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Serpentaire

- Voiles droit devant ma Capitaine ! Deux cuirassiers de la Marine, la flotte du Vice-Amiral Fenyang sans aucun doute !

- Parfait Sergent, retournez à votre poste !

La pluie battait drue à bord du navire, mais la jeune Fosters avait tout de même pu faire preuve de clairvoyance à travers ce temps de chien. La Commodore estima l'évolution de la femme aux cheveux roses qui semblait désormais plus sûre d'elle, plus efficace. Sa présence sur le navire ne passait plus inaperçue et, par chance, son tempérament se faisait nettement moins lèche-cul. Pas une seule fois était-elle venue demander une promotion... elle avait compris qu'elle devait son nouveau rang à la mort de l'une de ses congénères et ne souhaitait plus spécialement que la chose se réitérât.

Les cieux étaient noirs comme la suie, balançant passablement ça et là des éclairs fourchus qui venaient frapper la surface irrégulière des vagues aux formes isocèles. Celles-ci secouaient le navire comme s'il se fut agi d'une coque de noix. Car la légèreté de la Jouvencelle avait bien un défaut... et c'était celui de ne pas apprécier les tempêtes monstrueuses comme celles qui s'apprêtait à leur tomber sur le coin du nez.

- Ma Commodore, nous devons affaler les voiles ! Sinon nous risquons de chavirer à tout instant !

Loin d'être inquiète, presque même rassurée, à cause de ses troubles psychomoteurs, la pauvre femme n'en demeurait que plus alarmante dans ce genre de situations. Sa supérieure la considéra un instant d'un œil torve avant d'exécuter ses conseils. Anna n'était pas un vieux loup de mer, pas comme la Loque. Elle savait y faire, tout comme Browneye qui la secondait comme toujours avec, malgré la pluie, une bible entre les mains.

- Bordel, Lieutenant, qu'est-ce que vous feuilletez encore ?!

- Ma Commodore, "Trente-six façons de survivre à une tempête en pleine mer" de Ol' Lando Blum ma Commodore !

- Jetez-moi cette merde à la flotte ! Le jour où la Jouvencelle sombrera n'est pas encore arrivé. Êtes-vous une pleutre, Lieutenante ?

- Je le suis ma Commodore. A cause de tout ce que j'ai pu lire sur les mers du Nouveau Monde. répondit la rousse avec un regard de biche comme Annabella n'en avait jamais vu de tel.

Celle-ci décida donc de laisser la pauvre femme à ses bouquins pour revenir aux deux points noirs sur l'horizon, ceux qui naviguaient devant eux et n'avaient pas à risquer de sombrer dans la tempête. Outre le poids et la solidité des cuirassiers, il semblait que les nuages trouvaient leur fin quelques lieues avant la flotte du Vice-Amiral Fenyang. C'était donc, en quelque sorte, une malédiction pour la 346ème. Et les jeunes femmes n'étaient clairement pas au bout de leurs surprises. Notamment quand un long cri se fit percevoir du haut de la vigie pour être suivi par quelque chose que la Commodore aurait souhaité ne jamais entendre dire.

- Ro... Roi... Roi des Mers à tribord !

L'albinos se dirigea soudainement vers le pont principal pour analyser l'ampleur de la menace. La bestiole n'était pas vraiment visible, dissimulée sous une épaisse couche d'eau... toutefois l'eau en elle-même n'avait rien de normal. Rien du tout. Il s'agissait en réalité de l'un de ces phénomènes que la blonde avait pu remarquer à bord de l'Umi Ressha lors de son voyage en direction d'Arcadia. Et ça n'était pas un monstre marin, non... c'était bien pire.

Un courant serpentaire, probablement l'un des pires ennemis pour un utilisateur du fruit du démon.

Il fallait prendre une décision et vite. Les risques étaient trop grand, le bateau n'avançait clairement pas assez vite pour distancer le tentacule aqueux qui s'était dressé à quelques verges du bâtiment. Le moment était plus que critique, poussant la Commodore à braver les interdits.

En haut des mats, des femmes redescendaient prudemment après avoir replié les voiles sur le grand mat, mais elles furent stoppée net dans leur mouvement par l'injonction éclair de faire marche arrière.

- Hissez les voiles, vite !

- Mais, mon Capitaine...

- C'est un risque que nous devons prendre, Vasilieva !

La manœuvre était suicidaire, d'autant plus que le vent s'était renforcé. Une seule bourrasque dans le mauvais sens pouvait anéantir tout espoir de survie. Et Annabella serait parmi les premières à couler à pic. Mais si la chance leur était favorable, alors peut-être fileraient-elles à toute allure loin du serpentaire qui...

- Deuxième courant serpentaire à bâbord !! chouine-hurla la vigie une nouvelle fois, blanche comme un linge, s'étant probablement déjà compissée.

La Loque regarda longuement sa supérieure dans les prunelles de ses yeux... puis abdiqua et grimpa parmi ses subordonnées pour les aider à s'exécuter. Une brève œillade en direction de la Lieutenante Browneye indiqua à la Commodore que le livre dans ses mains s'était multiplié en cinq ou six exemplaires.

- White storm... Thurst up stream... Ah, courant serpentaire, comment survivre...

Annabella s'essuya machinalement la pluie gouttant sur son visage avant de darder le regard dans une autre direction. Les deux cuirassiers étaient toujours visibles... mais peut-être plus pour longtemps. Et les serpentaires, eux, se rapprochaient inexorablement, prêts à briser la Jouvencelle comme si elle n'avait été qu'un fétu de paille. Il n'en fallut pas plus pour que la Commodore se décidât à enfin utiliser ses pouvoirs, malgré les indications du médecin. Les os de son crâne ne s'étaient pas parfaitement reformés et la moindre secousse pouvait lui faire perdre connaissance... voire pire. Il lui fallait attendre au moins deux semaines encore avant d'être à nouveau capable.

Accrochée au bastingage, la blonde parvint à rejoindre l'escalier menant au gaillard arrière vainement piloté par la Vice-Lieutenante dont les veines nervurant le front laissaient entendre la difficulté de la tâche. Le plus surprenant toutefois était de laisser pareil travail... à une aveugle. Mais la Commodore avait bien conscience des aptitudes surhumaines dont faisait preuve la sous-officière.

- Belle journée, n'est-ce pas, Lieutenante Frances ?

- Il est des jours que je suis bien heureuse de ne pas voir, Capitaine ! répondit la jolie rousse, les dents crispées autant que ses mains sur les poignées du gouvernail.

Sans mot dire, Anna s'approcha alors du bastingage le plus au sud du navire et s'y accrocha fermement en plaçant ses bottes dans une zone stratégique. Dans le doute, elle enroula une corde autour de son corps, comprimant ainsi son manteau qui désormais ne volait plus tous azimuts. Puis elle leva enfin les mains devant elle... et fit un drôle de mouvement dans l'air, comme si elle essayait de lisser l'espace. Rapidement, des traces de doigts bleutées apparurent dans le vide.... alors la jeune femme frappa du poing la zone précédemment maniée.

L'air se brisa en mille morceaux.

Et une vague gigantesque naquit aussitôt pour rouler sous le navire et emporter la Jouvencelle avec elle. Ainsi que la Commodore qui, lors de l'inclinaison de l'embarcation, avait eu la malchance de perdre connaissance avant de basculer par dessus bord.

***

D'abord il y eut une étrange sensation de retour à la vie, s'exprimant par l'impression d'avoir les poumons comprimés. Et en effet, ils étaient plein d'eau. Puis divers maux succédèrent les nombreux vomissements de l'officière supérieure, sauvée de la noyade de justesse. Allongée sur le pont principal, celle-ci était entourée de toutes les femmes composant l'équipage... près d'une trentaine désormais. Elle apprendrait par la suite que dix avaient disparu... dont la vigie, la dévouée Sergente Fosters.

- Ma Commodore, vous allez bien ?

- Comme un charme. répondit la rescapée entre deux crachats sympathiques.

Tout semblait avoir un goût de sel et ses narines pleines d'écume la démangeaient atrocement, au même titre que ses yeux ou bien encore le fond de sa bouche.

- Heureusement que Frances vous a entendue tomber et s'est précipitée à votre secours, sinon vous y auriez laissé la vie. fit la subalterne tout en tendant une main secourable à l'albinos pour l'aider à la redresser.

Ce qui fut chose faite assez promptement, permettant à cette-dernière de voir au-delà du bastingage et remarquer enfin que le ciel n'était plus noir... mais désormais bleu. Et que les points sombres des cuirassiers étaient devenus deux fiers bâtiments voguant un peu plus en avant de la Jouvencelle. Le tsunami semblait avoir porté ses fruits, malgré les pertes occasionnées. Ce soir, on honorerait dignement la mémoire des femmes portées disparues, parmi lesquelles la regrettée Sergente.

Présente dans l'assemblée, la Noirvoyante ne pipa mot, même lorsque la Commodore vint poser une main amicale sur son épaule et la féliciter pour son action. Après une dernière minute de silence, la Lieutenante-Colonelle gueula aux femmes de retourner à leur postes... laissant la Lieutenante, la Commodore et elle-même quasiment seules sur le pont.

- Lorsque j'ai vu cette vague, j'ai cru que nous étions perdues. Et puis je me suis rappelée de... vos pouvoirs...

- En effet, si je n'avais pas agi nous serions désormais perdues au fin fond de l'océan.

- Oui. C'était suicidaire mais... ça a fonctionné. Nous vous devons toutes une fière chandelle.

La Lieutenante feuilletait avec grande hâte les pages de son bouquin. Au bout de quelques secondes, elle parvint enfin trouver ce qu'elle cherchait. Du coin de l'oeil, Annabella put enfin lire le titre sur la couverture : "Registre des Fruits du Démon". Elle prédit à l'avance les mots qu'exprima la subalterne.

- Fruit des Séismes : ce fruit tout bonnement monstrueux à la force colossale permet à son utilisateur de générer des ondes sismiques capables de ravager la terre et créer des vagues gigantesques. Ce pouvoir a notamment appartenu à : William Campbell, capitaine pirate, Zack Parreau, capitaine pirate... Edward Newgate dit "Barbe Blanche", empereur pirate...

- Vous avez fini, Lieutenante ? demanda sèchement la Commodore d'un regard sombre qui laissait entendre que le prochain mot de la littéraire pourrait très bien être le dernier.

Celle-ci se tut, l'autre prit la parole.

- Nous avons plusieurs fois été témoins du phénomène mais vous ne nous avez jamais rien dit. Pourquoi ?

Pas leurs oignons ? pensa l'albinos, avant d'être un peu plus raisonnable. Elle descendit progressivement de ses grands chevaux pour finalement comprendre que les deux jeunes femmes ne lui voulaient aucun mal et qu'il ne s'agissait pas là d'un danger... mais d'une question de confiance. Toutefois la question demeurait épineuse et la blonde s'emporta dans sa réponse, prenant brusquement les deux femmes de haut.

- Parce que mon boulot, à moi, c'est de garder des secrets, Colonelle. Et que le votre, à vous, c'est d'obéir aux ordres de votre supérieur hiérarchique. Vous avez eu votre réponse, désormais, qu'attendez-vous de plus ?

Cette fois-ci, ce fût la Lieutenante Browneye qui répondit.

- Que vous vous comportiez comme une sœur de la 346ème, Commodore.
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Les jours qui suivirent furent l'occasion pour l'agente de se remettre en question. Elle n'était pas experte en la manoeuvre puisqu'elle n'avait pratiquement jamais eu, jusque là, à prendre du recul sur son propre comportement.

Si elle arrivait plus ou moins à arborer sa couverture marine, l'obligation de se sociabiliser avec les membres de son équipage l'avait tenue à l'écart des soldates dont elle voyait chaque jour le visage. Le voyage lui permit dès lors de mettre les conseils de la Lieutenante en application pour corriger le tir. Moins isolée, plus décontractée, la Commodore Amanda Holmes semblait désormais éprouver des sentiments pour ses subalternes. Même si, pour Annabella, il ne s'agissait que d'une manipulation dans le but ultime de s'octroyer leur confiance. Il semblait que, d'une infiltration à l'autre, d'une couverture à l'autre, les valeurs changeaient. Ainsi les révolutionnaires de la Vox Dystopia n'avaient pas les mêmes attentes que les Marines de la Division Carter. La notion d'appartenance à une caste était définie par des facteurs différents, parfois même contraires.

Enfin bref, après trois jours passés à dîner non plus seule mais en compagnie de ses femmes, à partager l'alcool et à jouer aux dés, la Commodore semblait s'être assez débauchée pour enfin rentrer dans les rangs. La Loque apparaissait comme étant moins attisée par la présence de sa supérieure et se surprenait même quelques fois à blaguer avec elle. Annabella savait faire preuve d'humour : c'était à dire qu'elle avait étudié la chose pour ne pas trop divaguer dans son cynisme habituel et simplement laisser flotter des petits instants de bonheur et de franche rigolade.

Bien évidemment, pour la grande bête au Cœur d'Acier, tout cela était faux, mais parfois ses rires demeuraient tintés d'un zeste de vérité. Parfois la cheffe d'équipe du CP9 était un être humain comme un autre.

Marie-Joie et son G-0 désormais passés, la flotte du Vice-Amiral Fenyang voguait tranquillement en direction de la fameuse Juicy Berry. Avec un peu de chance, la CP9 pourrait être témoin d'un combat confrontant deux pirates primés à plus de deux cent millions de Berries, une chose qu'elle n'aurait voulu manquer pour rien au monde. Mais plus que par simple curiosité, l'espionne exultait d'enfin rencontrer les responsables d'une pareille fourberie : les Blattards. Sur Grand Line, les eaux étaient plus calmes, bien qu'assez agitées pour n'importe quel néophyte y mettant les pieds pour la première fois.

Pourtant un bourdonnement invisible dans l'air annonçait l'arrivée d'un vent de changement.
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