- Paie le monsieur Joe.
- Des clous.
- Joe, paie le monsieur.
- Je paie déjà assez de ma personne en venant dans cette fosse sceptique qu'ils osent présenter comme une île, je vais pas en plus me laisser dépouiller par ces connards !
- Joe...
- Mmmh ?
- Paie le monsieur.
- QUE DALLE !
L'inconvénient lorsque l'on venait à s'encombrer de nouvelles recrues, c'est que celles-ci étaient dans leur bon droit en escomptant de leur capitaine qu'il ne s'occupe des dépenses à bord. Paniers percés devant l'éternel, Mahach et Balior n'allaient certainement pas s'acquitter de la taxe portuaire exigée à l'entrée de Dead End, leurs poches demeuraient résolument vides.
Cela faisait une demi heure que le punk harcelait son cafard de capitaine pour que ce dernier mette la main à la poche. Vaste programme. La scène perdura jusqu'à ce que le docker, chargé de récolter la taxe, ne fatigue à force de subir les insultes que Joe lui adressait et n'aille chercher une dizaine de camarades pour étayer son argumentaire. Même une douzaine de pirates menaçants n'achevèrent pas de persuader le cafard de débourser la modique somme de cinq-mille berries demandée.
- Eh pis merde, tu m'les brises. T'es avec moi le vieux ?
Reposé à même ponton de la jonque qu'ils s'étaient employés à voler suite à leurs mésaventures sur Clockwork Island, l'aîné de la bande s'étira avant de gratter frénétiquement sa barbe hirsute tout en se redressant. Les radineries coutumières de son nouveau capitaine avaient eu raison de sa patience à lui aussi.
- Yep.
Alerte, Joe oscilla sa tête paniquée de droite à gauche, scrutant successivement Mahach et Balior qui s'approchaient.
- N'y pensez même pas ! Un pas de plus et je me servirai de vos carcasses pour payer cette putain de taxe ! Allez ! Reculez ! Alleeeez !
Un instant d'inattention de la part du geignard suffit pour que le vieux boucanier ne le ceinture violemment. Il fallait au moins ça pour que le cafard daigne payer quoi que ce soit. Malgré la force excessivement supérieure de l'ancien sur son capitaine, ce dernier s'agitait tant bien que mal telle une anguille tentant d'échapper à son pêcheur.
- Casus Belli ! Casus Belliiiiiiiiii ! Lâche-moi que je te dépèce enfoiré !
Ainsi immobilisé, Joe ne manqua pas de se faire fouiller par son deuxième membre d'équipage. Les mains couvertes de poudre à force de palper le bougre équipé de plus d'une dizaine de mousquets sous son anorak. Mahach finit pas mettre la main sur une liasse salvatrice, extirpant la somme nécessaire pour s'acquitter de la taxe portuaire qui avait fait couler tant de larmes.
- De Dieu, c'est la croix et la bannière pour qu'il mette la main au porte-monnaie celui-ci...
Exaspérés par le temps perdu pour que se déroule une transaction des plus anodines, les dockers firent volte-face, pressés de ne plus avoir à supporter les gémissements larmoyants du cafard. Le plus dur était fait. Délesté de cinq-mille berrys, le cafard, recroquevillé sur le pont pestait comme un sale gosse blessé dans son orgueil, visage couvert de larmes.
Tous deux perchés à l'observer, presque fascinés par la propension à l'avarice de leur capitaine, le punk et son comparse finirent par rompre ce silence de recueillement face à ce drame humain qu'ils contemplaient gisant au sol.
- Porte tes couilles pucelle ! T'vas pas nous r'jouer ça chaque fois qu'y faudra allonger les biffetons !
Secouant doucement la tête de droite à gauche, atterré du spectacle auquel il venait d'avoir droit, Mahach engouffra la liasse dans sa poche.
- J'crois qu'c'est mieux pour nous tous si j'm'improvise trésorier.
Fébrile, presque insignifiant, Joe chercha à se remettre sur ses jambes du mieux qu'il pouvait, se redressant au mieux, lentement, pour soudain bondir tel un fauve, braquant un mousquet savamment dissimulé pour y coller le canon sous le menton du punk trop audacieux à son goût.
- M'enfin ça peut s'discuter hein...
Suffisamment instruit pour savoir quand il avait affaire à un dément, croisant le regard acéré et vil de ce capitaine si perfide, Mahach leva délicatement les bras. Il savait distinguer une menace réelle d'un bluff, et sentait de ce fait les intentions belliqueuses du cafard lui étant adressées sans la moindre réserve.
- Discute si tu veux, moi je récupère mon pognon.
Il le dit, et il le fit. Quand il était question d'argent, Joe était homme à respecter sa parole. Doucement, le métal froid du canon quitta la peau du punk pour retrouver l'intérieur de la parka de son hôte, jouxtant les billets retrouvés. Mahach ne trouva qu'à grimacer, mais qu'à cela ne tienne, si le cafard manquait encore à ses obligations, il trouverait le moyen de lui soutirer son pécule une fois de plus.
Alors que Balior se croyait à l'abri du courroux de son capitaine, un violent coup de botte dans les roustons lui rappela à quel point Joe n'avait que trop peu apprécié d'être ainsi immobilisé.
- Tiens géronte, c'est ma manière à moi de pardonner. La prochaine absolution se fera à renfort de poudre et de plomb, tiens-le toi pour dit !
Agenouillé, les bourses solidement tenues par ses mains, c'était au tour du doyen des Blattards de grimacer, pour des raisons bien à lui cela dit.
- Dé...Dégénéré à la manque ! T...T'vas voir fumier, j'te réserve un chien d'ma chienne, t'vas voir !
Hautain, sûr de lui après cette démonstration de force, exprimant le niveau de bassesse ultime auquel il pouvait se consacrer, le cafard fit craquer ses cervicales comme ignorant les menaces de son membre d'équipage.
- Si tu veux qu'on en reste au champ lexical du canidé, je te répondrai que si tu continues à aboyer, je vais me sentir contraint de te foutre un coup de laisse pour te rappeler qui est le maître.
Pour Balior, il n'y avait qu'un maître à bord, lui même. Indiscipliné était un mot encore bien trop faible pour exprimer l'esprit d'indépendance qui l'animait. Joe le sentait et tenait à s'imposer comme le mâle dominant à bord. Ce faisant, il s'exposait aux griefs sévères de ses deux hommes. Affirmer son autorité était à long terme une affaire de survie.
Alors que l'ancien se redressait, poings crispés, yeux révulsés, Mahach s'interposa vivement entre les deux hommes prêts à se sauter à la gorge.
- Arrête ton char Biutag ! On n'a pas l'temps pour tes conn'ries. J'te rappelle qu'on est blessés.
Joe ne quittait pas Balior du regard, comme le provoquant, ce dernier n'en démordait pas non plus le moins du monde.
- Ah bon ? Je me sens très bien pourtant hin hin.
Se plaçant de sorte à faire écran entre ses deux camarades, le punk était bien décidé à calmer les tensions à bord, posant ses mains sur les épaules de son capitaine, dix centimètres plus petit que lui.
- Le vieux et moi, faut qu'on se r'fasse une santé. Ça veut dire qu'y va falloir nous payer à bouffer...
- Et à boire !
- Et à boire... et nous fournir quelque part où dormir. Si tu t'donnes pas la peine d'faire ça, un jour où l'autre, tu pass'ras par-dessus bord plus vite que t'auras l'temps d'dire "mutinerie". On bosse pour toi, mais en échange, va falloir abouler le flouze pour nous entretenir.
Joe ne savait que trop bien tout cela. Le capitanat venait avec son lot de responsabilités, notamment fiduciaires. S'il voulait que ses hommes lui soient fidèles, il devait les récompenser au mieux, composer avec sa radinerie maladive pour ne pas se retrouver avec un col chinois au moment le moins opportun.
Le cafard passa sa main derrière la nuque, essuyant une moue contrariée et hargneuse, bien que résignée.
- Ouais, ouais... Mais personne touche à mon fric. Personne !
La bombe semblait désamorcée. Tous trois quittèrent l'embarcation pour déambuler jusqu'en ville. Malgré la nuit noire qui enveloppait l'île, mille lanternes faisaient scintiller Dead End comme un soleil. Un sinistre soleil chaotique où la piraterie et l'ordre entretenaient un ménage précaire.
Traînant leurs guêtres jusqu'à une auberge désignée par Mahach, habitué des lieux, les Blattards posèrent leur cul chacun sur un tabouret, faisant face au comptoir rayé et sale à leur disposition.
- Et pour la triplette de gentlemen, qu'est-ce que ce sera ?
- Bière.
- Une eau plate, la moins chère !
- Fais donc péter l'barrilet d'rhum !
Chaque choix de boisson déterminait sommairement le trait de caractère de chacun des trois lascars. Rapidement servis, la note alla de paire avec les consommations.
- Ça fera quatre-mille-deux-cent berries.
Un silence aussi lourd qu'inquiétant s'installa alors que Joe entamait son verre d'eau à la paille, ne perdant pas une occasion de faire du bruit le plus inutilement possible. Tous les regards étaient rivés sur lui, aussi bien celui de ses compères que celui de l'aubergiste.
- Joe... Paie l'addition.
Lâchant un instant sa paille de la bouche, la réponse du cafard ne se fit pas attendre avant de recommencer à siroter son verre.
- Des clous.
Ni une ni deux, les épaisses paluches du vieillard se nouèrent autour du petit cou lâche et maigre du capitaine Blattard, manquant d'expulser ses yeux exorbités par la soudaine pression.
- TU RAQUES ET TU FERMES TA GUEULE !!!
Trouvant les arguments de l'ancien particulièrement persuasifs, Joe fouilla à la hâte l'intérieur de son manteau, cherchant son pactole comme il cherchait à reprendre de l'air, à croire que les deux quêtes semblaient intimement liées. Abattant cinq billets de mille sur la table, ce n'est qu'à cet instant qu'il put reprendre son souffle. Il fallait croire qu'il tenait plus à la vie qu'aux berries. C'était déjà un progrès.
Ainsi affalés sur le comptoir, la cohésion sociale au sein de l'équipage s'établissait à tâton après ces derniers incidents. Enfin les Blattards commençaient à s'accommoder d'un savoir-vivre leur étant propre. Il fallait savoir prendre le capitaine par le bon bout.
- Des clous.
- Joe, paie le monsieur.
- Je paie déjà assez de ma personne en venant dans cette fosse sceptique qu'ils osent présenter comme une île, je vais pas en plus me laisser dépouiller par ces connards !
- Joe...
- Mmmh ?
- Paie le monsieur.
- QUE DALLE !
L'inconvénient lorsque l'on venait à s'encombrer de nouvelles recrues, c'est que celles-ci étaient dans leur bon droit en escomptant de leur capitaine qu'il ne s'occupe des dépenses à bord. Paniers percés devant l'éternel, Mahach et Balior n'allaient certainement pas s'acquitter de la taxe portuaire exigée à l'entrée de Dead End, leurs poches demeuraient résolument vides.
Cela faisait une demi heure que le punk harcelait son cafard de capitaine pour que ce dernier mette la main à la poche. Vaste programme. La scène perdura jusqu'à ce que le docker, chargé de récolter la taxe, ne fatigue à force de subir les insultes que Joe lui adressait et n'aille chercher une dizaine de camarades pour étayer son argumentaire. Même une douzaine de pirates menaçants n'achevèrent pas de persuader le cafard de débourser la modique somme de cinq-mille berries demandée.
- Eh pis merde, tu m'les brises. T'es avec moi le vieux ?
Reposé à même ponton de la jonque qu'ils s'étaient employés à voler suite à leurs mésaventures sur Clockwork Island, l'aîné de la bande s'étira avant de gratter frénétiquement sa barbe hirsute tout en se redressant. Les radineries coutumières de son nouveau capitaine avaient eu raison de sa patience à lui aussi.
- Yep.
Alerte, Joe oscilla sa tête paniquée de droite à gauche, scrutant successivement Mahach et Balior qui s'approchaient.
- N'y pensez même pas ! Un pas de plus et je me servirai de vos carcasses pour payer cette putain de taxe ! Allez ! Reculez ! Alleeeez !
Un instant d'inattention de la part du geignard suffit pour que le vieux boucanier ne le ceinture violemment. Il fallait au moins ça pour que le cafard daigne payer quoi que ce soit. Malgré la force excessivement supérieure de l'ancien sur son capitaine, ce dernier s'agitait tant bien que mal telle une anguille tentant d'échapper à son pêcheur.
- Casus Belli ! Casus Belliiiiiiiiii ! Lâche-moi que je te dépèce enfoiré !
Ainsi immobilisé, Joe ne manqua pas de se faire fouiller par son deuxième membre d'équipage. Les mains couvertes de poudre à force de palper le bougre équipé de plus d'une dizaine de mousquets sous son anorak. Mahach finit pas mettre la main sur une liasse salvatrice, extirpant la somme nécessaire pour s'acquitter de la taxe portuaire qui avait fait couler tant de larmes.
- De Dieu, c'est la croix et la bannière pour qu'il mette la main au porte-monnaie celui-ci...
Exaspérés par le temps perdu pour que se déroule une transaction des plus anodines, les dockers firent volte-face, pressés de ne plus avoir à supporter les gémissements larmoyants du cafard. Le plus dur était fait. Délesté de cinq-mille berrys, le cafard, recroquevillé sur le pont pestait comme un sale gosse blessé dans son orgueil, visage couvert de larmes.
Tous deux perchés à l'observer, presque fascinés par la propension à l'avarice de leur capitaine, le punk et son comparse finirent par rompre ce silence de recueillement face à ce drame humain qu'ils contemplaient gisant au sol.
- Porte tes couilles pucelle ! T'vas pas nous r'jouer ça chaque fois qu'y faudra allonger les biffetons !
Secouant doucement la tête de droite à gauche, atterré du spectacle auquel il venait d'avoir droit, Mahach engouffra la liasse dans sa poche.
- J'crois qu'c'est mieux pour nous tous si j'm'improvise trésorier.
Fébrile, presque insignifiant, Joe chercha à se remettre sur ses jambes du mieux qu'il pouvait, se redressant au mieux, lentement, pour soudain bondir tel un fauve, braquant un mousquet savamment dissimulé pour y coller le canon sous le menton du punk trop audacieux à son goût.
- M'enfin ça peut s'discuter hein...
Suffisamment instruit pour savoir quand il avait affaire à un dément, croisant le regard acéré et vil de ce capitaine si perfide, Mahach leva délicatement les bras. Il savait distinguer une menace réelle d'un bluff, et sentait de ce fait les intentions belliqueuses du cafard lui étant adressées sans la moindre réserve.
- Discute si tu veux, moi je récupère mon pognon.
Il le dit, et il le fit. Quand il était question d'argent, Joe était homme à respecter sa parole. Doucement, le métal froid du canon quitta la peau du punk pour retrouver l'intérieur de la parka de son hôte, jouxtant les billets retrouvés. Mahach ne trouva qu'à grimacer, mais qu'à cela ne tienne, si le cafard manquait encore à ses obligations, il trouverait le moyen de lui soutirer son pécule une fois de plus.
Alors que Balior se croyait à l'abri du courroux de son capitaine, un violent coup de botte dans les roustons lui rappela à quel point Joe n'avait que trop peu apprécié d'être ainsi immobilisé.
- Tiens géronte, c'est ma manière à moi de pardonner. La prochaine absolution se fera à renfort de poudre et de plomb, tiens-le toi pour dit !
Agenouillé, les bourses solidement tenues par ses mains, c'était au tour du doyen des Blattards de grimacer, pour des raisons bien à lui cela dit.
- Dé...Dégénéré à la manque ! T...T'vas voir fumier, j'te réserve un chien d'ma chienne, t'vas voir !
Hautain, sûr de lui après cette démonstration de force, exprimant le niveau de bassesse ultime auquel il pouvait se consacrer, le cafard fit craquer ses cervicales comme ignorant les menaces de son membre d'équipage.
- Si tu veux qu'on en reste au champ lexical du canidé, je te répondrai que si tu continues à aboyer, je vais me sentir contraint de te foutre un coup de laisse pour te rappeler qui est le maître.
Pour Balior, il n'y avait qu'un maître à bord, lui même. Indiscipliné était un mot encore bien trop faible pour exprimer l'esprit d'indépendance qui l'animait. Joe le sentait et tenait à s'imposer comme le mâle dominant à bord. Ce faisant, il s'exposait aux griefs sévères de ses deux hommes. Affirmer son autorité était à long terme une affaire de survie.
Alors que l'ancien se redressait, poings crispés, yeux révulsés, Mahach s'interposa vivement entre les deux hommes prêts à se sauter à la gorge.
- Arrête ton char Biutag ! On n'a pas l'temps pour tes conn'ries. J'te rappelle qu'on est blessés.
Joe ne quittait pas Balior du regard, comme le provoquant, ce dernier n'en démordait pas non plus le moins du monde.
- Ah bon ? Je me sens très bien pourtant hin hin.
Se plaçant de sorte à faire écran entre ses deux camarades, le punk était bien décidé à calmer les tensions à bord, posant ses mains sur les épaules de son capitaine, dix centimètres plus petit que lui.
- Le vieux et moi, faut qu'on se r'fasse une santé. Ça veut dire qu'y va falloir nous payer à bouffer...
- Et à boire !
- Et à boire... et nous fournir quelque part où dormir. Si tu t'donnes pas la peine d'faire ça, un jour où l'autre, tu pass'ras par-dessus bord plus vite que t'auras l'temps d'dire "mutinerie". On bosse pour toi, mais en échange, va falloir abouler le flouze pour nous entretenir.
Joe ne savait que trop bien tout cela. Le capitanat venait avec son lot de responsabilités, notamment fiduciaires. S'il voulait que ses hommes lui soient fidèles, il devait les récompenser au mieux, composer avec sa radinerie maladive pour ne pas se retrouver avec un col chinois au moment le moins opportun.
Le cafard passa sa main derrière la nuque, essuyant une moue contrariée et hargneuse, bien que résignée.
- Ouais, ouais... Mais personne touche à mon fric. Personne !
La bombe semblait désamorcée. Tous trois quittèrent l'embarcation pour déambuler jusqu'en ville. Malgré la nuit noire qui enveloppait l'île, mille lanternes faisaient scintiller Dead End comme un soleil. Un sinistre soleil chaotique où la piraterie et l'ordre entretenaient un ménage précaire.
Traînant leurs guêtres jusqu'à une auberge désignée par Mahach, habitué des lieux, les Blattards posèrent leur cul chacun sur un tabouret, faisant face au comptoir rayé et sale à leur disposition.
- Et pour la triplette de gentlemen, qu'est-ce que ce sera ?
- Bière.
- Une eau plate, la moins chère !
- Fais donc péter l'barrilet d'rhum !
Chaque choix de boisson déterminait sommairement le trait de caractère de chacun des trois lascars. Rapidement servis, la note alla de paire avec les consommations.
- Ça fera quatre-mille-deux-cent berries.
Un silence aussi lourd qu'inquiétant s'installa alors que Joe entamait son verre d'eau à la paille, ne perdant pas une occasion de faire du bruit le plus inutilement possible. Tous les regards étaient rivés sur lui, aussi bien celui de ses compères que celui de l'aubergiste.
- Joe... Paie l'addition.
Lâchant un instant sa paille de la bouche, la réponse du cafard ne se fit pas attendre avant de recommencer à siroter son verre.
- Des clous.
Ni une ni deux, les épaisses paluches du vieillard se nouèrent autour du petit cou lâche et maigre du capitaine Blattard, manquant d'expulser ses yeux exorbités par la soudaine pression.
- TU RAQUES ET TU FERMES TA GUEULE !!!
Trouvant les arguments de l'ancien particulièrement persuasifs, Joe fouilla à la hâte l'intérieur de son manteau, cherchant son pactole comme il cherchait à reprendre de l'air, à croire que les deux quêtes semblaient intimement liées. Abattant cinq billets de mille sur la table, ce n'est qu'à cet instant qu'il put reprendre son souffle. Il fallait croire qu'il tenait plus à la vie qu'aux berries. C'était déjà un progrès.
Ainsi affalés sur le comptoir, la cohésion sociale au sein de l'équipage s'établissait à tâton après ces derniers incidents. Enfin les Blattards commençaient à s'accommoder d'un savoir-vivre leur étant propre. Il fallait savoir prendre le capitaine par le bon bout.
Dernière édition par Joe Biutag le Ven 13 Jan 2017 - 16:29, édité 1 fois