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[Event] Quelle est la couleur de la nuit ?


[Event] Quelle est la couleur de la nuit ? Dark-brotherhood-t-shirt

C’étaient des légions de soldats qui déferlaient sur les plages de Kanokuni. En rangs organisés, ils suivaient les ordres de leurs commandants en enjambant les corps de révolutionnaires, civils et gouvernementaux. Les barges vomissaient sans cesse des soldats, livrant un décor apocalyptique. La mer était rouge de sang. Peu à peu le sable s’auréolait de nuances similaires. Ils apportaient la mort avec eux, ils apportaient la douleur et le calvaire. Loin dans les arbres, un sifflement retentit, un cri de chouette chevêche. Un corps militaire se détachait des autres et commençait à prendre la direction du cœur de l’île. Puis un autre vers le nord. Comme prévu par les stratèges révolutionnaires, l’armée se scindait pour déborder les forces en œuvre. Un second sifflement retentit, un cri de chouette hulotte. Le brouillard avait envahi l’île. Il ne semblait pas vouloir se dissiper malgré les nuages qui commençaient à gronder au-dessus de la bataille. Les corbeaux, pourtant rares à Kanokuni, offraient leur ballet de croassements. Silhouettes noires dans les arbres, ils contemplaient l’avancée inexorable de la marine, se risquant de temps à autre à picorer un œil ou une joue sur les cadavres. Puis les derniers bataillons se mirent en marche.

Un geste, les jumelles changèrent de mains. Ajustant les lentilles, l’image se fit plus nette sur un des soldats. Dépassant les autres d’une bonne tête. Il portait les traces de plusieurs combats, mais vociférait des ordres qui ne laissaient aucune équivoque. On ne pouvait percevoir ses mots, mais il était impossible de ne pas le reconnaître. Quelques œillades s’échangèrent, ainsi que des signes de tête. Un nouveau cri retentit, celui d’une chouette harfang. Qui était, cette fois, typique des collines de Kanokuni. Les colonnes sans fin de soldats s’étiolèrent, laissant une bonne partie de leurs forces stationnées dans la baie de Jing. Quelques gradés patrouillaient çà et là, distribuant consignes et diatribes. Au loin, quelques navires semblaient mouiller, leurs mâts perçant la brume au rythme du ressac. Brume qui, une fois de plus, semblait s’étoffer en dehors de toute considération logique. La fumée dévala alors sur les plages, gagnant le village par l’est. Elle s’étendit aux genoux des soldats, qui pestèrent contre ce coup du sort. Les renforts, quant à eux, ne semblaient même plus visibles : la mer était devenue blanche et opaque.

La colonne du Vice-Amiral s’étendait sur plusieurs dizaines de mètres, avançant plus de soldats qu’on ne pouvait en compter. Sur les trois voies choisies, c’était peut-être celle que les assassins avaient le moins piégé. Et pour cause, cette zone avait été le fief de Mandrake, et il y avait dissimulé là plusieurs surprises. Le combat de front n’était pas la spécialité de la révolution. Les escarmouches, les opérations de guérilla. Voilà qui avait de quoi déstabiliser une armée. C’était peut-être pour cette raison que la marine avait choisi d’avancer au plus vite, de se frayer un chemin en divers endroits pour limiter les pertes à essuyer. Mais était-ce vraiment dû à leurs propres choix ?

Loin, au large, retentit une explosion qui fit vibrer l’air de la baie de Jing. Puis une seconde, quelques instants plus tard. Une vague un peu plus violente vint frapper la côte, mais le brouillard ne permit pas de distinguer quoi que ce soit. Quelques sentinelles se retournèrent, des ordres furent beuglés. Mais la seule certitude était que quelque chose venait de se passer dans la direction supposée où mouillaient les navires de la marine. Vidés de la plupart de leurs membres, certes, mais qu’en était-il des renforts du Colonel Jakku ? Et si la révolution venait de couper toute voie de retraite ? Et si la marine était à présent coupée du monde, sur cette baie couverte du sang d’autant d’innocents que de soldats ? L’agitation gagna les troupes entraînées de la marine, dont la seule perspective de ne pas savoir ce qui se passait suffisait à jeter l’inquiétude dans leurs esprits. Les troupes s’organisèrent, rassemblèrent les armes. Se mirent en état d’alerte. On chargea les mousquets, on fortifia les bâtiments. On se prépara à se battre, à subit un siège. Mais rien ne vint. Seul le silence et le croassement des corbeaux qui se nourrissaient encore des cadavres de leurs camarades.

~~~

La colonne sous les ordres du Vice-Amiral avançait sans sourciller. Ils n’avaient pas encore rencontré un seul révolutionnaire et c’était ce qu’il y avait eu de plus étrange à remonter jusqu’ici. À peine le son d’une explosion leur parvint aux oreilles, mais n’était-ce pas chose usuelle sur une île assiégée ? Quelques pièges sommaires furent désamorcés, tant les éclaireurs paraissaient efficaces. Mais petit à petit, on commença à s’inquiéter. Quelques rumeurs gagnèrent l’arrière de la queue, ainsi que l’avant. N’était-ce pas trop facile ? Les révolutionnaires s’étaient montrés bien plus opiniâtres sur les mers. Peut-être avaient-ils choisi de battre en retraite ? Peut-être s’étaient-ils regroupés au niveau de leur prochaine cible ? Le moral oscillait entre le pessimisme pur et la fierté mal placée. Si certains se targuaient d’une victoire proche, d’autres proclamaient que le pire était encore à venir. Ils n’imaginaient pas à quel point ils étaient proches de la réalité. Et ce, dès les premiers pas aux abords de la forêt interdite.

« Vi … vice-amiral ? ppf … ppf … Un … ouf. Attendez, je … reprends … mon souffle … » fit un soldat qui semblait avoir remonté l’ensemble des troupes, les joues rougies par l’effort et le nez par le froid.

« Vice-Amiral Fenyang ! » reprit-il, saluant à la militaire.

« On rapporte une attaque sur la baie de Jing, les révolutionnaires ont ... débarqué. Le lieutenant Jameson a réussi à envoyer quelques hommes nous prévenir … ils maintiennent la position, mais il semblerait que Mandrake lui-même soit sur place !! » commença à paniquer le soldat, s’attirant les regards paniqués des hommes à la ronde.

« L’unité envoyée par le lieutenant, avec ordre du sous-amiral, bien sûr, arrive, escortée par nos hommes. Je ne comprends pas ce qu’ils racontent : une histoire de brume, de navire pris dans les flammes … et de morts qui disparaissaient dans la fumée … C’est … c’est … » tenta-t-il d’expliquer, laissant son effarement emporter ses mots dans sa gorge.
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- « Oh ? Je vois… »

Mandrake. La seule évocation du nom de cet éminent révolutionnaire suffit à susciter l’émoi chez tous mes hommes ou presque. Bizarrement, c’est quelqu’un que je n’avais jamais considéré puisque jamais croisé sur mon chemin. On vantait assez sa force et on le plaçait comme l’un des leadeurs qui gravitaient autour d’Adam. Le mystérieux Adam. Un gars que je me ferais un plaisir de buter si je le voyais sur mon chemin. J’eus un petit rire sec qui interpella quelques-uns de mes hommes, mais je fis vite de me reprendre pour ne pas laisser mon esprit s’égarer. Ce n’était pas du tout le moment. Je grattai mon crane, avant de me retourner vers Hermest et Taizo qui me regardaient d’un air stoïque. Ils étaient d’un tel sérieux que j’eus presque la chair de poule. Mais je finis par hausser mes épaules, avant de faire tourner mon cheval pour faire face à la masse de marines avec moi. Si j’avais eu le loisir de sonder leurs esprits à travers mon mantra et comprendre ce par quoi ils passaient, je trouvais le moment opportun pour rehausser le moral des troupes. Enfin, rehausser… C’était vite dit. Disons que moi-même, je n’avais pas le cœur à ça…

« ET ÇA SE DIT DES HOMMES ?! DES SOLDATS DU VICE-AMIRAL FENYANG ?! PITOYABLE ! VOUS ÊTES PITOYABLES !! Y’A DES CONNARDS QUI VEULENT S’APPROPRIER CETTE TERRE ET QUI ONT TUÉ BON NOMBRE DE VOS FRÈRES D’ARMES ?! ÇA, ÇA NE VOUS DIT ABSOLUMENT RIEN ? VOUS N’ASPIREZ PAS A LA VENGEANCE ?! ET SUR QUI LE PEUPLE PEUT COMPTER SI ON FAIT PAS NOTRE BOULOT ? RÉVEILLEZ-VOUS, BANDE DE TAFIOLES !!! C’EST LA GUERRE !!!! ON VA BUTER CES CHIENS UN PAR UN, C’EST MOI QUI VOUS LE DIT ! OUBLIEZ LA FATIGUE, CE BROUILLARD !!! PORTEZ VOS COUILLES ET ALLEZ LEUR BOUSILLER LA GUEULE ! AI-JE ÉTÉ CLAIR ?!! »


Ce n’était pas dans mes habitudes de pousser pareille gueulante, oh que non ! Et ça avait même étonné pas mal de gars. Mais après quelques secondes, fierté oblige ! Je n’étais pas le plus fin des orateurs, mais quelques mots bien placés et je le savais, suffisaient à redonner du peps à des soldats. Et je sentis le changement, et cette lueur vengeresse dans leur regard. J’eus un sourire presque carnassier en les voyant regonflés à bloc, oubliant toute peine, toute peur, toute douleur liée à une quelconque blessure. Une seule chose comptait finalement : Bousiller du revo. Dès lors, il n’en fallut pas plus pour les entendre hurler comme des bêtes, des sauvages vicieux fin prêts à faire un carnage. Une vue qui m’enivra presque. S’ils partageaient ce sentiment de haine que j’avais envers la révolution, tant mieux ! Je pouvais donc les laisser entre de bonnes mains. Je finis par me tourner vers Hermest et Taizo. Un signe bien à nous leur fit comprendre qu’ils étaient maintenant maitres des 1000 gars qui nous suivaient. Et sans tarder, une seule seconde, ils prirent le chemin de la cité rouge sans même remarquer que je m’étais décalé sur un flanc…

- « Halala… C’est dur d’être le leadeur d’une faction en pleine guerre… »

Alors que les gars s’enfonçaient bruyamment dans le brouillard, moi je tapais tranquillement la discussion avec le gars qui était venu me prévenir de la présence de révolutionnaires sur la baie et tout. J’avais même le sourire aux lèvres, nullement impressionné par ce qui arrivait. C’était les aléas de la guerre quoi. Je finis même par descendre du cheval sur lequel j’évoluais depuis avant de commencer à m’étirer longuement. Avec ce putain de brouillard, j’avais la nette impression qu’il faisait nuit. Pas pratique hein ? Un silence s’installa ensuite alors que je sentais mes gars disparaitre au loin. Les bruits de pas, sabots ainsi que leurs cris de rage/guerre n’étaient presque plus perceptibles. Ce n’est que lorsque le silence le plus total s’installa entre nous que je croisai les bras, le regard dans le vide. Intérieurement, j’avais fait le vide le plus complet et quiconque voulait me sonder avec le haki de l’observation ne trouverait absolument rien. « Tu sais qu’il a une invention très pratique qui s’appelle l’escargophone… ? » Et comme pour le narguer, je levai un bras pour lui montrer le petit appareil qui était à mon poignet et qui semblait ronfler comme jamais.

- « En plus… J’ai donné des directives assez claires… Étant donné que nous avons un effectif très limité, nous ne pouvons pas nous permettre le luxe de dépêcher un messager… Surtout en territoire inconnu ou tout peut arriver. S’il se passait vraiment quelque chose… Eh bien… J’aurai été au courant autrement… »

Ne parlons même pas du fait que mon haki de l’observation qui couvrait au moins la moitié de l’île…

- « Ne fais pas de gestes inutiles ou tu pourrais perdre la tête en un instant, gamin… » Qu’avais-je prononcé avec un sourire un peu trop bienveillant pour être vrai, ma paluche droite déjà sur la garde de mon arme. « Qui est-ce qui t’envoie… ? Ou plutôt… Qui es-tu ? »

Les dés sont jetés.


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La haine. On ne pouvait que comprendre, au sein de la révolution, que ce sentiment était le moteur de bien des guerres. Colère, amour, peur. Tous menaient à la haine. Et la haine menait les hommes à se dépasser. Quoi qu’on puisse en dire, c’étaient toujours les sentiments négatifs qui primaient chez l’homme. C’étaient eux qui le ramenaient à sa condition d’animal, d’espèce qui se voulait dominante. Evidemment, Fenyang n’était pas homme à tomber dans un piège aussi grossier. À mesure que les soldats passaient devant lui, et le messager improvisé, la tension devint palpable. L’esprit du messager était allé à toute allure, comprenant rapidement que Fenyang avait déjà percé le pot aux roses. Un pas en arrière et c’était la mort assurée, un mot de travers et c’en était fini de lui.

« Au … au courant autrement ? On m’a dit de venir vous voir directement, Vice-Amiral … je n’ai fait que suivre les ordres de … » commença-t-il à se justifier.

Mais il était évident qu’aucune troupe n’était venue depuis le village. De la même manière que Fenyang n’avait pas dû sentir ses hommes mourir au loin, seulement s’agiter et paniquer. Comment un simple messager, déguisé, pouvait espérer faire face à des pouvoirs dont il ne comprenait pas la nature même ? Il frémit en croisant le regard du commandant, sentant presque le couperet sur sa nuque. Puis la peur qui masquait ses traits sembla s’effacer. De même, l’ondée paniquée qui caractérisait sa voix s’atténua peu à peu. Il modula ses traits, ses émotions, pour devenir aussi lisse que le Vice-Amiral.

« Tu as mis plus de temps que je ne le pensais … » reprit le messager, avant de se redresser.

Adoptant un port un peu plus altier, il sembla grandir et l’air penaud qui l’imprégnait un peu plus tôt s’évapora. Suffisant, il posa à son tour sa main à sa ceinture. Il soutint le regard d’Alheïri et d’un geste s’essuya le visage. Les quelques traits de maquillage disparurent pour révéler un menton large et une cicatrice barrant un œil gris. Dans le même temps, les habits de soldat tombèrent à terre, ne révélant qu’un homme auréolé de fumée, à la tenue caractéristique des assassins de l’Umbra. Sa capuche tombée sur ses épaules laissait son visage libre de toute identification. À un mètre à peine du terrible Fenyang, il s’épousseta, chassa la fumée qui tiraillait encore les replis de sa tenue.

« … mais il est sage de ta part d’avoir voulu éloigner tes hommes. Nul doute qu’ils auraient fait office de dommages collatéraux. » poursuivit l’assassin, faisant jouer les jointures du gantelet métallique qui ceignait son poing droit.

Une fréquence un peu plus aigüe perturba sa voix intérieure, laissant transparaître une joie inquiétante. Un plaisir non dissimulé à se trouver ici, en cet instant. Et, même, un peu d’autosatisfaction. À le voir, s’être fait épingler par Salem ne semblait pas le gêner le moins du monde. En un sens, cela paraissait même l’avoir soulagé.

« C’est une longue histoire que nous avons tous les deux … mais je n’avais pas envie de te tuer d’une dague dans le dos, sans que tu ne saches pourquoi tu es mort. » continua Rafaelo, faisant signe à son adversaire de venir s’asseoir avec lui.

Ce faisant, l’assassin sortit une bouteille de sa besace et il s’accroupit sur un rocher avant d’en boire une lampée. Il goûta le breuvage avec plaisir, noyant cette excitation qui lui broyait les tripes depuis qu’il avait commencé à se diriger vers Alheïri. Une légère aura diaphane entoura ses épaules.

« Nous avons fini de jouer les justiciers pour une pomme ou l’honneur d’un mioche. Aujourd’hui, nous nous retrouvons en tant que têtes montantes de nos camps respectifs. Nous avons fait bien du chemin … malheureusement, le mien ne peut pas se poursuivre sans mettre un terme au tien. Je te dois bien un combat dantesque, non ? En face à face. Poing contre épée. Assassin contre soldat. Révolutionnaire contre Marine. » fit-il, avant de tendre la bouteille à son rival.
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- « Ma lame, hé ? Tu t’en penses digne ? »

Un affreux sourire déformait mon visage qui n’avait presque plus rien d’humain. J’avais attendu ce jour depuis des années ! D’ailleurs, je l’avais cru mort à un moment. Il faut dire qu’il s’était fait discret comme moi je l’avais été il y a deux ou trois ans. J’eus un ricanement qui n’augurait rien de bon et d’un geste étonnement rapide et plus que violent, je dégainai ma lame et lui décochai une lame de vent. Cette dernière bousilla la bouteille contenant je ne sais quoi, éclata le rocher sur lequel il fut et alla même raser quelques petits arbres derrière. Lui ? Intact bien entendu. Logia oblige. L’attaque était passée à travers son corps sans provoquer le moindre dégât. Ah… Pouvoir de lâche ! Mais qui lui collait bizarrement bien au cul, je devais l’avouer. Pour autant, je ne fus nullement impressionné. Mon sourire redevint un peu moins effrayant même. Mon initiative était un doigt d’honneur en quelque sorte ; et je devais avouer que ça m’avait bien calmé. Boire la même chose que ce gars-là ? Sans façons ! Rien que le souvenir de « Gabriel » m’irritait. Cependant, j’avais assez d’expériences pour savoir que la colère n’était pas forcément un bon moteur pour une bataille de ce genre. Un combat à mort histoire d’en finir une fois pour toute hein…

- « Maintenant que j’y pense, je suppose aussi que ce brouillard est ton œuvre hein… »

Si je visais juste, ça allait être plutôt marrant. Préparer le terrain et être autant avantagé… Bon Dieu ! J’étais dans une sacrée merde ! Pour autant, je gardais mon calme. Quelques coups dans le vide générèrent des ondes tranchantes qui dispersèrent le brouillard autour de moi… pendant quelques secondes seulement. Il y en avait trop et m’en débarrasser demanderait un très gros effort. Quoique tout allait se jouer sur de petits détails et aucun aspect de cette confrontation n’était à négliger. « Bon, je suppose que je n’ai pas vraiment besoin de ça pour le moment… » C’est non sans un long soupir que je rangeai mon sabre dans son fourreau. Avec mon haki de l’armement pas encore bien maitrisé, je n’avais droit qu’à quelques coups limités. J’allais donc attendre le moment opportun pour m’en servir et faire mouche. Enfin… Quelque part, il devait s’en douter le bougre. En lieu et place de mon épée, c’est dans le plus grand des calmes que je fis sortir des paires de menottes en granit marin. Ces dernières n’avaient pas la forme conventionnelle et habituelles qu’on pouvait trouver dans les prisons et autres. C’était de gros bracelets/poignets grossiers mais resserrés qui étaient reliés par des chaines. Après passé une paire à travers l’autre pour chaque main…

J’avais maintenant une paire improvisée de nunchakus dans chaque paluche à partir de menottes entrelacées.

- « Ça devrait faire l’affaire ! »

Comme un moine, je me mis à les manier à une vitesse effarante. Le brouillard autour de moi se dégagea suite à mes mouvements assez brusques. Vu comment je m’en servais, je pouvais aisément broyer un membre avec. Le bruit de mes armes qui fendaient le vide en disait long. Ça claquait sévère. On aurait presque dit que j’étais paré à le fesser avec ! Pour un dernier test, je m’amusai à l’agiter à ma gauche, en direction d’un arbre. Ce dernier dans un bruit assez sourd, finit par céder. Les lames de vent occasionnées n’étaient pas aussi puissantes qu’avec mon sabre, mais elles avaient le mérite d’être presque invisibles et assez discrètes. Ça pourrait certainement servir. Puis, sans crier gare, soru. D’un seul coup. Il était vain de perdre du temps en palabres inutiles. Je n’étais plus disposé à l’écouter et l’heure n’était de toute façon plus à la parlotte. Comme si je le jaugeais ou que j’attendais un angle mort, je me mis à me déplacer en cercle autour de lui. Soru par ci, soru par là… La vitesse et l’esquive allaient être également de principaux atouts pour parvenir à bout de cet enfoiré. Mon manège dura une bonne trentaine de secondes, quand enfin je décidai à l’attaquer en surgissant brusquement dans son dos et en lui assenant un violent coup avec mes menottes, destiné à lui perforer le crâne. Le combat venait de commencer, pour ainsi dire…


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La bouteille vola en éclats, son liquide maculant les arbres devant Alheïri. Aussi tôt, le liquide commença à attaquer les éléments organiques en laissant échapper une odeur âcre. L’assassin vola en éclat, avant de se rassembler, debout. La forme fumeuse mis quelques secondes à gagner en contraste. Elle révéla un Rafaelo en garde, un léger sourire en coin. Il laissa s’écouler hors de sa main le liquide qu’il avait fait semblant d’ingérer. Il goutta à terre, calcinant les quelques plantes qui avaient survécu à l’attaque du Vice-Amiral. La puissance du coup avait rasé une partie du bosquet attenant. Le révolutionnaire n’était pas le seul à s’être entraîné.

« Voyons, Salem … ce serait mal me connaître. »
minauda-t-il, retrouvant tous ses mauvais instincts au contact de son adversaire.

Lui, préparer le terrain et se donner un avantage non négligeable pour être sûr d’emporter son adversaire dans la tombe ? Voyons … Le brouillard se dispersa pour retomber à terre en un miasme qui collait à la peau. Il était chargé de quelques particules que l’assassin se gardait bien de maintenir attachées à son corps. Il ne savait pas jusqu’où le marine était allé. Et si lui, assassin et tueur de son état, avait pu maîtriser le fluide de l’armement, que demander d’un bretteur d’exception ? Bien entendu, il aurait été idiot de penser que Salem se serait privé de trimballer avec lui un atout tel que le granit marin. Cela faisait partie de l’équation. Une constante non négligeable certes. Mais constante tout de même. Les variables ? Elles arriveraient bien assez vite. Depuis, Rafaelo avait appris bien des choses sur le granit marin. Notamment sur sa source … et sur quelques plans malicieux tirés de ponéglyphes. S’en suivit quelques katas de la part de Salem, destinés à … à on ne savait quoi d’ailleurs. Le révolutionnaire ne resta pas sans rien faire pour autant, activant discrètement quelques mécanismes disposés dans la bourse qui pendait à sa ceinture. Chacun ses préparatifs. Quoi qu’il en fût, c’était une aubaine pour lui, maître du corps à corps. Sabre contre sabre, il aurait eu du mal à faire face à la maîtrise de son adversaire qui, il fallait le rappeler, avait déjà brisé l’antique rapière de la famille Auditore dans leur dernière confrontation.

« Ne te donne pas la peine de le disperser … le brouillard reviendra toujours. »
railla l’assassin, une fraction de seconde avant que l’assaut ne fut donné.

Si l’attaque de Salem aurait pu en surprendre plus d’un, la vitesse et la maîtrise du mantra de Rafaelo, qui en faisait sa fierté, n’étaient pas de cet avis. Il garda, pour la peine, son intégrité physique et offrit à son adversaire l’occasion de goûter aux arts de l’Umbra. Sans frémir, l’assassin écarta les pieds, et laissa les mouvements autour de lui trahir les intentions de son opposant. Puis cela vint, presque sans crier gare. Mais Rafaelo avait un plan bien précis en tête. Il pivota, offrit son gantelet métallique pour encaisser le coup. Il accueillit le coup de poing de Salem dans le creux de son gant, plaçant son autre main pour accuser le coup. Ses deux pieds s’enfoncèrent dans le sol, creusant des sillons qui se propagèrent des mètres à la ronde. L’onde de choc souffla une partie de la fumée, balaya quelques arbres fut audible des centaines de mètres autour d’eux, comme un canon aurait pu le faire. Un coup gong pour le début d’un combat dantesque.

Prenant garde de ne pas maintenir directement le contact avec le granit, l’assassin relâcha l’étreinte. Il se glissa sur le côté et relâcha d’un revers du bras quelques dagues de fumée qui éclatèrent sur Salem sans plus d’effet que propager encore plus de fumée. Elles éclatèrent avec le son d’une bulle qui explose mais au milieu de l’une d’elles, ce fut Rafaelo qui apparut, genou dressé vers la tempe de son adversaire. Un autre filet de fumée le ramena en arrière avec le même son caractéristique, une vitesse qui ne pouvait que rappeler celle du soru. Emporté par l’aspiration de sa technique, il roula en arrière et planta ses griffes d’acier pour arrêter sa course folle. Il releva la tête et sourit en contemplant Salem.

« Va falloir sortit l’artillerie lourde … »
s’amusa-t-il avant de disparaître purement et simplement.

De l’assassin ne resta alors nulle trace. Un silence de mort s’installa autour du Vice-Amiral tandis qu’un vent glacé se leva. Il ne fallut que quelques secondes pour comprendre ce qu’il se passait. La fumée doubla de volume et sembla s’animer d’une volonté propre. En un instant, elle déserta le sol pour gagner les hauteurs. Trois éclats fauves et tranchants jaillirent des cieux pour fondre sur Salem, ajoutant au mordant de l’air la densité mille fois décuplée de la fumée de Rafaelo. Les trois émanations s’écrasèrent sur Alheïri, perforant la terre sur plusieurs mètres et couchant autant d’arbres que lui. Moins dévastatrices que les lames d’air du Vice-Amiral, ces attaques suffirent tout de même à faire trembler le sol. La fumée, quant à elle, garnissait de nouveau la terre comme si elle ne l’avait jamais quitté.

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- « L’artillerie lourde, hein… ? »

Alors que la fumée reprenait « ses droits » sur la terre ferme, la poussière se dissipa et laissa place à ma gueule ensanglantée. Son coup de genou, il fallait avouer que je ne l’avais pas du tout vu venir ! Je saignai au niveau de la tempe, mais il ne s’agissait que d’un mince filet carmin qui ne gênait même pas ma vue. Pas de problème donc. Par contre, sa dernière attaque, j’avais eu le temps de la voir venir. S’il était rapide, je l’étais aussi. S’il maitrisait le haki de l’observation, je le maitrisais aussi. Peut-être bien mieux qu’il ne le pensait lui-même. Pour autant, je n’avais pas bougé. J’avais juste dégainé ma lame à la vitesse de la lumière pour dévier ses techniques qui mitraillèrent le sol, mais qui m’avaient loupé au final. Des attaques qui ressemblaient à celles des sabreurs ne pourraient jamais vraiment me surprendre, tout comme il était rompu, lui, au corps à corps. Logique oblige non ? Ceci dit, il avait l’avantage. Un très gros avantage même. Il avait même réussi à m’avoir à la tempe. Une tel coup aurait certainement tué l’un de mes lieutenants sur place. C’était chiant à dire, mais ce type était devenu très fort. Un vrai assassin, quoi…

- « Halala… Quelle plaie… C’est un concours de logia ou quoi ? D’abord ce dénommé Clotho et ensuite toi… Vous vous êtes passés le mot ou quoi ? »

Celui-là était particulièrement bâtard dans le sens où il pouvait se dématérialiser à volonté et se camoufler dans l’environnement comme un enfoiré. Il avait bien préparé son coup, le bougre. J’étais sûr qu’il était dans le coin non pas pour la cause de sa faction, mais sans doute pour ma gueule en premier. Franchement, ce fait ne m’étonnerait même pas. Maaaah… Je pouvais me sentir honoré, non ? Venir spécialement pour ma gueule… Préparer le terrain à l’avance en supposant que je passerais sur ce chemin… Définitivement, cette faction avait toujours un coup d’avance. J’eus un petit rire finalement. Il n’avait pas vraiment tort le gars. Sortir l’artillerie lourde. J’avais pas le choix. Pour ma part, il ne fallait pas que le combat s’éternise. Ça me chagrinait un peu que de devoir griller une cartouche, là, maintenant, mais le caractère tordu de son fruit ne me laissait pas vraiment le choix. Haussant les épaules, je me mis à faire pousser ma chevelure de façon exagérée. Lorsqu’elle fut au creux de mon dos, je stoppai le processus et m’arrangeai à faire mouvoir deux longues mèches qui comme des bras, se saisirent des paires de menottes.

Mes mains étaient maintenant libres. Je pouvais manier mon sabre avec plaisir !

Je fermai les yeux pendant quelques petites secondes, jusqu’à ce que je sente une oscillation dans l’air qui avait l’air naturel, mais qui avait un défaut près de 0.01%. J’eus un sourire large et je fonçai comme une brute à ma gauche. Il était là-bas, aucun doute possible. Si son art de l’assassinat était peut-être parfait et sa maitrise du fruit plus que complète, il n’en demeurait pas moins qu’il était doté d’une « présence ». L’une des plus fortes de ce monde. Taper la discussion avec lui m’avait permis de reconnaitre ladite présence et de m’y habituer. C’était ce qui était à la fois pratique et handicapants quand un puissant affrontait un autre puissant. Il y avait des détails et nuances qui n’échappaient plus à la perception de chacun des adversaires. C’est fort de ce constat que je multipliai les sorus jusqu’à arriver à son niveau. Lorsqu’il fut à la porte de ma lame, j’enchainai les estocades comme un fou et ce avec une violence inouïe. Mes tentacules capillaires suivaient le mouvement en faisant claquer les paires de menottes en sa direction. Mon visage fut une nouvelle fois déformé par un sourire plus qu’inquiétant. Rafaelo était assailli de partout.

S’il n’évitait pas spécialement les menottes qui le toucheraient, il allait s’essuyer de gros trous dans le corps.

Et ça allait faire mal.

Très très mal.


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Et ce fut que qu’Alheiri fit, bien évidemment. Par une technique que l’assassin jugea ridicule, il se fit pousser les cheveux. Intrigué, il le laissa pourtant procéder à ses tours, ne comprenant que trop tard que c’était là une des utilités du retour à la vie. Il vit la masse capillaire s’emparer des menottes, ne sachant même pas qu’une telle chose était possible. Il avait vu les manifestations de ce pouvoir chez Oswald et savait pertinemment que Fenyang avait les fruits en horreur. Mais il avait déjà entendu parler de tels pouvoirs, aussi aberrants étaient-ils. Ne venait-il pas, d’ailleurs, d’occire un agent capable d’hypnotiser ses pairs en jouant des doigts ? À croire que les pouvoirs tirés par les cheveux, et c’était le cas de le dire, n’étaient pas l’apanage des fruits du démon. Il tenta de masquer au mieux sa présence, inspectant l’état de son adversaire. Il fut ravi de constater qu’il avait réussi à l’atteindre, mais ce plaisir tout relatif fut de courte durée. Et, pour une fois, ce ne fut pas parce que quelqu’un avait mentionné de traître de Clotho devant lui. Clotho qui se trimballait sur l’île comme si de rien n’était, aidant la révolution qu’il avait trahi … Cela faisait partie des choses dont il avait parlé avec Freeman. Des choses qui changeraient bientôt, il l’espérait. Mais pour cela, il devrait vaincre Salem. Or, si l’assassin excellait à se dissimuler, son adversaire excella à le découvrir. La brume ne représentait rien pour un homme maîtrisant le fluide de perception. Il sentit plus qu’il ne vit Fenyang se diriger vers lui à toute allure. L’assassin serra la mâchoire. Cela confirma qu’une attaque discrète et expéditrice aurait été vouée à l’échec.

Reprenant consistance dans la brume, il pesta contre le sort qui voulait que Salem se soit autant amélioré que lui. Fort de ses nouveaux pouvoirs, il était revenu de Skypeia en se fondant de nouveau dans le rôle de l’assassin. Mais aujourd’hui, il ne se laisserait plus marcher sur les pieds. Les cheveux maniaient les menottes et les mains son épée ? Il ne pouvait demeurer intangible et faire face au granit marin. Alors il lui faudrait se battre. Il lui faudrait tirer une de ses cartes de sa manche. Entre deux arbres surgit alors sa Némésis, lame au clair et cheveux au … vent ? La peau de l’assassin était devenue légèrement grise, oscillant entre le terne et l’ébène. Toujours constitué de fumée. Mais pas n’importe laquelle. Moins dextre, moins prompt à s’esquiver il faisait front, une dague dans sa main gauche, pointe vers le bas, et son gantelet métallique, griffes dehors. Puis un. Deux … trois ? La première apparition s’évanouit sous le premier coup d’épée de Salem, qui ne fut pas dupe sur la véritable localisation de l’assassin. La seconde disparut d’elle-même avant qu’un coup de menottes en granit marin ne vienne la détruire. Quant à la dernière, sa couleur n’oscillait plus. Elle était d’un gris si profond qu’on l’aurait cru noir. Poisseux, même. D’une densité extrême, il semblait plus élastique que vaporeux. Et pourtant …

Les armes de l’assassin vinrent au contact du granit marin, contenant l’assaut qui aurait neutralisé ses pouvoirs. La première lame de Fenyang passa à travers son corps sans même le séparer, glissant sur ses entrailles comme à travers l’eau. Sans le toucher ni le blesser. Puis s’entama un bal d’esquives qui le mirent hors de portée des menottes. Le Vice-Amiral ne s’arrêta pourtant pas là. Ses coups d’estocs firent l’effet de boulet de canon, perforant les cieux et la terre de sa force démesurée. Les coups frappèrent l’assassin, frappant la fumée poisseuse. Certains ne parvinrent à passer cette défense, s’enfonçant dans la fumée rendue dense par le haki de l’armement. D’autres rebondirent sur sa coque impénétrable. Mais certains furent placés de si près qu’ils emportèrent suffisamment de matière avec eux pour s’enfoncer profondément dans le sol, et creuser des cratères d’impact. Devoir révéler aussi vite la technique qu’il avait développé exprès pour ce genre de combat, c’était rageant. Mais entre survivre et mourir, le choix était vite fait. Tout ce dont il avait besoin, c’était d’un seul coup. De se placer suffisamment près pour placer l’impact le plus puissant possible. Or, si sa défense lui permettait d’encaisser les premiers échanges, cela ne serait pas possible indéfiniment. Cette forme avait quelques inconvénients, il fallait le dire.

« Surprise … » railla Rafaelo, faisant surgir une lame noire de fumée entre ses mains.

Il se glissa sous la masse capillaire et trancha dans le vif en encaissant un nouvel assaut d’estocs puis, profitant de la légère ouverture générée, il s’appliqua à reproduire sa taillade fumigène, au plus près de son adversaire. Une fraction de seconde aurait suffi. Mais il avait sacrifié sa vitesse pour sa protection et ce fut un poing chargé en granit marin qui le frappa dans les côtes. La fumée se dispersa, alors qu’il alla s’enfoncer dans la terre plus loin. Elle révéla alors une armure clairsemée d’haki de l’armement. Il roula sur le côté, secouant la tête des étoiles qu’il était en train d’apercevoir. Un goût âcre envahit sa bouche. Se tint les côtes et se fondit de nouveau dans la fumée. Le coup avait perturbé ses défenses et sa concentration, lui faisant perdre sa forme étudiée, chargée de haki. Le fluide l’avait tout de même protégé du pire. Un coup qui aurait pu détruire un navire entier. Il l’avait senti résonner dans chacun de ses os. L’inconvénient de ses taillades c’était qu’il ne pouvait savoir s’il avait réussi à toucher Fenyang. Par précaution il s’était de nouveau retiré dans la brume, avant de se reformer en hauteur, dans les airs. Le logia avait cet avantage que ses côtes, fêlées ou brisées, ne demeuraient pas éternellement un problème. La douleur était toujours là, mais elle n’était plus handicapante.

Ce n’était pas une raison pour se reposer sur cela uniquement. L’assassin ferma le poing, attirant à lui toute la fumée environnante. Elle se mua en un courant continu et puissant qui tournoya autour de lui. Il n’avait pas encore joué toutes ses cartes.
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Si ces fameuses taillades m’avaient touché ?

Bien sûr que oui. J’en grimaçai même. Mon corps était recouvert d’estafilades en tout genre. Petites, grosses, profondes, peu profondes… Bref, ce bâtard m’avait eu. Il faut dire en même temps que je n’avais pas vraiment cherché à esquiver ses attaques. J’étais tellement à fond dans les miennes que j’avais tout simplement occulté l’optique de la défense. Parce que bon, contre un type pareil et avec mon haki pas du tout au point, j’avais pas tellement le choix. C’est d’ailleurs ce que je regrettais. Un haki pas terrible. Si seulement j’avais plus poussé à l’entrainement, peut-être que je n’en serai pas là. Mais les remords s’évaporèrent complètement lorsque je me souvins que je l’avais découvert quelques semaines auparavant seulement. Gueule de dépit. Maturité bien trop tardive d’un pouvoir aussi précieux que celui-là puisqu’il était dit que le haki sommeillait en chaque être humain. Maaah… Peu importe… Là tout de suite, le gusse m’inquiétait à s’être replié dans les airs et à faire appel à toute sa fumée de merde dans les environs. Il préparait quelque chose de lourd cette fois. Et il avait bien raison. Si je cherchais à trop préserver mes chances, j’allais finir par clamser ici. Ça plus le fait que mon armée n’avait aucune chance si j’étais neutralisé.

Dans l’ensemble, le succès de notre intervention sur ces terres dépendait de ce combat.

J’aimais pas trop ça. Penser boulot ou penser à la survie de mes hommes alors que le type que je haïssais le plus se trouvait face à moi. Le je-m’en-foutisme, dans la tête c’est bien beau, mais dans les faits, c’est un poil plus compliqué. Du coup, j’avais pas le choix. J’allais abattre mes meilleures cartes dans les minutes qui allaient suivre pour pouvoir me tirer ici en vitesse. En plus, s’il avait mentionné ce chien de Mandrake, c’est qu’il devait être présent dans le coin. J’imaginais pas le carnage si jamais il était à la tête des révolutionnaires basés à la cité rouge, là où mes gars progressaient lentement mais surement. Je me mis donc à courir çà et là pour choper mes menottes de granit marin dont il avait réussi à me séparer temporairement et une fois que toutes les paires furent récupérées, je me gagnai moi aussi les airs via des geppo à quelques mètres de lui. La masse fumeuse devant moi devenait plus qu’importante. On aurait presque dit un dôme ou un cocon quasi inviolable. Toujours armé de mon épée -mes mèches tenant les menottes-, j’engendrai quelques lames de vent vers sa direction, mais quedal. C’est à peine si mes attaques éparpillaient un peu partout la fumée que le gars essayait d’accumuler pour je ne sais quoi. Chiant…

Puisqu’il ne bougeait toujours pas, j’avais pas le choix alors. Il fallait attaquer. Et très fort !

J’eus un sourire carnassier et me concentrai comme personne. En l’espace de quelques secondes, une matière noire se mit à recouvrir mon corps… Puis mes cheveux… Puis ma lame. Black armor comme Yamamoto l’appelait. Un full haki combattif, idéal pour l’attaque comme pour la défense. Le problème, c’est que je ne pouvais pas maintenir cet état pendant plus d’une minute. Mais c’était largement suffisant pour ce que je voulais faire. Par la suite, je fléchis mes genoux comme si je prenais appui sur une matière solide, puis je m’élançai à toute vitesse vers la gigantesque fumée. J’étais comme un boulet de canon qu’on ne pouvait pas éviter. Soit il me déviait, soit il me faisait face, mais vu la vitesse à laquelle je fendis les airs et mon haki que j’avais fait émerger, il n’y avait pas moyen que je le loupe ! Mes yeux clos, je me fiai à mon mantra. En générant des lames de vent un peu partout, je réussis à dégager une bonne partie de la fumée autour de lui. La sensation était carrément désagréable une fois dedans, parce que je me faisais carrément enfumer, mais pourtant, je n’en démordis pas ! C’est d’ailleurs en le sentant que j’eus un sourire encore plus sadique et que je finis par fermer ma poigne sur ce qui semblait être l’un de ses membres.

- « SUUUURPPRRIIIISEEE ! ♪ »

Même si c'en était pas vraiment une.

Rafaelo put voir à quel point j’étais horriblement laid et flippant à sourire de la sorte. L’attaquer ? Nooon. Vrai que je pourrais, mais le bougre était capable d’esquiver malgré tout. Alors plutôt que de lui foutre un pain, je resserrai ma poigne sur son avant-bras valide que j’avais réussi à choper. Bah, c’était ça, le problème des logia de son genre : Se transformer en son élément et augmenter le volume de son corps en faisait une cible bien plus imposante pour qui maitrisait un tant soit peu le fluide combattif. J’étais pas au stade de la maitrise totale, mais je pouvais au moins faire ce que je faisais à présent. La fumée voulait me rejeter loin, mais je tins bon, avant de m’aider de ma longue chevelure qui jaillit sous formes de plusieurs mèches tentaculaires pour mieux  enserrer ses autres membres. En quelques secondes seulement, je fus complètement accroché à son corps, même si mes poumons se remplissaient de sa fumée qui me niquait également les yeux pourtant clos. Ne pouvant même plus parler -et subissant sans aucun doute ses coups-, je n’eus d’autres choix que d’accélérer le processus : Lui menotter son bras valide. J’avais pour cela utilisé deux paires. Sauf que bien avant le temps limite ne soit écoulé, mon haki commença à disparaitre, me forçant à le lâcher…

Et à me barrer de sa zone enfumée via de multiples sorus.

Le souffle court, je ne pus même pas modifier la trajectoire que mon corps décrivait…

La preuve en fut que je chutai lourdement aux abords de la forêt, avant d’aller me cacher pour un temps derrière un gros arbre, le souffle me faisant défaut.

Mon avant-bras gauche était quasi-out. Je l’avais gonflé au dernier moment à l’aide du retour à la vie pour amortir ma chute. Atterrissage presque ratée.

Pendant les prochaines minutes, j’allais être pas mal vulnérable…

Tu parles d’une idée d’génie ! J’savais même pas si j’avais réussi à le correctement menotter…

Si c’était le cas, il était lui aussi dans la merde. Les clefs n’étaient pas sur moi.


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La fumée tournoyait en émettant des sons stridents. Des branches éparses s’étaient prises dans le mouvement et fouettaient l’air de leurs doigts raidis par l’hiver. Irrégulière, la masse grisâtre émettait les sons de milliers d’oiseaux pris dans une tornade en formation. En quelques instants, le terrain devin de nouveau dégagé, révélant les arbres couchés et les ravages du combat. C’était un coup qui en valait mille. Le soleil, déjà noyé dans la masse brumeuse, fut caché par une ondée aux relents noirs. Non contente de se rassembler, la fumée était animée d’une volonté propre, gagnant les cieux et jouant parmi les nuages. Agressive, elle prit la forme d’une main colossale. Les doigts s’écartèrent, le poing se resserra et …

[Event] Quelle est la couleur de la nuit ? Dracula_untold_2014_pic02

Une main de fer surgit des méandres fumigènes. Séparant l’ondée funeste, elle s’empara de l’épicentre. Puis il y eu l’impact. Ou plutôt à se demander quelle aurait été la puissance de l’impact sans cette interruption malvenue. Perçant la fumée, la main d’Alheïri se referma sur le bras valide de Rafaelo à l’instant même où la terrible vague noire perforait la terre. Il y eut un grand fracas qui fractura la terre puis la fumée retomba à terre en redevenant cette masse intangible qu’elle aurait toujours dû être. Quand à ce qu’il s’était passé au sein de la tempête, nul profane n’aurait pu le décrire. Un enchaînement de chocs, de passes et d’esquives à un rythme si effréné qu’on ne perçut que le contrecoup du poing géant qui s’estompa une fraction de seconde à peine après avoir touché terre. La fumée masqua à nouveau la scène, peu de temps après l’avoir révélée.

Les secondes s’étirèrent. Le calme après la tempête. La brume s’étiola légèrement, secouée par une brise naissante. La terre avait été fendue sur le lieu d’impact, tandis que plus loin trônait le témoin des coups vengeurs de Salem, une myriade de tranchées profondes marquait la terre. Un champ de bataille dressé par la force de deux hommes, seulement. Monstres aurait été plus adéquat. Mais, au fond de ce gouffre de terre et de fumée, on perçut un son. Un son qu’on n’avait pas entendu depuis des années.

Le son d’un assassin qui toussait à cause de la fumée. Le son d’un assassin séparé et privé de son pouvoir.

Il se releva, une main engoncée dans le mécanisme froid du granit marin, le visage ensanglanté. Ses habits étaient crottés de terre et son gantelet métallique pendait à son côté, privé de vie. Au contact du minerai, une langueur sans pareille l’envahissait et ses forces le quittaient petit à petit. Pourtant, il luttait. Grognant de douleur, les deux pieds enfoncés dans la terre boueuse, le cratère se remplissant des nappes phréatiques perforées. L’eau et le granit marin. Horrible combinaison. Le temps était compté, il ne pouvait se permettre de laisser des entraves aussi risibles avoir raison de lui. Mais privé d’une main, comment espérer crocheter cette serrure ? Comment percer cette serrure inviolable ?

« Bon sang … ça va piquer … » se murmura-t-il, tandis que son sang gouttait dans l’eau.

Une lame d’acier perfora sa main, glissant sur ses métacarpes et sectionnant muscles et tendons. Un grognement de douleur s’en suivit, alors que l’eau gagnait de plus en plus de terrain. Ou alors était-celui qui glissait de plus en plus ? Le métal repartit dans sa gaine dans un chuintement poisseux. Le tissu de sa manche commençait à boire le liquide chaud, qui coulait de sa main trouée. D’un geste sec, l’assassin tenta de faire passer son membre blessé à travers l’anneau serré des menottes. Os brisés, muscles tranchés … il s’arracha une partie de la peau dans ses efforts. Il lâcha un juron de douleur, se demandant encore comment Salem, qui n’avait que subir ses coups jusque-là, avait bien pu se frayer un chemin jusqu’à lui. Dans un dernier cri de douleur, il parvint à arracher sa main à l’étreinte douloureuse du minerai marin. L’eau boueuse à ses pieds se teintait peu à peu du rouge de son propre sang. Mais, déjà, ses blessures commençaient à laisser échapper une légère fumée. Tirant sur le carmin, elle reprit peu à peu de son gris d’antan. Les menottes tombèrent dans l’eau et le gantelet de l’assassin reprit vie. Les gouttes de sang qui tombaient de ses doigts se transformaient en fumée avant de toucher terre.

Engoncé dans le cratère qui se remplissait, Rafaelo laissa sa tête reposer contre la terre, soupirant de soulagement. Si l’adrénaline, liée à la panique de sa situation, l’avait aidé à lutter contre la douleur, il en subissait à présent le contrecoup. Salem l’avait surpris. Il s’était fait un chemin jusqu’à lui, passant à travers la déferlante fumigène. Par quel miracle, il n’en savait rien : il n’avait pas eu le loisir de voir autre chose que son facies déformé par la folie. Etait-ce encore une des lubies de son étrange capacité ? Il se battait avec chaque cellule de son corps. Comme lui. L’assassin soupira. Il se baissa, attrapa les menottes de son gantelet de métal. Il lorgna l’objet de son supplice. Où était donc passé le Vice-Amiral ? Sa voix, bien que ténue, était encore perceptible. Il était tapis dans les ombres, à préparer on ne savait quel coup … Il fit rouler ses épaules, chassant la langueur qui s’emparait de nouveau de lui. Il ne laisserait pas Fenyang l’avoir deux fois de la même manière. L’objet tomba dans l’eau, pour y rester. L’assassin remonta péniblement le cratère, quittant l’eau et marquant la terre de ses pas. Puis, une fois en haut, il sonda de nouveau le terrain de son esprit, guettant le moindre coup fourré. Il le sentait, à la limite de mantra. Il était là. Observait-il ? Etait-il blessé ? Cela ne changerait rien. Il leva la main, attirant de la fumée à lui, puis l’appuya contre la terre. Le sol écarté, du cratère frémit avant qu’une lame aussi dense qu’un foret ne vienne provoquer un glissement de terrain suffisamment lourd pour ensevelir le granit marin.

Le révolutionnaire resta quelques secondes à reprendre son souffle, main sur terre. La fumée était encore là, mais il craignait à présent de trop se connecter à elle. Ainsi prit-il le temps de vérifier l’état de sa main reconstituée et de faire jouer les articulations de son gantelet gris. Il se redressa, ferma les yeux. Alheïri avait été séparé pendant bien longtemps de ses hommes, maintenant. Il était temps de lancer la seconde phase de ce combat. Il y avait deux manières de vaincre un homme. N’ayant plus la force suffisante pour étendre sa fumée aux limites de sa perception, c’était de toute manière la suite logique des évènements. Rafaelo sortit un denden blanc de sa sacoche, qui avait survécu aux divers assauts. L’animal semblait avoir un peu le mal de mer, mais se révéla tout de même fonctionnel.

« Jonas ? Le Vice-Amiral est avec moi. Tu peux t’en donner à cœur joie. »


Un frisson parcourut l’échine du révolutionnaire. Car au loin, des voix commencèrent à hurler leur peur de la mort. Quel que soit le camp, ce n’était jamais chose agréable à entendre.
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En s’amusant à me provoquer de la sorte, il venait de signer son arrêt de mort…

Comme une furie, je sortis de nulle part et fonçai sur le logia à coup de soru et de geppou. Comme pour tout à l’heure, mon corps était recouvert de haki. Je faisais usage là de ma dernière cartouche concernant ce pouvoir. Il me restait encore un dernier coup de poker, mais je n’allais m’en servir qu’en cas d’ultime recours. Sinon, en attendant, c’était un gigantesque gars de plus de trois mètres qui fendait le vent et qui se projeta vers le gris. Ce dernier n’eut même pas le temps de se dématérialiser qu’un coup de poing sauvage s’écrasa contre son pif de façon odieuse et impitoyable. Un craquement se fit entendre. Craquement qui ferait grincer les dents de n’importe quel homme. Puis s’en suivit un enchainement particulièrement hargneux. Des droites, des droites et encore des droites. Tout témoin oculaire aurait eu la nette impression que Rafaelo s’était transformé en vulgaire punching-ball. L’idée était de le défigurer complètement. Non ! Mieux ! De le buter pour toujours ! Ce fils de pute venait de toucher un point sensible et le moins qu’on puisse dire, c’est que sa piètre provocation avait marché. Mes hommes étaient sacrés à mes yeux ! Sauf que même en le sachant pertinemment, j’étais quand même tombé dans le panneau…

Il avait réussi à me faire sortir de mes gonds et à arrêter de penser rationnellement. Il avait maintenant l’avantage psychologique…

« CRÈVE ! CRÈVE ! MAIS CRÈVE BÂTARD ! »

Après une vingtaine de secondes à le puncher comme s’il s’agissait d’un gamin, je l’avais poussé sans trop faire exprès et nous étions tombés dans le cratère plein d’eau. Joie ! Car à l’aide du retour à la vie (j’avais encore plus de trois mètres), je ne fus qu’immergé de moitié. Fourbe et mauvais comme j’étais, j’enfonçai la gueule du révolutionnaire pour qu’il soit complètement sous l’eau avant de continuer à lui foutre des pains n’importe où. Mon haki me quittait petit à petit mais l’eau faisait son effet et son corps restait tangible. C’est donc comme un véritable sauvage que je le rouais de coups. Coups de genoux, de pieds, de poings, de boules même… Tout y passait avec une brutalité inouïe ! J’avais même pensé à le mordre un moment, mais je préférai m’en tenir aux attaques classiques. Le tout dura un long moment jusqu’à ce que j’eus la nette impression qu’il n’opposait plus aucune résistance. Là, j’eus un rire nerveux, comme si mes nerfs avaient lâché, avant d’utiliser mes tentacules capillaires -Qui m’avaient aussi servi à l’immobiliser-, pour m’extirper du cratère géant rempli d’eau. Mon état était globalement lamentable : J’étais tout mouillé, couvert de boue et de sang, de plaies un peu partout, bras gauche out, yeux presque niqués tant ils étaient rouges…

Bref, je faisais peine à voir.

N’ayant plus beaucoup d’endurance, je manquai plusieurs fois de m’éclater la face à même le sol à mesure que je m’éloignais dudit cratère. Putain, fais chier ! Il m’avait éprouvé ce type ! Mais j’étais maintenant certain qu’il était mort, qu’il avait passé l’arme à gauche ! On pouvait pas sortir indemne de ce passage à tabac, c’était pas possible ! Tout du moins, c’est ce que je pensais. Pis, je n’entendais plus sa « voix ». Il me semblait bien qu’il ne respirait plus lorsque je lui infligeais mes derniers coups. Enfin… Enfin débarrassé de ce sale fils de pute qui aura parfois hanté mes nuits ! Je le haïssais plus que quiconque ce bâtard là ! Il s’était joué de moi à maintes reprises et avait même osé insulter la mémoire de ma défunte épouse. Sombre idiot ! La révolution n’avait aucun avenir… Il était dans le mauvais chemin depuis perpet ce gars-là ! Encore un aveugle qui croyait qu’il pouvait changer quelque chose ! Je finis par hurler de rire, avant de puiser dans mes dernières réserves pour siffler bruyamment. Perdant de l’envergure parce que le pouvoir du retour à la vie s’annulait du fait de ma fatigue, je finis par tomber sur mes genoux avant d’entendre arriver le cheval sur lequel j’étais tout à l’heure. Il allait me permettre de rejoindre mes hommes au plus vite !

Avant qu’il ne soit trop tard…

Sauf qu’au moment même où je levai faiblement ma main pour choper les rênes de mon cheval en face de moi, mon cœur manqua un battement…

J’écarquillai mes yeux d’horreur…

Je l’avais senti derrière-moi et n’osais pas me retourner…

La suite promettait d’être cauchemardesque pour ma gueule…


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Encore une fois, Raf. Plus qu’une ligne à tenir et il serait anéanti. L’assassin écarta les bras et serra les poings. Bandant ses muscles, il fit surgir un fluide incomplet mais se mua malgré tout dans une nappe de brouillard aussi noire que la rage de son adversaire. Un mélange visqueux constitué d’une armure aussi solide que sa résolution. Mais toute armure avait sa limite. Aussi fumigène qu’était l’assassin, le premier coup de Salem l’envoya à terre. Il n’avait pas eu le temps de lever son bras pour se défendre, il avait tout misé sur cette défense ultime. Mais à peine eut-il encaissé le coup de son adversaire que les coups s’enchaînèrent. Sa forme de défense ne lui permettait pas d’être aussi vif qu’à son habitude, mais l’aurait-il été de toute manière. Les quelques coups parés de son gantelet d’arme étaient risibles face à la violence des coups distribués par le Vice-Amiral. Mais qu’étaient-ils face à l’une des dernières cartes de Rafaelo ? Puis il y eut l’eau. Les souvenirs de l’assassin se brouillèrent légèrement tandis que ses pouvoirs diminuaient à mesure de son contact.

Mais, étrangement, le fluide noir semblât persister. Il collait sa peau à la manière d’une gangue inextricable. Ne l’avait-il pas développé, après-tout, en s’immergeant pour diminuer ses propres pouvoirs ? N’avait-il pas suivi un entraînement sous les cascades de Skypeia pour être en mesure de maintenir le plus longtemps possible ses forces, même immergé ? Mais là … sous la force impressionnante de Salem … Mais plus il maintenait Rafaelo, moins les coups se faisaient ressentir. Plus il frappait, plus sa force diminuait. À l’instar de l’assassin. Mais perturbé par ses hommes qui mouraient au loin, Salem se perdait dans sa colère. Il se perdait dans la terre et déversait sa rage sans aucune précision. Le révolutionnaire, quant à lui, tentait d’encaisser du mieux qu’il pouvait. Ses os craquaient, ses articulations hurlaient de douleur à mesure que le fluide se glissait hors de lui. Ses bras en barrière pendant que la tempête frappait. Eau, sang et boue.

* Logue Town … *

Les doigts de l’assassin s’enfoncèrent dans la glaise.

* Hinu Town. *

Il banda ses muscles, enfonça son autre main dans la boue.

* Little Garden. *

Son corps se hissa hors de l’eau.

* Drum … *

Un genou posé à terre. Il tituba en grimpant.

* Le Léviathan. *

Il posa un pied sur terre, se mit debout.

* Alabasta. *

Sa lame secrète jaillit de sa gaine.

* Goa… *

Il était là, plus qu’à quelques pas. La fumée qui entourait Rafaelo était erratique, échappait à tout contrôle. Un sourire malsain garnissait ses lèvres. Son gantelet de métal semblait animé par une volonté propre. Il tremblait, peinait à bouger. Elle était là, la dernière ligne. L’assassin dégoulinait d’eau et de sang. Son visage était sali par la boue. Son nez déformé saignait et maculait sa barbe. Il laissait derrière lui une trainée de souffrance, à chacun de ses pas. Mais sa cible était agenouillée, hagarde. Si ce n’avaient été les points faibles de son logia, il aurait déjà expédié son adversaire dans les limbes. La rancœur des souffrances causée par la famille Fenyang aurait suffi à lui faire faire n’importe quoi. Des milliers, sinon dizaines de milliers, d’hommes et de femmes étaient morts par leur faute. Dans l’aveuglement de leur probité imparfaite, ils préféraient sacrifier des vies plutôt que de se battre pour une vraie cause. Ils étaient l’incarnation même de l’hypocrisie du gouvernement. Ils étaient le fer de lance de leur fausse justice. Des héros qui n’avaient d’héroïque que la dorure dont les médias les paraient. Ils étaient le vice de ce monde. Ils étaient ce que les blues pouvaient faire de pire. Des chevaliers en armure qui tuaient et pillaient en se prenant pour des saints.

Aujourd’hui, cette croisade prenait fin.

Un pas après l’autre, l’assassin prit de la vitesse. La marche titubante devint une course acharnée et, sans crier gare, la lame de Rafaelo s’enfonça dans l’épaule de son adversaire. Les deux hommes roulèrent à terre ensemble. La pointe de métal ressorti de la chair de Salem. Elle se leva une seconde fois. Puis elle s’abattit sur sa gorge. Le métal trancha la chair, manquant de peu l’artère. La poigne de fer du Vice-Amiral se referma sur le poignet de l’assassin. Ils basculèrent. Le géant se retrouva alors au-dessus et le révolutionnaire n’avait plus qu’un seul bras de libre. Pourtant, un sourire malicieux se peignait encore sur ses traits. Il était temps d’abattre sa dernière carte. La surprise ultime qu’il avait préparée depuis le début de leur rencontre. Son gantelet de métal se posa sur la poitrine de Salem, paume ouverte. Il n’avait pas la force nécessaire pour le frapper, mais …

« Tu te souviens comment j’ai tué Krabbs ? » murmura-t-il.

« Goûte à ta propre médecine, puissance dix. »


Le reject dial caché dans le gantelet d’armure de Rafaelo s’activa. Dans une déflagration qui secoua l’île entière, le révolutionnaire fut dispersé en un immense nuage de fumée tandis que le Vice-Amiral encaissait la déflagration de plein fouet. Kanokuni porterait à jamais la marque de cette attaque, un cratère d’impact trônait à la place des deux hommes et du cheval. La terre avait tremblé sous la puissance du Vice-Amiral retournée contre lui. Les arbres s’étaient couchés à des dizaines de mètres à la ronde. Le silence fit suite au son strident de la puissance libérée du dial, sans qu’aucun des deux combattants ne réapparaisse.
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« PARCE QUE TU CROIS QUE C’EST TERMINÉ COMME ÇA ?!!! »

Après un moment de silence et un battement de cœur inespéré, je m’étais relevé subitement avant de gueuler comme un forcené. J’eus un rire gras et profondément sinistre qui eut un écho horrible à l’orée de la forêt noire quelque peu dévastée par le coup de pute du révolutionnaire. Parce que c’en était clairement. Une vraie saloperie que je n’avais pas vu venir. Un dial ? J’en avais déjà entendu parler de ces objets, mais je n’en avais jamais vraiment vu. Et ce dial m’avait pratiquement bousillé. La plupart de mes organes internes devaient être réduits en compote et un gros creux s’était même dessiné sur mon ventre sans pour autant présenter une plaie béante. Je me mis à vomir du sang en grande quantité, mais j’étais debout, au beau milieu de ce cratère. Mes yeux étaient vitreux et mon visage déformé par une sombre colère. Je ressemblais plus à un zombie qu’autre chose. Qu’est-ce qui m’aidait à tenir debout comme ça ? Mon mental, sans doute. J’étais à la limite de perdre ma conscience mais mon esprit combattif, plus que jamais mis à rude épreuve me faisait tenir. Planté au beau milieu du gigantesque cratère, quelques geppo maladroits me permirent de remonter à la surface et de gueuler une fois encore :

« FILS DE CHIENNE !!! RAMÈNE TA GUEULE QUE JE TE FASSE LA PEAU !!! »

La rage avait pris le pas sur la raison. Je n’étais plus qu’un amas de haine. Le gars qui avait dégainé un coutelas qu’il agitait un peu partout dans le vide devant lui. Le gars dont les mouvements étaient devenus lents, mous et pathétiques. Bref… Je faisais peine à voir. Un autre « rendu » conséquent me força à mettre un genou au sol. L’anémie était plus que jamais proche. C’était ce qui me rendait faible, puisque je ne sentais pratiquement plus les autres douleurs tant elles étaient sourdes. Paradoxal, mais véridique. Alors que je gueulais des insanités à n’en plus finir -toutes à l’égard du logia-, je sentis une présence derrière moi. Sans même chercher à savoir de qui il s’agissait, je me retournai et l’attaquai avec mon arme pathétique. Mais j’étais tellement faible que ladite personne n’eut aucun mal pour éviter mes attaques, à apparaitre derrière-moi et me foutre un violent coup à la nuque. Il n’en fallut pas plus pour que je lâche définitivement prise et que je tombe dans les pommes. Une défaite bien pathétique. La nouvelle arrivante n’était autre que Ketsuno. Pourquoi était-elle là ? Par intuition tout simplement. L’intuition féminine. Elle avait mobilisé une vingtaine de soldats et avait fini par prendre le chemin que j’avais emprunté avec ma troupe.

C’est ce qui lui avait permis de voir la fin de combat et de me porter secours.

- « On se retire ! Vite ! »

Consciente du danger que représentait le révolutionnaire, la lieutenante ordonna le repli immédiat de son escouade. Elle chargea le corps inerte de son supérieur sur son cheval et commença à galoper à vive allure en direction de la baie de Jing, place forte de la marine. Nerveuse, elle ne put s’empêcher de regarder en arrière chaque trente seconde. Il lui avait semblé à un moment donné que la fumée semblait les suivre, mais au final, il n’eut rien. Si la défaite de son supérieure était inéluctable, il n’était pas question pour elle qu’il perde la vie ici. Ce royaume et la cause n’en valaient pas la peine. Ketsuno et ses hommes galopèrent pendant une bonne quinzaine de minutes, avant d’arriver au camp de la marine. Elle chargea l’un de ses hommes d’aller prévenir le sous-amiral Niromoto que leur supérieur était out et fonça elle-même vers le galion de son cousin qui abritait en son sein une infirmerie où il avait le nécessaire pour commencer à le traiter en urgence. Les médecins prirent rapidement le relais et s’évertuèrent à tenter de sauver leur amiral qui était pratiquement entre la vie et la mort. Prostrée devant l’infirmerie et presque impuissante, Ketsuno se mordit la lèvre : La bataille de Kanokuni prenait une autre tournure.

Une tournure plein inquiétante.

Une tournure qui sentait la défaite à plein nez.


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Le monde n’était plus qu’un amas fumant et calciné, soufflant d’un vent qui menaçait d’emporter les quelques fragments de l’assassin. Il sentait son essence dispersée un peu partout, mais son esprit restait versé dans une version très personnelle des limbes. L’explosion cinétique avait emporté son être et l’avait dispersé aux quatre vents, le condamnant à rôder autour du cratère. La fumée formait un anneau épais en retrait de la zone d’impact. Une silhouette semblait de temps à autre émerger de l’amas. Un bras, un torse. Parfois un corps entier. Un râle s’échappa du nuage, alors que Ketsuno passait au travers pour porter secours à son supérieur. Des mains intangibles s’accrochèrent à son cou, à ses armes. Mais elle traversa le rideau gris sans encombre. Les soldats, quant à eux, ne cessaient de jeter des regards aux alentours. Fenyang avait-il vaincu son adversaire, tout en payant le prix fort ? S’il ne l’avait pas vaincu, où était passé l’assassin ? Où était passé le bourreau de Goa ? La fumée frémissait d’une colère surnaturelle, en l’absence de tout vent. Ils tirèrent leurs armes du fourreau. Fort heureusement, ils ne s’attardèrent pas. Sauver Salem était leur seul but.

Ce n’était qu’une question de réassembler les composants dans le bon ordre.

Les soldats formèrent une escorte rapprochée, entourant leur chef et sa cousine. Arme au clair, ils se mirent au trot et entamèrent quelques secondes après un galop soutenu. Un bras émergea du rideau translucide et s’agrippa à la selle d’un des chevaux. Le membre s’étira et éclata en une bulle de fumée. La masse volatile se mobilisa et s’attacha à suivre les fuyards. Ketsuno eut bien raison de se retourner car plusieurs fois, l’éclat scintillant du métal perça la brume. Mais il n’en cessait plus de s’évaporer et de se reconstituer, sans jamais toucher sa cible. Puis, quelques mètres avant la place forte de la marine, le nuage reflua, laissant traverser sans encombre les rescapés. Tous les soldats étaient en alerte. Leur port brûlait encore des quelques flammes qu’ils n’avaient su éteindre mais les explosions qui avaient retenti au loin les avaient, eux aussi, secoués. Une vague de panique vint saper leur moral, découvrant le Vice-Amiral inconscient. Mais au moins il n’était pas mort.

« Là, il y a quelqu’un ! » hurla une sentinelle, tirant dans la brume sans crier gare.

Mais rien de plus que la brume ne lui répondit.

« Je … je vous jure, il y avait quelqu’un dans le brouillard … »

Personne n’y prêta attention, trop de choses inquiétantes venaient de leur tomber dessus pour qu’on n’attribue une quelconque importance à un Première Classe hagard. Et pourtant … au loin, protégé dans la brume qui avait colonisé Kanokuni, une forma humanoïde prenait peu à peu substance. Des jambes, un torse. Des bras gris. Puis une tête et, enfin, un râle de souffrance. La forme se découvrit des vêtements, noirs et gris. Puis une épée et une capuche. Enfin, son visage émergea, encore marqué des sévices de la bataille. Un feu brûlait au fond de ses pupilles, tandis qu’il luttait pour garder la cohésion de son être.

Se recomposer était le premier tour qu’il avait appris.

L’assassin desserra son poing. Les galons et médailles arrachés à Salem trônaient là, pour lui rappeler qu’il n’avait pu le tuer. Mais il l’avait vaincu. Il l’avait mis à terre. Si ce n’avait été ses minions, il l’aurait tué. Anéanti. L’homme avait une constitution telle qu’il avait pu encaisser l’impact dial et y survivre. Même sous sa forme intangible, Rafaelo avait mis plusieurs minutes à s’en remettre, à pouvoir reprendre forme humaine. Et, maintenant, ils étaient hors d’atteinte. Le révolutionnaire glissa les reliquats de sa bataille dans sa sacoche. Il s’assit en grimaçant et sortit un denden blanc. Il inspira profondément, goûtant avec appréhension ce moment solennel.

« C’est fait. Le Vice-Amiral a été vaincu. Mais il n’est pas mort, ses hommes ont réussi à le rapatrier pour tenter de le sauver. Il ne se relèvera pas avant la fin de la bataille. »

Un silence s’installa. Suivi de quelques mots d’approbation. Tuer n’avait pas été un ordre facile à donner pour le Guide, cette solution semblait le satisfaire.

« Les troupes ennemies ont perdu leur chef, monsieur. Mais j’ai moi-même essuyé pas mal de blessures, je doute de pouvoir continuer longtemps à ce rythme. »


Quelques paroles furent murmurées.

« Je … je pense que je pourrais, oui. J’arrive aussi vite que je peux, monsieur. Merci. »

L’escargophone blanc tomba à terre avec un gargouillis de mécontentement. L’assassin soupira de souffrance, contempla ses mains qui tremblaient. Il était presque à bout de force. Avec le recul, aurait-il vraiment pu porter un dernier coup fatal à Salem ? Certainement oui. Lui était encore sur ses jambes, et capable de rendre des comptes à ses supérieurs. Il grogna de douleur en se penchant pour ramasser l’animal qui lui avait échappé des mains. Mais on l’attendait pour une dernière mission. Une mission qui finirait de mettre à mal le moral et les troupes de la marine. Si Salem avait été stoppé, d’autres marchaient encore sur les plats de bande de la révolution. Rafaelo se redressa en s’appuyant sur ses genoux. Il jeta un dernier regard en direction du camp de la baie de Jing.

« Ce n’est que partie remise. »
murmura-t-il à l’attention du Vice-Amiral dont la voix parvenait encore à ses oreilles.

Puis il se retourna et se fondit dans le brouillard.
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