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Rencontre entre deux orphelins volontaires



Si vous étiez à Fushia en 1620, alors vous auriez peut être pu voir le jeune Mahach, vingt-quatre ans, un peu à l'écart du village, souvent assis sur une grosse pierre, la tête entre les mains.

La cicatrice qui reliait son arcade au haut de sa tempe était encore fraiche. Il portait déjà la coupe et devenait moins un signe de rébellion contre l'autorité parentale qu'un mode de vie. Et pour cause.
Si vous cherchiez à savoir ce qu'il avait actuellement en tête, vous n'y trouveriez plus ses envies d'indépendance, de liberté, de rixes entre gang, de soif de conquête. Et pour cause.

Le Mahach qui errait à Fushia en 1620 venait de tout perdre.
L'année précédente, sa soeur fut capturée durant une rafle au Grey Terminal par la milice de Goa pour faire des prisonniers les esclaves des plus riches. Si le punk se fichait de ses parents -trop craintif d'attirer la haine des plus forts sur leur misérable existence- il se montrait plus protecteur envers sa soeur, Mai. Et ce jour, il s'en voulut de ne pas avoir su la protéger. Il s'imaginait même que sa soeur lui en voulait.

Pendant une longue année, il a tout essayé pour s'infiltrer dans Goa et libérer sa soeur. Sauf que les portes de la noble ville étaient bien gardées. Alors les miliciens, ne le prenant pas réellement au sérieux (que ferait un jeune homme contre une milice toute entière ?) commencèrent à le prendre en pitié. Nullement péjorativement. Ils compatissaient à sa peine et au fur et à mesure de ses vaines tentatives, ils finirent par tisser une amitié solide mais en filigrane. Ils tentaient chaque jour de le raisonner. En vain.

Finalement, le destin se montra favorable envers lui. Caché dans les buissons non loin de la porte qui séparaient les deux mondes bien distincts, profitant de la moindre occasion, de la moindre ouverture pour s'infiltrer, il put s'apercevoir que la milice était entrée en alerte et qu'elle devait intervenir dans Goa même.
Ni une, ni deux, le crêteux s'engouffra dans la mince brèche. Il pénétrait enfin dans la ville qui retenait prisonnière sa soeur. Il arpentait rapidement dans les ombres des rues et sillonnait entre elles comme un rat en proie à des prédateurs omniprésents et sur le qui-vive. Ses chances étaient minces, mais bien plus importantes que celles de tomber nez-à-nez avec sa soeur Mai. Ce fut ce qui se réalisa pourtant. Et si Goa était en ébullition, c'était à cause d'elle.
Fatiguée de servir et d'être reléguée à une moins que rien, elle gifla ce qui lui servait de maitre et s'enfuit en catimini de son lieu de travail, bel et bien décidée à quitter cet enfer. C'était de la pure folie ! Les chances de s'en sortir étaient plus que minces, étant sur le moment la personne la plus recherchée de tout le royaume.

Le frère et la soeur n'avaient plus qu'à croiser les doigts pour se frayer un chemin jusqu'à la sortie de la ville. Cette fameuse sortie que le jeune Mahach voyait comme une entrée et avait tant et tant tenté d'assaillir seul. Cruelle ironie !
Mais une fois dehors, ils seraient presque en sécurité. Seuls les rebuts du Grey Terminal connaissaient les recoins de leur dépotoirs. Alors ils s'y attèrent, à toute allure, leur coeur battant la chamade, avec toujours cette putain d'impression d'être vu ! Celle qui vous pousse à être encore plus discret et encore plus rapide !

Et comme jamais ils ne le furent et ils ne le seront plus, ils étaient très heureux de revoir leur terre de détritus et de désolation.
Derrière eux résonnaient les pas cadencés de la milice. Bientôt, ils feraient un assaut dans le Grey Terminal en guise de représaille. Pour l'exemple. Pour montrer leur supériorité déjà écrasante. Mais pas trop. Pour éviter une rébellion totale des Révolutionnaires qui s'ignoraient. Et ça en grouillait.
Mai voulait sauver ses parents. Mahach s'en fichait. Il tenait à sa vie et à seule de sa soeur. C'était tout. Leurs parents furent rarement présents. Peut être quelques fois pour les sermonner et éviter qu'ils ne s'attirent des ennuis plus gros qu'eux. Le punk avait adopté une nouvelle famille. Des caïds. Mai était plus sage, plus réservée et s'en tenait à la maison familiale.
Le temps jouait contre eux. Impossible de faire un crochet pour chercher père et mère et les emmener en sécurité. C'était la dure réalité.
La milice était descendue quelques temps, avant de remonter et accroitre la sécurité aux portes. Nombre de démunis furent tués sans qu'ils n'aient de rapport avec l'incident. C'était ça, la vie au Grey Terminal. Rien n'a d'importance et la loi de la jungle y rèigne.
Mai et Mahach se doutèrent bien qu'ils étaient devenus orphelins. Et Mai en voulu à son frère.
Alors qu'il lui proposait de fuir leurs terres natales pourries, elle refusa pour regagner la confiance de ceux qui partageaient son quartier et l'honneur de sa famille. Besogneuse, comme toujours.

Alors il piqua une colère noire. Il lui cracha son venin au visage.
Qu'il avait tout fait pour la libérer. Qu'elle n'était jamais satisfaite de lui.
Que sa famille n'avait jamais rien pour lui. Qu'elle ne conterait plus.
Qu'il voyagera pour s'endurcir et se venger. Que ce jour là, il ne faudra pas qu'elle vienne l'implorer à genou.

Et il s'enfuit vers le village de Fushia où il erra dans les alentour comme un fantôme.
Sans avenir. La tête entre les mains, assis sur un petit rocher.

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On deviendra marines, Craig. Et on refilera notre propre définition au mot Justice.
Les échos des mots d'Frangin. Qui rebondissent sans arrêt sous mon crâne nébuleux.
La justice consiste à distribuer des pains à tout c'qui a déraillé du sentier boueux qu'le gouvernement veut nous mater suivre docilement ? A ranger ses émotions au placard pour n'devenir que machines chirurgicales rasant les tumeurs avant qu'elles ne gonflent de trop ? L'monde est un sacré cancéreux, je l'ai remarqué. A un stade plus avancé que j'ne le pensais. J'aurais envie d'être son toubib mais j'ai pas encore l'scalpel assez fin.

Fushia est une ville rieuse, non, moqueuse même. Un peu sarcastique dans son bonheur léger. Elle s'affale sur son existence tranquille alors que derrière, j'sais que derrière, le royaume de Goa, il enchaîne des vies aux piloris d'la misère et les mate se débattre comme s'il s'ennuyait trop d'sa noblesse résidente pour s'contenter d'belles fiestas, d'opulence indigeste et de pouvoir violent : il lui fait des minables à conquérir. Et sous l'étendard du gouvernement, ils se sentent comme sous une couette chaude à vivre leurs rêves déviants. Dans un long sommeil en attendant que leurs coeurs atrophiés s'arrêtent pour de bon, ils rêvent sans entendre les cris déchirant leurs nuits. Sur leurs deux oreilles. Tandis qu'à côté... Ils se contentent de laine miteuse comme oreillers, et ne dorment bien que d'un oeil.

Du coup, Tark, quoi ? Est-ce qu'on a vraiment notre mot à dire en tant qu'pions sur un échiquier si vaste qu'on en perçoit pas d'horizon ? Ça va faire un an, un an déjà ! L'anniversaire de la Fugue. On s'est arraché du destin avare que papa et maman prévoyaient pour nous, marionnettistes sur la scène politique : j'me serais emmêlé dans les ficelles. Mais pourquoi, finalement ? On a juste bondi dans une piscine croupie polluée d'intérêts qui se torchent bien les fesses avec nos idéaux de... justice... nos ambitions.

On a échappé au pire. Mais on s'est élancés dans l'inconnu. Et je sais pas encore nager là-dedans.

J'suis mêlé à une escouade de branleurs avides de permission, qui donnent un vrai sens au concept d'économie d'énergie. Si l'huile du coude était une denrée périssable, j'suis certain qu'ils seraient les plus rationnés d'la planète. On a tous moins d'un an de trime derrière nous, aussi expérimentés et aptes au service qu'un oisillion jeté du haut d'une falaise, mais Fushia est une cité tranquille, où les plus grands drames, je pense, consistent en des chatons coincés en haut des arbres.

C'est du groupe disparate comme on en fait peu, des bidasses ricanantes, légères, trop jeunes pour encore vraiment comprendre à quel point un gallon pèsera lourd sur leurs épaules, qui s'éparpillent à travers le village en duos, en trios, en solos dans mon cas, pour vérifier qu'aucun gamin ne se froisse le genou en tombant d'son vélo. La justice.

Moi stationnant à l'entrée d'la ville, mirant au loin les lumières des murailles, érigées à l'horizon. Les murailles de la capitale de Goa. Un océan de grisaille étalé autour. C'est cette contemplation qui m'a harnaché le coeur aux remords. Clairement... On est pas là où on aurait besoin de nous.

Puis il y a autre chose, derrière moi. Sur un monticule de rocailles. Il m'a pas vu. Mais je sais qu'il est là.

J'le vois plié sur son rocher, voûté comme s'il croyait qu'en relevant la tête, une épée de Damoclès viendrait lui fendre le crâne. Lourde, sa caboche, roulée dans ses mains. Il m'capte l'attention, même s'il a l'air craignos avec son fer enfoncé comme des vers sous sa peau : j'ai toujours été une espèce de mouche attirée par la merde. Et ça m'tuerait qu'à cause de moi, il se sente vraiment merde. J'veux pas avoir l'air de lui tourner autour, comme un genre d'aileron menaçant autour d'une coquille de noix paumée dans la mer.

Je sais qu'il est là. Et il est en boule, la souffrance transforme en boule, elle tord et tasse le corps avec son âme. Et je gamberge. Et j'me demande s'il vient de. Là-bas.

Et ma conscience m'immole. Elle me dit Non. C'est pas tes affaires. Regarde ta gueule. Écoute ta langue. Quoiqu'il lui arrive, tu pourras PAS l'aider. Va t'enfoncer dans Fuschia, et fais ton boulot. Et va sauver des félins dans les arbres. Et va aider des petits cyclistes joufflus à se relever. Et va attraper un voleur d'étalage, peut-être, même, ça doit être l'équivalent des gangsters chez eux, les voleurs d'étalage.

T'es marine. T'es requin. Dans un monde d'humain. Héritier d'un génome pollué de corruption ; qui sent l'océan. T'es pas psy. Tu serais juste capable de remuer un couteau dans une plaie dont tu ne saisis pas la profondeur. Tu es un monstre. Ici. Ils te regardent tous comme si tu allais bouffer leurs bambins s'ils te tournent le dos. Frangin t'a prévenu : ils ont peur de toi, de vous, des Kamina, parce que malgré vos bonnes intentions... Vous êtes des monstres. Des monstres dans un monde de bêtes.

N'y vas pas.
Fais pas ça.
Putain de jambes.
Putain de compassion.
Putain de moi.

Ça... Ça va ?

Putain de langue.
Rien ne va...

Désolé, je... Tu... T'es perdu ?
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Si la vie est une pute, je suis son putain de gosse.
Un putain de gosse qu'elle a jamais désiré. Un putain de gosse toujours dans ses pattes et ça l'emmerde. Alors elle me le fait payer.

Mais bordel tu m'as tout arraché, ça te suffit pas ? T'aimes me voir souffrir comme t'as souffert hein ? Mais lâches moi merde ! Juste : lâche moi !

Et puis pourquoi moi ? Pourquoi tu me ramènes un connard de Marine qu'est même pas foutu d'être un homme ? T'es vraiment qu'une belle salope !


Je prends même pas la peine de regarder dans les yeux. Y'a qu'à voir ses mains pour comprendre.

- Ouais, ça va, c'est l'éclate, que je lui réponds sèchement. J'suis pas perdu, c'est qu'on m'a éjecté de mon putain d'tas de merde. Bienvenue à Goa.

Le truc, c'est que je parie que je suis ton jouet préféré. T'es qu'une putain de frustrée qui aime se défouler sur moi, mais tu sais quoi ? Je t'emmerde !

Maintenant, je le regarde dans les yeux.

- Qu'est ce que tu m'veux ? T'as pitié ? C'est ça ? Hein ? Tu dois bien connaitre c'que c'est la pitié ... C'est pour ça qu't'es rentré chez la Mouette ? Hmm ?

Tu veux vraiment jouer à ce putain de jeu là ? Okay, on va y jouer. Tu vas voir, j'ai pas besoin de toi pour m'enfoncer. Tu n'as fait naitre ici, c'est déjà pas mal comme début, t'aurais plus qu'à me regarder, mais nan, ça te suffit pas. Et putain, qu'est ce que t'aimes me le faire savoir !

Je rebaisse la tête et je me la prends à deux mains avant de me griffer le cuir chevelu en sachant pas ce qui va m'attendre.

- Tu vas aller prévenir tes collègues je parie ? Un connard de bouseux dans son coin qui demande rien à personne, vous aimez pas trop ça.

Je crache par terre et je cogne le rocher sur lequel je suis assis.

- De toute façon, si tu le fais pas, y'aura bien un d'ces connards de Fushia qui finira par me dénoncer alors fais toi plaisir. Autant tirer la couverture à toi.

Alors je me mets debout et je lui tends mes poignets.

Alors ? T'as aimé ? T'as pris ton putain de pied ?
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