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Résurrection


Le combat était parti pour durer. Alincourt et moi étions de force à peu près équivalente : il maîtrisait mieux son haki que moi, mais je l'avais aussi ; nous avions tous deux un fruit du démon dont nous savions tirer le maximum, mais j'étais beaucoup plus à l'aise avec mon zoan ; nous avions l'habitude du combat même si aucun de nous y trouvait un attrait. Mais surtout, aucun de nous ne voulait de CE combat. Les circonstances et nos mauvais caractères respectifs nous avaient poussés à chercher dans l'échange de coups une manière de se défouler, de se débarrasser de nos frustrations. Je pense sincèrement que si Lullaby n'était pas intervenue, nous aurions continué notre duel jusqu'à épuisement, et non jusqu'à « ce que mort s'en suit ». Épuisés, orgueilleux, décidés à ne pas céder avant l'autre, nous serions tombés au sol sans la moindre once de force pour balancer d'autres coups, et je pense que nous aurions continué à nous insulter verbalement, avant que la nuit, la soif ou le bon sens d'autrui ne nous arrêtassent.

Tout ceci pour dire qu'au moment où Lullaby nous délivra ces très mauvaises nouvelles, Alincourt et moi n'eûmes même pas à nous consulter d'un regard pour mettre termes à cet enfantillage. Nous savions déjà que j'avais gagné. Enfin, que Lullaby et moi avions gagné. Je devais d'ailleurs me tenir un peu trop fièrement pour l'angette qui doucha tout sentiment divergeant à l'urgence de la situation.
- « Mais vous n'avez pas honte, tous les deux ? Vous êtes censés montrer l'exemple ! Et voilà que je vous trouve en train de vous chamailler à coup de poings pour savoir qui a commencé ? On dirait des gamins qui se disputent le sceau dans un bac à nuages ! » Bon, les ressentiments et accusations que je portais dans mon cœur à l'encontre d'Alincourt étaient tout de même plus graves que ça.  « Le passé, c'est le passé. Dieu a fait ce qu'il a pensé devoir faire, et rien ne changera ça. Vous allez me faire le plaisir d'arrêter tout ça. Allez, on se serre la main ! Sinon, je me fâche ! »

Et très étonnant, je ne voulais pas voir Lullaby fâchée. Elle était ma cadette de dix ans, mais elle venait de me mettre au garde-à-vous, et Alincourt n'en menait pas large non plus. Mais nous étions des têtes de mules avec un amour-propre à la mesure de notre démesure, alors nous fîmes forcément la tête en nous exécutant. Donnez-nous un ordre, et ce que nous aurions fait de bon cœur devenait une corvée.

- « Mais pourquoi la Marine attaque Shanda ? » fis-je en revenant à nos moutons.
- « Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c'est que le navire est parti avec tout l'équipage, et que le capitaine-colonel vous a mentionnée. »
A ce moment, tout se mit en place. Je n'avais pas contacté Kadren depuis mon départ du GUANO pour Shanda la veille auparavant. Cela faisait donc plus de vingt-quatre heures que mes copains les Marines n'avaient pas eu de mes nouvelles. Pas étonnant qu'ils se fussent mis en branle. C'était touchant, de voir qu'ils avaient l'esprit d'équipe.
- « Où sont mes affaires !? »  

Le retour au camp du GUANO se fit dans la précipitation, avec un Chris très peu cérémonieusement porté par un Alincourt qui semblait prendre un malin plaisir à passer sur toutes les bosses et crevasses du chemin. Ces deux-là, ça remontait à la scission Héailleutou/GUANO, et même avant. Cependant, le den-den que je piochai dans mes affaires était non opérationnel. Déjà que les communications passaient mal de base, mais avec le vent prélude à un orage, j'étais bien incapable de prévenir Kadren et Zieger que tout allait bien. Idem pour Rafaelo.
- « Nous devons nous rendre à Shanda le plus vite possible. » déclara Alincourt.
- « Ah ? Votre présence va changer quelque chose ? »
- « Mais parfaitement. Manguelita ne pourra pas m'attaquer devant la Marine. Si nous voulons une trêve ou une paix, c'est encore le meilleur moyen à l'y contraindre. En plus, une parole donnée en public vaut comme une promesse de sang pour un Shandia. Ils sont très tatillons avec les questions d'honneur, ces gens là. »

Venant de la part d'un Ange qui n'avait pas de scrupule particulier à souffler le chaud et le froid, c'était un comble. Toutefois, ce n'était pas là le cœur du problème. Rejoindre Shanda était notre priorité. Ce fut ainsi que je fus introduite à une technologie qui m'enthousiasma : les dials qui émettaient des rubans de nuages sur lesquels les Anges pouvaient glisser à toute vitesse avec des patins. C'était à la base une invention des Shandias, mais le GUANO avait réussi à la répliquer au fil du temps. Je sus que je voulais une paires de patins avec un de ses dials la seconde où je les vis en action. Pourquoi ? Aucune idée. Entre le rokushiki et mon zoan, je n'en avais pas besoin. Mais femme un jour, femme toujours : accumuler l'inutile, le superflu était inscrit dans mes gènes.
Cependant, je fus bien plus heureuse de m’asseoir derrière un Ange qui conduisait une sorte de scooter à dial. C'était moins fatiguant, bien que plus bruyant.
- « Avec ça... » m'expliqua Andy qui me dépassa, avec Chris accroché derrière lui, sur un véhicule similaire, « .. nous serons en moins d'une heure à Shanda. … j'espère que tu sais ce que tu fais, parce que sinon, c'est la mort assurée pour tes compagnons de la Marine. »
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J'aimerais dire que j'avais un plan. Que tout était clair dans ma tête, exactement quand j'utilisais le Haki. Que je savais avec exactitude qui allait dire quoi, et comment j'allais pouvoir agir à mon tour. J'aimerais.
Tout ce que j'avais se résumait à que j'étais épuisée, que j'avais faim et soif, que mon corps n'était que plaies et courbatures, et que la nuit était encore loin. J'aurais pu me blottir contre le dos de l'Ange qui pilotait le scooter à dials, tomber dans une sorte de torpeur à défaut d'un réel sommeil, mais je savais que non seulement cela ne me ferait aucun bien véritable mais aussi que j'étais bien trop angoissée pour arriver à me relaxer.

Mon cœur battait la chamade à chaque fois que je pensais à ce qui se passait. La seconde d'après, mes entrailles se tordaient, et j'avais envie de vomir. Le goût acide sur ma langue n'aidait absolument pas à se projeter dans le feu de l'action. Une fois ou deux, Rafaelo m'avait parlé du poids de la responsabilité qu'il sentait sur ses épaules, et à quel point il avait parfois peur de lui-même. Je n'avais pas vraiment compris avant de moi-même détenir le sort de tout un peuple entre mes mains. Il suffisait d'un mot pour déchaîner les violences des uns et des autres. Cette sensation de pouvoir absolue avait poussé plusieurs personnes à l'euphorie mégalo, je le savais. Moi, elle me terrifiait.
J'avais souvent pensé être meilleure que les autres. Ma place de chef d'équipe au CP, je l'avais méritée, mais j'étais en ce moment trop fatiguée pour me sortir mes usuelles sournoiseries et demi-vérités. Je l'avais méritée, oui, mais j'étais partie du principe que le long processus d'apprentissage et de notations n'était qu'une formalité. J'étais née pour diriger. J'avais ça dans le sang, ça et toute la morgue héritée de mon éducation. Ce n'était même pas une question de destinée. J'étais à la place qui me revenait de droit. Si j'étais sortie du ventre de ma mère adulte, j'aurais été placée chef d'équipe dès mes premiers pas.
J'avais déjà réalisé qu'être chef d'équipe, c'était avoir la main mise sur les autres. Mais jusqu'alors je l'avais plutôt ressenti comme la possibilité de donner des ordres et d'être obéie sans contestation. Ils étaient là pour moi. Je savais que j'endossais la responsabilité de leurs actes, mais je l'acceptais parce que leurs actes, c'était juste ma volonté à travers leurs mains. D'ailleurs, s'ils faisaient « zap zap » au lieu du « zip zip » demandé, je tombais sur eux comme armée de toute la fureur des cieux.
Non jamais auparavant je n'avais compris qu'être chef, qu'être responsable, c'était aussi être là pour les autres, et non simplement eux qui étaient là pour moi. Peut-être parce qu'inconsciemment, j'avais été influencée par le fait que mes subordonnées étaient Marine et CP, et que moi, j'étais révolutionnaire. Les préjugés. Saleté que ces maudits préjugés.
Pour la première fois de ma vie, j'avais des gens à protéger. Des gens que je ne connaissais pas si bien que ça, mais dont la survie m'importait. Pas forcément pour eux-mêmes. Pas forcément que pour eux-mêmes. Si au départ, les Anges, les Shandias n'étaient pour moi que des points sur l'échiquier entre le Gouvernement et la Révolution, désormais je me battais pour Chris et Mangrove, pour Lullaby, pour Alincourt un peu aussi. Des gens, avec un nom, un visage, une histoire qui me devenait familière, qui étaient complètement démunis face à la menace devant eux. J'étais leur dernier recours. Le premier aussi. Le seul et l'unique.
Et c'était terrifiant.
Un geste, un mot, et j'aurais sur la conscience leur mort, leur douleur, leur tourment.
Qu'on ne s'étonnât pas après que je fusse devenue une parano solitaire.

** « Et maudit soit Rafaelo ! Il n'est JAMAIS là quand j'ai besoin de lui. Lui saurait. Ou aurait su me dire. … oh, comme je comprends maintenant pourquoi il voulait perdre la mémoire. Je n'avais jamais compris pourquoi il avait élaboré ce plan débile. Mais quelque part, il voulait s'offrir la chance d'oublier et de recommencer. Il a juste trop d'honneur pour ne pas laisser un lien pour remonter jusqu'à lui. Et maintenant que j'ai besoin de lui, non seulement il n'est pas là, et même s'il l'était, il me serait complètement inutile avec sa satanée amnésie !! » **

Blâmer Rafaelo et l'accuser de tous les maux me permettait de ne pas penser à Shanda, et à la Marine qui arrivait pour demander – exiger – des nouvelles de moi, nouvelles que Manguelita serait bien en peine de donner, si tant était qu'elle voulût bien répondre à leurs questions. Ça partait d'un bon sentiment. Kadren était un bon officier, Zieger un officier sournois en devenir. Eux-aussi, je voulais les protéger. Ils n'y étaient pour rien.
Et je n'avais pas la moindre idée de comment j'allais faire.
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Après avoir laissé Amapsa, Tenna et Sanji discuter de leurs propres termes de l’armistice entre leurs deux factions, l’assassin s’était envolé dans un nuage de fumée. Usant sa fumée à la manière d’un propulseur, il attira des cris d’admiration des enfants de la Lune Noire alors qu’il disparaissait dans la frondaison des arbres. Quelque chose, aux frontières de son mantra, avait piqué ses nerfs. Une sensation désagréable et poisseuse qu’il se devait d’aller vérifier. Les malheurs ne venaient jamais seuls. Une traînée grise s’en fut dans les nuages, cherchant leur sécurité et l’appui du vent pour gagner de la vitesse. Sans qu’il ne puisse l’expliquer, une bouffée de panique avait secoué son être. De peur, d’hésitation. Puis tout avait disparut. Une seule pensée s’était alors imposé à lui, Shaïness. Il délaissa sa curiosité pour le Knock up stream et les nouveaux arrivants, quels qu’ils fussent, et bifurqua à 180° pour se diriger vers la terre des Shandias. Serrant les dents, l’assassin redoubla de vitesse. Le fait de savoir voler lui avait autrefois grisé l’esprit, sans mauvais jeu de mot, mais aujourd’hui … c’était devenu aussi facile que de claquer des doigts. Il ne saisissait pas exactement le processus inconscient de cette technique. Mais il volait. Et plutôt vite. Quelque chose n’allait pas. Quelque chose se précipitait dans le nord de l’île. Il n’aurait su dire comment il était au courant car son mantra ne s’étendait pas aussi loin, mais il le savait.

Il ne lui fallut pas plus d’une heure pour traverser l’île de part en part, libéré des contraintes de la jungle. Le territoire Shandia. Des ruines centenaires se tenaient là, prenant l’humidité et de l’âge. Cet endroit était protégé de toute part par les guerriers de cette terre. Or il n’y avait personne aux alentours. Pas âme qui vive. Fatigué, malgré tout, par le voyage et les derniers évènements, l’esprit de Rafaelo était trop embrouillé pour s’étendre aussi loin que lors de ses moments de prescience. Ainsi seul son environ immédiat était clair à ses yeux. Il avait forcé jusqu’à ses limites pour aller au secours de Shaïness, persuadé dans son sein le plus intime qu’elle courrait un grave danger. Que quelque chose n’allait pas. Il grogna en se faufilant entre les constructions antiques et s’épongea le front, muselant son denden pour ne pas se faire surprendre par une quelconque nouvelle de la Lune Noire et des Sélénites. Il ne lui fallut pas très longtemps pour rallier Shanda. La ville était en plein émoi et toutes les troupes avaient été réunies pour faire face à un bras de fer insoutenable. La Marine était là, faisant face aux indigènes. Grimpant dans les habitations, l’assassin se fit aussi discret que possible et sonda la terre de loin.

Kadren. Zieger. Il les reconnaissait. Tous. Il se concentra sur celle qu’il supposait être Manguélita, qui darda un regard interloqué dans sa direction. Les deux troupes se faisaient face. Les Shandas armés levaient leurs dials et leurs lances vers la Marine qui les tenait en joue. Les deux gradés faisaient face à la chefesse des Shandias. Une tension était palpable, à couper au couteau. Le silence était de plomb. Suffisamment pour que Rafaelo se sente l’obligation d’intervenir. Ou peu s’en fallut. S’appuyant sur le renfort de pierre où il s’était dissimulé, il se ramassa pour bondir lorsqu’un sentiment bien connu le submergea. La présence de Shaïness. Il avait cru ne plus la revoir, qu’il lui était arrivé malheur et sa fureur alliée à sa crainte avaient failli le faire atterrir au milieu des deux corps pour s’occuper lui-même de la Marine avant qu’ils n’en viennent à tirer à tout va. Marine plutôt que Shandias. Les préjugés avaient la vie dure. Préjugés … une phrase qui n’était pas la sienne. Comme empruntée. Mais dès que la présence de la donzelle s’imposa à son esprit, sa colère se transforma en un réel soulagement et une joie non mesurée. Car s’il lui était arrivé malheur, il s’en serait voulu. Il avait en effet été trop préoccupé et trop loin pour lui venir en aide et la soutenir. Ce lien qu’il avait forgé avec Shaïness était tout de même étrange.


Une deuxième fois, il eut un frisson d’appréhension en observant la scène des gradés de la Marine et de Manguélita qui les toisait. Il fronça les sourcils. Non, tout se passerait pour le mieux : il en était convaincu. Shaïness était dans son rôle : elle pourrait apaiser les choses, faire rentrer les Marines à la niche. Il avait toute confiance en elle à ce sujet. Lorsqu’elle fut à hauteur de sa vision, il la vit couverte de blessures. Mais nichée derrière la troupe d’élite de Dieu. Enfoiré d’Alincourt. Voilà pourquoi il était parti aussi rapidement, voilà pourquoi il avait si vite lâché l’affaire. À noter que lui aussi était couvert de contusions. Bien joué, Shaï, bien joué. Ce pédant personnage avait bien mérité sa raclée. Un sourire mesquin se dessina sur le visage de l’assassin, se plaisant à l’idée de voir Shaï écraser son talon sur la face de Dieu. Quant au révolutionnaire, il ne lui restait plus qu’à attendre et voir, son esprit complètement accaparé par ce qui allait certainement être la résolution du travail de Shaïness. Car si elle réussissait ce qu’elle allait mettre en place dès ses premiers mots, ne resterait plus qu’à faire le lien entre la Lune Noire et eux pour qu’une paix précaire soit établie. Et l’assassin était plus que curieux de vois le résultat de l’efficacité de la jeune femme.
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Quand nous arrivâmes à Shanda, nous débarquâmes sur une scène qui me figea le sang. Là,  à l'entrée des ruines, la tribu Shandia dans sa globalité, du nourrisson jusqu'au plus chenu des vieillards, tous tenant une arme, une arme dirigée contre la Marine – peut-être pas le bébé, mais nul doute qu'il était prêt à vomir son lait sur les pieds du soldat le plus proche. Leur faisant face, l'équipage du Ptérodactyle, Kadren et Zieger au centre, en ordre de combat. Si les chiffres étaient en faveur des locaux, je savais parfaitement que le petit bataillon d'hommes à la Mouette était parfaitement entraîné, et capable de faire bien plus que les prouesses individuelles le laissaient entendre. Dans un autre monde, on aurait facilement pu comparer ça à la toute puissance des armées romaines contres les tribus celtiques dites barbares.

- « Le GUANO est arrivé, on est bien dans la merde ! » fit une voix dans l'anonymat de la foule shandia, tandis que nous prenions position sur un des côté du « carré » : à ma droite, la Marine, et donc à ma gauche, les Shandias.
- « Que le Kraken me croque ! » s'exclama Kadren. « Agent Raven-Cooper !!!! » Le soulagement se mêlait à la colère dans sa voix comme sur son visage. Bien malgré moi, je me pris à rougir, comme une gamine prise la main dans le pot de cookies.
- « Ah, Colonel. Toutes mes excuses, mon den-den semble être bloqué. Je n'ai pu vous joindre. »
- « Ah... bon.... » S'il était été du genre à se trémousser, il l'aurait fait, et d'embarras. À mon avis, il venait de pousser une bonne gueulante, exigeant des Shandias que je leur fusse rendue... alors que je n'étais pas là. Connaissant les Shandias comme je commençais à les connaître, nul doute qu'ils n'avaient même pas cherché à expliquer quoi que ce fût, opposant à la vindicte marine un silence de pierre... de ruines. Ce qui avait le don d'énerver tout bon Marine. D'où la situation telle que je venais de la découvrir. « Mais... mais vous êtes blessée ! » s'offusqua-t-il en prenant soudainement en compte mon aspect général.
- « Oh ça... » Alincourt intervint en passant son bras autour de mes épaules. « ...rien de bien méchant. Nos épreuves initiatiques sont toujours un peu turbulentes. Vous savez, nous sommes que des barbares qui vivent dans une jungle. »
- « ... » Clairement, Kadren n'était pas convaincu. Moi non plus. Oups, c'était de moi qu'on parlait, là.
- « Je vous assure, je vais bien. Je ne dirais pas non à une séance de kiné, je l'avoue, mais voilà, je fais partie de la tribu des Anges, maintenant. » Yeah me...
- « Ah non ! » protesta le meneur du GUANO avec un grand sourire. Un conseil : quand Dieu vous sourit, comptez vos abattis. C'était terrifiant, cette vision. Alincourt me tira-poussa, traversa sans vergogne le carré dessiné par les trois troupes, coupant en biais jusqu'à Manguélita, le tout, sous le regard torve de ladite cheffesse.  Là, Alincourt se posa, prenant Manguélite dans ses bras, de telles façons qu'il avait un bras autour de chacune de nous. Nous devions avoir là tellement heureuses, là, tout de suite. « Pas que les Anges. La tribu unifiée de Skypiea. Nous tous, ensemble. Nous sommes désormais la MST. »  
- « HEIN ? » rugit Manguélita en se dégageant.
- « Mais bien entendu : la Mutualisation Skypiéenne Totale, MST. Tu préfères peut-être SIDA ? Société Inter Défense Ailée. Hum IVG : Interconnexion Viable Groupée, peut-être ? Ou alors, ASSEDIC ? Ange-Shandia Solidaires Empêchant le Débarquement d'Individus Cabochards. » Il glissa un regard pseudo-en coin vers Kadren et ses troupes.  « Hum, à la réflexion... OSEF – Organisation Sympathique des Efforts Fraternels ? SOPALIN pour la Société Organisée pour l'Autonomie Locale des Instances Nationales ? »
- « MAIS TAIS-TOI !!! » hurla-t-elle en devenant rouge pivoine.

À ce jour, je ne sais toujours pas si Alincourt a fait exprès, ou s'il a juste fait preuve de son mauvais goût coutumier. En tous les cas, je sus désormais à qui on devait le nom de GUANO.
- « Ah, ce ne sont que des suggestions.... » Alincourt jouait maintenant à l'enfant blessé par une rebuffade. Je ne pouvais décidément pas le laisser seul deux secondes. Je lui envoyai donc mon coude dans les côtes, avant de sourire – un peu pâlement – à Manguélita :
- « On verra les détails techniques après, et on ne laissera pas Alincourt donner son avis sur la question du nom. Bon... voilà, une grande famille, c'est ce qui compte. »
- « C'est en effet, une bonne nouvelle... si elle est véridique. »
- « Mais bien sûr qu'elle est véridique. Hein, Manguélita ? »
- « ... »
- « N'est-ce pas, Manguélita ? »

Elle pouvait dire non. Elle pouvait tous les dénoncer. Envoyer dans la tête de ces humains que les Shandias n'étaient pas plus unis au GUANO que les cochons volaient. Mais dans ce cas, rien n'empêchait les Anges de s'allier aux Humains, et de les détruire, eux. Oh, la bataille serait terrible, mais Manguélita ne savait pas trop de quoi était capable la Marine. Bien entendu, elle jugeait encore les étrangers à l'aune de Shaïness, qui n'avait pas fait un adversaire bien vaillant. Cependant, cette dernière n'était plus sous le sortilège d'Alincourt, et elle avait réussi à sortir des ruines souterraines. Visiblement, cette fille avait d'autres ressources.  Peut-être qu'elle l'avait trop rapidement sous-estimée.
Et voilà que cette étrange humaine se penchait vers son oreille, dos tourné aux siens, pour venir lui parler en aparté :

- « Tu sais que je ne suis pas seule. Tu sais, tu l'as senti, toi ou un des tiens. J'ai quelqu'un avec moi ici. Il est avec la Lune Noire. Il s'occupe des Sélénites. »
Il n'aurait fallu qu'un balayage des environs par le Haki pour déceler Rafaeolo. Mais j'étais trop fatiguée pour pouvoir me concentrer tout en continuant à parler. Or, la situation exigeait une réponse rapide, si ce n'était immédiate de la part de Manguélita. A tel point que j'avais oublié que parler de Rafaelo à Manguélita était une très mauvaise idée ! Sa présence sur le Ptérodactyle était secrète, notamment de Kadren ! Et si la Shandia faisait l'erreur de le mentionner à haute voix ?
La cheffesse était parfaitement au courant de la présence d'un autre humain sur Vearth. Il fricotait en effet avec les Sélénites et la Lune Noire. La chute du Maquis Corse et la double mort de Madhine-Skippy n'étaient pas passées inaperçues.
- « Quand il aura fini, la Lune Noire se joindra au GUANO, et Héailleutou est sur le point d'être de nouveau englobé dans la tribu angesque. Le Gouvernement Mondial... bah, il parlera avec la tribu dominante, et il est évident que ça ne sera pas les Shandias. Au bout du compte, les Shandias seront seuls. Seuls contre tous. Et il y a encore cette question du Dragon Céleste dont nous devons discuter. Je ne pourrais protéger qu'une alliance. Si tu n'en fais pas partie, les Shandias devront se débrouiller tous seuls et bon courage pour faire face à tout le monde en même temps. »
- « Oui, » consentit  Manguélita. Elle n'avait pas le choix. « Oui, » répéta-t-elle à haute voix. Elle regarda Kadren directement dans les yeux. « Les Shandias sont en paix avec les Anges du GUANO. »
La remarque sécha les Shandias, mais ils étaient trop bien élevés pour montrer ouvertement qu'ils désapprouvaient leur meneur.

- « Dans ce cas... » Kadren se rappela à notre bon souvenir en toussotant un peu. Cette fois, à moi de jouer. Rapidement, je me portai à ses côtés.
- « Bon, la situation est un peu instable, pour le moment. Je viens juste de finir de décider les deux zozos à s'entendre. Ce qu'il faudrait, c'est que vous retourniez à Héailleutou, et que vous rameniez Gisèle et Valériane, pour qu'on signe rapidement l'unification des tribus et la déclaration de paix entre le GM et cette nouvelle... entité. Tribu. Groupe. Bande. »
- « Et pas Phil? »
- « Quoi Phil ? » lançai-je d'un ton excédé. Qu'est-ce qu'il pouvait bien encore me vouloir, ce con ?
- « Il est Messie, non ? L'unification le concerne. »
- « Phil est mort. » Devant son air choqué, je maudis mon impulsivité et je brodai un peu. « Question de politique interne. Apparemment, il mettait volontairement la bisbille entre le GUANO, Héailleutou et les Shandias. Son interférence a été dévoilée et la justice dans le coin est, je l'avoue, assez expéditive. »
- « Bande de barbares... » grommela le colonel. « Bon, je ramène les deux Messies. En attendant, je vous laisse quelques hommes pour---. »
- « Oh, n'en faites rien ! Il faudrait justement me laisser leur parler tranquillement, et les ruines ici sont en partie sacrées, donc tout ira bien. Et ce qui n'est pas sacré est sacrément en train de s'écrouler, donc encore moins de danger. Je me suis prise un Puits sur la tronche, et je n'en suis pas morte. »
- « Agent, il va me falloir un rapport détaillé.. »
- « Je vais vous faire la version courte : je suis allée chez le GUANO qui m'a dit un oui de principe, je suis allée chez les Shandias qui m'ont testée, et j'ai été assez bête pour ramper là où je n'avais pas à ramper. Je suis allée voir le GUANO, j'ai été initiée, je suis devenue une des leurs et maintenant, je finis ma négo' avec les Shandias, en tant qu'angette honoraire.  »
- « Ce que vous pouvez faire compliqué, vous, les CP. »
- « Oui, hein ? On aime bien ça. »
- « En fait, vous vous amusez comme une petite folle ? »
Misère... J'avais envie de lui écraser mon poing sur le nez, mais je me surpris à hocher la tête d'un air convaincue. Dans quelques temps peut-être, en effet, pourrais-je rire de mes mésaventures. Pour le moment, c'était plutôt une aventure.

Kadren se prêta donc à quelques formalités – comme se présenter et saluer, choses qui indifférèrent profondément Manguélita et Alincourt – avant de réunir ses troupes et de se mettre en marche, pour regagner le Ptérodactyle.
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Après le départ des Marines, je me retrouvai face à face avec les deux tribus ennemies et je n'eus aucun doute qu'ils seraient prêts à s'entraider dans la tâche de me tuer. Quoi que... ils seraient capables de combattre pour être les premiers à me porter un coup.

- « Bon. J'ai faim, j'ai soif et je n'ai pas envie de me battre. On va tous s’asseoir et vous allez m'écouter. »
On pouvait dire beaucoup de chose contre les Shandias, mais ce sont des hôtes organisés, à défaut de prévenants. J'allais cependant devoir leur enseigner le concept de coussin. Les pierres, c'était peut-être beau dans les ruines, mais certes pas confortables en tant que siège.

- « Parle-moi de cette menace, de ce Dragon Céleste. » Manguélita me lança cet ordre dès que nous fûmes assis. Alincourt et elle étaient juste en face de moi, le reste en cercle tout autour, avec Andy et Lullaby pas très loin. Je regrettai l'absence de Mangrove et Chris. Leur bon sens aurait été un atout de poids, en plus du réconfort que leurs bouilles de vieux m'auraient apporté.

Je commençai à leur expliquer ce qu'était un Dragon Céleste, à quel point les lois du Gouvernement ne les concernaient pas, intouchables qu'ils étaient. Puis je détaillai les misères des esclaves pour finir sur le plus important :
- « Son Illuminance Elzékior Maselfush a entendu parlé de Skypiéa. Il vient ici, dans le but de mettre au fer les Anges. Pour lui, vous n'êtes que des esclaves rares, en grand nombre, et « libres d'accès ». Il veut pouvoir parader avec sa tribu, à lui rien qu'à lui, sous ses ordres. Il vient, et il va gagner. Car quoi que vous fassiez, il va gagner. Si vous perdez, bon, c'est facile de voir ce qui arrive. Mais si vous vous opposez à lui, il va aller se plaindre au Gouvernement, comme quoi vous l'avez attaqué. Et le Gouvernement ne cherchera pas à savoir qu'il a été le premier à se montrer agressif. Tout ce que le Gouvernement fera, c'est d'envoyer des dizaines de bâtiments, remplis jusqu'à la bastingage d'experts en combat, et vous aurez la guerre. Je sais que vous êtes de braves et forts guerriers... » Et je fixai les deux chefs de groupe d'un air tellement accusateur que je réussis à les faire baisser le nez, « ...mais vous ne faites pas le poids face à la Marine d'élite. Ne serait-ce qu'en nombre. Et honnêtement ? Le GM préférera laisser derrière lui une terre brûlée, vide de toute vie, plutôt que d'avouer la faute du Dragon, ou de faire machine arrière.
Ça s'appelle un buster call. Des dizaines de navires les plus performants de la flotte, qui viennent et qui tirent pendant des heures sur Héailleutou et Vearth. C'est une flotte qui ne sert qu'à ça. Oui, les Dragons Célestes sont à ce point puissants, qu'il existe une flotte entière de navires stationnée à leur quasi-disposition et soumis à leur bon-vouloir. »


Anges et Shandias blanchirent. Ça y était, j'avais réussis à leur faire comprendre le danger qu'ils courraient.
- « En quoi être alliés va-t-il nous aider ? » Manguélita approuva de la tête. Quand elle se rendit compte qu'elle était d'accord avec Alincourt, elle s'arrêta brusquement et lui envoya un regard qui aurait tué s'il avait pu.
- « Pas vous aider. Vous sauver. Si tous les habitants de ces îles sont d'accord, montrent un front commun, ne serait-ce pour une journée, alors le GM peut signer un accord avec un gouvernement local représentatif sans que cela nuise à un groupe.
Si le GM reconnaît votre existence en tant que nation et signe une déclaration d'amitié avec vous, le Dragon Céleste ne pourra pas faire ce qu'il veut en toute impunité. »

- « Mais il pourra toujours faire beaucoup de choses, si je comprends bien. »
Là, j'eus un sourire gêné.
- « Je ne sais pas exactement ce qui se passera. Kadren est un Marine intègre. Il ne laissera pas les lois de son Gouvernement être spoliées comme ça, mais lui comme moi ne pouvons pas vraiment nous opposer à Maselfush. Disons que... si je devais comme ça, faire un pronostic... Maselfush se retrouverait seul face à vous. Pas de support avant ou après un combat. Sauf que je ne sais pas quelle force il va amener avec lui. Et il est riche. Très riche. Il peut sans problème faire appeler à des mercenaires ou des pirates, par wagons entiers. »
- « C'est quoi, un wagon ? » me demanda Andy. Ben oui, les trains, dans le ciel ?
- « Laisse tomber. Ça veut dire qu'il peut appeler plus d'hommes que vous ne pourrez en combattre. »
- « Donc... si j'ai bien compris... Tu veux qu'on s'allie, mais ça ne change rien. » conclut Manguélita avec les yeux étrécis de suspicion.
- « Sans alliance, vous n'avez aucune chance. Avec une alliance, vous avez une petite chance. A moins que vous ne vouliez tout simplement quitter Vearth et Skypiéa pour migrer ailleurs. »
- « Ah non ! Skypiéa est à nous ! Personne ne jettera loin de ma terre natale ! »
- « Tu rêves ! C'est MA terre natale ! Cette île est à MON peuple. » siffla Manguélita et bien entendu, des remous suivirent cette remarque.

- « ASSEZ ! » hurlai-je. « JE VOUS JURE QUE SI VOUS NE VOUS TAISEZ PAS IMMEDIATEMENT, JE VOUS PASSE TOUS AU LANCE-FLAMMES ET JE LAISSE MASELFUSH S'OCCUPER DE CEUX QUI RESTENT !!! A-T'ON IDEE D'ÊTRE AUSSI BOUCHÉS ? »

Mes poings étaient devenus deux masses à mes côtés, aux articulations blanches de tension, avec mes ongles qui me rentraient dans la paume de mes mains, qu'ils fussent cassés ou non. Je me levai, les dominant tous.
- « Vous allez m'écouter, et une fois pour toute, vous allez arrêter avec ces histoires. Mais regardez-vous ! Là  à vous entre-tuer depuis des générations pour savoir qui a droit à la terre ou pas !! Je vais vous dire, moi. Vous avez tous droit à cette terre, et vous êtes tous nés dessus. Enfin, à part ceux qui sont nés à Héailleutou.

Vous les Shandias ! Regardez-vous, bon sang ! Vous avez des ailes ! Si vous deviez redescendre sur Grand Line, revenir à Jaya, on vous prendrait pour des anges. JE vous prends pour des anges. Des anges bronzés, des anges bourrins, mais des anges. Votre place n'est plus sur Grand Line ! Votre corps, votre tribu se sont adaptés à la vie sur la Mer Blanche. Vous êtes devenus des Anges. Vous avez crée une race nouvelle, issue d'humains. Mais VOUS ÊTES DES PUTAINS D'ANGES !! C'est compris ?!!

Quant à vous, les Anges, les soit-disant vrais et natifs !!! Avez-vous seulement compris ce qu'ils pouvaient ressentir, ces Shandias ? Vous dites qu'ils vous ont envahis. Pff. Vous pensez vraiment que les premiers HUMAINS dont le pays a été propulsé du jour au lendemain dans un milieu inconnu, ont VOULU de cet exil ? Combien de familles ont été séparées ce jour là ? Combien de personnes sont mortes ? Avez-vous seulement imaginé le traumatisme qu'ils ont vécu ? Alors oui, Vearth, c'est à eux, au départ. Et ces ruines, c'est tout ce qu'il restait de leur vie. Difficile d'y renoncer comme ça. De la même manière que vous n'avez pas voulu renoncer à Vearth, sous prétexte que c'était aussi chez vous. Ben à la base, c'était chez eux !

Mais maintenant... une terre n'appartient jamais à personne. Nous ne sommes que des passagers sur les eaux, les îles et les nuages. La terre s'appartient à elle-même, et nous ne faisons que bénéficier de ses ressources. Vous les Shandias, pourquoi ne pas avoir voulu comprendre la fascination que Vearth provoquait chez les Anges ? Pourquoi ne pas avoir partagé avec eux, cherché à vous intégrer ? Oui, vous aviez peur. Mais au bout d'un moment, ça va bien, de toujours prétexter la peur et le « bouh, ils ont commencé les premiers. » Ben, vous n'avez qu'à vous montrer plus grands que ceux qui ont été les premiers à faire la guerre : soyez les premiers à faire la paix.

Et vous, les Anges ? Pourquoi faire preuve d'autant d'avidité ? Vouloir voler les Shandias de leur terre ? Ça ne vous ressemble pas. Vous êtes un peuple fantastique, tourné vers les plaisirs simple de la vie. Je n'ai pas vu ici les traces des travers des sociétés modernes de mon monde. Vous vivez en paix avec la nature, fabriquant vos maisons et vos meubles à partir des nuages, mais vous seriez incapables de vivre en paix avec d'autres êtres vivants ? Vous espérez me faire croire que vous ne pouvez pas corriger l'erreur commise il y a plus de 500 ans ? Un demi-millénaire de guerre et de sang, mince ! Et la plupart des Anges en fondant Héailleutou ont bien signifié que tout ça, ce n'était pas eux !

Alors, regardez-vous, regardez-moi, et dites-vous de qui vous êtes le voisin, le frère ? De l'humaine que je suis ? Ou de l'autre qui fait partie de votre histoire, qui vous ressemble et qui vit, qui pense, comme vous ? »


Les Shandias avaient extrêmement mal pris que je les traitasse d'Anges. Pourtant, c'était la vérité. Ils avaient tous des ailes. Et Malsefush, quand il viendra, ne verrait pas deux peuples. Juste... plein d'anges. Je les voyais hésiter. J'avais bien un dernier atout dans ma manche : la paternité de Manguélita. Ou grande-parternité. Mais ce n'était pas à moi d'annoncer ce genre de détail intime. Pas sûre en plus que cela me fît gagner des voix.
- « Les Anges et les Shandias travaillent déjà ensemble. La Lune Noire. Cela fait vingt ans que Shandias et Anges luttent ensemble, et l'alliance n'a pas fléchi, ou n'a pas été dissolue. A mon avis, vous êtes même compatibles physiquement. Roo, ne faites pas cette tête là. Oui, je le dis. Vous pouvez faire l'amour ensemble et vous pouvez même faire des enfants ensemble. Et ça, c'est bien la preuve que vous êtes un même et seul peuple. Que vous êtes voués à établir ici une société belle et paisible, loin des tourments du Gouvernement Mondial. Vous êtes... vous êtes la tribu des Skypiéens. Vearth et les îles de Nuages tout autour, c'est Skypiéa. Et vous habitez tous dessus. Vous êtes tous des Skypiéens. Ou tout autre nom que vous voulez vous donner, tant que ce n'est pas Alincourt qui le choisit. »
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Ma dernière phrase avait tiré des rires épars, permettant d'évacuer une partie de la tension accumulée au cours de ma remontrance. Mon plaidoyer pour une réconciliation avait ému plus d'une personne présente, je le savais, mais s'il avait suffit d'un discours enflammé pour résoudre les choses, ça se saurait. Il faudrait du temps, pour que les choses s'adoucissent entre les deux peuples. Mais je savais aussi que désormais, plus personne ne pouvait dire ignorer la vérité. L'ensemble des deux tribus étaient là. Hommes, femmes, jeunes et moins jeunes avaient entendu ce que j'avais à dire, et il n'était plus question qu'une poignée décidasse au nom de tous. A mon avis, beaucoup d'Anges et de Shandias n'étaient pas contre la paix, mais avouer un tel penchant dans un monde profondément guerrier et hostile revenait à devenir le mouton noir de la famille.

Depuis la foule, un brouhaha s'éleva de plus en plus fort, alors que chaque individu prenait conscience de mes mots. Beaucoup se dévisagèrent, cherchant à voir s'ils étaient à ce point semblables, tels que moi, je les avais décrits. Leur monde ne pourrait plus jamais revenir à ce qu'il était avant. J'avais irrémédiablement fait bougé les choses. Il n'y avait pas d'autre choix que de continuer à avancer.
Cependant, l'affaire était loin d'être entendue.
- « Je ne comprends toujours pas... » fit Manguélita en fronçant les sourcils. « En quoi devenir des alliés – ou pas – va changer quelque chose face à ce Maselfush.  En quoi être alliés va nous aider ? »
- « Être alliés va vous permettre de négocier avec lui. »
- « Pourquoi négocier ? Négocier quoi, d'abord ? »
- « On ne peut pas combattre Maselfush, pas si on a un autre choix. Et cet autre choix, et nous n'en avons qu'un, c'est essayer de lui faire renoncer à ses désirs esclavagistes. Si vous restez désunis, une seule tribu sera protégée par le traité d'amitié. Et pour l'instant, cette tribu, c'est Héailleutou. Du coup, rien, absolument rien, ne l'arrêtera quand il attaquera Vearth. Alors que si vous êtes une seule et même tribu, il ne pourra pas jouer sur les divisions, et profiter de vous. »
- « Pourquoi ne pas tout simplement le tuer, lui et les siens et dire qu'il a été mangé par un Monstre de la Mer Blanche ? » grogna-t-elle.
- « … on en viendra peut-être là. » En mon fort intérieur, je ne croyais pas trop à la possibilité de raisonner avec Maselfush. « Et c'est encore plus important que vous bossiez main dans la main. Parce que couvrir vos traces va être extrêmement difficile, et à la moindre hésitation, le GM vous tombera dessus. »
- « Mais--- »
- « A t'entendre, Shaïness... » intervint Lullaby, « … on a impression que tu es contre le GM. Je veux dire... tu es en train d'évoquer sans sourciller la possibilité que nous, les... Skypiéens, nous tuions un de ces nobles, alors que ton devoir est, si j'ai bien compris, de le protéger. »  L'Angette avait assisté aux échanges dans un silence studieux. Mon discours fédérateur avait recueilli son approbation ; je le savais aux hochements de tête qu'elle avait eu. Cependant, elle n'était pas idiote et savait encore additionner deux et deux. J'avais déjà tenu un discours peu flatteur sur le compte des Dragons Célestes, pour la convaincre d'arrêter Alincourt. Cela me revenait à présent. Elle, elle n'avait pas oublié.

- « Je ne déteste pas le Gouvernement Mondial. Bien au contraire. »
- « Mais tu n'aimes pas les Dragons Célestes. » Même si je n'avais pas à craindre que Kadren et Zieger m'entendissent médire sur les Nobles, je n'avais pas non plus envie de me dévoiler devant autant d'inconnu. Je pinçai les lèvres, bien incapable de prendre une décision. Alors Lullaby se leva et me tint un petit discours que seuls Manguélita et Alincourt entendirent : « Tu dis qu'il faut qu'on s'allie, entre nous, mais tu n'as pas confiance en nous. Alors pourquoi aurions-nous confiance en toi ? » Elle n'avait pas tort. Mais sûrement pas raison. Je regardai les deux ennemis, pendus à mes lèvres, et je décidai que je ne pouvais pas leur cacher la vérité. Les sauver oui, mais pas les manipuler.
- « Vous voulez la vérité ? Hé bien, la voici. Une des raisons pour laquelle je suis venue ici ? Vous sauvez la peau de fesses, oui, mais surtout évitez que le Gouvernement ne mette la main sur un nouveau territoire. Je me battais autour pour vous que contre le Gouvernement. »
- « Tu veux dire, contre le Dragon Maselfush ? »
- « Non, j'ai bien dis contre le Gouvernement. » Je fis une pause, soudaine très nerveuse à l'idée de m'exposer ainsi. Je savais aussi que je ne pouvais pas me tromper. Un mot de travers, et Skypiéa était perdue. Non pas pour la Révolution, mais perdue, tout simplement. Désunie, mal préparée, faible à l'hégémonie de la Mouette. « Je vous ai parlé des Dragons Célestes, du fait qu'ils sont les descendants des premiers rois et dirigeants à avoir mis en commun leurs ressources. Pour se protéger d'une civilisation aujourd'hui disparue. »
- « Disparue, par vraiment, il reste encore les poneglyphes. » Alincourt lâcha son petit commentaire comme si de rien n'était.
- « C-c-comment tu es au courant !!! » Manguélita était en train de s'étouffer de rage et d'indignation. Le Poneglyphe était LE secret des Shandias. Comment le chef du GUANO pouvait être au courant et en parler si négligemment ?
- « Mais franchement, Manguélita ? Tu croyais peut-être que personne ici-haut n'était au courant ? Tu penses bien que Gan Forr a été mis au courant par Wiper, et que le secret a été transmis de disciple à disciple. On sait très bien ce que c'est : les mots de Nico Robin n'ont pas été perdus.  »
- « Ah ? C'est marrant, moi, je n'étais pas au courant. » glissa Lullaby, avec un rien de blessant dans sa voix. Alincourt eut un moment de flottement avant de se reprendre :
- « Bah, ce n'est pas bien important. C'est juste une grosse pierre avec des trucs incompréhensibles gravés dessus.. »
- « L'histoire du siècle perdu, Alincourt. Ce n'est pas n'importe pas. Des îles entières ont été rasées pour que personne n'apprenne ce qui peut s'être passé pendant ces cent années. »
- « Raison de plus pour ne pas permettre à ce Dragon Céleste de le voir. » grogna la jeune cheffesse Shandia.
- « Et tu ne nous n'a jamais dit dit quelle est ton histoire avec les Dragons et le Gouvernement. » Celle-là... quand elle avait une idée, elle ne l'avait pas ailleurs. Et après, on osait me dire qu'un Ange, ce n'était pas aussi têtu comme un Shandia.
- « Ce que je voulais dire, c'était que les conditions de la création du Gouvernement ne sont pas claires. J'irais même jusqu'à dire que le GM a été fondé pour de mauvaises raisons. Mais la chose est... cela fait 900 ans, plus ou moins, que le GM existe, et personne ne peut contester que le système a apporté paix et prospérité. Détruire le GM, cela revient à détruire la civilisation mondiale telle qu'on la connaît.
Pourtant, je ne vais pas dire que le GM n'est pas pourri. Bien au contraire. C'est un empire techno-bureaucratique, avec une armée redoutable, mené par cinq vieux fous, qui sont aux ordres d'une centaine de Dragons Célestes.
Ignorer le flux et le reflux des marées de toutes les formes de gouvernement est la folie des empires. La théorie des cycles, appliquée à la politique. A mon avis, le GM se trouve en ce moment au début d'une période de reflux, caractérisée par l'oppression et différentes formes de décadence. Quand une culture est à court d'idées, elle devient décadente. Et selon moi, le GM est en train d'arriver rapidement à bout d'idées, et surtout, de bon sens. Au lieu de reconnaître que chaque île est unique et admirable, ils pensent qu'ils faut les dominer en imposant à tous la technologie et leurs coutumes. Ce qui fait, qu'au lieu de les dominer, ils vont simplement provoquer des révoltes.
J'ai remarqué que la bureaucratie devenait de plus en plus envahissante, ce qui, selon ma conception de l'histoire, a toujours été un signal d’oppression. Il y a eu prolifération de permis, de taxes, d'interdictions et de lois. Ça s'est fait progressivement et personne n'y a pris garde.
Le fait même que le GM laisse ses propres lois se faire violer en toute impunité, sous son nez, montre la déchéance du système. Je déteste ce que le GM est devenu, et par là, je déteste ceux qui ont fait au GM ce qu'il est aujourd'hui. Oui, je hais les Dragons Célestes. Mais je ne hais pas le Gouvernement. Bien au contraire. Je m'opposerai avec la dernière énergie à tous ceux et celles qui veulent détruire le monde tel qu'il est est.
Imparfait, il l'est. Perfectible aussi. Mais je sais que cela ne servira à rien de foncer tête baissée, et d'anéantir le lien entre toutes ses îles. »

- « Dans ce cas, pourquoi ne nous fais-tu pas adhérer au Gouvernement ? »
- « Parce que je ne suis pas émissaire diplomatique habilitée à signer un tel papier. »
- « Et parce que tu ne veux pas ? »
- « Je ne veux pas, et... et je ne suis pas sûre que le Gouvernement veuille de vous dans son giron. »
- « Ah oui ? On n'est pas assez bien pour eux, c'est ça ? »
- « Il y a de ça. Si on met de côté le ponéglyphe, la seule ressource intéressante pour le GM ici, c'est les dials. Et pour les Dragons, l'exotisme de votre race. Le côté enchanteur des lieux, ça n'intéresse pas grand monde. Le tourisme de masse, ça n'existe pas encore à grande échelle. »
- « Le quoi ? » Andy et Manguélita se ressemblaient. Tiens, ils échangeaient un regard perdu. Tout ce blablabla, ce n'était pas pour eux.
- « Skypiéa est une terre peu facile d'accès, mais entourée de mythes qui pourraient attirer la convoitise de pirates. Vous intégrer en son sein revient à dire qu'en cas de besoin, le GM doit mobiliser des troupes pour vous défendre. Des ressources pour vous guérir ou vous nourrir, s'il y a une épidémie ou une famine... »
- « Un investissement peu rentable, si vous restons des ploucs à leurs yeux. Mais si nous montrons notre véritable richesse, nous sommes alors des ennemis. »
- « C'est à peu près ça. »
- « Alors, pourquoi tu luttes autant ? Lave-toi les mains de nous. Les causes désespérées, ça ne semble pas être ton passe-temps préféré. Alors, pourquoi t'acharner à vouloir nous sauver, contre le bon sens, au risque de t'opposer à ton Gouvernement ? »
- « Parce que je veux faire la bonne chose. Pour vous comme pour le GM. Laisser le Conseil et les Dragons mettre la main mise sur Skypiéa, ce n'est pas un cadeau, c'est... c'est donner une hache à un tueur à la hache. »
- « … et comment pouvons-nous être sûrs que tu ne t'opposes pas au Gouvernement juste pour lui faire la nique ? »
- « … parce que je suis Révolutionnaire. »


Expliquer ce qu'était la Révolution. Des hommes et les femmes engagés dans une lutte apparemment perdue d'avance. Ces hommes et ces femmes, leurs buts, leurs moyens. Comment j'étais venue à rejoindre leur « armée ». Et comment cela faisait de moi une opposante au GM, certes, mais une opposante réfléchie.
- « Si mon but était de juste embêter le Gouvernement, je serais pirate, avec mes propres règles. Si j'étais venue avec ce genre de motivation dans la Révolution, je n'aurais pas été acceptée. Parce que la Révolution n'est pas là pour jouer les gros bras et jouer au chat-et-la-souris avec la Marine. On n'est pas là pour prouver qu'on en a une plus grosse. On s'oppose méticuleusement aux travers du système, on essaye de réparer les torts commis, et de changer depuis l'intérieur les choses. »
- « Ça n'a pas l'air de fonctionner. »
- « Oui, c'est un travail de longue haleine. C'est très peu motivant et on n'en tire aucune gratification. Pour chaque victoire minime, c'est la défaite sur trois champs de batailles essentiels. »
- « Pourtant... pas une seule fois tu n'as mentionné cette Révolution dans tes plans. Ils pourraient venir ici et nous défendre, non, tes copains révolutionnaires ? »
- « Vous vous retrouviez mêlés à un combat qui ne vous regarde pas.. »
- « Bah, ça nous regarde, non ? Qu'on le veuille ou non, le GM est arrivé ici. Et il n'est pas près de partir. »
Je haussai les épaules, un peu désabusée.
- « A mon avis, vous n'êtes pas prêts pour choisir un camp. Ça serait mal vous conseiller que de vous dire de rechercher une alliance avec la Révolution.. »
- « Ils profiteraient de nous, comme le GM le ferait ? »
- « Pas consciemment, et pas de la même façon. Ils vous maintiendraient dans une certaine ignorance, tout en profitant des avantages de Skypiéa. N'oubliez pas qu'ils sont en guerre, et nécessité fait loi, parfois, quitte à s'opposer à l'esprit même de la Cause.
L'un dans l'autre, vous ne seriez plus maître chez vous. Et je crois que c'est ça, que je veux pour vous. Que vous arrêtiez vos disputes de bac à sable et que vous rentriez à l'âge de raison, pour qu'un jour, vous soyez assez adultes pour choisir quoi faire de votre vie. GM, Révo ou indépendant, ou même GM, le choix doit vous appartenir. Protéger les populations, pour moi, ce n'est pas décider pour eux. »

- « Et tu n'as pas l'impression de trahir la Révolution, en refusant à tes camarades l'avantage que Skypiéa pourrait leur offrir ? »
- « S'ils pensent qu'agir pour le bien des peuples, c'est être anti-révolutionnaire, alors à ce rythme, je ne suis plus révolutionnaire. »

Une brève série d'applaudissement stoppa la discussion. Sortant des ombres entourant la place où nous étions réunis, un groupe se manifesta. A leur tête, deux hommes, un Shandia sans le moindre doute et...
- « Sanji Gote, gente dame, pour vous servir. Ange de Skypiea, co-leader de la Lune Noire... et allié d'un certain Rafaelo Auditore. » Il se présenta avec une petite courbette. « Alincourt, tu as pris un sacré coup de vieux. » Pff, ce « Dieu » avait provoqué des animosités par dizaines, apparemment. Tu parles d'un guide spirituel...
- « Ce sont tes pétitions. Ça m'a épuisé, d'avoir à les ignorer. »
- « La Lune Noire ? »
- « Qu'est-ce que vous fichez ici ! On ne vous pas invité ! »
- « On s'est invité tous seuls. On a pensé que c'était une bonne idée, de venir compléter l'alliance. » répliqua le grand brun baraqué, avec autant d'amabilité que sa compatriote Shandia.  
- « Alliance, quelle alliance ? »
- « Oh, celle avec les Sélénites. Rafaelo nous a fait faire la paix. Il a a dit que c'était le moment de mettre de côté nos disputes et de se mettre à la place de l'autre, tout ça. » continua l'Ange qui dévisageait Alincourt.
- « Tout arrive pour une raison, et il arrive parfois que cette raison est que tu es idiot et prends de mauvaises décisions... »
- « Toujours en colère contre moi ? Ou tu détestes toujours aussi aveuglement les Sélénites ? Tu sais, parfois, il faut savoir apprendre à lâcher prise. Voir les choses sous un autre angle. Faire preuve d'initiative. D'innovation. »
- « Tu sais, Sanji, le plus difficile dans l'ouverture d'esprit, c'est la gestion des courants d'airs... »
- « Euh... J'ai raté une marche... Il est où, Rafaelo, dans tout ça ? »
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Le discours s’était éternisé. La toile de Shaïness se tissait méticuleusement. Il avait beau la savoir papillon, l’araignée lui aurait très bien convenu. Ses fils, sa verve. Peut-être que sa phobie des arachnides l’avait menée sur cette voie. La beauté d’un lépidoptère, les motifs et rosaces sur les écailles avaient de quoi attirer l’attention et l’admiration. Alors que l’assassin se perdait dans ses contemplations absurdes sur les formes peintes sur les ailes de Shaïness, il perdait le fil du discours de la jeune femme. Petit à petit, les rouages s’accordaient. Il fut ramené à la réalité par une œillade insistante de Dieu dans sa direction. Alincourt lui offrit un regard mesuré, tandis que Manguélita ne semblait pas l’avoir remarqué. Il ne la connaissait pas mais tout lui portait à croire que c’était en ses mains que Shaïness avait reçu ses contusions. Chose pour laquelle il la jugeait avant même de la connaître. Elle ressemblait beaucoup à Tenna en apparence et en gestes. Puissante, déterminée. Une Shandia éduquée par des Shandias. Puis aux bords de sa conscience, il sentit un fourmillement. Comme à chaque fois qu’il ouvrait ses oreilles au monde qui l’entourait. À se demander ce qui pouvait lui échapper. Trop de choses, comme toujours. Car Tenna, Sanji et Amaspa étaient là. Environ 3 heures plus tôt que ne l’aurait jamais envisagé l’assassin. Comme de juste, la Cipher Pol s’en étonna et posa la bonne question.

« Je suis là. » fit-il, atterrissant dans une gerbe de fumée aux côtés de Sanji.

Dieu esquissa un petit rire mesquin tandis que Manguélita dégainait son arme, surprise.

« Paix, paix. Je suis de votre côté. Alincourt pourra en atester. » argua l’assassin, refusant d’attribuer son patronyme devant le susnommé.

Tenna grommela quelque chose qui avait un lien entre un quelconque dieu et un coup de bâton bien placé puis vint se mettre aux côtés de l’assassin.

« Rafaelo parlait de temps et d’urgence alors nous avons fait vite. Pas le temps pour les blagues. C’est la guerre. Enfin … c’était. » continua le Shandia, en rendant son regard colérique à Manguélita.

« Je ne comprends pas. C’est qui lui ? Et … comment il est arrivé ici. » fit la chéfesse, terre à terre et étant la seule à ne pas avoir rencontré Rafaelo.

« Lui c’est Rafaelo Di Auditore, As de la Révolution et il a tué Medhine, Skippy. Oh, et il a aussi fait s’écraser le Maquis Corse sur le camp des Illuminés. » commenta une donzelle à l’arrière de Tenna et Sanji, avec un ton brin caustique.

Une angette aux ailes et cheveux bleus se fit une place au milieu de toute la petite tribu. Voilà qu’Amaspa se mettait à le dénigrer elle aussi. Rafaelo se passa une main lasse sur le visage. Manguélita leva son arme vers la Sélénite, arguant qu’elle ne ferait jamais alliance avec une pourriture de son acabit puis rapidement, tout le monde en vint à tirer son arme. Restèrent Shaïness et Rafaelo, à se regarder en soupirant. L’assassin haussa les épaules, contrit, puis se tourna vers la Lune Noire.

« Si on peut éviter de relancer le débat, ça serait sympa. Et Amaspa, tu pourrais pas agir en ‘vaincue’, ça serait pas trop te demander ? Pourrais-je au moins être tenu au courant de vos arrangements avant de … ? » commença l’assassin, pendant que Dieu explosait de rire derrière lui.

« Vingt c… ah ah ah ! » exulta l’Ange à l’humour si … particulier.

L’assassin soupira de plus belle.

« Les Sélénites entrent dans la Lune Noire dès aujourd’hui. Au nom des trois peuples, la Lune Noire forgera une nouvelle et unique race qui protègera Skypeia jusqu’à son dernier souffle. Pour rémission de leurs actes, les Sélénites deviendront des skypéens et seront dès à présent soumis à nos lois. » répondit Sanji, adressant un regard noir à Dieu.

« Si tu dis que vous allez dorénavant vous appelez la Lune Blanche, je te frappe. » menaça l’assassin, pointant un doigt un doigt inquisiteur sur l’ange.

« Non, ça ne nous est pas venu à l’idée, pourquoi on s’appell… » répliqua le blond, arquant un sourcil.

« BIEN. Ahem. Bien. Donc … j’en étais où déjà. Ah oui. Donc, les termes à discuter, si j’ai bien suivi, sont d’une entente entre Lune Noire et le MST … ou peu importe le nom qui sera choisi. Et il va falloir faire vite, Shaïness. Ils arrivent bientôt. » fit Rafaelo, cherchant le regard de la jeune femme.

C’était plus tôt que prévu, et la Lune Noire était visiblement déjà au courant. C’était vraisemblablement la raison qui les avait poussés à venir aussi vite. Vingt contre un que les autres marines allaient être mis au courant sous peu, et Shaïness dans la foulée. Ce n’était l’histoire que de quelques heures, mais le temps pressait beaucoup trop. Shaïness avait estimé la venue de Maselfush à 3 jours plus tard. Pour l’heure, ils étaient là depuis deux jours et demi. Leur arrivée et la réunion. Le séjour chez et l’alliance avec la Lune Noire. La chute de Médhine et la deuxième journée. Puis la défaite des Sélénites et leur incorporation dans la Lune Noire. Deux journées et demies bien chargées.


Maudit Hebieso et ses phrases sibyllines. L’assassin aux talents divinatoires s’était seulement contenté de lui laisser un message énigmatique sur les flux du destin et du plaisir de l’imprévu avant de lui dire qu’un dragon qui n’avait de dragon que les noms et la longueur de ses crocs avides se ferait voir avant dès le prochain zénith ou peu s'en fallait …
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J'aimais Rafaelo.

Parfois, il faut se rappeler des choses essentielles. L'habitude des choses fait qu'on oublie la saveur des petits détails quotidiens, que trop souvent on prend pour acquis.

Oui j'aimais Rafaelo.

Une bonne chose que je m'en souvinsse.
Sinon, je lui aurais éclaté la tronche. Je ne savais comment j'aurais fait, mais foi de Shaïness, j'aurais réussi.
De tous les moments possibles pour ne pas avoir su gérer ses copains, et ne pas les avoir empêchés débarquer comme un cheveu sur la soupe, il avait choisi CE moment précis. Celui si délicat du dénouement. J'avais fait une belle révélation, et il ne restait plus qu'à ficeler tout ce beau monde et nous avions une belle et grande famille. Mais non. Voilà que se rameutaient les fils prodigues des deux clans, traînant derrière eux la lie de l'angélité – les shandias n'étant, je le rappelle, pas plus humains que vous et moi. Enfin, moi. Vous, je ne sais pas.
Les Sélénites.
L'art de faire mauvaise impression en deux secondes.
Ça devait être génétique à ce niveau.

Je retournai à Asmapa le regard d'une femelle dominante qui se savait en position forte sur son territoire. Elle était peut-être jolie, et exotique dans son genre, mais qu'est-ce qu'elle était chiante. Ça se voyait à l’œil nu. Parole d'experte. Il fallait une murène pour en détecter une autre. Elle et sa face de grognasse, je ne les encadrais pas. Une femme de pouvoir n'en acceptait pas une autre, même pas dans son ombre. Heureusement que Rafaelo lui rabattit son caquet. Et ce fut à ce moment que je compris réellement qui elle était : une Sélénite. Non que cela changeât grand chose à l'histoire.

Comme une réaction épidermique, mon irritation semblait se transmettre à la foule autour de moi. Ou alors, c'était moi qui étais sous l'influence des humeurs ambiantes. L'un dans l'autre, nous étions au cœur d'un maelstrom de négativité. Alincourt et Sanji avaient les plumes hérissées, littéralement, et Manguélita prendrait bille en tête celui qui survivrait au combat de coqs. Nous avions été à ça, juste ça, de vivre en paix. Il n'y avait vraiment que moi pour croire que cela allait fonctionner, que les haines centenaires seraient rendues muettes par le bon sens. A croire que jamais je n'apprendrai.

- « Allez, on se calme. » tentai-je de temporiser. On avait plus urgent. Surtout s'ils arrivaient. Ils ? Maselfush et son équipage. Il y avait aussi Kadren and co, qui allait revenir avec Gisèle et Valériane. On allait avoir l'air fin, tiens. C'était la foire d'empoigne et ça tournait à l'orage. Déjà je voyais des lames à demi-tirées, et il ne manquait pas grand chose à ce que l'acier fît une apparition, tranchant et rapide comme l'éclair. D'autres personnes semblaient partager mon trouble. Lullaby, une certaine Angèle, et un rouquin balafré qui s'avéra plus tard être un Sélénite. Comme quoi.

Ça montait, comme la mayonnaise. Ça aller tourner aigre aussi. Comme la mayonnaise.
Le gras, c'était peut-être la vie, mais ce n'était pas la mienne. Quand on a un tour de taille comme le mien, on apprend à détester la mayonnaise à vue. Comme pour les Asmapa et leurs faces de stéatopyge.
Le truc, c'est d'imaginer une vie sans mayonnaise. Je ne sais pas pour vous, mais ça faisait deux jours que moi, je n'avais pas dormi plus qu'une poignée d'heures, sans trop avoir mangé ou bu, ayant passé mon temps à traverser Vearth de part en autre entre camp GUANO et Shandia, à ramper dans des ruines, à me faire piquer par des araignées et à m'en prendre plein la tronche. Et on était en train de me retirer, là, directement sous mon nez, ma quantité annuelle de mayonnaise. Le peu auquel j'avais droit, la goutte que je m'accordais avec une demi-crevette.

- « MAIS VOUS ALLEZ LA FERMER, OUI ? » rugis-je alors, avec toute la hargne de la fashion-killeuse au régime forcé. Or, forcer la main à une Raven-Cooper, c'était dangereux. « JE SUIS GENERALEMENT POUR LE RESPECT DES INDIVIDUALITÉS MAIS LE PROCHAIN OU LA PROCHAINE QUI L'OUVRE, JE LUI FAIS RAVALER SES PRÉ-MOLAIRES !!! JE NE VEUX PAS SAVOIR QUI A FAIT QUOI ! LA SEULE CHOSE QUE NOUS ALLONS FAIRE, C'EST LA PAIX, ET ON VA LA FAIRE MAINTENANT !!! »

J'étais juste folle-furieuse, mais trop fatiguée pour mes habituelles extravagances diplomatiques. Les conditions me poussaient dans mes derniers retranchements. Et mon moi véritable, c'était Shaïness le papillon. Celle que je gardais jalousement secrète, car finalement, c'était encore celle que je connaissais la moins. Lentement, mes yeux s'assombrirent, reflétant mon humeur noire, et mes ailes irisées sortirent, presque éthérées.
Les Shandias et les Anges avaient une expérience amère des fruits du démon. Ener, celui dont on ne prononçait pas le nom, restait un point douloureux de l'histoire locale. Il avait détérioré les relations angesques-shandias jusqu'à cette guerre civile récurrente, et se voyait crédité de l'antagonisme des Sélénites. S'il était resté les pieds sur terre, ou sur nuages, sans aller emmerder les lunaires, on n'en serait pas là, très loin de là. Du coup, devant la révélation de ma nature, tous reculèrent craintivement, peureusement, hargneusement.
J'avais pour moi d'être un zoan. Un logia aurait, avec les tensions actuelles, été mis à mort à vue. Au moins cela aurait-il fédérateur : tous contre le logia. Il y avait bien Rafaelo, mais lui n'avait jamais caché qui il était. Et puis d'abord, Rafaelo n'était qu'un étranger, là pour son agenda révolutionnaire. Vous allez me dire, moi aussi techniquement. Mais moi, j'avais cette fâcheuse habitude de m'investir et de mélanger empathie et émotion. Mangrove me l'avait dit, Alincourt en avait profité, Phil aussi – mais lui était mort, et les absents ont toujours tort.

Je déversai mon trop plein d'émotions, et avec chaque mot, des torrents de phéromones. Peur et sympathie alourdissaient l'air d'autant de molécules indésirables. C'était comme rajouter des caisses de rhum à la Sainte Barbe durant un orage sec. Or, cela faisait longtemps que le temps local avait tourné aux grincements de dents produisant des étincelles.
- « Après plus de cinquante ans de guerre civile larvée, il n'y a plus de victime ! Que des coupables ! Dois-je donc vous juger en tant que tels ? Et tous vous passer par le fil de l'épée en guise de châtiment à vos crimes ? Voulez-vous me faire réellement comprendre qu'il n'y a rien à tirer de vous ? Ou peut-être dois-je comprendre que si je dois vous sauver, c'est en devant un tyran qui impose sa loi, sa paix ? N'êtes-vous donc capable que de vivre dans la servitude d'une idée ? Que ce soit celle comme quoi l'autre est l'ennemi, ou que je sache mieux que vous ? M’obligeriez-vous donc à sacrifier tout ce en quoi je crois, moi la révolutionnaire, pour vous sauver, de sorte que je deviendrais le monstre que je combats ? Je deviendrai comme le Conseil des Cinq Étoiles, ou pire, comme un de ses Dragons Céleste. Ainsi, à la place d'un Seigneur des Ténèbres, vous aurez une Reine. Non pas une ténébreuse. Mais aussi belle et terrible que l'Aurore, aussi traîtresse que la Mer. Plus forte que les Fondements de la Terre car je serai aux cieux encore plus puissante. Alors tous m'aimeront et désespérerons... »
Spoiler:

Pendant que je parlais, un vent invisible m'avait attrapée et désormais je lévitais au-dessus d'eux, prête à déverser toute la fureur du firmament. Honnêtement, j'étais à deux doigts de passer à l'attaque, et de leur parler la langue qu'ils comprenaient tous : la violence. Déjà j'avais tiré mes fils de leurs bobines. Une pensée me retint, cependant. Une pensée, ou encore une fois, mon orgueil. Je n'allais tout de même pas laisser des emplumés me dicter ma conduite non ? Allais-je me salir les mains pour ça ? Après tout, fallait-il vraiment les sauver d'un Dragon Céleste, si c'était pour tomber sous la coupe de la Révolution aveugle, au prix de ma déchéance ? Allais-je laisser cette part de ténèbres en moi, celles qui m'avaient contrôlée à Alabasta, s'installer définitivement ?
Ce n'avait pas été une pensée comme les autres. Nous ne le savions pas encore, mais elle venait de Rafaelo, qui m'avait transmis l'espace d'un instant tout son dégoût de ce que j'allais faire. Nos âmes étaient accordées, en écho l'une de l'autre. Il avait peut-être perdu accès à ses souvenirs, mais son âme s'en souvenait et mes tourments réveillaient les siens. Le Haki donne la perception des autres. Généralement l'autre qui sera. Aujourd'hui, il me donna celui qui avait été. Et ce fut comme la voix de la raison.

Avec un long soupir, je me repris. Cela aurait pourtant été libérateur que de laisser cours à toute ma puissance. Depuis le BAN, je n'avais jamais réellement testé mes limites. Et encore, j'avais été extrêmement prudente à cette époque, pour ne pas trahir mon fruit du démon dont ma hiérarchie ignorait tout. À Skypiéa, je m'étais mise à nue. Plus rien ne me retenait vraiment. Rien d'autre que ma conscience. Elle avait bien choisi son moment, celle-ci, tiens. Je repris pieds sur terre, rangeant mes ailes, redevenant humaine.
- « Bon, maintenant que tout le monde est calmé... vous allez peut-être vouloir vous parler comme des êtres civilisés et commencer à élaborer un début de gouvernement commun. Kadren et les Messies ne vont pas tarder, et il est hors de question que je laisse ce soleil se coucher sans qu'un accord d'amitié soit signé. Vous vous démerdez comme vous voulez, mais vous faites front commun. »

Puis j'allais m’asseoir sur un rocher – toujours pas de coussin – et je boudai jusqu'à ce que Rafaelo m'apportât un verre d'eau.
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C’était un non uniforme et franc. L’image qui avait gagné le cœur de Shaïness avait déteint sur l’assassin à lui en faire prendre conscience de ce qu’il aurait lui-même pu devenir. Cette part d’ombre jugulée par de fades préceptes moraux. Une façade derrière laquelle se cacher pour ne pas assumer ses actes. L’assassin versa sa fumée sur son cœur, enserrant sa tunique et luttant contre cette force vitale qui perturbait sa volonté. La force de Shaïness l’avait ébranlé, mais ces sentiments étaient tout sauf ceux de Rafaelo. C’était une gangue qui l’enserrait. Qui le jugulerait et le forcerait à aller là où il ne le désirait pas. Sa Cause ne le permettrait pas. Quelle bonne idée d’être aussi rigide malgré la perte de tout ce qui avait façonné son identité … C’était d’une telle facilité. Céder à la violence, faire le choix que tous faisaient. Ne devenir qu’un loup parmi les loups. Mais quel intérêt ? Quelle volonté ? C’était un jeu pathétique auquel seuls les faibles s’adonnaient. Et les faibles … il fallait des forts pour les aider. Non pas les dominer. Aider. Diriger dans la bonne direction. Un architecte du destin. Lentement la gangue qui martelait sa conscience se retira. L’instant où l’assassin comprit que quelque chose le liait avec Shaïness. Un lien indéfectible qui allait au-delà des mots. Une motivation partagée ? Il se sentait en accord avec les pulsations qui émanaient de la voix de la jeune femme. Mais c’était quelque chose qu’il ne convenait pas d’élucider pour l’heure. Il fit un pas. Posa sa main sur son épaule et les ténèbres qui enchâssaient son esprit s’envolèrent. Le contact avait cette force de chasser l’insurmontable. Il soupira, reprenant ses esprits et sentant qu’il en était de même pour Shaïness. Ses phéromones étaient … terrifiantes. Il sentait encore son cœur battre la chamade sans pouvoir l’arrêter.

« Elle a raison. Il est temps de mettre de côté vos petites alliances rebelles et de vous comporter en nation. Votre guerre n’a fait que trop de victimes. Vous êtes quoi ? À peine quelques milliers de survivants sur toute l’île ? Comptabilisez vos pertes. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Il serait temps de comprendre que chacun des vôtres a assez perdu dans vos querelles intestines. » commença-t-il pendant que Shaïness s’en allait se calmer sur un rocher, non loin.

« Ce que vous voyez, c’est un femme dont le seul intérêt est de vous éviter ce qui est déjà arrivé à tant d’autres nations. Vous avez la chance d’être réunis, d’avoir des alliés et d’être au courant de ce qui vous attend. L’information est un pouvoir que vous détenez. Alors, chers Skypeiens. Valez-vous la peine d’être sauvés malgré vous ? Oui, je suis arrogant. Comment pourrais-je penser faire une différence dans la lutte contre le Gouvernement sinon ? Comment pourriez-vous vous tenir ici sans rougir de honte devant votre attitude si vous ne l’étiez pas ? » poursuivit l’assassin en s’en allant sous une tenture pour attraper un broc en terre ainsi que la chope la moins poussiéreuse.

« La différence, c’est que vous êtes aujourd’hui plus unis que jamais. Demandez-vous pourquoi. Demandez-vous si l’ennemi commun vous fédère ou si c’est de vos ressemblances que vient cette union. Vous êtes les leaders et hommes, et femmes, les plus respectés de cette nation. Si vous pensez que le peuple doit agir selon votre guise, c’est que je devrais vous tuer comme je l’ai fait avec Skippy et Medhine. Oui, c’est une menace. Shaïness que vous voyez là-bas est une femme de cœur et de passion. Moi, je suis un assassin. Je trouve les rouages qui coincent la machine et je les fais sauter. Pensez à cela dans votre décision. Vous n’êtes que des pièces interchangeables. Vous ne valez pas mieux que les autres. Tout comme je ne vaux pas mieux qu’eux. Vous n’êtes que des hommes, que des anges. Que des individus. Et les individus n’ont pas vocation à considérer les autres dans leurs prises de décision. Pourtant, c’est aujourd’hui que vous devrez vous libérer de cette mentalité. Aujourd’hui que vous devrez vous unir pour faire front face au véritable ennemi : la bêtise humaine. La vôtre, la mienne. La leur. Devenez plus que de simples individus : devenez une nation. Libre de choix, libre de droits. Une unité débordante qui à elle seule vous octroiera un avenir. Contactez les Messies. Qu’ils viennent sur le champ. Notre ennemi arrivera demain. » conclut-il en s’éloignant vers Shaïness, dont il sentait la tension et l’énervement.

La troupe resta silencieuse, dardant des regards sombres sur Rafaelo. Il avait pris le temps de leur expliquer le fond de sa pensée de manière calme. S’ils avaient eu un aperçu de ce que pouvait être la jeune femme, ils prenaient mesure de ce qu’était au fond Rafaelo. Ce n’était pas un homme bon. Ce n’était pas un homme clément. C’était le mal nécessaire. Du moins c’était ainsi que lui-même se voyait. Sa Cause était juste, ses moyens étaient discutables. Mais le résultat serait là. Il s’avança vers la donzelle.

« Hey, mignonne. » lui fit-il en s’accroupissant à ses côtés.

Pas même un sourire. Au moins il avait essayé. Il lui tendit un verre d’eau et fit un geste du pouce vers les hurluberlus qui discutaient pour la première fois ensemble. Pas besoin de tendre l’oreille pour savoir de quoi il en retournait.

« Je les ai un peu secoués, mais c’est pas à moi que revient la palme sur ce domaine. Bois, ça te fera du bien. T’es sûre que ça valait la peine de tout leur montrer ? Je veux dire … ils ont compris ce dont t’es capable maintenant. Je pense que personne le savait avant ça. Ils ont pris du plomb dans la cervelle … Mais ils restent des petits chefs. Il va falloir qu’ils acceptent de passer la main et de considérer d’autres avantages que ceux de leurs ethnies respectives. » poursuivit-il, cherchant le regard de Shaïness.

« On s’en sortira. Le fait que Maselfush arrive demain changera rien aux plans. C’est dans l’adversité qu’on se réalise le mieux. Dis-toi que le temps des coups et des pleurs est terminé. Je ne serais pas loin si jamais tu as besoin d’aide. La seule chose que je peux faire pour toi, maintenant, c’est de t’aider à penser à autre chose. Laisse-les faire leur soupe, pour une fois qu’ils s’accordent autour du même son de cloche. On est des étrangers ici, et ils auront du mal à l’oublier. Ce qui leur manque … c’est de comprendre qu’ils ont besoin d’un point de vue extérieur. On a les anges, on a les shandias et on a les sélénites. Trois troupeaux d’aveugles. » soupira l’assassin en se relevant, faisant craquer ses rotules.

Malgré son fruit, il n’était pas libre des affres de la condition humaine. Ses articulations lui faisaient mal, son épaule était encore moulue des coups de Medhine. La seule chose qui changeait c’était la tendance qu’avait son sang à s’évaporer au lieu de couler … et ses naseaux à souffler de la fumée quand il était énervé. Ce qu’il fit, assurément. Rafaelo se passa les mains dans les cheveux, tirant sur les racines pour décoller le mal de tête qui n’allait pas tarder à venir. Il avait besoin de repos. Tout comme Shaïness.

« L’heure est venue, ma grande … l’heure où tu changeras l’histoire de cette île. Moi, je ne suis qu’un assassin. Je te regarderai des ombres comme toujours. Et puis je les ai menacés de leur arracher la gorge, donc ça pourrait mettre une petite tension dans cette négociation. Je vais aller jeter un œil sur tes camarades de la Marine en attendant, pour voir comment ça se trame de ce côté-là. On est au bout. Et il te reste encore le plus dur à faire. Je ne serais pas là, mais pas loin. Si jamais, tu sais comment m’appeler … » lui sourit-il, avant de tapoter la poche de son gilet où il avait rangé son denden qui trouva amusa de sortir ses yeux à ce moment précis.

S’assurant que Shaïness allait mieux, il s’étira. Tenna, de son côté, lui adressa un hochement de la tête, assez discret pour que seul lui puisse le percevoir. Le vieux Shandia était homme à comprendre les manœuvres de l’assassin. Tout comme il comprenait au mieux l’alliance qui se dressait là. Le besoin, aussi. Rendant son hochement de tête à Tenna, Rafaelo disparut dans une explosion de fumée qui s’en alla loin dans la frondaison des arbres, ne laissant plus que Shaïness, le broc et la chope. Il y avait une raison pour que l’assassin se soit soudainement volatilisé. Une raison qui indiquait de bien mauvais augures. Car à quelques kilomètres de là, sur Vearth, une troupe militaire et armée jusqu’aux dents avait débarqué. Et à des lieues de son emplacement supposé, le Lieutenant-Colonel Zieger faisait cavalier seul. L’assassin espérait que sa tension ne soit pas transparue, mais c’était certainement peine perdue.
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J'avais entendu sans avoir écouté les paroles de Rafaelo. J'étais encore terrifiée par ce désir implacable qui m'avait envahi, celui de m'imposer à ces gens, par la force, d'imposer ma vision. C'était terrible. Je ne me reconnaissais pas.
- « Tout leur montrer ? Je n'ai fais que leur parler le langage qu'ils connaissent. J'ai fait l'étalage de mes pouvoirs. Mais ce n'est en rien la somme de qui je suis. Oui, je suis révolutionnaire, oui, je suis une femme, oui j'ai un fruit du démon, et oui, je n'hésiterai pas en m'en servir. Mais est-ce là la fin de tout ce que je suis ? Non.
En dépit de tout ça, je n'ai pas usé de mes pouvoirs. J'ai trouvé une autre voie. Une autre voix, peut-être. Je … j'en suis arrivée au point où je ne sais plus. Je vois le chemin à prendre, mais j'ai l'impression d'être la seule.  »

J'étais épuisée. Physiquement comme mentalement. Le verre d'eau me calma,  un peu. J'aurais voulu pouvoir me plonger dans une grande baignoire et n'en sortir que lorsque ma peau aurait flétrie, serait retombée et repoussée.

- « L'adversité ? Je hais l'adversité ! Je suis une espionne moi, je vis dans l'ombre. Le stress, ce n'est pas bon pour moi ! Je suis une planificatrice ! Je sais que je ne peux pas tout contrôler, mais je ne peux pas vivre dans l'incertitude. Le moment présent, c'est bien cinq minutes, mais voilà ! Il s'agit de gens, Rafaelo ! De gens vivants ! De leur vie. Pas simplement de la cuisson du riz ! Comment peut-on vivre comme ça ? Se contenter d'espérer ? Se contenter d'être des étrangers et pas autre chose ?  »

Tous mes mots sortaient en se bousculant, et je savais que ce que je disais n'avait pas beaucoup de sens. A croire que même mes pensées ne m'appartenaient plus. Je sentais des larmes monter, des larmes de peur, d'impuissance, de frustration, de désespoir. Elles glissaient et s'entrechoquaient, comme autant de braves soldats qui mourraient au combat. Quel combat ? Bah, une cause en valait bien une autre. Je finis par m'accrocher à mon compagnon d'infortune, cherchant un confort, un point d'ancrage. Pour tout ce que je n'étais pas était non seulement une douleur, mais un échec. Je dérivai.
Puis il y eu ce moment où tout bascula. Où mon univers restreint vola en éclats devant mon égoïsme. Mais ce fut surtout ma main qui vola, et qui s'encastra dans la figure de Rafaelo. Cette fois, les larmes étaient rageuses.
- « Plus jamais, tu m'entends ? PLUS JAMAIS. Plus jamais tu ne diras de toi que tu n'est que quelque chose. Quoi que ce soit. Qu'un homme, qu'un révo, qu'un assassin. Plus jamais tu te réduiras ! Plus jamais, tu m'entends. Tu es ce que tu es, et toi au moins, tu es quelque chose. Si tu me redis ça, je te réduis à l'état de néant, et pour de bon, cette fois-ci ! Tu n'as pas le droit de m’abandonner, de me dire que moi, je vaut quelque chose et pas toi ! Crétin ! Idiot !  »

Mais au moins avait-il la machine en marche. Je n'étais plus prostrée sur mon rocher, à me lamenter sur tout ce que j'étais ou pourrais être, ou n'avais jamais été.
Lorsque Kadren revint, avec Valériane et Gisèle, j'étais prête. Pendant tout le temps de leur approche, j'avais attendue, droite comme un « i », suivant leur progression à travers un flux de haki qui mentait encore de précision. Cet exercice m'occupa l'esprit et me tint à l'écart des discussions diverses entre les trois tribus. Quelque part, les paroles de Rafaelo, les trois aveugles, m'avaient pensé à cette sculpture des singes dont l'un n'entendait, l'autre ne voyait et le dernier ne parlait. L'inutilité dans sa splendeur dévoilée. Ce que je pouvais détester cette image.

Tenna m'approcha au final, alors que la Marine n'était plus qu'à quelques minutes d'ici.
- « Et on fait quoi, en fait ? »
- « On ? Qui ça, on ? »
- « Nous. Et vous. Et ceux qui arrivent. »
- « Vous, je ne sais pas. Moi, c'est clair. Kadren et moi avons un traité d'amitié pré-rédigé. Il est honnête, je l'ai regardé en détail. Ça n'engage vraiment personne à rien, si ce n'est à reconnaître l'existence de l'autre, de reconnaître ses frontières et de s'engager à une non-agressivité mutuelle. Ce soir, ce traité sera signé par le GM, représenté par le Colonel et moi-même, et une tribu. Shandia, Héailleutou, GUANO, Sélénite, Lune Noire, Skypiéen, finalement, ce n'est pas à moi que ça importe. Tout ce que je sais c'est qu'il y aura un nom sur ce papier, et c'est ce nom que je défendrai de toutes mes forces. »
Et Tenna savait que ce n'était pas une figure de style. J'étais capable de beaucoup, et encore plus si on prenait en compte Rafaelo, dont l'ex Shandia connaissait parfaitement les capacités.

Au bout du compte, nous avions eux, Raf et moi, raison de leur obstination. Ce traité d'amitié, ils l'avaient compris, signifiait la mort de tous ceux qui ne le signaient pas. Or, il n'y aurait qu'un seul paraphé au côté du sceau du Gouvernement. Un nom pour les gouverner tous, un nom pour les trouver, un nom pour les amener tous, et dans les ténèbres les lier, au pays de Vearth où s'étendent les ombres. Tels Shaïness et Rafaelo, tels les révolutionnaires à venir.

Gisèle, la voix des deux Messies, commença par protester devant cette assemblée peu orthodoxe. Elle voulut rappeler que c'était Héailleutou, et personne d'autre, qui était allé chercher la Marine, et donc le seul gouvernement local à même de signer cet accord.
- « Phil est mort. » dis-je soudain à voix haute, lui coupant un peu la parole.
- « Pardon ? »
- « Il est mort. Tué par des gens, ici, sur cette île. Des gens qui voulaient la guerre. Phil n'était pas pour. Loin de là. Il voulait vivre. Il n'a pas hésité pour ça à m'abandonner à mon propre sort, à me laisser seule avec un petit vieux pas vaillant. Pourtant, quand vint le moment de mourir, il a su retarder mes poursuivants. Alors, était-il un héros, ou un salaud ? On ne le saura jamais, il est mort. On peut bien entendu faire parler les morts. Leur faire dire ce qu'on veut. Je pourrais vous faire culpabiliser, Gisèle, avec sa mort. Vous raconter n'importe quoi, pour que vous acceptiez de faire partie de cette union. Mais aujourd'hui, je pense que c'est aux vivants de parler. Tant qu'ils peuvent encore. Donc, essayez de dire des trucs intéressants, Madame la Messie. Vous êtes devant une assemblée de vos semblables. Ici, tous ont du sang sur les mains. Et vous n'êtes en rien différente. Alors, avant de dire un mot de plus, réfléchissez bien. Réfléchissez aux vivants, et à ceux qui souhaitent le rester. Si vivre les fers aux pieds, c'est vivre tout court, soit. Mais certains pourraient en vouloir plus. Et--- »

- « ASSEZ ! » hurla Valériane. « C'est bon, on a compris. Nous sommes peut-être des anges, mais nous ne sommes pas idiots. Phil... Phil avait une vision. Je n'étais pas forcément d'accord avec lui, mais il avait toujours été consistant avec le fait que jamais le Gouvernement ne devait s'ingérer dans nos affaires. Il était contre l'envoi d'Amaury de Danemark, tout comme il était contre se mêler à ces histoires de Vearth. Ce n'était pas un héros. Juste un ange. Un ange que je voudrais pleurer en paix, car il n'était pas plus bon ou mauvais que nul autre ici haut.
Je ne suis pas une politicienne. Je sais très bien que j'ai été élue au poste de Messie par pur hasard, avec un zeste de manipulation. Pendant des mois, j'ai vu et entendu tout ce beau monde parler, du passé, du futur, de ce qu'on devrait faire, et comment le faire, pour en finir avec les autres. Personne n'a jamais pensé à demander ce qu'on pourrait faire pour en finir avec soi-même...
Moi, je suis prête à renoncer à mon poste de Messie. A ma race. Je serai ce que vous voulez, tant que je resterai moi, Valériane, la mère. J'ai deux enfants, et je veux qu'ils grandissent, en paix. Sans menace intérieure ou extérieure. Si je dois pour cela me mettre une plume dans le cul et pousser le cri de la chouette trois fois tous les matins, et me faire appeler Sélénite ou fille de Vearth ou Salamandre Cosmique, ça me va parfaitement. Je deviendrai ce que vous voulez, Héailleutou deviendra ce qu'elle doit devenir, pour non plus survivre, mais vivre. Alors, qui de Shandia ou de je ne sais peut me promettre ça ? »


Pour une non politicienne, Valériane en sécha plus d'un. Moi la première. Comme quoi, le courage venait parfois des personnes que trop souvent on ignorait, on méprisait. Après tout, c'était ça, la marque des héros : ces gens que rien ne prédestinaient à la grandeur qui sortaient de leur rang pour guider ou faire.

- « Puisqu'un consensus semble atteint.... » Kadren avait le bon sens bien concret du militaire de terrain. « … à quel nom est-ce que je mets le traité ? »
Alincourt ouvrit la bouche et pour la première fois, il y eut un mouvement collectif commun. Certes, il consista à bâillonner l'ange pour l'empêcher de parler, ce qui n'était pas forcément une preuve de démocratie.

Spoiler:

- « Le peuple de Skypiéa. » annonça Manguelita. « Les Skypiéens. »
- « Qui signera le traité ? » s'enquit le Colonel, penché sur le parchemin, remplissant ici et là les trous.
Cette simple question me donna des sueurs froides. C'était là que ça allait se corser. Techniquement on attendait UNE signature. Celle du chef du gouvernement.

Les parties se levèrent, se contemplèrent.
- « En tant que Shandias, nous représentons la minorité donc nous sommes les plus à mêmes de faire preuve d'impartialité ! » commença Manguélita en se levant comme une furie.
- « Une Shandia à la tête ? Que la Lune me tombe sur la tête ! » railla Alincourt.
- « Ça peut s'arranger... » susurra Asmpa d'un ton mielleux.
-- « Parce qu’un Ange c’est mieux ? » répliqua en même temps Sanji, plus pour répondre à Alincourt qu’autre chose, sans même se rendre compte qu'il s'auto-insultait par là-même.
S’ensuivit un brouhaha où les différents membres important élevèrent chacun le ton, à son tour, dans l'espoir de faire entendre son opinion, le seul qui était à suivre naturellement. À tel point que j'y mis aussi du mien, exaspérée par cette énième dispute.

Spoiler:

- « Je vais le faire. » fit une voix encore inconnue du soldat anonyme. « Chris Entème, connétable de Skypiéa. »
- « Euh.... » Devant l'air indécis de la troupe, Kadren hésita. « Et sur quelles légitimités s'appuie ce titre ? »
- « J'ai été membre d'une tribu qui n'existe plus, mais j'ai partiellement élevé celui qui mena le GUANO pendant tant d'années. J'ai fondé Héailleutou et je suis amoureux fou depuis des années, avant même votre naissance sûrement d'une Shandia. Est-ce que quelqu'un me conteste le droit de diriger de façon honnête et impartiale nos vies, jusqu'à ce qu'on s'accorde sur une forme plus poussée de gouvernement ? …. Est-ce que quelqu'un a déjà envie de s'y coller, à ce poste ? »

Chris jeta à l'auguste assemblée un regard dégoûté, celui du père qui constate les dégâts causés par ses gamins... ou ses chiots. Si Rafaelo sentait le poids des années, que dire de ce vénérable grand-père ? Il incarnait à lui seul toutes les causes et les raisons de ce conflit. Un Ange, né en tant que paix, ayant grandi si la guidance souple de l'ancien Dieu, le Mentor d'Alincourt. C'était lui qui avait d'ailleurs incité la famille Bergerac a confié à Dieu la garde de ce turbulent gamin. Il avait aimé une Shandia. Il avait vu la guerre reprendre, il avait vu descendre les Sélénites, il avait vu Giant Jack tomber et enfin, il avait fondé Héailleutou, et donc était quelque part à la genèse du GUANO ce que le Bing Bang était aux molécules.
Il avait mis sa vie aux services des siens et tout cela s'était soldé par la mise en scène de sa propre mort, de peur de tomber sous la lame d'un rageux local.
Il était fatigué. Il n'avait plus l'âge pour ça. Il n'attendait plus rien de la vie, si ce n'était la mort.
Pourtant, il était le seul à vouloir encore faire avancer les choses. A vouloir y croire, jusqu'à en accepter le poids cruel sur ses frêles épaules.
Le sentiment de culpabilité qui naquit fut généralisé. Pas un qui ne se sentit touché par cette preuve de dévouement ultime. Pas un qui ne se sentit piteux. Sanji approcha enfin Chris, qui se tenait, vieillard chenu, à la croisée des chemins, entre Skypiéens et Gouvernement Mondial.
- « Je vais vous aider à porter ce fardeau, Chris Entème. Aussi longtemps que vous aurez à le porter. »
- « Si par ma vie ou ma mort je peux vous protéger, je le ferais. Mon bras est vôtre. »
- « Et mon bouclier est vôtre. »
- « Et mon vin ! »

Spoiler:

Chris, connétable de Skypiéen, signa et fit entrer son groupement d'îles dans l'aire du Gouvernement Mondial.
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La signature du traité d'amitié marqua le relâchement collectif. C'était fait. Les dés étaient jetés. Cependant, la présence de Kadren empêchait vraiment tout ce beau monde de se laisser aller. Mon discours, mes révélations... mon coming-out... faisaient que j'étais acceptée, mais que tous se méfiaient de Kadren qui représentait le Gouvernement Mondial dans tout ce que je combattais. Alors même que j'avais le plus profond respect pour l'homme, que je pensais être un type bien, avec le cœur à la bonne place.

A ma plus grande surprise, Lullaby et Alincourt convergèrent vers le Marine presque immédiatement, le prenant à part pour « faire connaissance ». C'était bien digne de ses deux stratèges, tiens.  Soutirer le maximum d'information sans rien donner en échange sur Skypiéa. Le tout d'un ton suave, flatteur. En tous les cas, voilà le Colonel bien occupé. Bientôt le trio s'éloigna un peu, sous prétexte de faire découvrir tel ou tel élément faune-flore de l'île céleste à son premier touriste, ou peut-être même de se faire faire une viste guider par LE spécialiste du Ptérodactyle. En bon Capitaine, Kadren était fier comme un pou de son navire. Et des comme ça, aucun ange n'en avait jamais vu. Pas en état de fonctionner, en tous les cas. Il valait vraiment le coup d'oeil.

Pendant ce temps, les tribus organisaient une petite fête impromptue pour célébrer la fin des guerres. Personnellement, je trouvais que c'était une très mauvaise idée, avec l'arrivée imminente de Maselfush, mais je pouvais comprendre le désire de fêter ça. En plus, ça ne pouvait que renforcer les liens entre les individus. Rien de plus universel que la gueule de bois. Et pour avoir fait le BAN, la souffrance collective, dégobiller ses tripes en bel unisson, ça vous donnait le sens du corps de groupe.

Encore une fois, je me retrouvai au milieu d'une foule de questions. Toutes légitimes, je n'en doutais pas une seconde.
- « S'il vous plaît... » implorai-je en levant mes mains en signe de reddition. « … s'il vous plaît, pas maintenant. Je suis... je ne suis pas en mesure de penser. En plus, je DOIS revenir sur Héailleutou, pour préparer la venue du Dragon Céleste. Et la population angesque doit être mise au courant au plus tôt de son nouveau statut. Le moindre faux pas pourrait être fatal. »

Gisèle approuva de la tête. Maintenant qu'elle était déchargée de toute responsabilité, elle pouvait sans peur s'impliquer, aider. A l'instar de Chris, elle n'était qu'une vieille dame, usée par des décennies de politique stérile. A l'idée de faire enfin quelque chose de vraie, elle semblait comme rajeunie. Plus fringante. Valériane, elle, avait eu son épiphanie, et était plus que prête à redevenir une anonyme, bien qu'elle eût très gentiment proposé de faire une tarte à la citrouille pour Maselfush.

Je ne cacherai pas que ma décision de retourner sur l'île des anges avait quelque chose à voir avec le niveau de confort que je pouvais y trouver. Si je ne dormais pas dans un vrai lit ce soir, je ne répondais plus de rien. De plus, je ne laissais pas les alliés nouveaux sans ressource. Rafaelo était dans le coin. Et pour ce genre d’exercice, sa virilité rustique valait bien mieux que mes entourloupes de bonne famille. J'appartenais aux salons feutrés des intérieurs cossus de ceux qui pensaient être des penseurs, il ne trouvait sa vérité que dans la compagnie de ceux qui se contentaient d'être des faiseurs. Nous nous complétions à merveille sur ce point.
Je partis l'esprit en paix. Carpe diem, qu'il m'avait dit, le Rafaelo. Il était peut-être de fumée, donc ses paroles, ce n'étaient pas du vent. Alors, pour cette fois, je n'allais pas faire de plans sur la comète. Je n'allais pas m'angoisser avec des « peut-être » concernant un type que je n'avais même pas vu. Mon monde, ce soir, allait s'arrêter à l'aube ; autant dire que mes jours étaient comptés. De ce point de vue, j'étais même vouée à disparaître, vu que la nuit était tombée. Demain. Demain.
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