Bleu marine taché de sang. [Quête 1ere partie / Solo]

J'ai laissé Lilou et Kiril après les avoir grassement remerciés pour leur aide. Enfin eux et leurs équipages, ils ont quand même participé, même le lézard... Enfin soit, je pense que je peux abandonner tout espoir de revenir dans la marine, je me suis échappée, Alcadraz est au fond de la route de tous les périls et il y a eu trop de blesser et de mort pour que cela soit anodin. C'est étrange, je devrai être frustré, en colère, mais finalement, je tourne la page bien vite... J'imagine que des mois en prisons m'ont permis de faire mon deuil sans m'en rendre compte. J'aimerais dire que je suis calme, que j'accepte cette fatalité sans rien faire de stupide, mais une femme en colère, ça fait toujours des choses sous le coup de l'émotion... Mon premier réflexe à quand même était de vider mon compte en banque. Je n'ai pas envie d'attendre que la marine me sucre tous mes revenues, même si ça serait légitime dans un sens qu'elle le fasse.

J'ai récupéré un maximum d'affaires, à croire que je n’ai pas fini mon deuil, car, j'ai bien mon uniforme dans mon sac. Mais surtout, j'ai des plans que j'ai améliorés au fil du temps... Couleuvrines, canon à répétition "Tempête de fer" que je vais devoir refaire ce qui m'occupera, mais surtout le pire de tous : les plans de la forteresse flottante Titan et du canon déicide Vulcain... Je m'apprête au final à faire une grave erreur, peut-être, mais je n'ai pas d'autre solution et encore moins d'envie. Sans être brisée, c'est la deuxième fois que l'on me jette loin de chez moi à coup de pied au train, la première fois c'était Boréa, la seconde fois la marine et surtout les Rhino Storm. Je marche doucement au milieu de cette île, j'ai des vêtements longs pour cacher au maximum mes prothèses mécaniques et un chapeau pour ma tronche. Je ne pense pas être si connu que ça, surtout que pour le moment il n'y a pas d'affiche de recherche à mon nom, mais plus le temps va passer et plus je risque d'être attrapée et franchement, la prison j'en ai un peu ma claque.

Je connais déjà ma destination, j'ai eu de vagues rumeurs sur le fait que mon père et les esclaves venant de Boréa sont sur Armada. Le problème, c'est que si le premier venu pouvait y aller ça se saurait. Évidemment, je ne suis... Je n'étais qu'une simple membre de la marine, ce n'est pas comme si j'avais des contacts dans la pègre ou la piraterie pour savoir comment mis rendre. J'aurais peut-être dû demander à Lilou avant de partir si elle n'avait pas un truc pour m'aider, enfin je vais devoir apprendre à me débrouiller toute seule à partir de maintenant. Heureusement que j'ai mis de l'argent de côté pendant ses années, parce que sinon je ne sais pas trop comment je m'en sortirai maintenant. Je vais devoir me réhabituer à la vie civile en quelques sortes, puis doucement aller vers un monde plus obscur et plus dangereux.

C'est en goutant à cette liberté qui a un sale arrière-goût de cendre que j'erre ici et là, essayant de trouver un contact, une personne avec qui pouvoir discuter de ce sujet sans finir dépouillée et égorgée au fond d'une ruelle sale. Habillée en civil avec une cape à capuche rabaissée, je me dis que la première étape pour trouver des informations, c'est d'aller dans un de ses bouis-bouis miteux où avant j'allais simplement y déloger des gens, sans me rendre malade à essayer d'approcher de près où de loin de leurs consommations pour le moins douteuses. Je rentre donc dans le plus proche que je trouve, en moins de deux pas, je vois le tenancier nettoyer un verre en crachant dedans, me stoppes et ressort aussi sec. Et bien je dois avouer que ça commence bien dit donc. Quand les gars disaient qu'il valait mieux commander de l'alcool, car au moins ça désinfectait le verre je comprends mieux.

Deuxièmes essais, un autre lieu, cette fois-ci ça a l'air un peu mieux, au moins il le n'étoie à l'eau même si je fais exprès pour mon propre bien d'éviter de vérifier la couleur de celle-ci. Rapidement des regards se tournent vers moi, puis les gens retournent à leurs coins d'ombre et leurs chuchotements respectifs autour d'une blonde où d'une brune plus ou moins coupée à l'eau. Je m'approche du comptoir en évitant encore soigneusement de regarder l'état de l'eau.

"Une bière s'il vous plaît."

Il s'arrête net, me regarde de travers, renifle un peu l'air et reste stoïque. J'entends un petit cliquetis... Il vient de prendre le pistolet sous le comptoir et de l'armer pendant qu'une partie des clients sortent hâtivement alors que les autres semblent se préparer à me sauter dessus comme une bande de... De pirates ? Je soupire, sors un de mes cigares lentement et l'allume. Puis une bouffée de fumé plus tard.

"Sérieusement, c'est quoi le problème ? On me repère à l'odeur ?"
"On n'aime pas les gens d'vot races par ici. Fiche le camp temps qu't'es encore en vie fillete."

J'hausse les épaules, j'imagine que cela va être compliqué d'avoir des informations en restant polie et courtoise, enfin qui ne tente rien. Je soupire encore un petit coup et sors sans créer de remue-ménage supplémentaire. Je marche dans la rue, il y a des bruits de pas tenace qui me suivent, évidemment il fallait que ça arrive. Je me retourne après être entré dans une ruelle. Ils arrivent, ils sont armés et ils ont franchement envie d'en découdre, voir plus si affinité.

"J'imagine que l'on ne réglera pas ça à l'amiable."

Quelques rires tordus et regard mauvais ou lubrique plus tard, je roule des yeux et les laisse me foncer dessus. Vu leurs vitesses et leurs manières de combattre, sans être des bleus des blues, ils ne sont pas beaucoup plus puissants ou expérimentés. Cela n'aura donc même pas le mérite de me défouler, ainsi que le premier me frappe d'un crochet extrêmement prévisible, j'esquive puis lui décoche un bon coup dans les gencives et quand c'est fait avec une prothèse mécanique en métal ça fait bien plus mal que ça n'y parait. Ces deux copains réfléchissent, mais trop tard, le premier dans l'élan se rapproche trop et certains réflexes sont conditionnés pour rester en vie. Ainsi, il reçoit aussi un bon coup, directement dans l'estomac et fini au sol, pas hors d'état de nuire, mais quand même amoché.

"On peut discuter maintenant ?"

Pour toutes réponses, ils se regardent les uns et les autres, puis se tirent en criants... Je me retrouve comme une idiote la main tendue vers eux comme pour leur dire d'attendre. Décidément, je fais une mauvaise criminelle et je n'ai jamais voulu l'être. Peut-être que si j'utilise des arguments plus violents ou que j'en attache un, j'aurais plus facilement des réponses ? Est-ce qu'il faut que je désapprenne toutes mes bonnes manières pour espérer avoir une chance même ridicule d'arriver un jour à Armada sans passer par la case prison ? Décidément, la simplicité de la marine me manque : on me donne des ordres, j'obéis et tout va bien dans le meilleur des mondes ou presque. Là, je peux tellement aller partout sans que ça ait le moindre sens où que cela ne serve à quoi que ce soit, que ça en est très perturbant.

J'imagine que j'attire trop l'attention et que surtout, ce n'est pas forcement l'île idéale pour ce genre de choses. La prochaine c'est... Alvel. J'ai bien intérêt à faire très attention à comment je vais y aller et même comment agir sur place, je n'ai pas quitté une prison pour finir esclave juste derrière. Ici, je risque de mal finir, il y a une présence de la marine trop importante pour réussir à y échapper éternellement. Surtout que ce n'est qu'une question de temps avant de voir de belle affiche avec ma trogne dessus. Il faudrait que je change mon apparence... Quelques teintures et des vêtements neufs ne me feront pas de mal. C'est ainsi que j'ai continué et fini cette journée en faisant les magasins, tout en esquivant autant que possible les patrouilles de la marine.

De toute évidence, je vais devoir changer de crémerie et ça n'a rien à voir ni avec les produits laitiers ni avec l'alcool... Je me suis décoloré les cheveux pour perdre ce bleu trop reconnaissable, inutile de dires qu'ils ont souffert dans l'opération sans parler de l'odeur particulièrement désagréable que cela implique. Passer d'un bleu étrange à un blond encore moins naturel n'est pas forcement la meilleure idée que j'ai eue, mais ce sera déjà moins flagrant dans un sens, je ne peux rien faire pour mes yeux par contre, il faudra que j'apprenne à baisser le regard, j'ai aussi quelques tenues de rechanges maintenant, ça va me changer de mon uniforme et mes tenues de travail quand même.

J'ai fait un tour des navires civils en partance pour Alvel, difficile de savoir si l'un est plus capable d'y arriver sans finir par le fond sur les récifs qu'un autre... Finalement, il va bien falloir que je fasse un choix, surtout que j'ai cru voir des guetteurs de la marine autour de la chambre que je loue l'autre soir. Finalement, j'ai fait mon choix, je fais mes bagages et me dirige vers un port, apparemment la guigne sera mon embarcation pour un voyage que j'espère tranquille.

Le capitaine de la guigne Willem Barton, un vieux de la vielle qui a surement deux fois mon âge et facilement un demi-siècle d'expérience dans le métier, enfin le fait d'être en mer. Il m'a l’air juste assez honnête pour que cela se passe bien et assez filou pour assurer notre survie, vu notre destination. Un mélange étrange, mais néanmoins indispensable à notre survie commune, j'ai déjà préparé un paquet avec le prix exigé pour la traversée, soit un million et demi de berrys ce qui comprend le paiement pour le phare nous évitant de sombrer stupidement. Une fois les détails réglés, dans sa cabine en toute intimité il me demande tout de même.

"Gamine, tu es sûr de vouloir aller là-bas ?"
"J'ai ma propre destination."
"Ce n'est pas un lieu pour n'importe qui, mais bon temps que tu payes."
"Je souhaiterais travailler pendant la traversée."
"Ah ? D'habitude, on me paye pour se la couler douce."
"Rester inactive et grasse ne va pas assurer ma survie sur Alvel."
"Puisque tu sembles consciente de cela, alors bienvenue à bord."

Et c'est ainsi que je vais voyager vers l'un des endroits les plus hostiles possible pour moi, mais en même temps pour trouver un moyen d'accès pour Armada, je n'ai pas vraiment le choix.