesse. Si bien qu’il rattrapait presque le capitaine qu’il avait laissé il n’y a pas trente secondes.

DINWELL VOTRE SECTION DANS LA GRAND HUNE !


Arrivé en bout de course, Benjamin attrapa de sa large main un mousse qui semblait quelque peu tétanisé. Il le releva et le posa sur ses pieds tout en lui tapotant paternellement la tête.

- La tête haute sur le gaillard d’arrière fils !
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Henley était également sur le gaillard d’arrière et fut rejoint par son second qui prit place derrière lui. Le capitaine se tourna vers un second mousse qui attendait avec rigueur qu’on lui donne un ordre.

- Monsieur Bill, à vous pour les couleurs.
- A vos ordres capitaine !

Et le jeune mousse s’élança. Dans l’entrefaite, l’aide de Henley vint lui apporter son tricorne qu’il plaça vigoureusement sur sa tête.

- Benjamin, notez au journal de bord
- Monsieur ?
- Combat engagé avec frégate ennemie à six coups.
- Bien capitaine.
- Droit sur eux. Ordonna Henley au pilote.
- Droit sur eux monsieur.

Au niveau inférieur, sur le pont-batterie, le maitre-canonnier s’époumonait tellement que son visage avait prit une teinte violacée.

- ELLE N’EST PAS À PORTÉE DE TIRS ! TIENS BON ! ATTENDEZ MON SIGNAL !

Une véritable tension s’était emparée des canonniers qui avaient préparé les canons et n’attendaient plus que le signal pour faire feu. Ils étaient tous penchés pour tenter de voir quelque chose par les sabords. Le maître-canonnier était presque totalement couché sur un canon, les doigts crispés sur les renforts de la volée à quelques centimètres seulement de la bouche.

Finalement les deux navires se rapprochèrent inexorablement. On pouvait distinguer l'adversaire de manière très précise depuis le gaillard d’arrière où les officiers étaient toujours en grande manœuvre. Henley donnait des ordres avec la fermeté du pirate qui tient entre ses mains l’avenir de son équipage.

- Approchez par le milieu.

PAR LE MILIEUUUU !


Une nouvelle série de détonations se firent entendre du côté du navire adverse. On pouvait maintenant voir qu’il s’agissait d’une frégate de la marine, le genre de bâtiments que tout marin à une sainte horreur de croiser sur mer.

De nouveaux boulets percutèrent l’ensemble du navire en divers endroits. Notamment au niveau du pont-batterie où plusieurs canonniers furent soufflés. Des débris de bois et de fer vagabondaient à travers les hommes et rencontraient parfois une chair bien tendre.

TENEEEEEEZZZZ !
RESTE À POSTE LES GARS !
RESTE À POSTE LES GARS ET COURAGE !

Mais à travers les hurlements, des boulets venaient toujours fracasser la coque, emporter jambes, bras voire vies. La fumée était maintenant bien présente et certains canons avaient basculés vers l’arrière sous l’effet des explosions.

ON VA LEUR RENDRE LA PAREILLE !

Certains tentaient de se relever, un peu groggy par les souffles.

BLESSÉS A L’INFIRMERIE !
A COUVERTS SUR LE PONT !

Sur le pont, on ramassait les blessés qui étaient aussitôt conduit à l’infirmerie.
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Le chirurgien n’était déjà plus qu’une tunique sanglante et s’affairait sur les corps des hommes blessés.

- Plus de sable sur celui-ci !

Bien qu’à l’écart, l’infirmerie tremblait de tout son long sous le poids des attaques. Les hommes glissaient sur le sang qui recouvrait le sol.

Henley était descendu au niveau des batteries et passait la tête à travers un sabord éventré par une attaque. Le navire ennemi était à portée et allait bientôt entrer pleinement dans la zone de tir. La contre-attaque était imminente.

- A LA LEVÉE ! FEUUUUUUUUUUUUUUUUU !

Et il abattit un bras rageur tout en s’égosillant pour tenter de couvrir de sa voix les autres bruits. Les hommes ne se le firent pas dire deux fois et commencèrent à relayer l’ordre tout en mettant le feu aux poudres. Les canons propulsaient tous leurs projectiles puis finissaient par reculer vers l’arrière, retenus par les bragues, ces cordages fixés avec expertise.

Il est alors difficile de rendre avec précision le capharnaüm qui régnait en tous endroits sur le navire. Les boulets continuaient de cueillir des hommes et des parties de rafiot, le tout ponctué du très traditionnel « à couvert ». Les canons du vigoureux déversaient également leur lot de mort sur le navire ennemi tandis qu’une bonne partie de l’équipage tirait à l’aide de mousquet avec l’envie d’emporter un maximum de soldats de la marine.

- Maintenez le tir ! Clama Henley tout en remontant vers le pont supérieur, son tricorne toujours solidement enfoncé sur la tête.

A peine avait-il la tête à hauteur du pont qu’une formidable explosion secoua tout le navire. La tête d’Henley bascula vers l’avant et il rencontra fortement le bois du navire. Complètement sonné, le temps sembla pour lui s’être ralenti l’espace d’un instant. Il avait perdu l’usage de la parole et tentait vainement d’éructer quelques sons. Furieux, il parvint à se remettre sur pieds et fonça sur le gaillard arrière où Benjamin se tenait fier comme un paon. Landstorm semblait fixé telle une statue et aucune secousse ne semblait faire vaciller ce marin parmi les marins.

Les deux navires se dépassèrent finalement, laissant tout le loisir au capitaine Henley d'user de sa lunette pour connaitre l’identité de ses agresseurs. Mais il n’eut pas le temps pour cela car Benjamin lui demanda de venir à l’aide de force jurons.

- SANG-DIOU ! CAPITAINE ! VENEZ VOIR ! MORDIOU ! AH LES CLOPORTES VÉNÉRATEURS DE COUARDS !

Henley atteignit la poupe alors que Benjamin descendait le long d’une corde pour voir plus précisément l’état du gouvernail. Il releva la tête vers son capitaine.

- SACREBLEU ! GOUVERNAIL HORS SERVICE ! LA BARRE NE RÉPONDRA PLUS FOI DE LANDSTORM ! FAIT COMME DES RATS !

Car tandis que le vigoureux était à l’arrêt, le navire de la marine entamait déjà un changement de direction pour faire comme qui dirait « un second passage de courtoisie ».
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Un calme incroyable et saisissant se propagea jusqu’à l’infirmerie où le chirurgien, habitué à travailler dans le bruit et le mouvement permanent fut intrigué par un tel immobilisme.

- Pourquoi diable avons-nous cessé de tirer ?

VOIE D’EAU ! VOIE D’EAU !

- MORDIOU LES BONNES NOUVELLES AFFLUENT !

La coque était annoncée percée à un endroit encore incertain tant le pirate qui venait informer les officiers semblait exténué. Il était en tous cas si bien trempé qu’on eut cru qu’il venait de plonger à la mer avant de réapparaitre sur le pont supérieur.

Il était surtout temps de prendre une décision pour assurer la sureté du navire. Les gars se préparaient déjà à un probable abordage, mais Henley ne semblait pas l’entendre de cette oreille. Ayant reprit un peu de la voix, il s'exprima avec lenteur et malice.

- Servants de canons sur le pont. Rapprochez les canots et les chaines à la proue.
- Quittez le navire monsieur ! Vous n’y pensez pas ! J’préfère mourir sur ce bel étalon que sur une vieille coque de couards !
- Allons mon bon Landstorm ! Il n’est pas encore question de mourir ! Descendez donc avec les plus gros bras de l’équipage. Et souquez ferme !

En quelques minutes, Benjamin qui avait juré de mourir sur le navire était pourtant le premier à prendre place sur un canot de sauvetage solidement harnaché à la proue par de larges chaines. Plusieurs canots étaient ainsi reliés au navire pour tenter de le faire avancer. Et il avançait même correctement !

Il faut dire que la force proverbiale de Benjamin, couplée avec celle des meilleurs gaillards de l’équipage, avait tôt fait de rivaliser avec le faible vent matinal. Derrière les canons de poursuite de la marine n’étaient pas si précis et le vigoureux ripostait avec une batterie installée en poupe. Henley, le pied sur le bastingage, jubilait.

- SOUQUEZ ! VERS LA BRUME !

Après quelques minutes où les deux adversaires s'échangèrent des coups de canons, le navire pirate pénétra dans la brume. Et tous firent silence sans même que l’ordre ne fut donné. Quelques rares boulets sifflaient encore de ci, de là. Mais le vigoureux semblait bel et bien sauvé.

Benjamin regagna alors le navire, exténué mais ravi, il était trempé jusqu'au cou et tentait vainement de sécher sa tunique en la tordant.

- Les coquins ne nous suivront pas dans cette purée de pois !
- Non, en effet…
- On l’a échappé belle, MORDIOU ! LES COQUINS !

Mais dans l’œil d’Henley, ce n’était pas de la satisfaction que l’on pouvait percevoir, c’était bel et bien une furieuse envie de vengeance. Benjamin remarqua cette envie et comprit bien vite que cette échauffourée n’était que le début d’une sacrée affaire.

- Allons bon… Il ne manquait plus que cela !

Et sans attendre ne serait-ce qu'un geste de son capitaine, il descendit dans les entrailles du vigoureux afin d’en savoir plus sur les dégâts de la coque. Car l’équipage pirate, sans nul doute, allait prendre sa revanche sur la marine…
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