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Le chemin de traverse


La Flaque, 1626.

Perçant la brume matinale, la barrière rocheuse se dévoila aux yeux blanchis du Cavalier. Écrasante par sa masse, elle s'étalait à perte de vue pendant que sa façade rougeoyante escaladait les cieux jusqu'à l'insondable. Au fil de sa vie et des échecs qui la ponctuèrent, le pirate avait développé un mélange de respect et de rancœur face à cet ennemi immuable. Qu'importe le nombre de tentatives, l’amas rocailleux continuait de barrer le passage au porteur de mort. Encore et toujours, mais ils le savaient tous deux… un jour il en viendrait à bout. Depuis le début, une simple guerre d’usure opposée les deux adversaires et jamais l'issue ne lui avait paru incertaine. Il patientait et saisirait sa chance le moment opportun, mais pas aujourd'hui. Sa venue ne souffrait d'aucune prétention dans ses aspirations. Il s'agissait simplement de se côtoyer le temps d'une ballade dans l'attente d'un jour prochain. A mesure qu'ils approchaient, le fracassement des flots s'intensifia jusqu'à devenir assourdissant. Les vagues, véritables rouleaux compresseurs, venaient s'écraser sans répit à ses pieds. Le navire continua sa route au milieu de pics rocheux transperçant les flots, avec pour seule échappatoire la coordonnée précise d’un interstice de la cuirasse. Lâchée à prix d'or par une connaissance fiable établie à Hat Island, sa véracité ne souffrait d'aucune remise en cause. Mais même sans cela, à la moindre erreur de navigation, ils s'écraseraient contre la paroi et finiraient engloutis corps et biens par les profondeurs.

A bord tout le monde s’affairait sur le pont, la moitié aux manœuvres et le reste aux aguets à inspecter les fourberies dissimulées par les eaux. S’empaler maintenant, clôturerait bien tristement une décennie de brigandages à travers les mailles toujours plus fins de la Marine. La route périlleuse choisie ne correspondait qu’à une des étapes d’un long cheminement dans l’obtention du sésame convoité. Pour beaucoup les Blues s’assimilaient à une petite mare, savoureuse si l’on savait s’y mouvoir mais où l’égo finissait par se sentir à l’étroit. Un nouvel horizon s’ouvrait alors, où les platulences reculaient au profil d’un torrent furieux : Grand Line. On parlait de mondes fantastiques défiants les lois du bon sens, où l’aventure se mélangeait à la renommée. De puissants armadas tenant tête au Gouvernement Mondial attendaient les prochains venus et leur promettaient un nom dans l'Histoire. C'est cette vie qu'ils souhaitaient maintenant rejoindre. Le butin amassé contribuerait à se payer le ticket d’entrée. Une monture plus solide et mieux harnachée afin de résister à la fougue de Grand Line et aux créatures y demeurant. Des rumeurs circulaient sur une terre de pirates pouvant répondre à leurs attentes, sa position ne s'échangeait qu'à demi-mots entre forbans. Pour l'atteindre, il devrait changer de Mer et le seul chemin que les flibustiers connaissaient portait comme doux nom : « La flaque ». Une carte en main, ils pouvaient maintenant traverser le dédale de tunnels à la barbe de la marine. Rien ne les arrêterait plus !

Quelque peu perdu dans le vague, accoudé à une rambarde du rafiot, le vieux pirate semblait détaché du tumulte environnant. Perdu dans les tranches du passé, il prit conscience un temps en retard du mouvement pernicieux de l’océan. Une lame d’eau plus vorace que ses comparses s’éleva au-dessus du gaillard arrière et engloutit le pont avec tous ce qui s’y trouvait. Emporté par le flot furieux vers un plancher inférieur, son corps se retrouva à ballotter en direction de la nappe bouillonnante. Laissé impuissant par l’absence de prise, le moment critique atteint ne  laissait pas de place aux tergiversions. Dans un acte naît de la débrouillardise du dernier instant, il attrapa son coutelat et le planta profondément dans le sol de bois pour freiner sa course. La simplicité n’enlevait rien à l’efficacité.  Un ou deux barils mal-fixés lui atterrirent bien sur le crâne lisse,  mais rapidement la menace retourna d’où elle était sortie. Crachant le trop-plein d’eau englouti, le pirate se releva haletant pour se remettre d’aplomb d’ici le prochain coup bas. Autour les hommes se remettaient déjà aux manœuvres. Quelques uns manquaient mais personne ne s’en inquiétait encore. On les pleurerait plus tard, une fois tiré de la tourmente.


- Ouverture à 11 heures !!!
- Récifs par tribord !!


Ça soufflait, rallait, courrait de toute part sur le pont. Rejoignant tant bien que mal de gros bras le long d’un mât, il agrippa à son tour un cordage et participa à l’effort en tirant aux rythmes du maître d’œuvre pour terminer de fermer le voilage coincé par le vent. Sous l’aspect desséché de ses membres, une musculature latente effectua la tache à la perfection. Si bien que les bœufs l’accompagnant manquèrent de se retrouver le cul par terre à la suite d’un mouvement sec du vieil homme. Les dernières voilures fermées, l’approche de la fente ne se décéléra pas pour autant. La faute à une coque prisonnière de la force du courant l’entraînant. Le timonier ne tenait plus les rennes depuis qu’il avait déposé la bête sur le bon flot. Le navire se confronta à la muraille sans prendre de gant. Éperon en avant, il fondait vers la cuirasse. On serra les dents, un choc les aurait effacés. Mais pas aujourd’hui. Ils se firent happer par la montagne dans un gerbe d’écume et disparurent de l’horizon.


Dernière édition par Le Cavalier le Dim 16 Oct 2016 - 12:44, édité 1 fois
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Les ténèbres se refermèrent instantanément sur eux, occultant de leurs regards les aphtes du monde rejoint. Seule une nappe épaisse englobée maintenant leur avancé. Les humeurs du monde marin les avaient quittées sitôt l’entrée passée. Rapidement elle ne devint plus qu’une lueur au loin. Les bruits au sein de ce nouvel environnement s’altéraient en de multiples échos brouillés par le courant continuant de les porter. Comme né d’une concertation commune, aucun son ne s’échappait des lèvres pour ne pas l’alimenter d’avantage. Chacun préférant réapprendre à percevoir une vie dissimulée avec ce qui leur restait de perception. Alors que leurs sens se perdaient et que de nouveaux se démarquaient, une présence se fit sentir. Elle les avait toujours accompagnés, mais en ce monde effacé elle flamboyait d’un halo glacé. Dissimulée par l’obscurité, la noirceur du tréfonds se tapissait. Attendant dans l’ombre, elle glissait entre les âmes, prête à les saisir l’heure venue. Une crainte ancestrale resurgit des esprits barbares, elle se répandit dans les corps en chassant tout contrôle. Pris de folie, certains se précipitèrent aux niveaux des lampes à l’huile en quête de luminosité. Rapidement, un dôme protecteur naquit autour du navire. Mais l’ombre était toujours là... proche.. Prête à fondre au premier relâchement du rempart lumineux.

Le Cavalier se tenait maintenant à l’avant du navire, attentif au décor dévoilé. Les brigands des mers dans son dos raffermissaient leurs pensées. Jetant parfois des regards inquiets en direction du vieillard sans que leurs esprits parviennent à relier l’homme à l’innommable. Autour, un long tunnel aux parois effilées les entourait de mille recoins insondables. Aucune végétation notable n’était parvenue à s’implanter le long de la pierre ocre, la laissant aussi nue et vide que le premier jour. Avec une largeur deux fois supérieures au trois mâts, nulle menace ne les inquiétait présentement. Ils se contentaient de se laisser porter par le courant, descendant vers les profondeurs du monde souterrain. Le temps semblait s’étirer sous les monticules de roche, les premiers signes de claustrophobie apparurent la première quinzaine de minute passée. Soudain un cri sortit l’équipage de la léthargie ambiante. Le goulot se resserrait. En effet, les parois se rapprochaient inexorablement. Légèrement au début, puis rapidement l’effet s’accéléra jusqu’à devenir difficile de l’ignorer. Un mètre d’espace de chaque coté. L’inquiétude monta, mais impuissant les hommes ne pouvait plus que serrer les dents. Quand il resta moins d’une dizaine de centimètres, le premier choc frappa la coque. Comme s’il en appelait d’autres, leur nombre s’intensifia chahutant l’embarcation prise dans une partie de dé dont le sort lui échappait.

Le briscard noua fermement ses doigts osseux à la rambarde pour assurer sa position malgré les chocs incessants faisant grincer la carcasse de bois. L’amas de planches parvenait encore à conserver son agencement, mais personne ne savait pour combien de temps encore. Pourtant si l’équipage craignait principalement un disloquement de la coque ou d’être brutalement stoppé par la faible largesse du passage, le cavalier s’inquiéta d’un tout autre problème. Une obscurité grondante non loin les rejoignait via la force croissante du courant. Mieux placé que ses comparses, il percevait pleinement un terrible fracassement s’en échappait. D’abord dubitatif sur sa nature, il comprit finalement le sens de ces signes. Il resserra sa prise tout en poussant un grand cri pour alerter l’ensemble de l’équipage encore ignorant de la menace :


- Cascade !!!

Un mot quelque peu étranger au dialecte marin, qui ne fut pas compris par tous au début. Mais déjà le navire portait par les eaux quitta son lit inquiétant pour un vide meurtrier. Victime de la pesanteur, il succomba à une chute d'une profondeur encore inconnue.
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Glissant vers les profondeurs, les éléments non arrimés s’élevèrent du pont centimètres après centimètres comme pris dans un sortilège de lévitation. Les individus à bord n’échappèrent pas au sort. Une certaine légèreté gagna le Cavalier au moment où ses pieds décollèrent du sol. Il se remémora un bref instant l’époque bénite où les rhumatismes travaillant son corps n’altéraient pas ses journées. Si l’euphorie le gagnait à l’intérieur de cette nouvelle attraction, il ne perdait pas de vue la dure réalité. Ses doigts crochus dans l’encadrure d’une boiserie, il contrôlait son envol en prévision de la dégringolade. Qui ne manqua pas d’arriver sitôt bois et eau se rencontrèrent de nouveau. Tête en bas, jupon en haut, il s’écrasa sur le sol au milieu d’une pluie de pirates. Des amas de tissus fraîchement atterris, provenaient les râles douloureux des moins chanceux ou des plus douillés.  S’appuyant sur son bras droit, il releva une nouvelle fois sa vieille carcasse en frictionnant son crâne endolori greffé d’une nouvelle bosse. Dans le chaos environnant, il pouvait contempler des corps malmenés l’esprit en vadrouille et des gars encore pendus à plusieurs mètres un pied coincé dans les haubans. Les mieux lotis avaient réussi à s’accrocher avant de décoller ou résidaient dans les calles au moment du plongeon. C’est d’une de ces positions inférieures qu’un de ces petits chanceux gueulaient à la voie d’eau sans créer grands émules. A travers la mélasse de ses pensées, le vieillard ne s’en inquiéta pas d’avantage. Parcourant le pont du regard, il chercha le Capitaine. Le grand homme tentait de mettre un peu d’ordre au sein du nid de vauriens. La tentative donnait encore peu de résultat.

Comprenant finalement le danger les guettant, le Cavalier se traîna au coté du seigneur de bord. Chapeau droit et nez de travers, le bonhomme s’occupait de remettre les hommes d’aplombs en les houspillant. A l’approche du voile froid, il se retourna abruptement. L’oiseau de mauvais augure l’avait rejoint sans bruit. Sans réfléchir, il lui posa cette question qui lui brûlait les lèvres comme à chaque personne croisée depuis peu.. et regretta aussitôt.


- As-tu vu Barry ?!
- Ouai je l’ai croisé.. juste avant qu’il jute à l’entrée de Red Line.
- Quoi ?!!
- Pour être exact je l’ai pas vraiment vu couler, mais c’est tout comme. Il m’est passé au dessus emporté par le flot. Hé hé en y repensant il se peut bien qu’il avait fermé les yeux.
- …
- Alors vif comme il était, il ne risquait pas de s’accrocher à grand-chose. Je ne veux pas être pessimiste Cap’tain, mais depuis je l’ai pas revu.

Quelque peu hagard suite au coup de massue, le capitaine n’arrêta de blêmir qu’une fois le visage débarrassé de toutes traces de sang. Le fameux Barry  ne faisait pas parti de ces troufions éjectables pour l’exemple les jours de mauvaises lunes. Non pas en raison de sa personne, unanimement détestable et méprisable, mais de sa position au sein du navire. Par ce tempérament exécrable, il s’était hissé au rang de quartier-maître lui octroyant la permission et le devoir de mater la bande de voleurs et de meurtriers. Un poste nécessitant une certaine fiabilité, lui valant l’honneur de se voir confier la carte du chemin à suivre. Autrement dit, une fois fourrée dans son pantalon personne n’allait venir lui dérober. Preuve à l’appuie, elle l’avait accompagné jusque dans l’au-delà. Maintenant la porte ouverte, ils risquaient bien de tous le rejoindre dans un trépas sans éclat.

Attrapant brusquement le col du vieil homme, le capitaine ramena sa prise à lui. Soufflant des mots hachés à son oreille pour bien se faire entendre de l’intéressé et non du fretin les entourant. A ce moment, la Mort sembla plus proche que jamais.


- A qui t’en as parlé ?
- Rien qu’à vous, pas eu le temps de faire causette à grand monde.
- Que ça reste ainsi tu m’entends ?! Si tu baves je t’arrache la langue et te débarque par le canon.  T’as compris ?
- Oui Capt’ain hé hé.. Aussi clair que de l’eau de roche.

Les deux hommes se jaugèrent quelque peu. L’un dissimulant ses pensées derrières un sourire incongru en de telles circonstances et l’autre sur la défensive cherchant à le déchiffrer. Le porte poisse interrompit l’échange non verbal afin de continuer sur sa lancé.

- Maintenant qu’on s’est mis d’accord, il me semble bon de vous prévenir qu’on prend l’eau et que les hommes se bougent pas trop pour colmater depuis que le quartier maitre a pris sa retraite.
- Quoi ?!!!
- Si le post est vacant, laissez moi redresser la bande de branquinol. Trente ans dans le métier à botter des culs, autant remettre le couvert avant qu’on finisse le voyage à la brasse.

La nouvelle plomba une nouvelle fois le Capitaine déjà à terre. Alors que ses yeux sortaient de ses orbites, ses méninges à plein régime cherchaient à résoudre le problème posé. La disparition de Barry ne durerait pas éternellement méconnue de grand monde cependant le souci principal restait la carte. Il l’avait suffisamment étudié pour en mémoriser les grandes lignes mais l’humeur capricieuse des pirates avaient peu de chance de s’en contenter. Le moindre chamboulement survenant après l’annonce risquait de mettre le feu aux poudres. Les pensées se bousculaient dans sa tête pourtant seulement quelques secondes étaient passées lorsqu’il donna ses ordres.

- Très bien vas y, tu as la place pour moi tant que le rafiot reste à flot. Pour le reste, arranges toi avec l’équipage. Et pas un mot de tout ça !
- Bien M’sieur !

Sans perdre d’avantage de temps, le nouveau gradé de bord partit réveiller ses ouailles. Les plus lents à récupérer se prirent une gifle ou deux et rapidement une équipe se forma pour aller écoper la cale inondée. Quelque peu rassuré, le Capitaine retourna dans sa loge mettre en ordre le reste du chemin à suivre. La carte était déjà obscure par endroit, le trajet le serait bien plus s’il ne mettait pas par écrit ce dont il se souvenait.
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L’eau à hauteur de genou, le vieux pirate observait les hommes se débattre dans les entrailles du navire contre la marée salée s’y invitant. Le rodéo improvisé le long des parois rocheuses n’avait pas été du gout de la bête, particulièrement pas à celui de sa coque. La chute d’une bonne vingtaine de mètres l’acheva. D’abord fragilisée, la collision força sur les zones abimées et l’éventra par trois endroits, suffisamment méchamment pour que l’eau s’y engouffre joyeusement. L’assemblage de bois s’était ainsi greffé de trois longues estafilades. Sous la houlette du nouveau quartier-maître, les gars planchaient ferme à coup de marteau pour calfeutrer les brèches. Peu inquiet du rendu final ni des stocks disponibles, les planches s’accumulaient et se croisaient en tout sens dans un agglomérat grotesque. L’équipe s’était dotée avec les bras les plus prompts à intervenir, plutôt que des plus habiles. Ils comblaient le manque de maîtrise par un surplus d’énergie. Le Cavalier n’en demandait pas plus. Assis sur les marches d’un escalier bancal, il se contentait de les regarder se débattre tel un vieux charognard attendant son heure. Le seul geste effectué dans leur sens depuis qu’ils étaient descendus, consista à tendre le bras pour saisir une bouteille qui flottait non loin. Pourtant, malgré le manque d’investissement de l’encadrant, le travail avançait bien. Sans avoir été encore officiellement intronisé, personne n’avait remis en cause sa position nouvelle. Les hommes sous pression faisaient leur tache sans perdre de temps à s’éparpiller dans de vaines confrontations. La crainte inspirée par le personnage jouant pour beaucoup. La mort montante aussi.

Depuis son perchoir, le Cavalier inspectait les gesticulations des membres d’équipage avec un détachement prononcé. Il n’avait pas rejoint ce post par grandeur d’âme, mais pour les avantages qui en découlaient. L’un des plus intéressants consistait à superviser la basse œuvre plutôt que de la réaliser. Siffler un reste de vignasse tranquillement assis allait également de paire. La réalisation plus qu’approximative du rafistolage ne le préoccupait pas, elle sortait du cadre de sa mission. L’important consistait à empêcher l’eau d’entrer et planche après planche son débit se tarissait. Si d’autres souhaitaient consacrer leur temps à la beauté de l’ouvrage et autres joyeusetés, grand bien leur fasse. Son reste de bouteille terminé, le gradé se releva et remonta quelque marche pour essorer le bas de sa tunique. Chose faite, il se tourna vers les hommes encore entrain de fignoler et commenta d’un ton enjoué.


- Mouai, c’est pas mal on a bien bossé les gars. Reste plus qu’à écoper tout ce bazar par-dessus bord.
- …
- Rho allez faites pas ces têtes d’enterrement, je vous envoie du renfort sitôt la haut. Une petite chaîne et on dormira pas le cul dans l’eau.
- …
- Hé hé.. Perdez rien de ce dynamisme, je repasserai vous voir.

Laissant les bosseurs à leurs occupations, le vieux roublard remonta l’escalier accoudé à la rampe. Son bâton disparu lors de la saucée, il nota dans un coin de son crâne d’envoyer un mousse lui retrouver. Au dehors, le pont s’était doté d’un regain activité. L’œuvre du Capitaine mais pas seulement. Les petites natures ne tenaient jamais bien longtemps à bord de tels navires, ne laissant plus que de fiers pirates. La sélection naturelle qu’il se disait. Même si des chuintements s’échappaient parfois du lot, ils restaient un rassemblement de brutes des mers qui ne flanchaient pas au premier travers. Parmi les blessés, on comptabilisait d’avantage de muscles endoloris que d’os brisés. Les quelques têtes violacées ne manqueraient pas d’apporter de la saveur au tableau.

Depuis son atterrissage, l’embarcation se laissait porter par le courant souterrain, bien plus calme maintenant qu’a leur arrivé. Fini le temps où elle frôlait les murs, quatre autres trois-mâts pouvaient dorénavant naviguer bord à bord sans difficulté. L’immensité du tunnel renvoyait le navire à l’image d’une simple coque de noix. La roche effilée aux mille recoins s’était faite remplacée par des parois en parties gommées. De ces espaces aplanis, un sentiment d’emmurement ressortait malgré les dimensions imposantes de l’endroit. Le couloir emprunté se ponctuait parfois de passages condamnés par de longs morceaux de bois, tagués à la peinture bleue.. Assis à l’avant, le Capitaine comptait les entrées passées concentré dans la tache qu’il s’était fixé.


- Cinq…Humpf bientôt.
- Là-bas !! La sortie droit devant !!!

L’acclamation provenait d’un pirate court sur pattes mais aux bras disproportionnés, à la limite de toucher le sol. Avec son torse débordant de masculinité pilaire, le nom de Pierrot lui avait été attribué. Habituellement posté au nid de pie, le gredin était redescendu de son perchoir une fois à l’intérieur du monde souterrain. Perdre de la hauteur ne lui avait cependant rien enlevé de son acuité visuel, ni de sa voix puissante qui explosa les tympans des plus proches. Le doigt pointé dans la direction de la proue, des éclats lumineux les attendaient. Un certain soulagement gagna l’équipage, tapotant son dos ravi de la trouvaille. Le Capitaine semblait plus dubitatif pour une raison des plus simples, depuis le départ ils s’enfonçaient dans la montagne. Difficile de croire qu’ils en avaient déjà atteint le bout.

- Du calme les gars, du calme..

Ponctuant ses mots, deux éclats retentirent de la lueur approchante dont l’écho se répercuta dans la caverne inondée. Un sifflement caractéristique se fit finalement entendre.  


Dernière édition par Le Cavalier le Ven 16 Juin 2017 - 10:13, édité 1 fois
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Longeant le pont d’un sifflement perçant, les morceaux d’acier ne s’arrêtèrent pas au premier obstacle et vaporisèrent la figure de proue en un nuage de poussières. Aux premières loges, Gates s’empressa d’esquiver l’un d’entre eux d’un pas sur le coté. D’entre les plis de son habit roussi, le projectile poursuit sa course jusqu’à un groupe de pirate moins prompt à réagir. Des cris douloureux s’échappèrent lorsque le jeu de quilles vola dans une explosion. Bâton nouvellement en main, le vieux roublard s’avança vers les nouveaux venus à l’entrée si soignée. A la salve suivante, il se contenta une nouvelle fois d’esquiver la volée de boulets, laissant à d’autres le loisir de les réceptionner. Plissant les yeux pour discerner les contours de l’assaillant, un sourire carnassier naquit sur ses lèvres à la vue du pavillon. Remontant le cours d’eau par la force de puissantes aubes, deux caravelles de patrouille se propulsaient dans leur direction. Pris au piège, la carcasse de bois des gredins de bas étages continuait d’avancer tout droit vers le nid d’épines.

- MARINE !!?

Postées à l’intérieur du réseau de Marijoan, elles stationnaient habituellement aux entrées du passage et se contentaient de lever l’ancre pour escorter les protégés du Gouvernent Mondial. Une position peu convoitée au sein de la marine, où les demandes de promotion étaient aussi enterrées que les demandeurs. Avec des centaines de couches rocheuses au-dessus du crâne, les bains de soleil se faisaient rares. Beaucoup atterrissaient ici après avoir titillé la mauvaise personne. Mais le temps d’acclimatation passé, les jours finissaient par se suivre comme ailleurs. Une certaine routine gouvernait l’endroit pour le bien comme pour le pire. Ils étaient rarement envoyés patrouiller aussi loin dans les goulots désaffectés de la mer souterraine, les parties les plus externes du réseau contrôlé. Mais depuis quelques temps, une recrudescence d’équipages pirates avait été signalée à cette position sans qu’une explication satisfaisante n’en donne la raison. L’ordre de mission confié consistait à renforcer la sécurité du secteur par leurs présences et à trouver des éléments de réponses. Après plusieurs semaines à ne croiser que des monstres marins égarés, un premier indice se révélait finalement à eux.

Sous le feu nourri des deux canons, le trois-mâts poursuivait son approche. Il fallait serrer les dents dans l’attente du choc, manœuvrer maintenant aurait révélé les flancs à un double éperonnage. Les boulets continuaient de pleuvoir, obligeant les marins à se terrer tant bien que mal derrière ce qu’ils pouvaient. Harnachés de leurs attirails meurtriers, ils attendaient l’éclairci en trépignant d’impatience. Les grondements avaient peine à étouffer les aboiements du Capitaine. Une main enfouie dans sa barbe de jais comme pour garder un minimum de contenance, l’appel de la bataille exaltait son regard. Les doutes et les craintes balayés, il balançait ses directives d’un ton impératif. Comme toutes personnes à bord, le quartier maître n’en perdait pas une miette. Certains mots s’envolaient dans le vent, mais dans l’ensemble l’idée avait bien été transmise. Il prenait du galon, lui octroyant un heureux empalement et autres joyeusetés en cas d’échec. Un tiers de l’équipage serait sous sa coupe le moment venu, le Cavalier s’impatienta de lancer la charge. Toujours entrainé par le courant, le navire pirate rejoignit les caravelles et s’écrasa entre elles. Malgré la différence de taille, les embarcations renforcées du gouvernement tinrent bon et bloquèrent son avancé en forçant sur les turbines. Il s’agissait du signal, le moment était venu de rendre les coups. D’un cri, les canons vidèrent leurs charges à bout portant. Masqué par la fumée, un groupe se jeta alors sur chaque navire.

Laissant au chef de bord le bâbord, Gates s’élança au tribord accompagné de ses hommes. La tige de bois en avant, il contrôla sa réception pendant que les autres atterrissaient de toutes leurs lourdeurs sur le plancher clouté. De ce qu’ils virent, l’artillerie avait fait son office en désorganisant les troupes. Mais déjà reformée en retrait par un gradé, une section se dressait à leur devant. Sous la forme d’un véritable peloton d’exécution avec une première ligne genou à terre et une seconde relevée, ils tenaient en joue les vauriens du canon de leurs fusils. Les soldats avaient attendu les derniers arrivants pour commencer à tirer en un roulement continu sur le flot de belligérants. Les pertes auraient été nombreuses si un vieil homme au teint blafard ne s’était pas alors interposé. Le Cavalier n’avait pas pour habitude de materner les grands garçons, il ne souhaitait simplement pas finir la traversé seul. Confiant en ses compétences, le combattant aux yeux blanchis éleva la Porte des Limbes face au déluge mortel. Les doigts osseux de l’ancien coupe-jarret prirent vie de nouveau et s’engaillardirent dans une danse folle. La rotation de son bâton s’accéléra jusqu’à en effacer le contour, aspirés, les projectiles s’écrasèrent contre le bouclier sans en blesser le porteur. Par le mouvement du vortex, ils ricochèrent de toutes parts. Le flot meurtrier s’estompa bientôt en raison de l’annihilation de son effet destructeur. Le regard du pirate brilla devant l’occasion offerte. Se glissant dans le temps mort, le porteur de Mort libéra l’âme des damnés en un souffle glacé. Le mouvement d’air emprunt de l’aura maudite glissa en direction des marines, jusqu’au plus profond de leurs êtres. Tétanisés par la noirceur de la rencontre, ils ne purent éviter le mouvement ample de son arme qui balaya la zone de toute sa longueur. Propulsé à l’aide de son bâton comme il en aurait été d’une perche, le Cavalier venait de rompre la distance le séparant de ses adversaires en un bref instant. Tel le paysan à la saison des moissons, il faucha tout ce qui se trouva à sa portée nouvelle. Les corps malmenés s’éparpillèrent en tous sens.


- La voie est ouverte, lâchez-vous ! Ne vous retenez pas hé hé..

Courant de chacun de ses cotés, les hommes galvanisés par l’appel de la mort s’élancèrent croiser le fer. La sauvagerie contenue se libéra en une explosion écarlate. Face à eux, des marines gonflés par la vue de leurs camarades au sol répliquèrent avec la même violence. Un chaos propre à toutes les batailles s’étendit sur tout le navire. Le sang coula..
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Au cœur de l’engagement, le Cavalier ne se dérogeait pas à sa tache. Bâton en main, il gratifiait sans retenu ses honneurs à ceux qui tentaient de l’interrompre dans son avancé lente. La compassion ne se distribuait pas aux hommes valeureux au risque de les gâter. L’atmosphère ténébreuse planant autour du pirate s’imageait en celle accompagnant la nuée de charognards les temps de deuil. Malgré l’inquiétante pression, les marines continuaient de défendre chaque pouce de terrain. Prenant le pas sur d’autres, un soldat du Gouvernement se précipita contre lui sabre au poing. L’arme qui tournoyait entre les mains de Gates fendit l’air jusqu’à son menton avec suffisamment de force pour l’élever de quelques orteils, que déjà le retour de bâton le frappait plus fortement encore au niveau du crâne pour le rabattre. Son visage s’incrusta en profondeur dans le plancher. Le second et le troisième à tenter la manœuvre subirent le même sort comme bien d’autres avant eux. Le boucanier profitait pleinement de la portée de son arme pour tenir à l’écart les blessures, la vitesse du mouvement et la précision acquise avec les années réalisaient le reste. Une fois les corps à terre, il les enjambait sans un regard. Son estime se portait sur les hommes se dressant contre lui et non sur les vaincus. Pour son plaisir, de braves combattants l’attendaient encore.

Partout l’éclat des lames se ternissait d’un rouge vermeille, elles fendaient les airs en des sifflements glaçants. Parfois elles se contrecarraient, parfois elles s’entre-carraient entre deux os et y restaient logées. Venait alors le moment où les briscards les abandonnaient pour tout autre objet digne de sonner le glas. Peu ne répondait pas à l’attente une fois maniée dans la fièvre de la bataille. Plongeant son regard dans la désolation s’étant emparée du navire, le Lieutenant Ney ne perdait rien du triste spectacle. Les deux camps s’égalaient avec un avantage martial compensé par le nombre et la sauvagerie des pirates. Il remarqua cependant une menace au fragile équilibre en la personne d’un vieil individu délavé par le temps et des rangs de soldats s’éclaircissant à son passage. Prenant conscience de la menace,  le gradé grinça des dents. Posté en haut du château, siège central de l’embarcation qui abritait à l’étage la salle des commandes affiliée au centre des communications, il balança son poing dans le mutin qui avait tenté de monter jusqu’à lui et agrippa son long marteau.


- Sergent, je laisse sous votre responsabilité la défense du point.
- Bien chef !

L’arme massive en main, il commença quelques flexions énergiques pour se mettre en jambe. Jusqu’à présent, tenu à l’écart par ses responsabilités, il n’avait pas encore directement pris part à la bataille. Son rôle de commandant lui incombait d’avantage de superviser, comme on avait souhaité lui apprendre par son envoie à l’ombre. Calmer ses humeurs et ses actions guidées aux coups de sang dans une zone de toutes les routines, le message était bien passé. Ordonner les hommes et localiser l’endroit où sa présence ferait le plus la différence importait plus qu’étaler sa force au mauvaise endroit. L’encadrement militaire qui avait réorganisé les hommes après la salve douloureuse, et permis de faire feu de la plus implacable des manières aurait pu être un tournent rapide de la bataille, sans l’intervention d’un grain de sable qu’il s’apprêtait maintenant à souffler.

L’envolé gracieuse du pont supérieur se clôtura au milieu d’une bande de pirates hagards par le météore leur atterrissant sur le coin du nez. Le Marteau de la Justice éparpilla les mauvaises graines aux quatre coins du navire dans un brouhaha d’os brisés. De la place épurée maintenant au centre des attentions, ses muscles se mirent à se décupler fièrement dans la sainte lignée des premiers maîtres haltérophiles. L’homme resplendissait de mille éclats vigoureux, un véritable mirage aveuglant pour tous les intrus malnutris à dose d’alcools coupés à la pisse et de viandes avariées. Puisant dans chaque fibre de son tonus, le sol craquela sous la pression avant de relâcher la masse vertueuse. L’arme en arrière, il boula les tronches de vilains de sa charge jusqu’à atteindre celui qui les avait déversées. Porté par sa vélocité, il abattit l’imposante masse d’acier à quelques pouces du Cavalier. D’un coup de bâton sur le plancher, ce dernier était parvenu à pousser sa carcasse à une brève distance du point d’impact. Bien lui en pris en vue du cratère formé. Il renouvela la pratique sans attendre car déjà de nouveaux chocs germaient tout autour de lui. Il déplaçait son corps à mesure des avancées du marine belliqueux et le cas échéant accompagnait le mouvement du marteau de guerre pour le dévier ne serais ce qu’un peu. Malgré ses attentions, à chaque effleurement le bois de son arme grinçait d’un ton inquiétant. La danse entamée au milieu des combats ne se dotait d’aucune grâce. Il s’agissait d’avantage d’un jeu du chat et de la souris, mortel pour le spectateur inattentif. Si la représentation n’était pas à la hauteur, les petits bonds saccadés du brigand des mers à l’intérieur de la cohue sanguinaire avaient le mérite de préserver sa personne. Bientôt l’assaut s’estompa, laissant aux deux adversaires la possibilité de reprendre leur souffle après avoir parcouru de long en large le champ de bataille en un bref instant.


- Humpf.. réduis la cadence gamin, lâcha finalement Gates entre deux respirations, tu vas me tuer à ce rythme hé hé humpf..humpf..
- Lieutenant Ney, déposez les armes si vous souhaitez voir un lendemain !
- Moi qui croyais que les chiens du Gouvernement avaient plus que des dents creuses.. peut être qu’il y a encore quelqu’chose à attendre de certaines..
- Tu ne t’en sortiras pas si tu continues ainsi, alors réponds moi maintenant.  Comment êtes vous arrivés ici et que venez vous y faire ?!
- Hé hé.. On est là pour la bronzette mais on s’est fait avoir.. On est où déjà ?
- Vous êtes sur les terres du Gouvernement Mondial, dans le réseau de Marie-Joan. Votre seule présence vous condamne à mort.
- Nan ?! Passage de merde je me disais bien qu’il y avait merdouille.. Y en a un qui finira empalé sur un cactus si je lui remets la main dessus..
- Tu veux dire qu’il y a un passage ? Un chemin de traverse ?! Réponds-moi pirate !!
- Pt’être bin qu’oui, pt’être bin que non.. Je t’ai déjà trop mâché le travail hé hé..
- Quel est ton nom vieil homme ? Si tu te rends maintenant, je jure sur mon honneur qu’aucun mal ne te sera fait aujourd’hui. Tu devras simplement répondre de tes actes devant la Justice.
- Hé hé hé… rends toi d’abord pour voir, promis je t’étriperai pas de bas en haut avec tes hommes hé hé..
- Misérable.. Ainsi soit-il, un autre parlera.

Bien que frappé par un rugissement tonitruant, le porteur de mort ne perdit rien de son air enjoué. Le gradé lui faisant face ne manquait pas de puissance et brassait de larges surfaces à chaque mouvement, pour autant une ouverture persistait. Joignant le geste à la pensée en le voyant lever son arme, le Cavalier devenu jouteur avança un pied comme appui pour propulser le reste de son corps bâton en avant en direction de la zone à nue. La lance glissa entre ses longs doigts jusqu’à enfoncer son extrémité dans l’estomac de l’homme plein de promesse. Tenue ainsi à bout de bras de toute sa longueur, la portée de l’arme venait de doubler brusquement sans perdre de sa puissance. Le teint violacé autant par la douleur que la surprise, le Lieutenant ne laissa pourtant pas échapper un son, préférant prendre sur lui le temps de raffermir sa prise et d’abattre son arme dans le vide. Trois coups simultanés se refermèrent alors comme des serres. Endolori mais toujours présent, le marine renâclait devant l’épine lui pourrissant sa journée. Toute cette attention meurtrière ravissait le quartier-maître.

D’une pirouette gracile, le colosse chuta tel un obus dans sa direction et éventra une portion importante du pont. Le Cavalier désarçonné par la manœuvre, échoua sur le derrière au grand d’âme de sa bonne étoile. Le marteau était dressé prêt à l’envoyer rejoindre le monde des âmes sans que son maigre bâton ne puisse s’y opposer dignement. Hameçonnant le fouloir bleu marine d’un soldat à portée, il le rabattit rapidement à son devant en un semblant de muraille de brindilles. La masse d’acier tombante stoppa sa course à un pouce du marine blanchi. D’importantes gouttes de sueur  perlèrent de son front, mais aucun son ne sortit, trop choqué pour réagir. Grognant, le Lieutenant le dégagea de sa patte lourde et aperçut l’animal puant se carapatant à quatre pattes tel un couard. Pourtant lorsqu’il se releva, le vieillard arborait la même mine hautaine d’un sourire plus accentué encore. Il s’amusait ou avait découvert quelque chose qui le ravivait, les deux peut être..

Lorsque Ney chargea, le gredin se contenta de se glisser entre deux marines affairés ailleurs et insuffla la rotation à son arme. Frappant les simples soldats de passage, il conservait l’attention du Lieutenant. Ce dernier pas en reste, broyait les malfrats tombant entre ses mains sans le quitter du regard. Se jetant derrière un marine comme d’un bouclier, le pirate glissa autour jusqu’à attendre sa cible. De l’arme tournant à grande vitesse, trois coups simultanés se refermèrent tels des serres contre le demi-géant.  Gêné par la présence d’alliés, ce dernier ne parvint pas à bouger comme souhaité et se prit sans pouvoir pleinement répliquer l’attaque, mais déjà il répliqua dans une zone de nouveau vide. Les coups douloureux étaient loin de suffire, mais l’enchaînement se répéta encore plusieurs fois endolorissant le corps du gradé. C’était comme un ours harcelé par un essaim d’abeilles. Et ce sourire moqueur qu’il ne parvenait à effacer le rendait fou.

Soudain depuis le pont supérieur du château, un pirate court sur pattes couvrit le champ de bataille de sa voix tonitruante.


- C’est bon Monsieur Le Cavalier ! On remballe !!!

Le Lieutenant Ney se retourna brusquement en quête du Sergent laissé en poste, plus trace. A la place une bande de raclures des mers s’échappait sans demander leurs restes de la salle des commandes. De tous cotés les pirates quittaient les combats et fuyaient ventre à terre vers leur embarcation. Pourtant le goût de la victoire se laissait désirer. Un tremblement l’avertit que les navires se remettaient à bouger. Jusqu’à présent tenu en statu-quo par le grondement des aubes luttant contre le courant, les caravelles ne parvenaient plus à retenir le trois-mâts massif des forbans. Elles s’étaient tues... De plus la barre avait été bougée, car l’embarcation du GM libérait le passage en se dirigeant vers les bords rocailleux du canal. La carcasse de bois s’extirpait peu à peu du barrage. Un large filet  avait été déployé de chaque bord, où les pirates se jetaient comme des moucherons ravis d’être gobés. Les marines bousculés par le flot s’enfuyant ne parvenaient que timidement à en barrer le passage. Comprenant s’être fait berner, le Lieutenant se retourna rouge de rage contre le Cavalier, mais le voile sombre aussi avait libéré la place.

- RHAAAA !!! VOUS ! Allez remettre de l’ordre au poste des commandes et faites moi un rapport ! Tout de suite !! Sans attendre, les cinq soldats désignés se précipitèrent vers les hauteurs du navire. ÉCOUTEZ-MOI VOUS AUTRES !! NE LES LAISSEZ PAS PRENDRE LES VOILES !! ABBATTEZ LES COMME LES RATS QU’ILS SONT !

Les ordres lâchés, le titan partit en chasse. Écrasant son Marteau de la Vengeance contre les traînards, il tentait de rattraper l’homme qui s’était amusé à le faire tourner telle une bourrique. Le Cavalier ne prévoyait pas de jouer les nourrices au départ, il se dirigeait vers la salle des contrôles lorsque la pointure avait tenté de l’écraser. Occupant ailleurs la menace au plan, d’autres s’étaient chargés de la besogne. Tout le monde avait reçu le même mot d’ordre : saccager la machinerie et les commandes pour percer le blocus. Personne ne savait combien de petits gars bleus traînaient dans le coin et personne ne souhaitait le savoir.

L’art de décamper aurait pu être le credo de la piraterie tant ils savaient si brillamment l’appliquer. Remontant ses bas, notre héros périmé cavalait un souffle chargé de fureur brûlant dans le dos. Le navire ne l’attendait pas, l’équipe de bâbord avait du libérer la place plus rapidement, galopant en fin de cortège il parcourait l’embarcation sur sa longueur vers la poupe. Son arme tournoyait dans une main pendant qu’il maintenait de l’autre sa soutane. Le bord arrière n’était plus qu’à un pas, mais des retardataires restaient sur le chemin. Sans se poser de questions il balança son bâton dans des paires de derrières, les boulant dans le filet et coinça au dernier moment l’embout de sa perche contre le bastingage. Sous l’impulsion de la vitesse, son corps décolla de plusieurs mètres avant de retomber gauchement contre les liens tendus. Déjà remonté, pendant que ça pétardait de toute part, il remarqua de l’autre coté le Lieutenant fulminant et la piste d’envol défoncée par le marteau.

L’excitation des combats grisant les pensées, une certaine hardiesse baignait les survivants de retour à bord. Durant un temps les recoins sombres de la grotte semblaient encore lointains. Ravi de l’escapade, le vieux pirate communiqua sa bonne humeur à un Capitaine plus circonspect.


- Hé hé hé regardez moi cette tête de glan..
- Cavalier !  Qu’est ce que vous avez foutu ?! Une plombe que l’affaire est réglée de notre bord !
- Y’a eu un imprév..
- Pas de ça avec moi ! Vous y étiez pour gérer les imprévus et regardez moi ça ?!
- Nnf.. on les a dégagé du passage comme convenu Cap’tain..
- La moitié de vos gars y sont restés ! De MES gars !
- Comme je disais de la tête de gland, pas un tendre.
- Je veux rien savoir ! Foutez-moi le camp et ordonnez-moi le bord. A la prochaine porte de bois, on vire de bord. Préparez des canons et abstenez vous de traînasser cette fois !
- Bien Monsieur.. le Cap’tain…

L’échange se terminait sur un ton froid, glacial. La colère du Capitaine à peine soufflée, une crainte primitive s’installa en arrière plan de son subconscient. La personne d’en face était dangereuse, l’oublier était à éviter. Mais le porteur de Mort se plia aux exigences sans faire d’histoire fidèle à son habitude. L’équipage de vilains s’organisa rapidement dans les divers postes malgré les manquements à l’appel.


A la proue d’une des caravelles, le Lieutenant fulminait toujours de s’être fait balader. Il gardait le regard fixé sur l’arrière train du bateau pirate, tout en tapotant d’un doigt nerveux contre le bastingage épargné. La distance entre les forces de la Justice et les criminels s’était quelque peu accrue lorsqu’il avait fallu remettre les navires dans le bon sens. Histoire d’avoir le gouvernail autre part qu’à l’avant… Depuis, puisque portées par les mêmes courants souterrains, les trois embarcations suivaient un rythme similaire. Humilié par le Cavalier, Ney le tenait responsable de tous les maux qu’un subalterne lui énumérait d’une voix monocorde.


-  … les poches de sang de type G, T et R vont commencer à manquer, 40% des effectifs blessés seront inaptes en cas d’affrontement et la moitié de l’effectif restant sera diminué selon le deuxième rapport du Docteur Tournesol, les mécaniciens estiment à une demi-heure le temps nécessaire pour remettre en fonctionnement les communications avec le QG, pour les aubes ils ne se prononcent pas encore les dégâts sont importants à différents niveaux, les munitions…
- Le Sergent ?
- Vilaine blessure, mais il s’en sortira, les munitions de type balle de fusi…
- SALOPERIES !!

A quelques brasses, les forbans venaient d’ouvrir le feu contre une épaisse structure de bois. De longs troncs, entrecroisés en une barrière tatouée aux couleurs de la marine, libérèrent le passage sur une voie d’eau plus sinueuse en comparaison de l’immensité qu’ils quittaient. Arrivés à l’édifice explosé, la lueur des lampes à huile s’éloignaient. Balançant son pied dans une caisse vide, le Lieutenant leva son poing fermé comme signal d’arrêt.

- RHAAAAA !!!!

Depuis la deuxième caravelle, le Sergent en charge s’empressa de suivre à l’identique la manœuvre en allant se fixer contre le bord de la caverne sans continuer la poursuite dans l’interstice. Personne ne les suivrait dans le dédale non balisé de la Flaque. La rancœur laissait un goût amer, croissant à mesure que le halo lumineux se perdait dans l’obscurité tortueuse…
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Rokade, automne 1627.


- Pas bon..
- J'sais...
- Une purée de poix aussi épaisse qui se bouffe le large.... Elle suinte le surnaturelle ou je m'y connais pas !
- Je sais j'te dis ! Une heure que tu m'casses les oreilles et regarde moi ça ? Un putain de beau merlan que voilà, le plus beau de la saison ! T'y connais rien, arrête de flipper.  
- De l’appât à crétin ! Le Hollandais guette. Il sème les graines et nous choppera à son bord pendant les milles prochaines lunes si on rebrousse pas chemin.
- Des histoires de soûlards.
- Dis pas ça trou d'cul ! "Mets pas en doute le Hollandais sinon y viendra te chercher." Le Kyuma se gaussait aussi des leçons des anciens, un jour il partit seul en mer et se moqua du Hollandais. Depuis on l'a pu jamais revu.
- Comment tu sais ce qu'il a dit, s'il était seul ?
- Ça se sait c'est tout.
- Un bon ramassis de conneries, on perd pas la côte du regard et on sera rentré à midi les caisses pleines de poissons. Alors boucle là, sinon je t'accroche à la ligne pour chopper plus gros !
- ...
- Qu'est que t'as à faire cette tronche de déter...

Le chemin de traverse Ghost_ship_by_daroz-d75i54n

Le teint blême, les deux pêcheurs fixaient la masse sombre s'extirpant du brouillard. L'éclat incertain de la lampe révélait les contours dentelés d'une proue décapitée. Le funeste présage traînait dans son sillage une carcasse de bois cabossée, bariolée des stigmates d'une histoire chargée. La petit barque semblait bien minuscule au devant de cette monstruosité s'élevant sur plusieurs ponts. Glissant dans le silence du petit matin, aucun signe de vie n'en réchappait. Seule une aura de Mort se dégageait du vaisseau fantôme. Lorsque les mâts sortirent de la brume s'offrit à eux une vision de terreur. Bon nombre des voiles déployées retombait en des linceuls de part les déchirures les lacérant, mais le plus effroyable était des amas accrochés aux vergues, bercés par un vent d'outre tombe. Les deux clampins n'attendirent pas d'apercevoir l'artimon pour détaller à grands coups de rames vers le port protecteur de Rokade.


***



Journal de Bord a écrit:__________Jour 1.

J’ouvre une nouvelle page en ce jour de promesse. De ma plus belle plume par ces mots se marquent officiellement les débuts du voyage du Capitaine Hornicorne au cœur d’une des dernières terres insondées : la Flaque. Mot bien peu reluisant pour un monde de légende aux milles récits.

La fin du périple atteint gratifiera le monde des marins d’eau profonde d’une nouvelle histoire à conter les soirs sans lune. Le ton se devra d’être rocailleux et pesant en mémoire du lieu qui l’a vu naître. Qui sait quelles merveilles et diableries croiserais je au détour de ces couloirs.

Le temps est à l’accalmie après une rude rencontre de trois navires des chiens du Gouvernement Mondial. Le combat fut rude, les pertes nombreuses, mais de par ma bravoure et les bons hommes m’accompagnant nous vinrent à bout de l’épreuve sans faillir. Les indications de la carte me conduisent vers un endroit plus sombre dorénavant.

Le drapeau pirate flottera encore ce soir !


__________Jour 3.

Calme et attention sont les mots qui marquent cette journée passée. Hier on pansait les plais. Aujourd’hui encore le soleil ne s’est pas levé, nous avançons à la lueur des lampes en quête des repères encadrant la route. Aucun ne fut trouvé à cette heure, qui sait combien de temps il nous faudra attendre d’ici le premier.

Nous slalomons entre les passages se présentant, inquiets de ce que nous laissons derrière. Il y a longtemps maintenant qu’aucun retour en arrière ne nous est possible. Patience est le troisième mot, nos efforts seront récompensés.


__________Jour 5.

Seulement ? Le temps est plus lent en ces lieux que partout ailleurs. Un goutte à goutte incessant dont nous sommes condamnés à suivre le cours. La nature des lieux absente de singularités ne permet pas de s'évader. Tout comme le corps, l'esprit est prisonnier des roches. La nuit perpétuelle nous étreint et nous fatigue, mais le sommeil nous quitte. Il devient difficile de résister à l’appel cotonneux du calme total et impénétrable.

Certains idiots ont tenté de le briser par des hurlements grotesques, avant d’être violemment rudoyés sur mes ordres par le quartier-maître. Ne rentrons pas dans la démence, on ne sait ce qui se tapit en ces lieux. Le brave homme est un soutien de taille en ces temps difficiles, alors que les hommes sont laissés à l’oisiveté.

Rien n’est plus dangereux que de dangereux hommes qui s’ennuient...


__________Jour 7.

Les ressources ont été verrouillées à triple tour dans une atmosphère houleuse. La perte de la nourriture et de la boisson a fait grincer des dents, celle de l’huile des lampes fut un déchirement. Le rationnement ne peut plus être évité. Seul l’espoir de trouver rapidement la sortie nous avait encouragés à retarder cette douloureuse contrainte.

Aucun chemin ne s’est révélé à nous, nous tachons de suivre une trajectoire droite. Personne ne s’y trompe nous tournons en rond.

L’espoir s’est perdu.


__________Jour 8.

La folie frappe les hommes. La faute à l’obscurité qui nous assiège à chaque instant et nous emprisonne. La révolte plane à bord, elle s’est implantée dans les esprits maintenant et ne fera qu’amplifier. Comme à chaque temps de doute, les fautes sont rejetées sur le Capitaine plutôt que sur l’incompétence de son équipage. Seule la crainte du Cavalier me protège encore. Les raisons de sa fidélité me sont étrangères, il n’est pas un homme qui souffre de conscience. J’ignore encore combien de temps il me servira de rempart.

Ma survie en dépend, pourtant la difficulté de le côtoyer s’accentue chaque jours. Sa nature se révèle en ces terres perdues. Qu’est-elle ? Nul ne le sait.


__________Jour 10 11..

La tension est au plus haut, la nuit dernière un groupe d’hommes a tenté d’assassiner le Cavalier durant son sommeil. Le projet a parcouru le pont tel un murmure jusqu’à mes oreilles, pourtant je n’ai pas prévenu mon protecteur. Sa présence nous étouffe et nous glace, on n'ose fermer les yeux de peur de les rouvrir. Alors je n'ai soufflé mot.

Des personnes ayant participé au projet, plus un signe sur le navire. Tous évaporés sans qu'un bruit nous parvint. La pression inquiétante nous pèse plus que jamais.


__________Jour ...

Un mois ou une année ou cent sont passées. Le compte du temps fut perdu, englouti par la montagne comme toute chose en passant l’entrée. L’espoir nous y a abandonnés, seuls et affamés. Les monstruosités des ténèbres nous tuent ou nous gardent en vie. Le sommes nous encore ? Le doute s'est insinué... Suis je encore en vie ? Ou perdu dans le royaume des morts, damné pour l'éternité. Le doute est un poison, qui s'insinue... Le Cavalier est le maître à bord, a t'il toujours été là ? La question se pose, les idées se mélangent. Était il monté à bord pour nous guider une fois enfoncé dans les profondeurs ? Je ne sais plus...

La flamme s'éteint. Une dernière bougie, trouvée alors que je cherchais du cordage. J'ai du barricader les interstices de ma cabine pour qu'aucun rayon n'en réchappe. Ils m'auraient tué. La luminosité m'a brulé, aveugle j'ai attendu heureux de redécouvrir ses bienfaits.

La flamme s'éteint, je me meure...  

Le carnet referma ses épaisses tranches, il ne restait que des pages blanches. Aucunes indications dignes d’intérêts n'avaient transparu de l'écrit. Le Cavalier laissa le livre en place et s'équipa de son panier, chargé d'un butin dérobé ici et là. L'heure était maintenant venue de mettre pieds à terre. Red Line s'était montrée particulièrement coriace cette fois encore. Mais à force de patience et de volonté, l'épreuve avait été franchie. Il sentait le mur infranchissable se fissurer, bientôt les portes s'ouvriraient. L'heure approchait... Lorsqu'il sauta sur le quais, Shino le collecteur de la dîme attendait. Averti par deux pêcheurs fébriles, il avait pris en main ses armes et souhaitait son dû.

- 100 000 Berries d'avance, si vous mouillez votre navire.
- C'est pas le mien, le Cap'taine est dans sa cabine.
- Euh...

L'étrange individu lui sourit. Un sourire froid, sans chaleur. Voyant le peu de réponse, le vieil homme s'en alla sans prononcer un autre mot. Il lui coutait de simplement avancer tant la soif et la faim le tiraillaient. Le servage des bonnes choses l'accompagnait depuis de long mois maintenant, il tiendrait encore un peu.

Le gardien du port était plus perplexe sur la conduite à adopter. Il se décida cependant de grimper à bord de l'embarcation aux carcasses pendouillant dans le vent. A la vue des derniers survivants du voyage, il comprit que plus aucune vie n'habitait le navire. L'esprit des pirates était resté emprisonné sous les roches.


Le chemin de traverse Aura-528f7d3


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