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Nouvelle Arcadia

Une semaine avait passé. Une semaine incroyablement courte, mais qui avait apporté un vent de fraicheur sur l'île comme elle n'en avait pas connu depuis des années.

Annabella marchait dans les rues de la Capitale, dans l'un des quartiers en pleine métamorphose. Certains l'appelaient encore "Premier" mais d'autres l'avaient déjà baptisé d'un nom nouveau, d'un nom s'attachant à l'Arcadia, reprisée jusque dans son nom, "Prime". La "Nouvelle" Arcadia donc était désormais devenu l'un des plus grands chantiers au monde et la main d'oeuvre ne cessait d'affluer. D'abord étaient arrivés des renforts pour garnir la zone : des divisions renommées telles que la 197ème et la 198ème, ainsi que la 28ème d'élite. Plus de quatre mille soldats s'ajoutant à ceux d'ores et déjà présents grâce à l'intervention de Fenyang, qui s'étaient ainsi scindés en deux groupes : un premier chargé de superviser la reconstruction d'Alsbrough pour y établir une base ; un second opérant davantage dans la Capitale. Et d'ores et déjà, par cette simple présence d'une simili-police, les choses avaient naturellement commencé à rentrer dans l'ordre.

Toutefois la Marine n'était pas seule sur l'affaire, loin de là. Les quatre mille soldats ne représentaient qu'une infime partie des colons dépêchés par le Gouvernement Mondial pour venir saisir l'opportunité d'une vie nouvelle dans un monde nouveau. Des charpentiers donc, tout naturellement, ainsi que des ingénieurs, des métallurgistes et autres génies civils étaient arrivés en masse pour saisir les opportunités d'emplois et la chance de rebâtir les œuvres grandioses dont se targuait jadis la Nécropole : ses formidables gratte-ciels. Ouvrier et techniciens travaillaient donc de paire sur l'architecture des rues et des bâtiments... mais aussi sur le rétablissement de l'écosystème lui-aussi ravagé par les guerres et intempéries. Et des scientifiques se penchaient déjà sur la question.

Mais avant même que tout cela n'arrive, l'agente avait eu la chance de pouvoir s'entretenir avec son administrateur pour discuter de ce qui allait advenir désormais. Celui-ci avait visiblement fait des pieds et des mains pour construire son petit paradis local, misant gros sur la victoire de la jeune femme. Il avait d'ailleurs conforté ses supérieurs dans le choix de l'un de ses plus proches notables pour régner sur l'endroit : un politicien et diplomate de Marie-Joie au nom soit-disant reconnu qui, il l'assura, ferait des merveilles. Et l'albinos pouvait désormais les contempler.

Car il y avait beaucoup à faire sur Arcadia, il y avait du travail. Et car l'on avait aussi précieusement découvert au sein de la Cavité des gisements enfouis dont seuls quelques troglodytes pseudo-révolutionnaires avaient le secret. Tout ce beau monde n'avait évidemment pas été mis à la porte ni même emprisonné... le gouverneur avait trouvé plus précieux de les conserver comme responsables de ce qui devint rapidement la "Mine de Klavethy".

En seulement une semaine, l'homme était ainsi arrivé et avait réhabilité trois zones urbaines de l'île. Il avait engagé nombre d'experts pour rebâtir et terraformer l'endroit. Des efforts qui, d'ores et déjà, pouvaient se remarquer. Et cet homme formidable s'appelait Orwen Flint.

Elle avait d'ailleurs rendez-vous avec lui, dans le camp temporaire dressé sur les ruines du Seizième. Là où avaient été acheminés malades et blessés, pauvres hères souffrant de famine, de déshydratation ou bien encore de sénilité. La place forte des Bourgeois était devenue, sous la tutelle de Flint, une zone de charité et un lieu d'accueil pour les miséreux. Pour cela, le Gouvernement payait grassement certains médecins, c'était certain. Mais bon nombre d'entre eux étaient venus pour s'intéresser aux cas sortant de l'ordinaire des victimes contaminées par l'environnement nocif de l'île et déformées par des gênes héréditaires défaillants. Tandis qu'une tente sur deux accueillait des patients, l'autre abritait du matériel de recherche sophistiqué où l'on essayait de déceler les raisons des nombreux syndromes mutilant les corps des Arcadiens.

La rumeur la plus invraisemblable portait sur la recherche d'un sérum déjouant l'espérance réduite de la vie des autochtones. Mais il ne s'agissait, pour le moment, que de racontars.

Il était difficile pour Annabella d'estimer ô combien son supérieur avait investi, mais la fortune évaluée de ce dernier se comptait, d'après certaines sources, en dizaines voire centaines de milliards de Berries. Il s'était probablement ruiné pour tout cela, mais tôt ou tard en récolterait des fruits bien juteux. Et déjà les minerais extraits de Klavethy venaient commencer à combler cette dette.

La coquette bâtisse aménagée par le gouverneur était l'une des rares à ne pas avoir été flambées ou réduites à un tas de gravats. Elle se situait bien évidemment dans un milieu plus sécurisé, gardé par tout un peloton de soldats décorés et d'officiers qui, l'espace d'un instant, crurent bon de demander à l'agente de s'identifier. Elle avait en effet troqué son manteau contre une tenue plus ordinaire ce jour-là : les chemins étaient encore boueux et elle n'avait pas envie de salir sa belle tunique blanche.

- Halte, qui va là ? demanda donc un Sergent au ton bien pompeux et au regard incisif.

Regard que lui rendit aussitôt l'officière en le remettant à sa place de par sa stature hiérarchique.

- Amanda Holmes, Commodore de la Marine. J'ai rendez-vous avec le gouver... l'archigouverneur Flint.

Arcadia n'avait pas été que la victoire de l'administrateur, le Gouvernement Mondial avait lui aussi été bien prompt à réagir en nommant le nouvellement gouverneur archigouverneur du Nouveau Monde. Un titre flambant neuf qui n'y changeait pas grand chose, mais lui donnait le pouvoir de peser dans les négociations avec l'ensemble du Cercle d'Or qu'il se devait désormais de piloter. Sauf que la mission de Flint se concentrait pour le moment uniquement sur Arcadia, que le GM le voulût ou non.

- Je...euh... Mes excuses, Commodore... Je ne vous avais pas reconnue. se confondit aussitôt en excuses le sous-officier confus qui regrettait désormais ses viles paroles.

Mais l'agente n'en fit aucun cas, à peine s'était-il écarté sous la pression de sa propre bêtise qu'elle était rentrée sans mot dire, oreilles fermées à toute discussion.

Après une brève rencontre avec ce qui s'avéra par la suite être la secrétaire du gouverneur, Annabella prit place sur un mobilier à la fois humble et confortable qui lui valut la possibilité de lire le journal pour en découvrir les récentes nouvelles. Bien évidemment, Arcadia figurait à la une depuis plusieurs jours : une chronique quotidienne avait même été mise en place pour en suivre l'évolution. Toutefois, alors que ses yeux déchiffraient progressivement les caractères imprimés, une ombre noire vint rapidement ternir le tableau.

Sur la page des primes figurait un nom. Un nom qu'elle ne s'attendait pas à voir, mais qui avait pris plus de poids que prévu. Et le nombre à neuf chiffres qui le succédait lui coupa le souffle pendant de longues secondes obligeant la jeune femme à se délester du torchon pour retrouver ses esprits. Par chance il n'y avait pas de photographie... mais tout de même. Elle avait averti son supérieur de la couverture qu'elle avait utilisé pour opérer et celui n'avait rien fait pour en effacer les moindres faits et actes. Non, cela n'en était pas réellement la cause... et elle aurait pu aisément le savoir si elle avait pris le temps de lire la page suivante où figuraient les faits divers de la piraterie. Là, l'extrait d'une chanson et de ses répercussions étaient finement analysés par un énième journaleux se croyant assez bon pour critiquer tout ce qui pouvait lui passer sous la main.

Lorsque la secrétaire lui fit signe de rejoindre le bureau de son employeur, l'albinos fulminait malgré elle. Les portes furent les premières victimes de sa force démesurée, lorsqu'elle les ouvrit brutalement pour les claquer derrière elle... générant une légère bourrasque qui vint souffler la paperasse sur le bureau de l'administration.

Flint était assis derrière son plan de travail, sans grande surprise. Enfin, il l'était avant de se relever spontanément tout en se demandant d'où provenait tout ce raffut. Il fut évidemment étonné de trouver l'officière devant la porte, le visage rouge pivoine et l'expression sombre. Ce qui le fit hoqueter sans vraiment comprendre pourquoi.

- Ah, Commodore, c'est vous ! J'ai bien cru que les pirates nous attaquaient.

On n'en était pas loin, au vu de la prime qui pesait sur la tête de la CP9 actuellement. Elle trouva toutefois la force de redescendre avant d'enfin venir serrer la main de son interlocuteur. Comme son ami administrateur, celui-ci était jeune, svelte et impeccablement habillé. Ni trop aristocrate, ni trop pauvrement vêtu, l'homme semblait justement vêtu, ce qui ne contrastait aucunement avec ses traits de personnalité. O'Murphy l'avait vendu comme un homme à la langue dorée et au charme implacable, digne d'attirer l'attention de quiconque par le simple ajustement d'un bouton de manchette. Politicien parmi les politiciens, le jeune homme était respecté sinon jalousé parmi ses pairs, digne héritier d'un parcours riche en accomplissements.

A Marie-Joie, on le considérait, pour ainsi dire, comme un petit génie.

- Ah, quel rustre fais-je. Je vous en prie, prenez place ! Nous avons tant de choses à nous dire... notre ami en commun m'a beaucoup parlé de vous.

Tout en s'assoyant sur la chaise prestement libérée d'une pile de paperasse par le notaire, la blonde le considéra d'un regard suspicieux surplombant un fin sourire tout aussi politique. Elle aussi était actrice, mais elle remarqua bien rapidement la vanité de poursuivre dans cette voie : le gouverneur ne souhaitait pas s'entretenir avec elle à ce sujet. Il l'avait conviée pour discutailler du projet qui leur tenait tous les deux à cœur. C'était tout de même grâce à Anna que les colons avaient mis la main sur Klavethy et découvert ses richesses enterrées.

- En bien, j'espère. Que puis-je faire pour vous, archigouverneur ?

- Oh, je vous en prie, pas ce titre pompeux ! Appelez-moi Orwen, vraiment, j'insiste. commença le jeune homme tout en se servant une tasse de liquide chaud et brumeux. Un thé ?

La Commodore refusa poliment d'un geste de la main, elle venait de sortir de table.

- Une prochaine fois. Très bien, entrons dans le vif du sujet. Si vous êtes ici, c'est parce que votre nom, Commodore, n'est pas sans avoir certains échos de par delà Red Line. Vous avez d'ores et déjà brillé et suscité beaucoup d'entrain au sein de la Marine, vous êtes, pour certains néophytes, un véritable exemple.

- Je vous en prie, gouverneur, les flatteries me mettent mal à l'aise. Je ne suis pas aussi terrible que le racontent les rumeurs. se gaussa l'agente face à tant de flagorneries.

L'homme était cependant loin d'être idiot, son regard laissait entendre qu'il savait. Qu'il savait bien plus et peut-être même au-delà de ce que savait la blonde sur elle-même. Il était décidément inutile de jouer aux greluches avec un tel homme, car il semblait comme capable de lire dans les pensées et faire des déductions incroyables que même certains mentalistes laissaient de marbre.

- Vous avez raison, inutile de me perdre dans tant de cajoleries, bien que cela ne vienne pas de moi... mais du peuple. Un peuple à l'affût des héros comme le Vice-Amiral Fenyang, comme vous. Un peuple qui aime se dire que de pareils emblèmes de la Justice existent... un peuple qui a  besoin de se sentir protégé...

Accordant ses paroles aux gestes, le bonhomme parvenait efficacement à communiquer des sentiments jusque dans la racine de ses mots. L'agente était épatée, mais voyait désormais où il venait en venir. Elle sourit.

- Et quand le Vice-Amiral Fenyang nous honorera-t-il de sa présence ?

Le politicien se mit à sourire à son tour en voyant que son interlocutrice et lui étaient visiblement sur la même longueur d'onde. Il n'avait même pas eu à lui donner la raison de sa présence, elle l'avait devinée par elle-même : l'assimilation de son nom à la protection de la Nouvelle Arcadia... ainsi que celui de l'Amiral.

- D'une minute à l'autre, je suppose.


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Jeu 9 Mar 2017 - 9:21, édité 1 fois
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- « Il s’emmerde pas ce gouverneur… »

J’eus un petit sourire en voyant la secrétaire rouler des hanches devant moi. Bordel de merde ! Encore une bonasse qui faisait exprès de me titiller ! J’en étais sûr ! Elle exagérait bien trop sa démarche. Pour avoir sauté bon nombre de meufs de son calibre, je pouvais l’affirmer sans craintes. Après, c’était pas comme si elle en avait besoin vu la volupté de son derche. Faudrait p’être que je fasse comme ces bureaucrates pompeux et que j’engage moi aussi une aide de camp bien roulée comme y faut. Enfin… Si Ketsuno me laissait faire… Mais vu qu’elle avait le béguin pour le petit Ethan d’après les racontars, ça pouvait se faire. Mais oublie tout ça, Salem et mate ce truc devant toi. De la bombe. Brune, coupe carré, lunettes pour faire professionnel à défaut d’avoir vraiment un problème de vue, tenue impeccable avec une jupe qui moulait atrocement son séant digne des plus belles callipyges de ce monde, lèvres pulpeuses rehaussées juste comme il faut par un rouge à lèvres de haute gamme… Franchement, elle avait tout pour plaire la p’tite dame là. Bien entendu, une main se perdit sur son popotin ce qui fut loin de lui déplaire. Y’avait clairement moyen de tirer ma crampe rapidement. Enfin… Rapidement… Non… C’était jamais rapide avec moi.

Dommage.

- « T’auras qu’à faire un tour vers mon navire… Quand t’auras le temps… »

Avec un clin d’œil à l’appui, la jeune femme ne put que rougir, avant de m’ouvrir la porte du bureau du gars qui avait maintenant la charge de cette île. Comme d’habitude, le gouvernement avait réagi vite. Très vite. Trop vite même. Mais n’étant pas spécialement intéressé par toutes les questions d’ordre politique, j’avais refusé de me triturer les méninges pour ça. A vrai dire, j’en avais rien à foutre des tenants et des aboutissants de cette histoire. Ça pouvait sembler con, mais mes objectifs en venant ici ne furent pas vraiment louables. Oui parce qu’intervenir sur une île juste pour combattre l’ennui et sauver le cul d’une meuf qui vous tape dans l’œil, c’est franchement pas honorable. Je me sentais même coupable quand je pensais que j’avais mis en jeu la vie de mes hommes pour une meuf. Et quelle meuf ! Un monstre ! Je n’arrivais même pas à concevoir comme elle avait pu évoluer aussi vite. D’ailleurs, j’avais eu le loisir de parcourir l’autopsie de McKlayn. Une vraie boucherie qui donnait des détails pas du tout glorieux. Si elle avait le loisir de le dépecer comme ça, c’est qu’elle devait être ultra balèze maintenant. Ça plus le fait qu’elle était une tarée. Une véritable tarée. Et avec ça, il y avait encore des gens pour s’étonner de l’aversion des marines pour le CP.

- « Vice-amiral, enfin ! C’est un honneur ! »

BCBG le type. Dire que j’aurai fini comme ça si j’avais pas suivi les traces de mon père. A gerber ! J’en venais parfois à me demander si j’étais vraiment un noble. Non parce qu’hormis ma belle gueule et mon élégance selon les moments, je n’avais plus vraiment la tronche d’un bourge : Pas maniéré pour un sou, jamais vraiment tiré à quatre épingles (sauf lors de grandes cérémonies et lors de soirées mondaines auxquelles je ne participais plus du tout !), pas un grand orateur (sauf quand ça m’arrange, surtout pour draguer…) Bref… J’étais loin du style du petit bonhomme qui s’était levé de son siège avec un sourire de circonstance. Je l’observai pendant un petit moment sans bouger, avant de me résoudre à avancer vers son bureau. Je contournai le siège qui m’était réservé, lui serrai vigoureusement la main avant de tourner la tête vers le fameux commodore dont tout le monde faisait les éloges. Un rictus déforma mes lèvres. En l’espace d’une seconde, j’ai failli éclater de rire. Me marrer comme un con. Mais je m’étais retenu avant de m’éloigner de mon siège sous le regard interrogatif du gouverneur. Il eut rapidement réponse à ses questions lorsqu’il me vit sortir un cigare et le briquet qui allait avec. Quand je vous dis que je suis un rustre fini. Un véritable sauvage.

- « J’me permets. Ça ne vous dérange pas, j'espère ? »

- « Mais point du tout vice-amiral ! Allez-y ! »


Oui parce que sans la meuf assise devant toi, t’en serais pas là et tu le sais. J’aimais pas dire « nous », parce que je n’avais pas foutu grand-chose dans cette histoire. Juste du nettoyage, comme d’habitude. Ça m’avait valu une vilaine blessure à l’épaule qui cicatrisait déjà ainsi que la vie de quelques-uns de mes hommes, mais c’était la routine, quoi. J’allumai alors mon cigare et profitai comme d’habitude des premières bouffés avec un plaisir non dissimulé. Puis je m’adossai à un mur, avant de balayer la salle du regard. Très chic. Il avait déjà posé son empreinte sur les lieux. Maaah… ? Pouvait-on lui en vouloir ? Sur ce point, j’aurai fait pareil. Et puis, je devais avouer qu’il avait bon goût avec la bonasse qu’il avait comme secrétaire. Et que j’allais peut-être me taper ce soir. « Je suis actuellement en plein préparatifs pour mon départ. Vous avez une demi-heure. » En vérité, je ne quittais cette ile que le lendemain, à l’aurore. J’avais trop glandé ici et il était plus que temps pour moi de me barrer. Une halte à mon orphelinat me ferait le plus grand bien et ferait certainement plaisir aux gamins, ainsi qu’à ma mère. La simple pensée de ces gens avaient suffi à m’arracher un sourire, les yeux fermés, alors que je savourais toujours ce cigare confectionné à Logue Town. Je présumais qu’il voulait nous remercier. Pour ma part, je ne voyais pas vraiment d’autres raisons…


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Et grand seigneur qu'il était, le Vice-Amiral n'avait, en effet, pas tardé à faire sa remarquable arrivée.

L'agente s'y était habituée, à ce comportement hautain et primitif, à ses pulsions gargantuesques et démesurées. Elle appréhendait les moments où cela arrivait, mais le supportait désormais assez aisément. Tant que le gusse ne cherchait pas à la toucher comme il avait pris l'habitude de faire avec ses nombreuses conquêtes. Anna, elle, était faite d'un tout autre bois.

Là où tout autre politicien aurait affiché un malaise palpable, l'archigouverneur demeurait, lui, imperturbable, un grand sourire éternellement fiché en plein milieu du visage.

- N'ayez crainte Amiral, je n'abuserai pas très longtemps de votre précieux temps. avoua-t-il tout en se délectant d'une nouvelle gorgée de thé chaud, invitant finalement son second invité à prendre place aux côtés de la Commodore.

Celle-ci conserva un regard fixé sur l'horizon, sans prendre la peine d'admirer le déplacement typique du gorille en pleine période de prédation sexuelle. C'était toute une attitude que l'officier devait avoir travaillé depuis sa plus tendre enfance, l’œuvre ultime d'un macho rongé par la luxure. Cela vrillait la jeune femme autant que l'impression de se sentir épiée par un animal qui, de toute manière, ne lui voulait pas que du bien. Dans une énième respiration lourde, le valeureux bonhomme osa enfin asseoir son derrière princier et faire face à leur interlocuteur.

- A la bonne heure, passons donc directement aux choses sérieuses. Comme j'avais commencé à l'expliquer à la Commodore Holmes, pour bâtir un pays, ou à l'évide le reconstruire, il faut deux choses : de la main d'oeuvre et un fort pouvoir politique. Malheureusement le pouvoir politique s'incarne à la fois dans la sécurité intérieure et extérieure de la nation... ainsi que dans les contacts entretenus avec les zones frontalières. Par chance, nous nous trouvons sur une îl... Vice-Amiral ?

- Je vous écoute. répondit un homme dont le regard avait lentement bifurqué depuis le bureau du gouverneur vers l'invitée de ce-dernier.

Celle-ci blêmit, se rappelant les conditions dans lesquelles elle s'était présentée à l'officier, quelques jours plus tôt. Ils ne s'étaient visiblement pas tout dit, puisque le regard mystérieux du grand brun cherchait indubitablement à percer à jour chez sa voisine certaines choses dont elle seule avait le secret. Elle grimaça donc en espérant reporter son attention sur la tirade du bourgeois.

- Ce n'est pas le moment, Fenyang.

- Ne vous en faites pas, j'y viens, j'y viens. Et ensuite je vous libère. Pardonnez-moi, j'ai toujours le défaut de beaucoup trop dialoguer en la présence d'éminences. L'habitude, je suppose.

- Je ne suis pas une éminence. rétorqua la blonde, saisissant dans le regard que l'aristocrate ne l'entendait pas de cette oreille... et à raison.

A force, le parcours de la CP9 ne s'était certes pas pavé d'or, mais Sloan O'Murphy s'était arrangé pour qu'il soit politiquement irréprochable. Elle était une éminence des services secrets du Gouvernement Mondial, au même titre que le Vice-Amiral en était une de l'institution Marine.

- ...et donc, pour pouvoir asseoir davantage de poids sur l'échiquier diplomatique, il est de bon ton de posséder des figures emblématiques agissant comme des "protecteurs". Ce que l'on retrouve aisément sur Grand Line, aussi bien pour la piraterie que pour la révolution ou, bien heureusement, le Gouvernement Mondial et la Marine. Chaque... faction ? a ses héros, malheureusement pour nous dois-je dire.

- Donc, si j'ai bien compris, vous me proposez de graver mon nom quelque part pour faire de moi un... "protecteur d'Arcadia" ? Utiliser mon nom comme une arme de dissuasion histoire d'éloigner la lie du Nouveau Monde de ce trou paumé...

Anna avait compris la même chose. Et elle n'était certes pas contre, puisque cela ne l'engageait qu'à veiller sur l'endroit s'il venait à connaître de nouvelles heures sombres. Mais pour le Vice-Amiral, qui n'avait fait que raser Alsbrough et lui "sauver les miches", elle n'était pas sûre de sa probation. Elle était même pertinemment consciente de sa réponse. Laissant donc le temps de réfléchir à son supérieur, la Commodore s'activa sur sa chaise pour faire en sorte que la première réponse à la question de Flint ne fût pas un refus.

- Où dois-je signer ?
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- « Pas intéressé. »

- « Et puis-je savoir les raisons de ce refus, vice-amiral ? »


Le mec ne perdit pas son sourire, comme s’il s’y était attendu. Je fus très étonné de voir sa réaction. P’être qu’il était déjà satisfait d’avoir l’approbation d’Anna. La CP n’avait presque pas hésité une seule seconde. Dans ma tête, je me marrais. Le nouveau monde, c’était pas la première partie de Grand Line. Un empereur pouvait venir foutre le bordel d’un moment à un autre et peu importe le nom des protecteurs. Celui d’un « amiral » aurait été certainement dissuasif, mais ceux d’un « commodore » et d’un « vice-amiral », n’étaient pas si effrayants que ça. Par contre, si on parlait en termes de petites et moyennes frappes, nul doute que le coin allait être épargné. Encore que j’avais un doute. La logique de cette région du globe m’échappait toujours et la confiance dont faisait preuve le GM en conquérant l’endroit me perturbait grandement. C’était à se poser des questions. Enfin… Pour ma part, j’avais fini mon taf ici.

- « Aucune raison valable. On va dire que c’est un vilain caprice. »

Bien entendu, il y avait plusieurs raisons : Tout d’abord, je n’aimais pas spécialement cette île. En fait, il serait bon ton de dire que je m’en foutais complètement. Ensuite, je n’étais clairement pas du genre à profiter des fruits du labeur des autres. Ce n’était pas comme si ça me gênait de dire que le fameux commodore avait fait le taf toute seule ou presque. A part tuer quelques pirates, je n’avais pas fait grand-chose. Enfin, mon nom n’était associé qu’à un royaume et une entité : Alabasta et la marine. J’aurai éventuellement pu accepter un tel titre si on m’avait parlé des villes de Logue et de Shell qui restaient chères à mon cœur ; mais pour le reste, je n’en avais strictement rien à foutre. Ceci étant dit, vu que l’archi-gouverneur avait fait preuve de politesse et de patience, il n’était pas nécessaire de poser mes couilles en gros je-m’en-foutiste pour essayer de le contrarier ou autre. Ça ne m’apporterait rien du tout en fin de compte.

- « Ceci étant, je vous remercie d’avoir pensé à moi. C’est un honneur pour moi mais aussi pour mes vaillants soldats tombés au front. Par ailleurs, je vous souhaite bonne chance pour la suite. Sur ce… »

Je me levai et effectuai un salut militaire avant de contourner mon précédent siège pour me barrer. Le gars voulut me retenir, mais finit par lâcher l’affaire quand il vit que je quittai les lieux d’un pas pressé et décidé. Les affaires de cet endroit ne me regardaient absolument plus et je n’allais y mettre les pieds que si un empereur pointerait le bout de son nez. Et encore. Si ce n’était pas celle que je voulais défier, pas dit que je ferais quelque chose. Des vice-amiraux sans base ni garnison à gérer, il y en avait un paquet après tout, même si je doutais que l’un d’eux pouvait avoir mon efficacité. En sortant, je fis un clin d’œil à la secrétaire comme pour lui dire que le rendez-vous tenait toujours puis je m’éclipsai à coups de sorus. J’arrivai au port de la ville en moins de deux, là où mes hommes chargeaient des provisions sur nos navires.

Au programme ? Petit entrainement en solo, glandage, puis j’aviserai ensuite jusqu’au lendemain à six heures du mat’.

L’heure à laquelle je prendrai le large.


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Juste une petite signature... ça n'était pas grand chose. Tandis que la jeune femme remplissait la paperasse, formulant légalement qu'elle attachait son nom à Arcadia, le Vice-Amiral avait prestement pris congé d'une réunion qui ne le concernait plus voire qui ne l'avait jamais concerné. A cet effet, l'archigouverneur n'avait pu dissimuler un regard légèrement dépité... qui ne dura qu'un bref instant avant qu'il ne reconsidère la chance qu'il avait de bénéficier d'un atout déjà considérable.

Pourtant le Commodore Holmes n'était qu'un simple Commodore. Et c'était vrai, assez peu de chose à côté des monstres que l'on pouvait trouver dans le Nouveau Monde. Holmes n'avait d'ailleurs jamais pris d'assaut Arcadia, c'était une sombre pirate du nom d'Eleanor Bonny qui était principalement responsable de l'infiltration. Alors il ne s'agissait là que d'une... une simple fonction administrative qui veillerait à faire appel à la CP9 si un jour le pays devait être dans le besoin. Et ce qui se confronterait à l'hypothétique menace ne serait pas alors qu'un simple Commodore comme on en trouve partout, bien que ses états de services renseignassent déjà de ses aptitudes au combat : ce n'était pas n'importe quel officier supérieur qui pouvait remporter une bataille contre l'une des commandantes de Kiyori. Et ça, Holmes l'avait fait.

Peut-être était-ce d'ailleurs un jeu dangereux que de la lier à la ville en expansion, finalement.

- Bon... et bien on peut dire que ce fut une matinée productive. En revanche, si vous voulez bien m'excuser, je dois moi aussi répondre à des affaires urgentes.

- Cela va de soi. excusa la Commodore tout en effectuant un salut similaire à celui de son prédécesseur avant de quitter l'endroit.

***

Lorsque la blonde avait du temps libre, elle se complaisait à déambuler dans les rues de la Capitale... ou de ce qu'il en restait. Certains édifices en ruines étaient tout bonnement rasés pour être reconstruits, d'autres étaient simplement rénovés. Dans la plupart des cas, la zone jouissait d'une bonne activité ouvrière, ce qui remplissait l'agente d'espoir. Elle avait définitivement fini par s'enticher d'Arcadia et éprouvait un réconfort incroyable en voyant que ses efforts portaient leurs fruits. Alors elle traversait les quartiers principaux qui bénéficiaient le plus des travaux : Prime, évidemment, mais aussi Tercio et finalement Sévène. Sévène qui, elle l'avait rapidement appris auprès de ses femmes, était un haut lieu de débauche et de luxure pour les travailleurs fatigués, le soir.

Elle effectua ainsi une ronde qui la ramena inéluctablement vers Seize, le nouveau patronyme du Seizième, à côté duquel se trouvait le port. Et celui-ci n'avait, pour sa part, rien de véritablement stupéfiant. Non, il s'agissait d'un port basique, principalement composé de quais et de pontons standards auxquels étaient accolés des bateaux. C'étaient peut-être ces bâtiments-là qui ressortaient le plus, puisque aussi innombrables qu'immenses, ils remplissaient l'horizon de mats et de voiles repliées. Et parmi la multitude d'embarcations marchandes se trouvaient donc les deux cuirassiers du Vice-Amiral et la "Jouvencelle", la Corvette de la 346ème.

Non loin des quais, un campement avait été installé pour loger les soldats de la Marine. Par mesure de sécurité, à l'écart de celui-ci se trouvait un second camp plus minime accueillant la quarantaine de femmes de la division Carter. Ce fut en gueulant le nom de sa Lieutenante-Colonelle que la Commodore fit irruption, dressant aussitôt les oreilles de ses consœurs. La brune se présenta presque immédiatement.

- Commodore ?

- J'aurais besoin de discuter avec vous seule à seule au sujet de...

Le sujet était épineux, car même parmi les officiers de la Marine, peu savaient manier le fluide. Pourtant l'albinos avait besoin de s'entraîner, elle devait apprendre à le contrôler parfaitement, comme elle avait appris pour le Fruit des Séismes. Mais sa récente utilisation un peu trop poussée de ce-dernier avait laissé quelques séquelles... qui nécessiteraient du temps pour guérir. Dans un monde comme celui-ci, si l'agente ne pouvait profiter de ses pouvoirs démoniaques sans risquer de se rompre les os du crâne, elle devait nécessairement posséder une alternative aux effets au moins aussi destructeurs.

Elle chercha donc à recouvrir l'une de ses mains du Durcissement et montra celle-ci à l'officière qui hocha la tête machinalement. Elle savait mais...

- Je ne maîtrise pas cette capacité, ma Commodore.

Alors elle était condamnée. Car la seule personne qui, elle le savait, pouvait faire preuve de dextérité à c sujet était le Vice-Amiral. Vice-Amiral qui, lorsqu'il n'était pas occupé auprès d'une demoiselle, restait difficilement joignable. Il n'appréciait décidément pas la présence de la CP9, même si une chose attirait constamment son attention... et elle se doutait quoi. Mais il n'avait pas besoin de savoir.

Même à ses femmes Annabella n'avait jamais expliqué la raison de ses pouvoirs. Elle les avait démontrés, certes, mais sans toutefois accorder des précisions sur les sources de ses... ondes sismiques. Peut-être que Browneye le savait, elle, mais elle devait être la seule.

Browneye savait tout.

- Vous savez où je peux trouver la Lieutenante Browneye, Colonelle ?

- Me semble qu'elle est dans sa tente, Capitaine. Vous la trouverez en continuant tout droit, c'est la deuxième à gauche.

Annabella hocha aussitôt la tête et quitta promptement sa lieutenante, sans même lui ordonner le "repos" traditionnel. Il était de certaines choses dont Holmes pouvait se passer lorsqu'elle communiquait avec ses plus proches subordonnées... et elle se gardait de prendre de haut les deux femmes qui étaient au courant pour sa couverture. Non pas qu'elles pussent la trahir, mais car leur intelligence les ramenait à davantage que de simples matricules. C'étaient comme des collègues pour la CP9 et leur présences réconfortait l'agente tout aussi bien. Aussi ne se donnait-elle pas la peine de les remercier, néanmoins.

L'instant d'après, l'albinos faisait irruption dans la tente de la rate de bibliothèque qui semblait en avoir emmené une partie avec elle ; l'autre se trouvait à bord, dans sa cabine meublée en grande partie par des reliures, encore et encore. Celle-ci ne leva les yeux vers sa supérieure qu'après avoir fini sa page, nullement surprise de son entrée fracassante. Vestige du CP8, ça.

- Je peux vous aider, ma Commodore ?

- Peut-être bien. Je souhaiterais savoir comment maîtriser davantage une certaine... compétence que j'ai acquis récemment.

- Montrez-voir ? demanda innocemment la rousse, le regard curieux, les lunettes légèrement penchées sur le bout de son nez, négligées.

La commandante réitéra donc l'action, parvenant une fois de plus à noircir quelques zones de sa main, lui donnant l'apparence tachetée d'une fourrure de dalmatien. Les yeux de la jeune femme semblèrent soudain briller de mille feux.

- Mes aïeux ! Vous maîtrisez aussi le Haki de l'Armement ?

Celle-là en savait décidément beaucoup trop.

- C'est apparu lorsque j'ai mis le pied sur cette île... Mais maîtriser est un bien grand mot... je dirais plutôt que je peux le déclencher.

La binoclarde ne semblait pas écouter, les yeux rivés sur la peau marbrée. Elle demanda enfin :

- Je peux ?

Puis, sans attendre que l'autorisation ne fût donnée, la voilà qui venait tâter du bout des doigts les étranges plaques sombres. De toutes les capacités surhumaines que connaissait la Lieutenante, c'était bien celle-là qu'elle préférait de par son omniprésence dans les récits héroïques.

- Oui, le Nouveau Monde semble bien souvent mettre les héros à rude épreuve. Alors certains sens s'éveillent... L'observation... Le durcissement...

- Vous auriez moyen de m'apprendre à m'en servir correctement, Lieutenante ? demanda une albinos au bord de la crise de nerf.

La jeune femme se stoppa net dans sa méticuleuse analyse et raffermit sa position contre le dossier de son fauteuil. Puis, du bout des doigts, elle se mit à fouiller dans les innombrables piles de bouquins qui s'entassaient ça et là pour en récupérer certains et en faire une nouvelle pile sur ses genoux. Bientôt il n'y eut plus assez de place pour permettre à la Lieutenante de voir sa supérieure, son visage dissimulé derrière les écrits.

- Me semble que c'est tout ce que j'ai ici. Bien sûr, il y a d'autres livres à bord mais...

- Vous n'auriez rien de plus radical ? Par exemple, des consignes d'entraînement ou bien...

- Désolée ma Commodore, je suis une lectrice par une soldate. Je ne peux que vous préconiser la lecture de quelques œuvres à ce sujet. Mais si c'est l'envergure de la tâche qui vous tient à cœur, peut-être est-il possible de vous limiter à la lecture de... mmh... celui-ci.

Piochant une nouvelle fois dans la récente pile sise sur ses cuisses, la subordonnée tendit finalement à son obligée une reliure sombre renfermant un paquet de pages jaunies tenant difficilement ensemble. Le titre était assez évocateur : "Bastonner avec l'Armement par...

- "Willy Jonathan Rayleigh, fils de Silvers Rayleigh" ?!

- Toute science est bonne à prendre, c'est ce que l'on en fait qui est problématique.

L'agente considéra un instant la monstruosité qu'elle tenait entre ses mains... avant d'abdiquer et la fourrer dans la besace pratiquement vide qui lui flanquait le côté droit. Elle pouvait toujours essayer, mais n'était pas sûre des résultats.

La Commodore n'était pas vraiment du genre à lire.

Ce pourquoi, lorsqu'elle quitta la tente de la littéraire déjà retournée à sa précieuse lecture, elle se dirigea vers le campement principal où devait se trouver son supérieur hiérarchique. Lui savait comment s'y prendre... mais ce n'était pas dit qu'il accepterait.

A moins qu'elle ne lui montrât ce qu'il voulait savoir en échange.
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La logique aurait voulu que j’accepte sa demande lorsqu'elle vint à moi cette aprèm, mais…

- « Le fait de t’avoir aidé à nettoyer cette ile en plus de t’avoir sauvé d’une chute mortelle ne te suffit pas ? Est-ce que tu connais le mot abus, Sweetsong ? »

Non. Elle ne le connaissait pas. C’était pas quelqu’un qui se gênait de toute façon. Et puis le plan que j’avais respecté ici, j’étais sûr et certain que c’était elle qui l’avait mis en place. C’était logique et évident de toute façon. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, j’eus un sourire alors que j’étais en train d’enchainer des katas, torse nu, avec mon sabre imprégné de haki. Les gigantesques lames de vent que je générais fendaient la mer devant moi et impressionnaient certains marines qui observaient mon entrainement depuis une falaise lointaine.

- « Ou bien c’est quoi ? Le fait que tu saches que j’ai envie de te foutre dans mon lit qui te donne cette confiance ? Tu manques pas de culot toi ! T’as horreur que je pose mes pattes sur ton cul mais tu te gênes pas pour me demander l’impossible quand t’es débordée ou coincée. T’es vraiment quelque chose, toi. »

J’eus finalement un rire. En gros, j’étais tombé sur une manipulatrice -Digne d’un CP- mais con comme j’étais et vu que j’avais eu le béguin pour elle, j’avais feint de ne rien voir. Mal m’en aura pris. Très belle leçon de vie. A bien y penser, c’était p’être moi le gros prétentieux dans cette histoire. J’avais trop insisté, persuadé que j’allais l’avoir un jour pour moi, mais niet. Râteau royal. Du coup, vu qu’elle avait assez abusé de ma bonne volonté, il était temps de redevenir un poil raisonnable. L’idée n’était plus de la draguer, ni de la fuir ou encore moins de la snober.

- « J’estime t’avoir assez aidé comme ça, gratos. Je ne compte ni te donner de pistes, ni t’aider pour la pratique de ton haki. La dernière fois sur Water Seven, ça n’a abouti à rien de toute façon. Dorénavant, c’est donnant donnant, Sweety. Et c’est toi qui m’en dois une. Maintenant rompez commodore ! Je suis en plein entrainement et j’aimerais me concentrer ! »


J’aurai pu l’humilier ou l’envoyer royalement chier, mais je n’y trouvais plus aucun intérêt. J’allais maintenant privilégier une relation strictement professionnelle entre elle et moi. Et puis, si je voulais devenir amiral, j’avais tout intérêt à avoir quelqu’un de plus ou moins fiable dans cette faction détestable. L’albinos était donc toute indiquée pour servir mes intérêts, vice-versa. Échange de bons procédés donc. C’était un bon plan à défaut de la choper. C’est donc sous cette décision murement réfléchie que je me remis à m’entrainer pendant qu’elle s’en allait.


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Ce fût avec un visage rouge pivoine que la Commodore regagna son camp, frustrée comme jamais. Elle qui était persuadée de savoir, de contrôler et de pouvoir profiter... elle s'était faite avoir à son propre jeu. Il semblait que ce qu'elle prenait pour de la curiosité de la part du Vice-Amiral n'était en fait qu'une envie mal dissimulée de lui dire ses quatre vérités. Et lui affirmer au besoin qu'elle n’exerçait plus aucune emprise sur lui.

Le malin.

La déconfiture repoussa donc les ambitions de la jeune femme à plus tard au même titre qu'elle l'expédia dans sa tente, isolée pour ne pas provoquer de désastre. Dès lors, elle n'en sortit plus jusqu'au petit matin, probablement rongée par une rancune hargneuse bien typique des gens facilement froissables.

Ce fut donc au lever du soleil que l'on revit la Commodore Holmes dans un état moins agressif... ou presque. Celle-ci s'était affrétée avant même les premières lueurs et avait fait sonner le clairon pour brusquement réveiller ses femmes. Sans explication supplémentaire, les soldates furent discourtoisement priées de lever le camp en vitesse et regagner le navire sans broncher.

Le Vice-Amiral Fenyang venait de lever les voiles et la dette qu'il avait évoqué la veille trônait dans l'esprit de l'agente. A vrai dire, il avait eu le toupet de la contacter dans la soirée pour lui proposer une occasion de se racheter, selon lui. Et elle avait mûrement réfléchi à cette proposition toute la nuit... au  point de ne pas dormir.

- Mais... Commodore, je ne comprends pas, où allons-nous ? demanda une Lieutenante-Colonelle mal dégrossie par le réveil abrupt.

La pagaille régnait dans l'enchevêtrement de tentes soulevées et démantelées par la quarantaine de femmes. Chacune s'activait à la tache... ou presque. Seule la Lieutenante Browneye demeurait inactive comme toujours, le livre à la main, assise sur une brouette remplie à ras-bord de sa moitié de bibliothèque.

- Capturer des pirates de la pire espèce, Colonelle, voilà où nous allons. Juicy Berry, ça vous dit quelque chose ?

- Ce... Ça n'est pas l'une des îles placées sous le joug des Capitaines Corsaires ? Il me semble avoir entendu parler d'un certain Satoshi

- ...Noriyaki oui. Eh bien, je n'ai pas trop compris le comment du pourquoi, mais il se trouve qu'il y a eu un coup d'état et qu'un équipage pirate s'est emparé de l'île au nez et à la barbe du Corsaire. Depuis lors, les morts y pleuvent par milliers. Le Vice-Amiral Fenyang a donc été dépêché pour empêcher la situation de devenir davantage catastrophique... et nous partons avec lui.

Tandis que la discussion progressait entre les deux officières, les dernières tentes avaient finalement été pliées et le convoi avançait désormais vers la Jouvencelle à allure soutenue. C'était que l'Amiral avait levé l'ancre près d'une heure plus tôt avec ses deux navires et son millier d'hommes... mais il était toujours possible de les rattraper. La corvette était légère et rapide, bien plus que les navires de guerre gigantesques qui n'étaient bons qu'à détruire et flottaient davantage qu'ils ne filaient sur les flots.

- Allez, on se dépêche ! rappela à l'ordre la Commodore une fois arrivée au navire, pressant le pas des dernières recrues qui arrivaient hors d'haleine... et celui de la Lieutenante arrimée à sa pittoresque brouette.

Qui fut d'ailleurs la dernière à embarquer, avant que l'on ne retirât finalement la planche pour la hisser à bord. Puis que l'on ne fît de même avec l'ancre du navire. Dans la hâte brouillonne, une femme manqua même de tomber à l'eau lors de l'opération. Le départ était précipité mais il n'y avait pas de temps à perdre : Annabella ne pouvait laisser le Vice-Amiral se payer sa tronche plus longtemps. Elle avait reconnu sa dette certes... mais celui-ci lui avait fait un ultime coup de pute en lui donnant un mauvais horaire pour le départ. Une crasse qui était loin d'être la dernière que les deux zigotos se balanceraient à la figure, c'était certain.

- En avant-toute Lieutenante ! Direction Marie-Joie, on finira bien par les croiser en route... et avec un peu de chance, peut-être même qu'on les dépassera !

Il allait voir ce qu'il allait voir, ce satané Fenyang !
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