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Ultimate Fighting Club


Il est des choses qu'on fait plus ou moins facilement. Manger une pomme, ça c'est facile, on baragouine le vendeur pour qu'il nous la fasse à moitié prix, on adresse un joli sourire à la fifille à son popa qui traîne du côté des fruits et légumes et qui rougit comme une tomate prête à éclater de tout son jus par terre. Par contre, rattraper un gamin qui vient non seulement d'en voler une, de pomme, mais qui, s'étant fait remarquer par le maraîcher, lui a aussi glissé un p'tit coup d'poinçon au niveau de la glotte... C'est tout de suite moins facile. D'autant que cette fois-ci, c'est le paternel qui déverse tout par terre. C'est pas bien joli. La demoiselle est en pleurs, et moi comme un con, j'regarde alternativement le gamin qui s'éclipse et le marchand qui s'étale. Puis bien sûr, je vois plus le gamin. Merveilleuse journée en perspective...

Bien entendu, pas moyen de demander aux passants par où il serait allé, ce p'tit bout d'os et de chair avec une pomme dans la main. Les habitants de Las Camp sont pas fous, ils savent bien que s'ils m'aident, on les retrouvera au coin d'une ruelle avec un grand sourire, rouge comme celui du pauvre marchand de pomme dont le cou a arrêté de gargouiller. Et ça affolera pas plus le reste. Les gens qui passeront auront que faire du pauvre gars qu'expire à leurs pieds, tant qu'eux sont en vie, ça les rassure bien. D'autant que c'est pas comme s'ils pouvaient demander de l'aide à la Marine... Elle me fait rire la Marine de l'île. Pas foutus de faire respecter un brin de loi. Ce qui fait que les rues sentent la pissent, que les gamins ont pas d'autre choix que de jouer du poinçon pour vivre, et que les marchands honnêtes meurent à la première occasion qui se présente.

Bon, mais j'suis pas venu pour ça. Les misères des gens des villes, c'est bien sympathique, mais à moi tout seul, ma petite tête et mon beau sourire, j'vais pas pouvoir les aider beaucoup. J'suis venu sur les conseils d'une connaissances. Pour un gros coup. Un gros coup dans la gueule je pense. Quoi qu'il en soit, j'dois retrouver une certaine Allie Stockholm, gérante des jeux et des paris. Il paraît qu'elle est facile à trouver, quand on sait où chercher.

***

Allie Stockholm, une femme qui pouvait aisément tromper son monde par une série d'artifices putains d'intelligents. D'abord, une fois que les quinze intermédiaires ont été satisfaits de mes réponses, on m'envoie enfin à la bonne adresse. Pis je fais le pied de grue pendant trois heures, avant qu'une femme, ou plutôt un baleineau, ne vienne plonger dans mes yeux un très désagréable sourire. Heureusement pour moi, la quantité de vêtements qu'elle portait l'empêchait de mettre en avant un décolleté monstrueux. J'aime bien les femmes, mais bon, des limites s'imposent naturellement à moi en terme de poids et de diamètre.

« Bonjour, que puis-je pour vous monsieur... ?
-Kosma, Alexandre Kosma. J'ai appris par un ami à moi qu'il s'organisait des combats par ici. Et comme j'aurais bien besoin d'un peu d'argent...
-Vous avez pas peur de perdre un peu de cellules grises en échange de ce peu d'argent ?
-Oh, vous savez, un peu plus ou un peu moins...
-Parfait. Je vous inscris sur la liste des participants.Vous avez un coach ?
-Non, c'est nécessaire ?
-C'est important. Je vous mets Allie Stockholm en coach.
-Vous ?
-Moi ?
-Vous êtes un bon coach ?
-Encore meilleure que ça si vous couchez. Ahah, la tronche. J'sais pas si j'en ai déjà vu un qui avait pas cette tête dépitée quand j'lui ai dit mes tarifs.
-Et c'est ?
-Gratuit pour ceux qui couchent trésor. Mais ça, c'est si j'désire coucher avec toi l'ami, et c'est pas encore gagné. T'es mignon mais j'vais attendre l'issue du premier combat pour me décider. »

Et le sourire enjôleur de Miss Stockholm ne manqua pas de me soulever le cœur. Je paierais en cash, ce serait sans doute plus simple pour ma santé mentale et physique. Si celle-là se mettait à me désirer, j'en entendrais parler pendant un bon moment.

Une fois que j'eus signé, d'une simple croix dans une case, préférant imiter les signatures successives des brutasses qui étaient venues s'inscrire avant moi, on m'emmena me préparer dans une petite salle destinée à la sueur et aux larmes. Un sac de frappe était attaché dans un coin, des gants, quelques haltères, et d'autres instruments de musculation traînaient un peu partout. Je pris note de tout ce qu'il y avait, puis ramassait un tapis de sol mité dans un coin, l'étalais sur le sol avant de m'y assoupir. Dormir était le meilleur entraînement du monde. J'aurais bien besoin de dormir un petit moment avant d'attaquer les hostilités.


Dernière édition par Alexandre Kosma le Ven 2 Oct 2015 - 11:58, édité 2 fois
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Si le monde devait avoir un cancer, Las Camp et ses innombrables poches purulentes, véritables boursouflures putrides à ciel ouvert, incarneraient idéalement ce rôle. Las Camp avait de cet air vicié, de ce relent infect qui vous mine le tarin et vous ferait presque gamberger la glotte, comme si l'oxygène du patelin se faisait l'écho de toute les souillures innommables perpétrées sur son sol. Fléau du monde, marqué du sceau du démon, rares étaient les énergumènes du bouclar à prendre de grandes bouffées et à inhaler allègrement toute cette puanteur latente, faite de vices et d'abandon de soi. Les niveleurs, fiers comme Artaban, la gueule béante et déglutissant d'actions héroïques à leur actif, de ces gars qui n'avaient plus froid aux yeux et qui vivaient en roue libre depuis perpet', appelant la mort de leurs vœux à chaque opération, faisaient bien entendu partie de toute cette trempe d'hommes-ci. A l'instar des autres comparses,  le père Wade n'était pas en reste pour se gorger de l'atmosphère du lieu, avant de poser ses couilles sur le table et pisser à la raie du fameux Mogaba et de sa cohorte d'enflures de la pire espèce. Pas tant qu'il était important de se figurer qui avait la plus longue mais plutôt de lui rappeler qu'il n'avait pas vraiment le droit de citer sur le territoire de Nivel.

Aussitôt arrivé, le fieffé galonné, ripoux comme pas deux, avait pas pu s'empêcher de lorgner et de s’amouracher de tout ce qui avait une once de jus dans le périmètre. Le bougre avait su se mouiller avec brio dans toute  les affaires suffisamment nébuleuses du patelin, usant de tout son réseau de relations, pour qu'on puisse pas remonter le filon jusqu'à sa petite cage dorée. Ce petit génie les faisait tous marner à la carotte tout en ayant pris soin de cercler leurs couilles dans l'éventualité où çà sente le sapin pour sa pomme. Sa solde de colonel suffisait pas à pourvoir la rapacité du félon, fallait qu'il bouffe à tous les râteliers en mettant  un point d'honneur à mettre la tête sous l'eau à tous ceux qui avaient l'audace de nuire à ses ambitions. Une mécanique bien huilé et foutrement bien rôdé , "impitoyable avec les faibles, servile avec les puissants", le genre d'axiome qu'on pouvait légitimement attribuer à un lascar comme cette catin répondant au doux nom de Mogaba.

Lorsque cette mouette galeuse décida de s'insinuer dans le business lucratif des combats clandestins, de s'improviser bookmaker et de tirer les ficelles dans l'ombre de tout un paquet de rixes organisées, il s'est engagé sur une pente savonneuse et nous a fourni sans le savoir une porte d'entrée fameuse pour contrecarrer ses petites machinations puériles.  Le Mogaba, en fin limier, avait mis sur pied toute une petite organisation bien ficelé et avait ameuté tout un lot d'énergumènes aux dents longues et à loyauté douteuse, du moins suffisamment pour accepter de se faire évincer si ils foutent leur boss dans l'embarras. Son champion autoproclamé, Cody James, une brutasse épaisse taillant dans les 3 mètres et dans le quintal et demi, pulvérisant les crânes à tour de bras comme du petit lait, partait ultra favori dans la compétition et entendait bien foutre la paluche sur le joli pactole. Dans le sillage du mastodonte, toute une meute de petites frappes et d'autres lourdauds à la dent dure étaient prêts à se foutre sur la gueule dans la joie et la bonne humeur, voulant s'attirer les faveurs de la pègre de West et redorer leur carte de visite souvent pas folichonne.

Wade écopa de la responsabilité de faire grande impression auprès de toute cette meute de loubards et gros bras et de rafler la mise du vainqueur du tournoi. Pas tant que sa plastique soit taillé expressément pour se frotter à tout ce gratin de gueules cabossés à la masse musculaire inversement proportionnelle à l'étroitesse de ce qui s'agite au coin du ciboulot mais c'est celui qui avait la probabilité la moins douteuse de se faire mettre sur le carreau parmi tous les corps de lâches du gang de Nivel.

Lorsque les lumières tombent sur la cité, que les ténèbres emplissent la noirceur qui s'y terre et que le feu embrase par endroits, les torches des artères principales, l'atmosphère lugubre et oppressante de Las Camp affleure au grand jour, révélant son véritable visage. Le feu et les ténèbres, un arrangement primaire, qui revêtirait presque une sacralité , rappelant nos origines animales, nos instincts bestiaux latents qu'on s'évertue désormais de dénigrer et de cacher sous de la sociabilité pernicieuse.  Et lorsque Wade s'engage dans le défilé des couloirs tortueux de las Camp en direction des bas fonds de cette gangue fétide, cette ambiance primitive le ronge et rogne petit à petit les freins à sa véritable libération, celle de l'individu sur tout ce qui l'entoure. Il s'efforce de museler toute cette bestialité réprimé qui s'élève crescendo et lorsqu'il débouche sur la petite arène clandestine qui va servir de défouloir pour certains et d'abattoir pour d'autres, il sourit intérieurement. Comme escompté, tout le gratin est dans les startings blocks, leurs mines enorgueillis qui se toisent avec dédain et insolence, çà se sent plus pisser et çà veut rapidement en découdre, c'est la loi du talion qui prime ici bas.

La paperasse acquitté, Wade s'oriente dans une grande salle d'entrainement avant qu'on lui flanque un coach commis d'office, un certain Johnny Lemon. Encore un mange-merde qui va se becter copieusement sur le dos de son poulain,  un vieux briscard qui tire davantage sur l'épave plutôt que vers le senior vigoureux qui tient sa bille. Il tire latte sur latte, laissant courir son oeil vitreux sur tout le brin d'ego rassemblé.  Toutes ces trombines déter' sont comme culs et chemises, cette promiscuité de sueur et de crasse leur fait montrer les canines et se hausser du collet et lorsque Johnny aperçoit le blondinet filiforme en peu en retrait, qui aligne ses mouvements sans faire de l'esbroufe, il flaire l'anguille sous roche. Le genre de loustic à surveiller de près, l’ambiguïté statistique, de ceux qui pourrait faire compromettre l'avenir radieux et tout tracé du petit protégé dont il commencerait presque à s'enticher.



Dernière édition par Wade le Mer 14 Oct 2015 - 17:36, édité 1 fois
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Ça renifle la testostérone dans tous les coins, ça parle pas beaucoup, ça grogne. Le genre d'ambiance que j'aime assez. C'est toujours avec ce genre de types qu'on a les meilleures discussions. Bien entendu, j'suis pas là pour faire la causette. Plus le genre conversations musclées. J'en vois pas mal qui zyeutent dans ma direction, un sourire aux lèvres. C'est vrai que mon gabarit est assez comique comparé aux brutasses de foire qu'ils ont l'habitude d'affronter. J'vois des plaies et bosses dans tous les sens et quelque part, j'me dis qu'il doit pas y avoir beaucoup de neurones dans cet ensemble de muscles.

« Hey, le mioche, besoin d'un coup d'main ? »

L'gars qui vient m'voir avec sa tête de muscle a un rictus moqueur sur le visage. J'veux pas l'décourager en lui mettant une pilée avant même le début des rixes, du coup j'suis presque prêt à rentrer dans son jeu. Presque. Parce que bon, c'est marrant un moment de se faire passer pour un naze, mais le plus sympa reste quand même de jouer la brute. J'vais voir comment y répond à son propre système de pensées, ça m'occupera.

« Hey, et toi, besoin d'un coup d'poing ?
-Houlà, j'ai peur, la menace d'une lavette.
-J'suis pas si pire que j'en laisse paraître, j'compte bien défoncer des crânes aujourd'hui. Le tien me paraît même pas assez dur pour que j'y touche. »

Hilarité générale. Que pourrait causer un gars qui fait la moitié de leur taille et dont le tour de bras est aussi impressionnant qu'un flan au pruneau. L'colosse s'éloigne de moi en ricanant et m'indique le chemin de l'infirmerie, au cas où j'voudrais me faire porter pâle. J'zyeute sur le côté, un gusse me regarde sans sourire hilare sur sa bobine. Un coach. Un gars intelligent peut-être ? Faudrait que j'me renseigne sur son éventuel poulain ; le danger, ça vient des coachs avec un peu de poids dans l'ciboulot.

Une clochette retentit. Ça va commencer, chouette. Vais pouvoir observer, me semble pas que j'fasse partie des premiers combats. Deux colosses bien bâtis montent sur le ring. Acclamations, hourras, sifflets, un vrai moment de supporters déchaînés. Me manque une petite bière pour apprécier le spectacle à sa juste valeur. Et Vlan, voilà que les juges ont lancé l'affrontement et que les beignes succèdent aux beignes, les coups d'genou, les arrivées inopportunes de phalanges dans la gueule. Ça saigne, mais on va pas arrêter un combat pour si peu, ici la règle est simple, abandon ou K.O. Tous les coups sont permis.

« Ça manque de technique, me souffle mon voisin de droite, un colosse blond à l'air moins con que les autres.
-J'trouve qu'ils ont de l'allure, que je rétorque. »

Parce que bon, j'ai dit que j'me mettais à un niveau de réflexion bas. Alors qu'effectivement, ils manquent d'une certaine recherche dans leurs coups. Si leurs attaques portent, ce n'est pas parce qu'elles sont efficaces et bien pensées, mais parce que le gars en face a une tendance à avoir le même genre de techniques stupides et irréfléchies. Là où ils en remontrent par contre, c'est par la puissance des coups. Une telle violence que j'ai intérêt à pas trop en encaisser sinon ce serait fini de la moitié de mon squelette. J'me retourne pour discuter encore un peu avec la tranche de barbaque au cerveau un peu plus gonflé qu'la moyenne.

« Enchanté, Alexandre Kosma, vous combattez prochainement ?
-J'suis l'suivant sur la liste. Wade. Vous pourrez entrevoir ce que c'est que bien se battre.
-Ahah. J'aime bien les grandes gueules.
-Vous supportez qui dans ce tournoi ?
-Moi-même mon p'tit gars. Pas encore assez vieux pour laisser l'avantage à une tripotée de muscles en culottes courtes.
-L'âge n'a rien à voir là-dedans. Mais votre physique de légume vous aidera pas beaucoup. »

La cloche sonne de nouveau, et alors que j'regarde le ring, j'vois un des deux colosses à terre, le visage méconnaissable dans un ensemble de morve et de sang. Le gagnant s'est lui aussi fait amocher et exhibe une dentition aléatoire derrière son sourire victorieux. Son coach lui éponge le torse, lui soigne le visage et il sort tranquillement du ring tandis que la civière vient évacuer la première victime de cette boucherie. Mon pote du moment s'avance à son tour, imité par un autre gonze plus petit de l'autre côté de la piste. Plus petit, mais pas moins musclé. Une belle barrique. Le genre de gars qui cogne dans la rue parce qu'on a cogné sa superbe épaule. Pas d'la faute des gens s'il prend une place folle côté envergure.

Chacun s'échauffe de son côté. Moi j'regarde attentivement. Si le gars qui m'a parlé a l'air de bien se débrouiller question combats, que c'est un as du milieu, y aurait moyen que j'jette mon dévolu sur lui. Faut que j'fasse en sorte d'arrêter le maximum de gens avec le minimum de dégâts. J'ai déjà mes cibles prioritaires. Les plus forts ensuite. J'attends que certains soient mis hors combat par la force des choses pour intervenir. J'ai confiance en mes capacités, j'suis capable de gagner à un contre un contre chacun de ces types. Mais si leurs muscles se mettent à faire alliance, j'donne pas cher de ma peau.

Par réflexe, j'me grille une tige. Ça m'calme un peu. Les coachs n'ont pas encore fini de préparer leurs poulains. On attend surtout que les premiers soins aient été appliqués au perdant du tour précédent, pour rendre immédiatement disponibles les urgentistes présents en cas de coup dur. Ça m'fait marrer toute cette organisation. Ils font pas ça pour garder en vie les gusses qui participent. Ceux-là finissent rarement très bien. Il font ça pour que les éventuels spectateurs qui n'osent pas trop tâter du ring viennent parier leur argent sur leurs propres chances de victoires. Ca leur donne l'illusion que même s'ils perdent, ils seront en vie. Qu'ils sont naïfs. La défaite ici, est synonyme d'os brisés, de membre arraché, de commotion cérébrale, de vertèbres pulvérisés. En aucun cas de « retente ta chance un autre jour ».

La sonnerie retentit une deuxième fois, j'me reconcentre sur le lieu des combats. Tout le monde est sous tension. Pour qui la première giclée de sang sera-t-elle?


Dernière édition par Alexandre Kosma le Ven 2 Oct 2015 - 12:03, édité 1 fois
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Lorsque Wade tailla le bout de gras avec son vis-à-vis, lui et son foutu petit sourire vissé sur son joli petit minois encore intact, son œil vif presque vivace même qu'il balance aux quatre coins de l'antichambre, il lit toute l'appréhension que le vieux Johny redoutait, il a du cran et suffisamment d'aplomb pour livrer quelques surprises fameuses dans la suite des réjouissances. Toujours se méfier de l'eau qui dort, de ce genre de petites forces tranquille qui te toise avec ce simili respect qu'il fait semblant de te vouer, ce sont les pires escrocs que ce genre de compet' peut rassembler, le genre à pas rechigner à te bourrer de coups peu réglementaires et te latter suffisamment les bourses pour que tu puisses plus les vider. Il fume avec nonchalance affiché, sa façon singulière de se saisir de la clope, comme pour se donner une consistance à moins que l'animal cogite et se fasse un peu de mouron quant au sort qui lui est réservé, le révolutionnaire entend presque les rouages qui lui tournent au coin de l'encéphale.

Wade apprécie ce brin d'homme, il aime les gus qu'ont un peu de répondant, assez d'amour propre pour pas clamser aux premières volées assénées, les petits hargneux dans son genre qu'avancent pas gros pour se révéler dans l'ardeur combat, dévoiler le vrai eux qui sommeille aux tréfonds de leurs carcasses et qui contribuent à la réputation sulfureuse de ces petits comités. On mesurera ton engagement aux litrons d'hémoglobine versés sur le ring, mon gars, ton tour viendra bien assez tôt, fais-moi donc l'insigne honneur de pas te faire étaler au premier round, débrouille toi donc pour te gonfler suffisamment le sachet pour qu'il ne désenfle pas complètement lors de ta premier duel.

Lorsque le gong retentit, l'arbitre au tricot rayé  le déchaînement des egos imprègne toute la pièce, le règne de la sueur et de la virilité reprend la place qui lui revient, qui lui incombe, cette tension latente est magnifique, elle abreuve la fierté et forge le corps des hommes. La dualité, c'est la constante absolue dans la grande équation, celle pour laquelle on se bat, contre les autres d'abord, contre nous mêmes ensuite pour faire prévaloir ce que l'on croit juste, légitime et qu'on soumet à autrui. La loi du talion, pure et parfaite, est impartiale et fait valoir ce que de droit. Le primal supplante le reste, la sélection naturelle reprenant sa primauté sur tout le reste. C'est uniquement que lorsque qu'on a tout perdu, qu'on est libre de faire ce qu'on veut.

Le gros d'en face, Robert Paulsson qui se prénomme, doit bien faire le quintal et demi à la pesée, un beau gros bébé bien charpenté tout en graisse dure, un bon gabarit pour se faire la main, le genre de petit teigneux qui doit rien lâcher et bien encaisser. Ils se zieutent, se jaugent du regard, se taperaient le manche au sol s'ils le pouvaient avant de débuter les hostilités avec virulence. Le gros a presque pas d'allonge mais qu'à cela ne tienne, le vl'a qui encaisse le premier gnon sans broncher et l'enserre rapidement à l'intérieur de ses bras huileux de sueur avant de comprimer le blondin contre sa panse velue. Il y a pas à dire, il en a des les burettes, l'animal, il serre de toutes ses forces et fait craqueler un à un les os du révolutionnaire qui a eu juste le temps de bander suffisamment les avants bras pour l'empêcher de le transformer en conserve à sardines. S'apercevant qu'il ne lui brisera pas la colonne, le gros a plus d'un tour dans son sac et projette son alter-ego, façon cathédrale renversée, la tête la première sur le tapis.

"GREAT SUPPLEX"

Wade s'écrase avec fracas sur la surface mais ses cervicales demeurent intactes. Belle manœuvre qui aurait pu être fatal si le blondin ne s'était pas servi de son épaule pour amortir l'impact dévastateur.

La ferveur gagne le public, l'on crie à la gloire des uns, à la mort violente des autres, les voix s'entremêlent dans la confusion et derrière les deux protagonistes grondent un brouhaha croissant. Le respect de cette meute endiablé se gagne au prix des victoires, broyer le cartilage n'est pas suffisant pour s'accaparer leur adoration, l'art et la manière comptent tout autant.

Le gros est galvanisé par la clameur, il se précipite vers le blondin dans l'idée de lui briser les bras, lui faire sa soumission spéciale qu'il réserve aux plus récalcitrants à s'avouer vaincu. Le révolutionnaire se tient à semi-distance et balance des droites fameuses sur son adversaire, l'enflure a une couche de graisse si épaisse que les phalanges du blondin s'enfoncent dans le tissu adipeux avant de rebondir consécutivement. Il esquisse le sourire du présomptueux, de celui qui s'imagine déja vainqueur, plein de vanité et de dédain, il sent sa victoire poindre au fur et à mesure que le blondin ne trouve pas son talon d'Achille. Il pense se le faire à l'usure et gagner la reconnaissance de ceux qui, lorsqu'ils étaient gosses le maltraitaient avec un plaisir non dissimulé. Il est le produit de notre société, la résultante de tout ce qui l'entoure et aujourd'hui, il a besoin que ce calvaire s'interrompe.

La confrontation gagne en intensité, le blondin finit par faire cracher de petits filets d'hémoglobine au géant graisseux tout en multipliant les coups de latte sur les ailes du bibendum, il s'efforce de fermer sa garde pour limiter les ouvertures au grand blond. Tour de chauffe, pour mieux prendre ses repères, le gros décoche enfin quelques pêches après les huées qui retentissent à son égard, l'orgueil le pousse à prendre des risques inconsidérées, sanctionnées par des uppercuts bien sentis dans sa tronche d'œuf. Des boursouflures apparaissent sur la gueule du gros lard, la virulence suinte et aucun des deux ne flanche. Pourtant l'issue du combat semblent se profiler à l'horizon. Le blondin prend peu à peu l'ascendant, ses pognes se font plus précises, plus puissantes, elles entrechoquent la chair et finissent par fatidiquement lui casser des côtes. Un râle de douleur émerge de sa trachée, un cri empli de gorgne mais surtout de fatalisme, celui de prendre conscience que la victoire lui glisse entre ses paluches graisseuses, celui de se faire mettre sur le carreau par un blondin qui faisait le quart de sa fesse.

La douleur le tiraille, le pousse dans ses derniers retranchements dans le tumulte qui l'enveloppe, il lutte contre elle avec cette hargne indéfectible, ses paumes plaquées sur ses blessures, pour ne pas que le rideau de la honte s'abatte à jamais sur son sort, pour ne pas qu'il disparaisse de la scène martiale et que son nom soit bafoué par ce blondin. Mais même avec toute la meilleure volonté du monde, l'écart est trop grand et lorsqu'il tombe genou au sol, qu'il relève péniblement la gueule vers son opposant, il sait sa cuisante défaite. Wade fait parcourir alors son œil dans toute la salle et l'animosité qui l'anime, tous autant qu'ils sont réclament un K.O, tous le regardent avec cette dévotion diabolique, tous sauf l'autre blond et son sang froid imperturbable.

Le dos tourné vers l'homme, Paulsson croit voir une ouverture et vise sous la ceinture mais sa vaine tentative est arrêté nette dans son élan par la paluche du révolutionnaire sans même qu'il ait eu à détourner son regard de l'autre corps de lâche blond. Une dernière beigne droit dans le bourre-pif met fin au supplice de l'homme qui tombe raide, inconscient. Une ovation gronde dans l'antichambre, on acclame le challenger mais bientôt l'arbitre calme leurs ardeurs et annonce la suite.

"Voyez-vous donc les challengers de qualité que nous avons ce soir. Pourront t'ils vraiment s'emparer de la ceinture du champion? C'est ce que nous allons voir Mesdames et Messieurs au cours du prochain combat maaaaaaais .."

Un concert de sons métalliques retentit dans l'atmosphère tandis qu'au dessus une immense machine tient en suspens un édifice d'acier trempé et amorce sa descente vers le ring. La foule exulte, sa soif d'hémoglobine est en décuplé, la cage revêt presque quelque chose de mystique pour les fins connaisseurs.

"celui-ci aura lieu dans la Caaaaaaaaaaaaaaaaaaage ! Qui sont les prochains challengers ?! Bernie Blue vers Barney Franks !"

Le blondin a à peine le temps de descendre du ring qu'il aperçoit son compère esquisser un sourire à la commissure des lèvres. Ton heure de gloire, blondinet, à toi de briller.



Dernière édition par Wade le Mer 14 Oct 2015 - 17:34, édité 1 fois
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Mon arrivée sur le ring fait des émules. Chose plutôt rare, le colosse en face de moi a un sourire deux fois plus large que le mien. Un sourire qui dit, « je vais te broyer, allumette ». Le mien lui répond poliment un petit, « j'attends de voir, l'ami ». Si lui arme déjà ses deux poings qui font presque la taille de ma tête, je reste droit, mes yeux dans les siens. Pas provoquant, non. Juste une façon de lui montrer que j'suis un adversaire à sa taille. Enfin, que j'pense bien l'être. Y a de la nervosité dans l'air, on siffle, j'parie que c'est pour moi.

« Ce combat, m'a dit ma coach, il faut l'assurer. Les gens ne t'ont pas encore vu en action, avec ta carrure ils parieront sur lui, en grosse majorité. Si tu gagnes, c'est plein de pognon. Si tu perds c'est fini, alors gagne. »

Je repense à la scène déroulée il y a même pas une heure et j'me dis que cette bonne femme, si grosse et laide qu'elle est, en a dans la caboche. Elle parie pas sur le plus évident. Elle parie sur celui qui lui rapportera un max s'il gagne et qui lui fera perdre très peu s'il perd. Elle sait jouer, elle joue depuis très longtemps, et elle en a gagné du pognon. Et elle a pas de bile à se faire concernant l'issue du combat, j'vais gagner. Par contre elle a intérêt de gagner plein pot et de se tailler, parce que son petit commerce, il va pas rester longtemps debout. Quelques gars de l'élite n'attendent que mon signal, et hop quelques arrestations en masse.

DONG
« Ça y est, on va pouvoir commencer microbe, prêt à prendre ta raclée ?
-Ne vends pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué gamin. J'suis pas une tanche, y s'pourrait que j'te cause des soucis.
-Y s'pourrait aussi que je t'attrape comme ça... »

Qu'il fait en lançant sa paume en direction de ma tête. Il a à peine levé le bras que déjà j'me vois obligé de faire un pas de côté pour éviter l'énorme massue. Pas le temps de réfléchir, j'esquive quelques coups, il est un peu trop lent, mais pas question de prendre ne serait-ce qu'une mandale, pas envie de terminer ma vie dans un lit d'hôpital. J'profite d'une beigne un peu mal amorcée pour me glisser au niveau de son abdomen. Un coup de coude, semble pas avoir ressenti quoi que ce soit. Tant pis. J'me relève d'un bond et j'lui agrippe le cou, qu'il a massif d'ailleurs.

« Hin, ricane le bonhomme, comment va la puce ? J'vais la décrocher de son perchoir, et elle va aller virevolter dans la salle.
-Me décrocher ? »

Monsieur gros tas de muscles s'agrippe, et tente de me dégager de son cou, cou que j'serre de plus en plus fort. J'le vois devenir tout rouge. Pas content ou bien il ne peut déjà plus respirer ? Dans l'doute je m'agrippe de plus belle. Il force, j'vois de la tension dans tout son corps. Jamais il ne parviendra à me virer de là, je suis une tique, je m'accroche et impossible de me déloger. Alors, dernière méthode, celle qui vient souvent en fin de combat, plutôt que de tirer sur la tique, on lui frappe dessus. J'encaisse deux ou trois coups. Pas très puissants ceux-là. Il en tente un autre, beaucoup plus violent, beaucoup plus rapide. Me reste deux secondes. J'lache son cou et j'tombe au sol. Et pendant qu'il se percute le torse avec violence, roulé-boulé dans ses jambes.

Depuis une poignée de minutes la salle est silencieuse. Des gouttes de sueur coulent du front des quelques gorilles présents tout autour du ring. La petite bête est en train de renverser la grosse. Bien entendu, le combat n'est pas fini. Si mon adversaire est bientôt au sol, moi je le suis déjà, et sous les deux troncs qui le font tenir debout. Faut que je m'extirpe de là et fissa. Puis faudra maîtriser le corps et l'assommer un bon coup.

J'pousse sur mes bras pour rejeter la jambe qui pèse sur mon corps, suffira de faire glisser l'autre. Un, deux, trois temps et zioum, j'suis debout. Un peu fatigué, mais debout. Merde, il s'est relevé aussi. Le voilà qu'il me toise. Il est énervé, très énervé. Il va frapper beaucoup plus fort, mais aussi commettre plus d'erreurs. C'est comme ça qu'il faut raisonner. S'il me touche, j'suis mort, sinon, c'est moi qui gagne.

« Alors, c'est plus dur qu'il n'y paraît ?
-Te fous pas de ma gueule l'avorton.
-Ce n'est pas mon intention... Tu veux faire une pause ? »

Son poing passe à quelques centimètres de mon visage et j'comprends que non, il veut pas faire de pause. Moi non plus à dire vrai, hâte d'en finir. De voir comment la salle réagira au combat. Si ce sera le boxon ou la fête. Ou les deux. J'tournoie encore autour de lui, il a pas l'air ravi. Les spectateurs sifflent. Ils veulent du muscle, du vrai, pas de la vulgaire chasse au papillon. J'les comprends. Alors j'fonce sur lui. Je m'agrippe à son poing qui tournoie en évitant le crochet qui vient de l'autre côté. Je m'approche de lui pour lui filer un coup, mais BAM, sa tête contre mon torse me renvoie direct au tapis. J'vois son pied qui s'apprête à m'écraser. Tant pis.

J'laisse la chaussure me pilonner sur le sol. J'fais fi de la douleur, et CRAK, torsion de la cheville. Le mec hurle, je l'aurais cru plus digne que ça. Il s'effondre de tout son poids, tentant tout de même un ultime coup. Que je dévie avant de lui écraser le nez contre mon genou. Il est pas mort. Juste salement amoché, j'entends le gong qui résonne, j'ai gagné. Plus qu'à affronter les réactions de ce cher public, qui vient de perdre une grosse quantité de thunes... Dommage pour eux.

J'jette un coup d'oeil direction Wade, le gars avec qui j'ai parlé avant les combats. Il sourit, j'lui rends son sourire, il a parié sur moi le gredin.


Dernière édition par Alexandre Kosma le Ven 2 Oct 2015 - 12:18, édité 1 fois
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"T'vois bien, je t'avais bien dit qu'il fallait se méfier du loustic " que le coach lance à son poulain, le cure dent se baladant au coin des chicots de sa gueule cassée.

Il le pointe de l'annulaire et le scrute de haut en bas comme un animal fabuleux avant de cracher au sol comme pour défier le brin d'homme qui se cache derrière cette tronche de presque premier de classe qu'il nous livre du haut de ses six pieds.

L'autre femelle de coach adverse eut beau se lever du tabouret et incendier la vieille épave qui servait de chandelle au révolutionnaire, le mal était fait. La foule en liesse avait vu l'offense perpétrée par le tandem d'hommes, le genre d'injure caustique qui se greffait au fer rouge dans le bocal de tous ces foutus cabochards, de l'opium fumant pour la plèbe hurlante et camé jusqu'au bout des ongles, du mazout frais qu'on épandait sur un lit de charbons ardents, où dansaient les compétiteurs qu'ils étaient, à jouer les funambules au dessus d'un gouffre incendiaire, du neuvième cercle de Satan et de ses apôtres accueillant les bras ouverts les hères venant à eux.  Ca beuglait de plus belle dans le bouclar, un relent de transpiration  encore chaude s'imprégnant dans la masure suintante qui leur servait d'arène de pugilat et plus profondément encore dans les cavités béantes du bétail observant, parqué dans des espèces de tribunes d'acier grillagées.

Les injures étaient la monnaie courante des zigs du cercle, rien de nouveau sous le soleil noir de las camp, les plus fanatiques, les plus sales zélés allaient même jusqu'à bouriner leurs cages d'acier pour se faire entendre. Qu'on leur adresse un regard, la moindre attention fameuse qu'ils arriveraient à capter et qu'ils prendraient pour acquis suffisait à ce qu'ils exultent en vociférant.  A travers les mailles des parois, toutes sortes de projectiles fusaent à l'égard des gars qui cognent à l'intérieur du "dôme " comme les mecs d'ici l'appelent. Le blondin et son alter-ego se rendait ce sourire fameux, cette espèce de mimique facétieuse que deux gars qui s'apprêtent à se coller des pains monumentaux se refilent en guise d'amuse-gueule pour épater leur égos d'abord et la galerie ensuite. Ces deux là font pas exception à la fameuse règle, ils sont pas bruns mais c'est tout comme, ils l'ont longue et turgescente et dieu sait que le mec qui remportera la gagne sera celui qui la claquera le plus fort sur le tarmac.

L'ardeur ne désemplit pas au gré des combats qui se succèdent dans l'âtre suffocant, le thermomètre monte sans cesse tandis que les lopettes se font éjecter sur fond de concassage de côtes et pains plus comaques encore. On a la main lourde ici bas dés qu'il s'agit de coller de copieuses trempes, certains doivent même récupérer leur mâchoire la chique entre les jambes ou presque après s'être pris une tannée. Mine de rien, l'écrémage a eu tôt fait de virer tous les minables de la course au trône, les giclées d'hémoglobine retapissent le ring et donneraient presque une atmosphère intime à ce qui se trame dans la turne.  Il en reste finalement six en lice, un nombre pair, suffisamment raisonnable pour une bonne mêlée générale bien consistante.  Wade, le second blondin, deux hommes poisson qui puent l'iode à plein nez, une armoire à glace bossue pas aidé par la vie et et un gros barbu au tempérament nonchalant, un peu comme l'autre tapette qui tire de copieuses lattes.


Les six se placent dans leurs boxes respectifs, dans leurs cages idoines devrais-je même dire, parés dans les starting blocks à en découdre et surtout pas en démordre jusqu'à ce que le gong final retentisse dans la plus grande effervescence. Ca bouillonne à l'intérieur des petites casemates dans lesquelles les mecs sont cantonnés, les poiscailles sont les plus flippantes, Wade verrait presque leur petite nervure caractéristique du sang qui leur pulse à travers le crâne à ces foutus énergumènes.

Le gong sonne et la rixe déroule, les mecs déboulent rapidement dans une acclamation générale, le règne martial reprend ses droits, celui du mollard bien fait qui vole sur le coin de la face de l'autre blondin et ses épis farfelus. Tout un tas d'outils en tous genre ont été flanqués çà et là pour qu'on transforme le périmètre en une enceinte sale.  Battes cloutées, chaises, barramines, pieds de biche, clefs anglaises et même un putain de chalumeau sont au programme des réjouissances.

Pas de tours de chauffe cependant, ca va saigner, ils vont se piquer au vif sur le fil du rasoir sans en démordre et déjà l'homme poisson s'élance à fond de balle dans l'antichambre et emboutit le moustachu qui bronche pas d'un cil, décochant une pêche fameuse en riposte.

Wade tient la distance avec le blond et se le réserve pour la fin, pour le grand final et s'intéresse davantage à la seconde poiscaille, sorte de poisson chat qui doit taper dans le quintal et demi.  Son immense pogne fend l'air comme un bloc de béton armé qui ploie tout obstacle semé sur sa route, un adepte du karaté HP sans doute qui fait tâter de son allonge soudaine son vis-à-vis révolutionnaire lorsque sa pointure 68 vient s'imprimer droit sur son faciès.

Vol planée qui finit sa course dans le grillage avant de tomber comme une loque, la gueule la première sur le béton froid. Pas à prendre la légère le gros, le temps de fondre sur lui et de réduire la distance qu'il saisit ses deux paluches avec les siennes avant de s'en servir comme pivot pour décocher un coup de latte dans le buffet du poisson chat puis à nouveau en combo dans la mâchoire qui le propulse façon fusée à la verticale. Le second ovipare profite de la porte ouverte, fourbe comme pas deux, agrippe la barre à mine et bourre les rotules de son comparse à branchie à la verticale. Les poissons font pas ami-ami, souci de chaine alimentaire depuis le génèse. le temps de jeter un œil sur l'autre gonze et ses clopes qu'il fourre son pied de biche dans la joue du bossu et le balance comme un soupe-au-lait dans le décor comme il se débarrasserait de bric à brac en plein nature. Wade profite de son altercation pour balancer une brique comme un sourd en direction du blondin, mauvaise pioche ou presque, la carne bleutée véner joue des coudes et finit par lui coller l'humérus droit dans le portrait. Sale. il gémit et tandis que le sang point sur son palais, il saisit machinalement la chaise adjacente et lui flanque les jointures de celle ci en pleine gueule à son tour. Outch, ca pisse et pourtant ca ne fait que débuter...



Dernière édition par Wade le Mer 14 Oct 2015 - 18:04, édité 2 fois
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C'est la grosse bagarre, la rixe dans tous les coins. On prend des gnons et on en donne, de quoi faire plaisir à la quantité de brutes épaisses que nous sommes. J'suis à peu près sûr d'apprécier la discussion, c'est nouveau, le dialogue est vif, sans temps morts. Les coups sont lourds, ça tape pour faire mal, pour briser des os, pour une victoire rapide, éclair. Les cinq gusses face à moi ont tous des corps de colosses, et j'tends à les rattraper. J'fais figure de puceau à peine sorti du sein de sa mère, mais déjà j'ai pris du muscle, et l'assurance que j'place dans mes coups leur donne pas un instant d'répit. Pas plus que j'en aie. La teneur en testostérone monte et c'est à coups de mandales que la fête se donne.

C'est un homme-poisson qui vient alors entamer les hostilités de front. Le problème dans ce genre de combat est toujours le même. Dès qu'on commence à vouloir sérieusement poutrer l'un des participants, un autre se ramène par derrière et nous assène une méga droite, un coup de chaise, un coup de coude, de genou, de dents. Bref, tout ce qui pourrait faire un brin mal. Et comme l'endroit est bien resserré, étriqué presque, il vaut mieux donner des coups un peu partout, quitte à ce que l'objectif premier ne soit pas atteint, plutôt que de tenter des passes plus complexes. Plus le temps de réfléchir dans la mêlée, plus qu'une chose qui compte ; cogner.

« Je... »

Pas le temps de parler, j'aurais bien voulu en savoir plus sur mes adversaires, mais à peine un mot prononcé et déjà un direct m'atteint à l'estomac. J'essaie presque de vomir sur l'adversaire. Tous les coups sont permis. Malheureusement, j'ai pas assez déjeuné pour que le coup me fasse dégobiller, tant pis. J'écarte l'adversaire de quelques coups de pieds aléatoires et j'saute sur le bossu. J'aime prendre un peu de hauteur. Deux gros bras tentent de m'agripper, j'y attrape les poignets puis j'saute en arrière, ne manquant pas de filer un coup de pied à mon précédent adversaire. Et alors que j'me débats de nouveau avec l'homme poisson, j'en vois un qui achève le malformé en lui sautant dessus.

« Plus que cinq. »

Que j'réussis à haleter entre deux esquives. J'connais pas assez bien l'anatomie des Hommes-Poissons pour être sûr qu'ils ont une paire de couilles entre les jambes, mais en tout cas, c'est ce que je vise. Tout en protégeant les miennes. J'vois l'gars avec qui j'ai causé tout à l'heure se démener. Il pisse un peu l'sang. M'fait marrer toute cette violence. Quand on y pense, c'est vraiment pas l'genre d'endroit que j'ai l'habitude de fréquenter.

J'espère tout de même qu'ils vont pas trop traîner. J'voudrais pas non plus risquer d'me faire démettre un bras, juste pour une petite bande de malfrats dont la prime ne s'élèverait pas à plus de 15 millions. Des p'tits loubards de pacotille pour la plupart, entourés de quelques pointures, et encore, des pointures pour le coin crasseux qu'est Las Camp, pas non plus des bêtes horribles et recherchées absolument. En attendant que les renforts appelés un peu plus tôt n'arrivent pour me sauver les miches, j'me contente de mettre des pains à droite et à gauche. De titiller des mâchoires, d'extraire des dents ou de briser des côtes.

J'regarde autour de moi, un deuxième s'est fait éjecter du ring, un des deux poiscailles. La sueur me recouvre le visage mais j'continue de batailler. Il se pourrait bien que j'subisse plus que les quelques égratignures dont j'ai écopé pour le moment.

DING DING DING.

Pause. Temps écoulé pour le premier tiers temps. De ce que j'ai compris, trois parties, s'il y a toujours pas de vainqueur à la fin du dernier round, c'est une manche illimitée jusqu'à la victoire. Généralement ça se joue en deux ou trois manches, le temps que les plus forts s'affirment. J'entends les ragots à côté de moi pendant que j'essuie mon visage sur ma chaise dans un des coins du ring. Ça cancane sur les précédentes victoires, y aurait jamais eu qu'un gars qu'avait terminé les combats dès le premier round, et il était arrivé une fois que deux combattants se mettent des droites pendant plus d'une journée avant qu'un des deux ne s'écroule sur le sol. Que des histoires passionnantes.

J'zyeute quelques instants alentours, toujours pas de nouvelles des Marines que j'ai contactés. Ils se sont paumés en chemin ou quoi ? C'est quoi ces petits bras qui comprennent pas les indications qu'on leur donne. J'espère qu'ils arriveront avant la fin des combats, sinon j'aurais fait tout ça pour rien.

« ATTENTION ATTENTION, LE ROUND 2 VA COMMENCER ! »

C'est reparti pour briser des mâchoires. J'ai les veines qui palpitent et les muscles qui gonflent, ça va dérouiller sec.
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Wade est taiseux, assis dans l'un des angles, il se laisse infecter par cette air vicié, cette aura glauque qui imprègne les bas-fonds, cette chaleur ordurière qui le ronge peu à peu, ce chancre presque tangible qui transforme la plus chétive des brebis égarées en le plus violent des monstres sanguinaires. Les sonorités s'atténuent avant de s'estomper et tandis que ses phalanges se creusent lorsque ses pognes se cimentent, que tout son corps se met à se contracter dans un seul et même élan, que ses yeux se compriment et s'injectent d'hémoglobine, il rentre dans un état second.  Le petit blond a su savamment tirer son épingle du jeu, il valait son pesant d'or ou tout du moins les quelques liasses que les plus fous avaient parié sur lui,  il s'est prit de copieux gnons dans le portrait mais il a en a évincé deux et pas des moindres. Tout en finesse, le gus est balancé à l'instar d'un félin, rien de superflu, juste ce qu'il faut pour évincer les plus cons et filtrer davantage. Les pommettes tuméfiées, l'arcade boursouflée, ont presque fusionné tant leurs volumes se sont décuplées, le révolutionnaire se fait asperger la gueule d'eau fraiche tandis que le coach s'applique à serrer une compresse le long de sa tempe.

"Te bile pas c'est que deux points de suture " qu'il débite

"Prend un coup de flotte, allez bois un peu d'eau fraîche ! "


Au goulot, le liquide lui arrache la trachée et décape ses boyaux. Le genre de boisson qui te réveillerait un lascar six-pieds sous terre, assez caustique pour te labourer les entrailles, pour mettre en abîme toute ton existence dans un simple shot, de la chaux vive qui t'harponne l'intestin d'une traite et te cramponne à la vie. Les deux ou trois gorgées qu'il ingurgite suffisent à le remettre d'aplomb tandis qu'il se cogne le poitrail avec la plat de la paume comme pour réengager les hostilités.

"Fais bien gaffe au Barbu, c'est un habitué du coin ! "

Wade ne l'entend pas, ne l'entend plus, ses mirettes se fixent sur l'homme-poisson restant et son fiel prend le pas sur le reste, sur tout le reste. Le gong amorçant le second tour n'est qu'une délivrance pour sa conscience trop lourde lorsque son poing vient percuter salement la gueule polygonale du chat à branchies et l'envoie bouler dans le décor. A chaque frappe impétueuse qu'il assène, il purge le poison de son organisme, il draine cette boulimie de violence qui s'est logée au plus profond de lui, il épure les germes de sa perdition.

Il est plus véloce, il fend l'air comme un shrapnell délivrant ses offrandes ,vif et aiguisé, ses membres s'abattent sans coup férir sur les gueules amochées et tout ce qui vient rencontrer l'arme létale qu'il incarne. Salement efficace, l'arène devient un pugilat où l'hémoglobine devient une récompense, une offrande aux chiens enragés du dehors qui glapissent.  La poiscaille bleutée en prend pour son grade, le révolutionnaire livre une copie martiale de haute acabit. Une feinte à droite, un déplacement à contrepied et un uppercut cinglant dans l'abdomen envoie l'ovipare se télescoper dans Herr. Barbu avant que le tandem heurte l'un des piliers de la bâtisse, fissurant ce dernier de part en part par la même occasion.

Au derrière, l'étuve devient insoutenable, le silence est aussi rare qu'une vierge passé minuit dans les coupe-gorges où les vieilles rombières et autres guenipes affriolent le chaland de passage. La moralité et tout ce qu'elle recouvre s'est fait la malle et lorsque les salves brulantes font courber l'épine dorsale de son vis-à-vis, qu'elles résignent sa victime à jeter l'éponge et implorer la pitié de ses pairs, que le simulacre d'arbitre le fait sortir de la zone de combat, c'est comme si Wade le jetait en pâture à la foule en liesse, à la sentence de l'opprobre populaire.
 
Le barbu et le blondin, un nombre impair taillé pour du combo. Le regard qui traine du côté gauche et qui vient se plonger dans les prunelles malicieuses de l'autre blondasse comme pour se mettre sur la même longueur d'onde, aucun mot, de geste pour traduire l'accord tacite, les vrais s'expriment en se toisant, la lueur dans les mirettes. L'antichambre choisit toujours ses champions et la prestation que Wade a rendu a embrasé leurs passions, l'exutoire choisit son vainqueur et celui qui a su assez l'affriander, le tenir en haleine jusqu'au bout, est acclamé à tue-tête, le plus sale et sans doute le plus violent d'entre eux.

"WADE, WADE, WADE "

Le patronyme du révolutionnaire est braillé, beuglé, déformé dans l'arène. Le pugiliste reçoit ses lauriers, il se voit gratifier du vivat de tous ces adorateurs, un public conquis qui n'a de cesse de l'intimer à plus de violence, à étancher sa soif insondable. Les pouces lèvent en son nom, il est scandé, lui, le natif que tout le monde connaît, l'enfant du pays triomphant, lui l'anarchiste imbuvable et effronté, minant la gueule à tous ces pisse-froid vaniteux et gouailleurs. Le révolutionnaire part grand favori et l'autre blondinet filiforme écope de l'infamie, du blâme, du désaveu de l'audience.  Les pouces dressés vers le sol. Il est hué, honni, conspué, lui le malandrin qui s'est hissé ici par la force des choses, lui l'usurpateur qui schlingue l'eucalyptus, l'œil un peu trop bleu, les traits un peu trop bien léchés pour qu'ils plaisent et séduisent la racaille du cloaque.

Le tandem de blond se lancent contre Herr. Barbu, le méprisé au devant crée une ouverture pour Wade, l'anarchiste saisit l'occasion pour renverser la vapeur et agrippe le blondin sous les aisselles, ses avant-bras bombés en forme de X, le cramponnant solidement. La ferveur populaire l'avait emporté. Le barbu voit le retournement de veste et bourre la gueule du zig comme pas permis. La tronche, les épaules, le buffet, tout y passe tandis que l'autre enflure encaisse sans broncher.

Sale. Abject, opportuniste, c'était le champ lexical qui convenait le plus à l'anar.


Dernière édition par Wade le Mer 14 Oct 2015 - 17:49, édité 1 fois
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Pas très agréable de s'faire tataner la tronche par deux armoires à glaces qui sont aussi belliqueuses que musclées. J'sens que j'vais devoir me refaire une beauté avant d'quitter cette île de malheur. Si j'réussis à la quitter en un seul morceau. P'tain. J'entrouvre les yeux de temps à autres. J'me débats comme un forcené, mais le colosse blond derrière moi me tient bien, le salaud. Manœuvre habile pour se donner toutes les chances. M'est avis que ce type là sait utiliser toutes les combines pour gagner. J'sens mon sang me dégouliner du visage, une mandale après l'autre, ils sont en train de réduire mon visage en bouillie.

J'donne un coup de pied vers l'avant ce qui me permet de tenir le barbu à distance pendant un court laps de temps. Intervalle qui me permet d'observer un changement dans la salle. Les spectateurs qui assistent à mon calvaire sont plus nombreux. La plupart se réjouissent de voir que le minot qui leur a fait perdre plein de thunes depuis le début des rencontres est en train de se faire laminer. Seulement, dans l'tas, j'vois une tripotée de tronches dont l'attention ne semble pas le moins du monde attirée par ce qui se passe sur le ring.

« J'ABANDONNE ! »

De toute façon j'en pouvais plus. Le géant blond me lâche et les juges interrompent le massacre, juste le temps que je puisse m'extraire de la cage. J'me sens complètement vidé. Si le combat s'était fait à la loyale, j'aurais pu gagner, j'le sens. Pas grave, de toutes façons, tous ces cons ont perdus, je m'efforce de produire un sourire ravi, et au moment où j'passe la limite du ring, j'émets un long sifflement.

C'est le signal. Mes hommes se mettent aussitôt en mouvement devant toute l'assemblée de malfrats surpris. Tous ces gens ont affaire à une troupe d'une vingtaine de Marines d'élite. Sélectionnés spécialement pour l'occasion. Ils ont mis du temps à arriver, j'ai failli clamser. Dans l'brouhaha qui s'installe dans la salle, j'repère quelques personnes qui tentent de fuir par quelque porte un peu camouflée. Je la repère de loin, ma grosse bonne femme du départ. Celle-là, j'peux pas la laisser s'échapper. En quelques foulées, bien qu'exténué, j'arrive aisément à coller au cul de l'énorme tas de graisse qui s'enfuit devant moi. Elle prend pas la direction de la sortie... Je la suis sans me faire remarquer, juste pour savoir ce qu'elle fricote.

Oh, bordel.

Par l’entrebâillement de la porte par où elle est entrée, j'la vois ôter successivement une kilotonne de vêtements. Des dizaines de pulls et de pantalons. Elle enlève de son visage différentes strates de maquillage destiné à la faire paraître plus grosse qu'elle n'est, des extensions de peau pour camoufler son des dehors d'énorme dondon, un joli minois. Jamais j'me serais douté... Tout à coup, j'éprouve des remords à pas l'avoir payée pour ses services. Totalement transformée, une jolie robe vite enfilée, un maquillage refait rapidement, cils et lèvres principalement, Allie Stockholm, ou qui que ce soit d'autre prend la direction de la sortie.

« Coach ?
-Qui êtes vous ? Feint-elle.
-Vous m'faites marrer ma jolie. C'est pas parce que vous enlevez vos vêtements qu'on vous reconnaît pas. Alexandre Kosma, vous vous rappelez.
-Oui, oui... Certainement... Je ne pensais pas que...
-Que je vous reconnaîtrais ? Je vous ai suivie quand vous avez quitté la salle des combats.
-Ah. Vous êtes dans un état pitoyable, vous feriez mieux de filer et de vous trouver un bon infirmier avant que ces Marines ne vous tombent dessus.
-Ils ne me feront rien.
-Vous ?
-Je ? Il ne tient qu'à vous qu'ils ne vous fassent rien non plus, coopérez avec moi et vous serez libre.
-Comment ça ?
-J'ai plus gros poisson que vous à ferrer.
-Hm. »

La demoiselle réfléchit quelques instants, avant d'acquiescer. J'lui conseille de me suivre sans faire d'histoire. Direction la salle des combats. J'y retrouve les collègues. Quelques mots avec certains d'entre eux. Selon leurs dires, ils ont arrêté plus des trois quarts des gars. J'me tourne vers la cage où le Barbu et Wade gambergent comme des lions en cage.

« Alors, le petit blond abandonne pour faire des coups en traître ?
-J'suis pas sûr d'avoir été le premier à trahir l'autre, n'est-ce pas ? J'vous laisse vous démerder avec le gars qui vous interrogera, il sera sans doute moins commode que moi cela dit.
-Vous savez, les hommes de Mogaba, suffit de leur graisser la patte... Votre opération sur une île comme Las Camp est vouée à l'échec.
-Aucun de ces hommes n'appartient à la division de Las Camp, nous sommes tous des Marines d'élite envoyés incognitos pour frapper. J'ai le sentiment que si Mogaba l'avait su, l'opération ne se serait pas déroulée avec autant de succès. »

J'laisse Wade réfléchir à sa condition. Il a l'air intelligent, pas l'genre à s'laisser enfermer bien longtemps. Il trouvera sûrement un arrangement avec un collègue. Moi j'vais m'occuper de l'interrogatoire de ma p'tite protégée. J'sens que ça va être une partie de plaisir. J'lance un vague salut à mes coéquipiers puis j'quitte les lieux, suivi de prêt par mademoiselle.

D'abord, me faire soigner la face. Ensuite, lui tirer quelques vers du nez. Ça sera pas de tout repos, il est possible que je la garde plus d'une journée en observation... Elle m'en voudra pas, je lui épargne quelques années de prison. Et tout ça parce que sa tête me revient. En tout cas plus que n'importe quel type à qui j'me suis frotté aujourd'hui... Ça s'comprend j'imagine.
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L'alter ego se défile comme la fiotte misérable que sa nature profonde lui susurre d'incarner au coin de l'oreille,  il se calfeutre derrière son insigne doré sur tranche pour se légitimer, pour se justifier de toute sa couardise, de sa lâcheté insondable, immorale pour le brin d'égo rassemblée dans le creuset sans fond que sont ces arènes clandestines. Il abat sa dernière carte, brûle sa dernière allumette et crache son nuage mentholée une dernière fois, et révèle le savant pot-aux-roses.  Prendre la tangente reviendrait à s'abaisser au même standard de médiocrité que ce gars qui le toise aux tréfonds des globes, aucun des gars du bouclar' pourra se carapater sans accroc, sans montrer pâte blanche aux gaziers en uniforme, le besoin viscéral de se sentir utile au bien commun, de supplanter la sélection naturelle de mecs infiniment plus méritants que des lavettes en uniforme et l'autorité procuré par leur plaque.

Chassez le naturel, il revient au galop.  

A commencer par le sourire facétieux et cette pointe de mesquinerie juché sur le rictus du blondinet qu'a servi de congénère de cage au révolutionnaire. Le chef de meute, le condé ratoureux de ce petit lot de marins enorgueillis à l'origine du coup de filet, la gueule boursouflé comme pas deux, le zig a assez morflé pour qu'il ne lui fasse pas tout son laïus et ne lise ses droits au révolutionnaire. Il se contente de viser au creux des cannes, d'entreprendre de broyer ce dont il a toujours été privé depuis sa plus tendre enfance, de cette frustration rampante dont il nourrit la protubérance pernicieuse.  Il a rappliqué avec un joli brin de femme, les bracelets serrés aux poignets,  l'ouaille qu'il est venu alpaguer dans ces sous-sol abominables et qu'il va faire cracher les liturgies jusqu'à l'aube. Wade le toise, sa gueule d'arriviste s'imprime dans le nerf optique pour ne plus jamais en sortir, ses relents mentholées s'incrustent dans la mémoire trébuchante du révolutionnaire pour ne plus jamais s'en éclipser.

Il sert son speech bien fagoté, se prétend être d'un bois différent que Mogaba, se figure apporter une once de justice dans un gourbi qui mériterait d'être calciné. Tous ces mecs sont faits du même moule, de la même souche malsaine, ont ciré de leurs culs les mêmes bancs,   ils se gorgent de mots et se donnent l'illusion de contribuer et jubilent intérieurement. Celui-là a plus de niaque que les autres, donne un peu moins dans la bienveillance populaire et toutes ses déclinaisons débonnaires dans laquelle verse tous ces clampins. Celui-là  a le mérite de pas trop donner dans la veine.  La langue de bois, Wade l'a lui arraché, il parle franc et vrai, comme un nouveau-né cherchant l'approbation de son vis-à-vis, quêtant l'assentiment pour se gargariser de la justesse de sa conduite.

" Mogaba a bien plus de cordes à son arc que toi et la tripotée de marin d'élite qui te collent aux basques. Il est là quelque part à te zieuter, à fureter comme un chacal assoiffé autour de sa tanière et si c'est pas lui, c'est la centaine de paire de mirettes derrière lui qui te lorgne en catimini. Mogaba n'est qu'une tête parmi tant d'autres que vous autres préférez voir prospérer plutôt qu'écimer."

"T'es un vrai bourdon, le marin d'élite. Tu fais beaucoup de bruit mais tu voles au ras des pâquerettes..."

" Fais donc ta besogne et gamberge comme un coq auprès des tiens, je m'en vais te faire ce plaisir et te suivre au poste, tu pourras te rendre compte de toute la fiente au derrière du papier peint de Las Camp...enfin si Mogaba étouffe pas dans l'œuf ta petite investigation. "


La moue perplexe, il reste de marbre, il cogite en tirant une énième latte tandis que sa paluche osseuse se resserre sur l'épaule de la donzelle qui rechigne à rester immobile. Deux minutes à gamberger qui parurent une éternité avant que le blondin scrutant le faciès amoché de Wade, ne donne le feu vert à sa cohorte de décamper de l'infâme cloaque. Dans leur sillage, le sang versé sur le tarmac irrigue les veines du béton malmené, un capharnaüm innommable d'outils, de déchets composites, de glaires, de transpirations et d'urine en toile de fond: Las Camp dans toute sa splendide déchéance.
 
 
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