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Strike Academy


Le directeur Elphias Jean Rotor commençait sa journée. Comme tous les matins, il prenait un café bien fort, un croissant, puis partait travailler. Il n’était en fonction dans la petite école primaire des lilas que depuis quelques mois, mais il s’y sentait bien. Les élèves à qui il enseignait chaque jour étaient prometteurs et il leur partageait avec la plus grande attention son savoir, et ses idées. Grand, athlétique et un peu grisonnant, un sourire charmeur sur le visage quasi constant, il aimait son travail. Faire cours à sa petite classe d’une vingtaine d’élèves tout en dirigeant l’établissement lui donnait l’impression du travail accompli.

En arrivant à l’école ce matin là, il ne put s’empêcher de s’arrêter quelques instants devant la grille pour observer son bien. Il n’habitait qu’à quelques dizaines de mètres de là, et pouvait voir de chez lui l’intégralité des bâtiments scolaires, mais la vue depuis le grillage le remplissait d’un certain sentiment de pouvoir. C’était son domaine et il y faisait ce qu’il désirait.

L’équipe pédagogique qu’il avait formée était composée de personnes de confiance, des gens qui partageaient les mêmes idées que lui et qui ne rechignaient pas aux quelques ajouts dans le programme qu’il avait pu faire. Son prédécesseur avait, selon lui, suivi trop conformément les directives gouvernementales et, à son goût, il n’était pas bon de se laisser guider béatement par une institution qui avait pour unique but de former ses futurs partisans, afin de continuer à diriger d’une main de fer ce monde qu’il jugeait en déclin.

M. Rotor n’aimait pas le gouvernement, c’était le moins qu’on puisse dire. Depuis sa plus tendre jeunesse il avait tenté par tous les moyens de contrer ce monstre de puissance et d’autorité, dont il n’aimait guère plus d’un aspect de la politique. Désormais, son nouveau défi était d’éduquer les jeunes à une nouvelle forme de pensée. Une pensée plus libre qui les mènerait à comprendre que, de toute évidence, le gouvernement mondial n’avait rien de bon à leur apporter, la Révolution, si.

« Bonjour Anabelle, lança Elphias en passant devant une des cantinières.
-Bonjour monsieur Rotor, beaucoup de travail aujourd’hui ?
-Oh, pas plus que d’habitude, nous allons nous pencher aujourd’hui, outre deux heures de Mathématiques approfondis, sur l’étude des douze péchés gouvernementaux puis nous nous attarderons sur les quatre vertus révolutionnaires.
-Ça m’a tout l’air d’être un bon programme ça, monsieur Rotor. »

Laissant à son travail sa collègue, il se dirigea vers la salle des professeurs pour y prendre un second café, secret de la réussite Révolutionnaire : un bon café pour bien se lever tôt, car comme le dit le dicton, l’avenir appartient aux gens qui se lèvent tôt. Assise derrière un journal, une jambe par-dessus l’autre, la charmante miss Girard lui adressa un bref signe de la main. Il n’avait jamais eu beaucoup de chance avec elle. Il la trouvait absolument ravissante, mais une foule de malentendus plutôt désastreux avaient conduit la demoiselle à ne pouvoir discuter avec Elphias que dans le cadre professionnel.

Elphias ayant fini par trouver une chaise qui lui convienne, portât son café brûlant à ses lèvres et continua d’observer du coin de l’oeil sa jeune collègue. Ses yeux verts surmontés d’une jolie paire de lunettes rondes posée négligemment sur le bout du nez la rendait tout à fait… Elle leva le regard quelques instants pour se passer la main dans sa large crinière brune et aussitôt, Elphias détourna le regard, s’intéressant subitement à une mouche qui agressait le plafonnier. Sara Girard n’était pas dupe, et elle s’apprêtait à lui lancer une réplique cinglante lorsqu’un troisième larron fit irruption dans la pièce.

« M’sieur le directeur, on a reçu du courrier ce matin, et… et…
-Calme toi Jeannot. Ça peut pas être bien grave.
-On a un gars qui vient présenter aux élèves le métier de Marin.
-SI ce n’est que ça. Je m’en chargerais Jeannot, tachez de vous montrer discret quant à nos idées communes. Je ferai passer le mot au reste de l’équipe enseignante. »

Qui donc pouvait bien avoir l’envie de faire découvrir un métier aussi moisi à des élèves aussi intelligents ? Il ne savait certainement pas à qui il avait affaire, et les quelques mauvaises idées que ce gars pourrait mettre dans la tête des gamins ne sauraient être longues à balayer, une fois l’incident écarté.


***

Le Denden a sonné ce matin, assez tôt, ma femme dormait encore. Ces cons-là m’envoient en mission dans une école, avec un type que je connais ni d’Eve, ni d’Adam, et avec pour unique but de vérifier si ce qu’on apprend aux gamins là-bas, est bien conforme à la ligne d’éducation du gouvernement. Ils voient le mal partout. Encore leur paranoïa au sujet des révos et des gens qui leur veulent du mal. J’ai grandi sur Cocoyashi, et j’ai jamais eu plus d’accrochages avec des Révos que partout ailleurs. J’vois pas pourquoi, subitement, on aurait une école gangrenée.

J’me dirige vers le port. Mon partenaire de mission doit arriver par là. J’espère qu’il sera sympa, j’en ai un peu marre de ces types un brin antipathiques avec qui la discussion va à sens unique. Les quais sont vides, ou presque, deux trois marchands de poissons qui déplacent des caissons, un cul d’jatte qui trimballe son corps en rampant, et à l’horizon, un navire.

Bon, plus qu’à attendre l’arrivée de celui-ci.
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L'adjudant Sebastian Archibald Mavim avait commencé sa journée bien plus tôt. Comme tous les matins, il avait pris un cognac bien tassé, une clope roulée, puis avait trié le courrier de la garnison. Les factures étaient jetées dans un panier qui serait vidé à la fin du mois, les ordres de marches classés en vue d'être relayés à qui de droit et le rare courrier personnel minutieusement empilé sous un pied de son lit sensiblement plus court que les autres. Encore quelques jours et son sommeil cesserait de tanguer. Il n'était en fonction dans la garnison de Cocoyashi que depuis quelques jours, mais il sentait déjà la routine le ronger. Il ne s'était pas enrôlé dans la marine pour servir de pousse-papier dans un coin tranquille, malgré ce que suggéraient les apparences. Grand, rachitique et franchement grisonnant, un visage labouré par les rides et dépourvu des muscles nécessaires à l'action de sourire, il n'aimait pas son travail. Rester enfermé dans une chambre large comme le bureau qui y trainait depuis qu'il avait été assemblé, lui donnait l'impression d'accomplir un travail de zombie.

Heureusement, un mémo lui avait annoncé qu'un marin de la compagnie était recherché pour faire une descente dans une école de la ville. Il ne lui en fallu pas plus. Il s'était rué chez son supérieur pour lui annoncer qu'il se portait volontaire. Sans prendre la peine d'écouter les vagues explications du boutonneux gestionnaire de cette administration du pouvoir. Sortir du domaine de la garnison était tout ce qu'il désirait.

Sebastian alla se présenter à Alexandre Kosma, un type du coin qu'il n'avait encore jamais vu. L'équipe serait donc formée de deux inconnus ne partageant potentiellement aucun point commun, si ce n'est le tabagisme. Allez savoir comment l'intervention tournerait...

Un détail à propos de Mavim, il ne supporte pas très bien de recevoir des directives. Dans les fait, il ne s'attendait pas à avoir un grade plus élevé que son partenaire et risquait bien de ne pas s'en formaliser. Depuis tout jeune, il avait appris à se débrouiller seul, il n'allait pas commencer d'agir autrement chose.

"Adjudant Mavim, vous devez être Kosma ? Je ne tiens pas à prolonger les présentations, alors si on pouvait y aller tout de suite..."

Laissant de côté l'étiquette civile, Sebastian prit les devants sur son collègue. Un homme les accueilli à l'entrée, les bras écartés et le sourire aux lèvres. Grisonnant, débordant d'affabilité, l'adjudant dût se retenir de ne pas lui plaquer la paume de sa main sur le nez.

"Bienvenue messieurs, bienvenue. Nous sommes très heureux de vous recevoir. Si vous voulez bien me suivre, nous avons rassemblé les élèves dans l'auditoire. Venez, c'est par là."

Les couloirs étaient propres, un mur décoré par des dessins d'écoliers, l'autre dissimulé par les rangées de casiers. Sebastian jeta un œil aux feuilles. Malgré les styles très différents, les thèmes 'union', 'ruine', 'soulèvement de foule' et le célèbre 'dessine-moi un chevron' semblaient très fréquents. Il se passa de tout commentaire, et entra dans une salle remplie d'une petite trentaine de têtes blondes s'activant à ce que les têtes blondes s'activent lorsqu'on les laisse seules plus de cinq minutes. Le gommes volaient, trois bagarres avaient éclaté, les filles cancanaient et éclataient en gloussement stridents, le sol disparaissait sous les avions en papier.

"Mesdemoiselles messieurs, un peu de calme s'il vous plait ! Voilà, très bien. Aujourd'hui, nous avons l'immense plaisir d'accueillir deux agents du gouvernement venus vous vanter les bienfaits du service militaire. Comme vous pouvez le voir, ce sont des marins exemplaires alors écoutez attentivement ce qu'ils ont à vous dire car nous feront sauter les heures de mathématique pour en discuter ensemble."
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Comme tout bon marin exemplaire que je suis -la formulation me fait bien rire- je m'grille une cigarette devant les yeux exorbités de tous ces gamins que la révo tente de formater. Bien entendu, j'ai eu de sévères doutes sur la réelle présence d'agents de recrutement révolutionnaires dans ma propre ville, mais à n'en pas douter, les quelques lignes de cours que j'ai pu entrapercevoir, ainsi que le discours lèche-bottes du directeur ne m'ont pas trompé bien longtemps. J'regarde l'adjudant Mavim. J'sais pas s'il pense la même chose que moi, mais personnellement, c'est pas de cette manière que je m'y serais pris pour cette mission routinière.

« Je suggère qu'on arrête toute cette mascarade et qu'on aille discuter tranquillement en tête à tête avec chacun des professeurs, que j'lui glisse à l'oreille. »

Il semble pas accorder le moindre intérêt à c'que j'lui raconte, bon. J'vais le laisser papoter un peu avec les gamins. Il a l'air tellement heureux de montrer son métier à la nouvelle génération. Un visage à faire déglutir n'importe quel mec sain d'esprit tant la mauvaise humeur s'y reflète. J'ai l'impression d'avoir affaire à mon exact opposé. Un mec qui ne sourit jamais face à un mec qui se marre tout le temps. Good Cop, Bad Cop. Parfait. Ça sera d'autant plus facile si c'est lui qui commence à causer.

« Monsieur Rotor ? Pendant qu'mon collègue discute avec les mômes, vous pourriez me montrer la machine à café ? J'ai pas bien dormi cette nuit, et il se pourrait qu'un p'tit remontant soit pas de refus. Un café Mavim ?
-Merci, mais non.
-Très bien, dans ce cas, monsieur le directeur...
-Bien. Bien bien... J'aurais aimé, mh, comment dire, assister au discours de Monsieur...
-Oh, vous le connaissez bien, et dans le pire des cas, je vous ferai un p'tit résumé, c'est moi qu'ai préparé ses fiches. »

L'attention du public entièrement tournée vers nous et le regard noir de Mavim incitent le directeur à accéder plus facilement à ma requête. Bouches bées, les enfants nous regardent partir, et je note avec amusement à quel point la perspective de se retrouver plusieurs minutes à écouter un gars dont le mot sourire est absent du vocabulaire est ennuyante. Au passage, j'adresse un sourire ravageur à la charmante jeune institutrice plantée dans le fond de la salle, les bras croisés, l'air un peu énervé. Je me réserve l'entretien en tête à tête avec la demoiselle.

De son côté, Mavim prend la parole. Ça doit être franchement intéressant, mais j'ai pas des masses envie d'écouter ce qui se raconte. J'le laisse en compagnie des gamins, de quelques professeurs, auxquels s'ajoutent quelques dames de cantine qui devaient passer dans le coin. Si jamais il commence à insulter trop gravement la révolution, je m'dis qu'il devra affronter à lui tout seul une petite unité d'anti-gouvernementaux. J'accélère le pas, je m'occupe du directeur pour le moment.

« Dites, que j'lui lance une fois qu'on est assez éloignés du reste du groupe, pourquoi vous n'aimez pas la Marine ?
-Que... Quoi ? Je... Mais pas du tout, je suis très...
-Oh, arrêtez vos salades, pas à moi. Vous inquiétez pas, j'suis plutôt du style discussion. On papote ensemble autour d'un bon café et on pose nos opinions différentes.
-Je... Vous êtes bizarre vous. Vous êtes sûr que vous êtes de la Marine ?
-Aussi sûr que vous êtes de la Révolution mon gars.
-... »

Le directeur semblait un peu plus âgé que moi, mais sa carrure laissait présumer un entraînement physique quotidien. Le genre de retraité révolutionnaire qu'on recycle dans le recrutement afin de ne pas perdre les quelques dernières années de sa vie. Pauvre gars, toujours pas compris que Marine ou Révolution, c'est du pareil au même. C'est le cycle éternel de l'insatisfait qui n'est pas au pouvoir. J'pense que j'irai pas lui expliquer les choses par ce chemin. Si on n'a pas compris ça à son âge, c'est qu'on ne le comprendra probablement jamais. Il continue de me regarder avec un air suspicieux sur le visage. Son sourire de façade qu'il montrait jusqu'alors s'est peu à peu effacé. Pas le mien.

J'interromps ce silence par un léger raclement de gorge. Il reprend ses esprits et rentre dans la salle des professeurs, devant laquelle nous nous tenions tous deux jusqu'alors. Il semble décidé à accéder à mes attentes. On va causer, et bien. J'lui emboîte le pas, cherche la machine à café quelques instants puis j'en prends la direction. Un simple signe de tête dans sa direction, puis je me retourne pour comprendre comment fonctionne ce bidule.

« Un café court sans sucre, qu'il me répond.
-Je vous l'offre. Donc... Reprenons notre petite discussion. Vous devez bien imaginer, maintenant que je vous l'ai assez fortement suggéré, nous ne sommes pas ici pour déblatérer des conneries à vos élèves. On nous a prévenu de la présence d'une cellule révolutionnaire de recrutement et nous sommes venus voir ça de nos propres yeux.
-Vous allez nous arrêter ?
-Vous allez un peu vite en besogne, j'suis pas du genre à mettre des gars aux fers sans avoir discuté par avance. Vous m'avez l'air d'être un gars plutôt intelligent, je me trompe ?
-Je...
-Et le fait que vous ayez choisi de soutenir la Révolution plutôt que notre actuel gouvernement, est-ce dû à une réflexion intense sur la vie ou à un affect émotionnellement douteux ?
-Ne vous moquez pas ! Vous prenez encore une fois notre faction pour des abrutis, mais s'il existe quelques ignares qui agissent sans réfléchir, le fond même de notre organisation est géré par des gens savants et ingénieux qui...
-Ouais... Enfin, vous m'causez un peu comme vous devez causer à vos élèves. En présentant la Révolution sous son meilleur jour, et la Marine comme un peuple de monstres assoiffés de sang. Soyons un peu objectifs, il existe des bons éléments dans la Révolution, comme dans la Marine, tout comme il existe des enflures des deux côtés de cette frontière. Seulement, quand on supporte un camp, on ne voit généralement que le bien qu'il procure. Je sais parfaitement que le gouvernement pour qui je travaille n'est pas parfait, mais qui est parfait ?
-Vous éludez une grande partie du problème. Et c'est faux, nous sommes objectifs quant à la position de tous.
-C'est pour ça que vous enseignez des conneries à vos élèves ?
-Je ne vous permet pas.
-Haha, comme si vous aviez le pouvoir de m'empêcher de penser. C'est un peu aller contre vos idéaux, non ? »

Bon, mon discours n'avait pas l'air d'améliorer les choses. Monsieur Rotor avait pris un teint rubicond et une veine palpitait sous son front. Je sentais qu'il valait mieux arrêter les négociations ici et revenir voir ce qu'il en était de Mavim. Si le soupçon de diplomatie avait réussi à énerver autant le directeur, je doutais que le discours de mon collègue ait fait des merveilles. Mais bon. On peut toujours espérer. Je pris la direction de la porte et la franchit avant que mon vis-à-vis n'ait la malencontreuse idée de s'attaquer à un sbire de l'état.
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Kosma et le directeur avaient quitté la salle avec la voix de l'adjudant Mavim qui les suivait.

"Donc, je suis là pour vous parler de l'utilité de la marine. Toutefois, avant cela, j'aimerais savoir quels sont, d'après vous, les métiers les plus importants pour une société, allez-y, je vous écoute..."


À leur retour, ils assistèrent à une scène quelque peu improbable. Une bonne partie des élèves étaient bouche bée devant ce qu'ils avaient sous les yeux. Les autres, quelque peu zélés ou alors carrément sadiques, prenaient des notes.
Dans un coin de la salle reposait le professeur de gymnastique, un grand baraqué s'assurant que seuls les éléments les plus en forme soient sélectionnés pour être envoyés au front. L'infirmière, également chargée des enseignements sur la biologie, était agenouillée à son côté et l'éventait avec un livre sur l'anatomie. Les deux collègues, chargés d'établir le profil physique des recrues collaboraient souvent, et le regard noir qu'elle lançait au marin devant la classe laissait entrevoir le type de relation qu'ils entretenaient.

"Donc, nous avons fait le tour des emplois liés à l'administration, ainsi que des forces de l'ordre. Puis vous avez énuméré les professions d'auteur, philosophe et autres libre-penseurs, mais ce n'est toujours pas la réponse que je souhaite entendre..."


"Que se passe-t-il ici ?"

Sebastian, qui tenait en respect deux autres membres du corps enseignant au moyen d'une clé de différentes articulations, tourna la tête vers les deux hommes qui venaient d'entrer.

"Kosma, vous voilà. Je dois vous confier quelque chose d'urgence. Je soupçonne que cette école soit dirigée par un groupe révolutionnaire..."

"Euh... est-ce que ce serait journaliste, par hasard ?"

"Bon sang Thomas, bien sûr que non !"

« Et qu'est-ce qui vous a fait pensé ça, au juste ? »

"Pour être tout à faire franc, j'ai émis cette idée en tant que plaisanterie. Toutefois, la réaction de ces trois messieurs me fait dire que ce n'est pas tout à fait faux..."

C'étaient les réponses des élèves qui avaient mis la puce à l'oreille de Sebastian. N'importe quel gamin de moins de quatorze ans rêve d'être aventurier, pompier ou magicien. Ceux-ci, toutefois, avaient commencé par agent de police et militaire, ce qui étaient des options censées 'faire plaisir' au marin qui leur parlait, comme leur avaient suggéré leurs professeurs.
Et, à son âge, Sebastian savait pertinemment qu'une personne cherchant à vous faire plaisir le fait pour une raison. C'est pourquoi il rejetait chacune de leur réponse, jusqu'à en arriver au couches supérieures du bourrage de crâne local. C'était la jeune Françoise et son imprimeur de tracts qui finalement l'avaient décidé que quelque chose ne tournait pas rond dans cette école...
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Je m'demande quand même pourquoi on me file des partenaires aussi peu portés sur la discussion. C'est exprès sans doute. J'ai tendance à être un poil trop laxiste. Bref, plus que deux solutions, soit essayer de raisonner Mavim sur les méthodes à prendre, soit l'aider à arrêter tout ce beau monde. J'aime pas bien intervenir par la force, mais le lieutenant me laisse pas beaucoup le choix. J'vais sans doute être obligé de donner quelques gnons. Merde.

« Lieutenant Mavim ! Vous en étiez où ? Fis-je en rentrant dans son jeu sous le regard de plus en plus hébété des élèves.
-Je demandais à ces gamins quel métier ils voulaient faire plus tard.
-Ah, et ils ont répondu quoi ? Pompier, astronaute, aventurier ?
-Non, plutôt soldat, enseignant, philosophe...
-Houlà, bon, les enfants, on va recommencer depuis le début. »

J'm'avance pour rejoindre Mavim, vérifiant d'un œil que le directeur ne fasse pas de conneries. Enseigner aux gamins à penser par eux-mêmes, et ce en l'espace de quelques heures, c'était sans doute pas chose aisée, surtout quand ces mêmes gamins avaient été formatés pour penser comme un bon révo. Mais bon, pour certains dans la Marine, un bon révo est un révo mort. Sans doute ne leur ont ils pas dit qu'en faisant un métier qui leur plaît ils auront une espérance de vie plus longue. Les révos ont parfois des idées, mais ils restent quand même extrêmement immatures sur le plan social.

« Bon, on va oublier pour un moment cette histoire de métier. Et vous allez réfléchir à ce que vous aimez dans la révolution. Ce sera la base de notre réflexion.
-Mais, intervint une jeune fille du nom de Johanna, si on vous dit qu'on aime la révolution, vous allez nous arrêter, non ?
-Pourquoi on vous arrêterais ? Vous n'avez rien fait de mal à ce que je sache. La raison pour laquelle mon collègue tient en respect vos professeurs, c'est parce qu'ils ne vous laissent pas réfléchir par vous même. On vous forme à devenir de bons petits soldats sans vous laisser le choix de vous dire, « tiens, et si je faisais autre chose ? »
-Ben, pourquoi on voudrait faire autre chose ? Lança un gamin d'un air de défi.
-C'est justement là que je voudrais en venir. Tous les enfants de la planète ont des rêves. Vous, la seule chose que vous désirez, c'est devenir révolutionnaire. Pourquoi ? Parce que vos professeurs vous ont dit que c'était la meilleure chose à faire. Pourquoi vous ont ils dit ça ? Parce qu'ils veulent que vous rejoignez leurs rangs.
-Mais non, nous on veut être révo parce que c'est cool !
-Ah, c'est cool ? Vous connaissez la durée moyenne de vie d'un révolutionnaire ?
-Euh... Non.
-Mavim, pourriez vous lui répondre ?
-Environ vingt-cinq ans. Souvent d'une mort atroce et douloureuse.
-Mais ça, c'est parce que vous êtes des gens pas sympas et que vous les tuez !
-Non, mon gars, ça c'est parce que ce sont eux qui attaquent. La Marine, tant qu'elle n'est pas menacée ou qu'on ne menace pas les gens qu'elle doit protéger, elle n'attaque pas. Si les révos meurent, c'est parce qu'ils ont essayé de tuer avant.
-Les enfants, intervint le directeur, si les révolutionnaires attaquent, c'est pour combattre les injustices de ce monde !
-C'est vrai ça. On l'a étudié dans un livre !
-Très bien, vous êtes persuadés du bienfait de la révolution. Mais demandez un peu autour de vous, ayez un autre avis que celui de vos professeurs. Vos parents, vos voisins, les parents de vos amis et tous les gens de passage. Demandez leur comment ils perçoivent le gouvernement. Vous vous apercevrez que tout le monde n'est pas du même avis.
-Mais...
-La discussion est terminée. Je ne vous dirai plus rien en faveur de la Marine et du Gouvernement, la seule chose que je vous demande, c'est d'essayer de vous forger une opinion par vous même. Vous pouvez aller en récré, vous l'avez bien mérité. »

Les gosses se lèvent dans un vacarme ahurissant de liberté. C'est sûr, mon discours ne les a pas laissés indifférents. Je l'espère. Avec un peu de chances, ils vont commencer à se poser des questions maintenant. Ils sont encore jeunes, ils peuvent encore changer leurs idéaux. Bon maintenant, il faut s'occuper des adultes. J'regarde le lieutenant d'un air entendu. Une fois que tous les gamins sont sortis, j'vais verrouiller toutes les entrées de la salle. Mavim relâche les deux gars qu'il avait attrapés.

« Bon, commence-t-il. Vous savez que vous agissez en toute illégalité ? »

Pas de réponse, je souris. Ces gens là sont conscients qu'ils risquent de passer un sale quart d'heure. Seule la jolie instit' que j'avais repéré avant de quitter la salle quelques minutes plus tôt ne semble pas montrer de signe de nervosité. Elle essaie de cacher un sourire victorieux. Ce doit être elle. Elle qui nous a prévenus de la présence de ces gars. J'aurais du m'en douter, sans une taupe dans l'école, celle-ci aurait pu continuer de formater les gosses pendant encore longtemps. J'laisse Mavim continuer de discuter. Je fais le compte du personnel de l'établissement. Selon mes estimations, il doit en manquer trois ou quatre. Ça pourrait nous poser problème.

« J'ai l'impression que vous n'avez pas l'air très coopératifs, continue le lieutenant. Je compte jusqu'à dix, vous avez le choix, soit vous continuez de vous murer dans le silence et je vous arrête pour entrave à la justice et embrigadement de jeunes sans défenses, soit vous me livrez des informations supplémentaires sur ce réseau et on pourra s'arranger devant le juge. »

Il n'a pas l'air de plaisanter. Mais au moins il leur laisse la possibilité de choisir. S'il n'est pas aussi porté sur la discussion que moi, il a une part d'humanité que certains Marines que j'ai rencontré n'ont pas. Une fois de plus, je souris. Ça tremblote de partout et ça se jette des regards en coin. Avec un peu de chances, certains vont craquer.

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