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Haki le tour ? Au Fakir pardi !

Ile Maléfique, Villa Rubis, actuel lieu de résidence du Corsaire Jack "Wrath" Calhugan.

Au bord de la piscine, Joseph lézardait comme à son habitude. Depuis l'arrivée des Saigneurs sur l'île, l'ex agent du CP5 avait rapidement trouvé ses marques. Cocktails, piscine, casino. Au bout de quelques jours à peine il connaissait le quartier touristique de l'île comme sa poche. La veille au soir, le boxeur s'était collé une énième cuite au Spirit Lounge (le cabaret number one de l'île) aussi son état actuel était plus proche de celui d'un comateux que d'un fier pirate.  Pour être tout à fait honnête, il ne lézardait pas, il cuvait son vin de la veille après avoir passé la nuit à dormir dehors dans un transat. Son esprit embrumé par l'alcool divaguait, faisant la navette entre les différentes vies de Joseph, ses souvenirs se rappelant à lui par vagues. Sous les paupières closes du boxeur, l'univers évoluait. La piscine se retrouva soudainement bien plus peuplé qu'elle ne l'était réellement.


Dans l'eau, Mini-Joe éclaboussait un gamin sans visage, riant aux éclats. Ah... Il était jeune et presque innocent à cette époque. Persuadé comme il était que sa volonté suffirait à plier le monde à ses désirs. Le gosse leva les yeux sur lui et sourit de toutes ses dents de lait.

"Alors, on a réussi ? On est d'venu Roi du Terminal ? Tout l'monde y connaît not' nom et l'vieux Bill est fier de nous ?"

Bizarrement, Joseph ne se sentait pas ivre. Il avait conscience que la situation était anormale mais cela ne l'affectait pas particulièrement. Il allait répondre quand un autre lui apparut au bord de la piscine. Le transat se transforma en un tas d'ordures au sommet duquel trônait le Roi Joe et sa face couverte de pustules.

"Roi du Grey T ? Un peu qu'on l'est devenu ! Quand l'vieux Bill s'est fait suriner, on a fait c'qui fallait qu'on fasse. On a cassé des têtes, planter des gars, fais tout ce qu'il fallait pour s'élever. La volonté c'est de la merde, y'a que la force qui compte. Si t'as pas le pouvoir, t'as que dal'. C'est une leçon qu'on a appris à la dure."

Crack Joe hocha la tête en silence en s'écoutant. Il avait raison. C'était une leçon difficile à apprendre pour un gosse. La vision du corps sans vie du vieux Bill étendu sur le tas d'ordures ne l'aidait pas. Bill avait été pour Joseph ce qui se rapprochait le plus d'un père. C'était un homme bon et pourtant... La vie le lui avait repris. Dur à entendre comme leçon. Le monde entier ne tournait pas autour de toi, tu ne peux le soumettre à ta volonté. Si tu veux quelque chose, tu dois le prendre de force. Si tu veux que le monde évolue comme tu le souhaites, alors tu dois être cruel, sans pitié. C'est ainsi que tu te places au sommet de la chaîne alimentaire.

"Mais on trouve toujours fort que soit. Je suis bien placé pour le savoir."

Ah, ce costume noir, cette cravate impeccable et ce sourire sans défaut. L'Agent Joseph Patchett était là, secouant la tête. Recruté par la force au sein du Cipher Pol, forcé à obéir, jamais maître de son destin. L'Agent Patchett avait fait l'amère expérience de la réalité. Il avait mesuré à quel point le monde était vaste et combien lui même était ridiculement petit, ridiculement faible. Il n'était rien de plus qu'un numéro, un pion évoluant sur un plateau dont les dimensions et les enjeux lui échappaient complètement.

Derrière l'Agent Patchett se trouvait l'Agent Séparou, son mentor, l'homme qui avait ridiculisé le Roi Joe. Séparou souriait de toutes ses dents, son costume noir était maculé d'une tâche rouge qui s'étendait en s'élargissant au niveau de sa poitrine.

"Tu le savais et pourtant tu n'as pas hésité à me tuer. Moi qui t'avais pris sous mon aile, moi qui t'ait tout appris."

Crack Joe se sentait bouillir. Le spectre de Séparou revenait le hanter à nouveau. Pourquoi l'avait il tué déjà ? Ah oui... Une bonne vieille vengeance à l'ancienne. L'Agent Patchett répondit pour lui.

"Dix ans d'humiliations continues Séparou... Dix ans. Que veux tu... J'ai craqué."

L'Agent Patchett partit d'un rire sonore qui résonna bizarrement aux oreilles de Crack Joe. Suite à ce craquage, sa vie avait totalement changé. Il avait été imprudent et sa trahison s'était rapidement su. Le Cipher Pol n'avait aucune tolérance pour les traîtres. Pour un instant de bref plaisir, il avait dû endurer près de deux ans de traque sur la moitié de Grand Line. Pour un instant de laisser aller, il avait vu sa tête mise à prix. Il était une célébrité désormais.

"Waaaaaah ! Quarante huit millions de Berrys ! Ca c'est une somme ! Alors, on est devenu quelqu'un c'est ça ? On est célèbre ?"

"J'espère qu'on a pas fait tout ça pour rien..."

"On est vraiment devenu le Roi ?"

Non... Bien sûr que non... Crack Joe avait creusé son petit trou à Dead End puis il avait rencontré Jack... A cette simple pensée, le corps tout entier du Crack frémit. Il se souvenait de la plage, de ce duel à l'aube où il avait failli y passer. Il se rappelait la puissance simiesque, il se rappelait le Haki. Les Joseph du passé disparurent, laissant la place à d'autres personnages bien plus sanglant.

Jack lui apparut en mode "Mister Black", tout son corps était recouvert par son Haki. Son petit sourire en coin ne pouvait avoir qu'une seule signification, il le méprisait. Derrière Jack apparurent d'autres Saigneurs. Son équipage... ses amis ? Pouah quelle horreur. Il ne naviguait avec eux que pour avoir une chance d'écraser Jack un jour et de prouver au monde entier qu'il était le plus fort. Il ne les aimait pas et c'était bien réciproque.

"Toi ? Le plus fort ? Me fais pas rire grande gueule ! T'es juste bon à nous casser les oreilles avec ton pouvoir de fillette."

"J'attendais mieux de toi que des cris de lopette t'sais l'aminche."

Hope et Kiril... Ils riaient, le prenaient de haut. Le pire c'est qu'ils avaient raison de le mépriser. Il n'était pas au niveau, il n'avait pas atteint le haut de l'affiche ni n'était devenu le plus puissant. Tout ce qu'il avait réussi à faire était pathétique.

"Il te manque la maîtrise, celle des pros."

La voix caverneuse de Jack sembla résonner dans la tête de Joseph. La Maîtrise des pros... Son corps nimbé de noir en était l'exemple même. La Maîtrise des pros... Ce qui faisait la différence.

"Je t'apprendrai les secrets du Haki mais tu devras aussi bouger ton cul osseux. On a rien sans rien !"

Marcel Pai-Me... Le vieux Maître des Poings Divins apparut à son tour. Il adressa à Joseph un sourire édenté. Le vieil homme était sûrement la personne la plus puissante que Crack Joe n'ait jamais croisé. Que lui avait-il dit déjà ? Armada... Il avait parlé d'Armada. Et le Haki... Il lui en avait parlé aussi.

Le Roi Joe réapparut entre les Saigneurs. Sa sale tête d'adolescent sadique lorgna sur les Corsaires puis cracha un glaviot. Mini Joe et l'Agent Patchett gardaient leurs yeux braqués sur Crack Joe. La tristesse se lisait sur les traits du gosse, le mépris le plus profond sur ceux de l'agent du Cipher Pol.

"C'est eux tes Maîtres ? Pov' merde. Moi j'me serais jamais soumis."

"Décevant... Tu te souviens combien on s'entraînait dur chaque jour ? Combien de fois crois tu que nous ayons frappé le sac de sable ? Mille fois ? Dix mille fois ? Que dal', on a bien dû envoyer un million de coups pour obtenir notre Kraak. Tout ça pour éclater Séparou. Et toi qu'est ce que tu fais maintenant que tu fais face à un vrai défi ? Tu picoles. Tsssk. Espèce de lâche."

"On sera jamais le plus fort alors ? On sera pas célèbre ? Mais... Et notre promesse au vieux Bill ?

Le Crack allait répondre. Il devait répondre. Il était bien ici après tout, il avait trouvé sa place dans ce monde. Jack était un Boss correct après tout. Il pouvait casser autant de crânes qu'il voulait, il avait droit à sa part du butin et avait des hommes qui lui obéissaient. Où était le problème ?

Un orage éclata soudain au dessus de la piscine. La pluie abattit sur les apparitions. Le tonnerre résonna dans la tête de Joseph. Inutile de se mentir à soit même. Il savait très bien où se trouvait le problème. Crack Joe ne pouvait supporter de n'être qu'un figurant, un moins que rien. Il ne pouvait s'y résoudre.



Le boxeur ouvrit les yeux. Au dessus de lui, à quelques centimètres de son visage, se tenait un des sbires de Jack recruté sur Dead End, un feutre à la main tendu en avant. Joseph papillonna des yeux pendant que son cerveau faisait la mise au point. L'autre se figea, n'osant bouger ou dire un seul mot. Il était toujours immobile lorsque la droite de Joseph le frappa en pleine face, l'envoyant plonger dans la piscine. Le Crack se leva de son transat et fit craquer ses articulations. Il savait ce qu'il lui restait à faire.


Dernière édition par Joseph Patchett le Mer 1 Oct 2014 - 22:59, édité 1 fois
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Il n'existait pas de salle de sport sur l'Île Maléfique pour autant que le sache l'ex agent Patchett mais il n'en avait cure. Après tout, ce n'était pas comme s'il avait depuis longtemps dépassé le stade où de simples sacs de sable suffisaient à encaisser ses coups. Coup de bol, il était sur une île dotée d'une jungle luxuriante où de nombreux animaux sauvages devaient évoluer pour le plus grand bonheur des détenteurs d'un forfait ADI.

Les autres membres de l'équipage l'avaient regardé partir sans mot dire. En tout cas sans oser le lui dire. Il faut dire que Joseph et la nature, ça faisait deux. Mais ils savaient aussi qu'il avait un sale caractère aussi se tenaient ils à bonne distance. Seul le fidèle La Fouine emboîta le pas de Joseph et encore, à une distance respectable. L'ex agent haussa un sourcil en le voyant faire, interrogation muette à laquelle la Fouine répondit d'un haussement d'épaules qui parut satisfaire Joseph. Après tout, la position de face de rat au sein de l'équipage serait compromise si le Crack se perdait encore au fond des bois. La dernière fois cela avait duré plusieurs jours et à son retour, il était couvert de blessures. Comme Kiril... Ces deux là étaient incapable de se tenir tranquille et se tapaient dessus dès que Jack avait le dos tourné. La Fouine repensait avec nostalgie à l'époque paisible où il vivait de menues larcins à Dead End. Mais ça, c'était avant qu'il ne sauve la vie de Joseph. Pas franchement sa meilleure idée à parler franchement. Non seulement l'homme était irascible mais en plus il était incohérent. Un coup il picole, un coup il part en forêt au milieu de la nuit. Enfin... Cela lui avait au moins permis d'intégrer l'équipage d'un Corsaire, mine de rien, ce genre de position avait ses avantages.

Le malheureux sbire suivit donc le Crack qui s'enfonçait plus profondément dans la jungle. A mesure qu'ils avançaient, les doigts de l'homme se resserraient plus étroitement sur son arme. On était jamais trop prudent. Au bout d'un moment, le boxeur s'arrêta dans une clairière quelconque. Crack fit craquer sa nuque et se mit en tenue d'entraînement. Dis plus simplement, il fit tomber le haut. La Fouine alla se caler sur un gros rocher présent au centre de la clairière, une dague dans sa main prêt à se curer les ongles. Son instinct lui disait qu'ils étaient là pour un sacré bout de temps.

Le Crack faisait face à un arbre centaine ou millénaire, allez savoir. En tout cas l'arbre était sacrément grand et son tronc particulièrement épais. Joseph ferma les yeux tachant de se concentrer. Il déconnecta son ouïe ultime, essayant de faire abstraction de tout ce qui l'entourait. Dans sa tête, des voix résonnaient toujours. Ou plutôt, sa propre voix résonnait qui titillait son égo plus que sa conscience. Quand il rouvrit les yeux, il lui sembla voir l'Agent Patchett l'observer d'un air dédaigneux. Une vision bien peu amène et qui en disait long sur la santé mental de Joseph, trop de coups reçus sur le crâne pouvait avoir cet effet.

*Chuuuuut... Fais le vide... Pense... Pense que cet arbre c'est Jack. Ouais... C'est Jack... Cet arbre est un putain de gorille...*

Le Crack se concentra et tâcha de visualiser la figure du Corsaire. L'image lui apparut très nettement. Il visualisa la plage où Jack l'avait rétamé et aussitôt il sentit sa colère bouillir en lui. Il devait se maîtriser, réussir à contrôler son pouvoir. Ça devait venir tout seul, instinctivement... Qu'avait dit Marcel déjà ? Un truc sur les sentiments, que le Haki était la manifestation extérieur de ce qu'il y avait de plus fort en nous. Pour ce qu'en pensait Joseph, c'était surtout la manifestation de ce qu'il avait de plus noir en lui. C'était l'incarnation de sa Colère.

Lentement le boxeur ramena son poing désormais nimbé de noir puis il frappa, lentement, sans ajouter de vitesse ce qui divisait la puissance de son coup par deux. L'impact fit un trou en forme de poing dans l'énorme tronc de l'arbre à tel poing qu'on pouvait voir à travers. Le Crack sourit de toutes ses dents, il commençait à piger le truc.


Sur son rocher, la Fouine avait fini de se curer les ongles, il avait aussi terminé de lire le dernier journal, y compris les petites annonces, et s'échinait maintenant à la grille de mots croisés. Incarnation de l'honneur en six lettres. Facile, Amiral. Au dessus de lui le Soleil commençait déjà descendre, il allait faire bientôt nuit. L'homme au faciès de rat observa la clairière d'un regard placide. Celle-ci s'était agrandi au cours de la journée. Les arbres au tronc perforés précédaient ceux qui avaient été renversés qui eux même se situaient avant ceux proprement réduit à l'état de souche. Le Crack avait quasiment terminé d'accomplir son cercle et il n'avait pour ainsi dire pas arrêté de la journée. Tout juste avait il daigné croquer dans le casse-dalle que le prévoyant sbire avait emporté avant de partir.

"Y serait p'tet temps de rentrer M'sieu Joe. Va bientôt faire nuit..."

Son chef répondit par un grognement. Il était exténué. Se servir du pouvoir du Haki aussi régulièrement l'avait vidé. Il ne sentait quasiment plus son poing et ses réserves de rage étaient pour ainsi dire épuisée. Mais Joseph refusait d'abandonner. Faire apparaître l'aura, il y parvenait mais il s'était vite aperçu qu'il n'arrivait pas à la maintenir très longtemps ni à l'étendre au delà de son coude. Il était très loin de maîtriser son pouvoir mais la Fouine avait raison. Il était temps de rentrer et il ne parviendrait à rien de plus ici, au milieu des arbres. Bon... Ça avait quand même été une bonne journée mine de rien. Cela faisait une éternité qu'il ne s'était pas entraîné avec autant d'acharnement et mine de rien, il se sentait bien. Vidé mais bien. Une saine fatigue. Pour un peu il aurait même pu qualifier son état d'heureux.

"Ouais... On rentre. Quand on sera de retour en ville. Trouve moi un endroit où ils ont des charbons ardents. Une forge ou une connerie dans ce genre."

La Fouine leva un sourcil interrogateur. Il avait appris qu'il valait mieux s'abstenir de contester les décisions de Joseph voir même de les questionner mais il ne pouvait s'empêcher d'être surpris. Le Crack lui sourit en retour.

"Parfois il faut savoir se donner les moyens de ses ambitions et pas avoir peur de se brûler au passage."
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Après la meilleure nuit de sommeil qu'il ait passé depuis des lustres, Crack Joe était de nouveau prêt pour l'entraînement. La veille il avait dit qu'il ne fallait pas avoir peur de se brûler. La bravade était à prendre au sens littéral et le fidèle la Fouine l'avait bien compris. Il avait passé la moitié de la nuit à chercher quelque chose pouvant convenir à son irascible supérieur et il avait trouvé. L'île disposait d'une sorte de fumoir ou salon d'opium, allez savoir. L'endroit embaumait l'encens et ils utilisaient des charbons ardents pour propager leurs odeurs. Une belle liasse de billets avait convaincu un employé peu regardant de laisser la fouine repartir avec deux sacs de ces charbons. D'après le gars, il suffisait d'approcher une flamme des charbons pour que ceux-ci se mettent à chauffer comme les flammes de l'enfer. La Fouine, dubitatif, avait voulu tester sur place et avait donc touché l'un de ces charbons. Désormais, la main du malheureux sbire était recouverte de cloques.

Les charbons, pas encore ardents, avaient été disposés comme un tapis sur un sol dur exempt de toute végétation ou herbe susceptible de prendre feu. Les Saigneurs ne tenaient pas à mettre le feu à leur propre villa tout de même. Un certain nombre de membres d'équipage s'étaient rassemblés pour assister au spectacle. Il faut dire que l'info avait vite circulé, le Crack allait tenter de marcher sur des charbons ardents ? Les paris avaient immédiatement été pris. Il faut dire qu'un pirate qui s'ennuyait était prêt à parier sur tout et n'importe quoi. Surtout n'importe quoi. En l'occurrence il s'agissait de parier combien de temps Joseph tiendrait sur les charbons. Un autre pari courrait pour savoir si oui ou non il crierait quand les charbons lui brûleraient les pieds.

Marcher sur des charbons ardents. Une idée originale pas vrai ? Joseph y avait pensé en se rappelant les propos du vieux Marcel. Le Haki ce n'est pas qu'une arme, c'est aussi un bouclier. S'il devait apprendre à faire "tenir" son Haki, quoi de mieux que des charbons ardents sous ses pieds nus ? Le Crack s'était donc mis en "mode Fakir" ce matin. A condition qu'un Fakir puisse être blond aux yeux bleus, se balader en chemise et pantalon de costume. L'homme darda un regard glacial sur le petit groupe rassemblé. Il se doutait bien du pourquoi de leur présence et il s'en moquait éperdument.

"A combien est ma cote ?"

Un murmure gêné parcouru le groupe avant que l'un des pirates qui tenait un calepin entre ses mains n'ose répondre.

"Euuuh... Si vous tenez plus que 30 secondes, vous nous mettez tous dedans. Sauf la Fouine 'videmment... L'a parié que vous tiendriez plus d'une minute."

"Trente secondes hein ? Fiou... Vous êtes dur avec moi là les gars. Va falloir que j'vous prouve qu'il faut pas m'prendre à la légère."

D'un geste, le Crack invita un des gars à allumer les charbons. Ceux-ci se mirent rapidement à rougeoyer , dégageant une légère odeur d'encens. C'était maintenant que l'ami Joseph allait devoir montrer qu'il en avait. Il ferma les yeux un instant et se concentra pour faire apparaître l'aura noire si familière non pas autour de ses poings mais autour de ses pieds, les enveloppant dans une couche protectrice. Il inspira profondément et posa le pied sur les charbons ardents.

Clic. Un des sbires venait de lancer un chronomètre. La tension grimpait en flèche. Les charbons émirent un bruit de chuintement quand le pied nimbé de noir se posa sur eux mais Joseph ne sentit rien, aucune chaleur, aucune sensation de brûlure. Prudemment, il plaça son deuxième pied sur le tapis de braises. Aucune sensation désagréable, parfait. Avec une lenteur prudente, Crack Joe avança parmi les braises effectuant de tous petits pas. Il se concentrait sur son aura, tâchant de la maintenir en place. La colère seule ne suffisait pas, il fallait de la Volonté. Une volonté de fer, une volonté capable de plier le monde à ses désirs. Typiquement ce qu'avait le Crack surtout qu'il avait ici un surplus de motivation. Il ne voulait en aucun cas donner raison aux enfoirés ayant parier qu'il crierai comme une pucelle.

Le Crack parvint au bout du tapis de braises et effectua un demi-tour ses pieds toujours protégés par le Haki. Il transpirait à grosses gouttes, luttant pour maintenir l'aura. Il comptait enchaîner avec une deuxième traversée ! Dans le groupe de pirate, c'était l'effondrement. Seul la Fouine souriait de toutes ses dents, il allait encore s'enrichir grâce au Crack.

Un pas après l'autre. Ne penser à rien d'autre qu'au maintient de l'aura. Le Crack essayait de toutes ses forces mais il lui semblait que ses pieds avaient de plus en plus chaud. Soudain une douleur fulgurante frappa son pied droit, le faisant bondir en avant comme un cabri, mais sans lâcher le moindre son, on avait son honneur. Le boxeur sautillait sur place, soufflant de toutes ses forces sur son pied endolori,   comme s'il espérait pouvoir le refroidir de la sorte.

"Alors... Combien ?"

La Fouine souriait à s'en éclater la mâchoire, son faciès de rat rayonnait d'un bonheur primaire. Le type au chronomètre maugréa avant de répondre.

"Une minute et 12 secondes..."

Le plus fidèle allié de Joseph tendit alors la main au reste du groupe, la paume grande ouverte tournée vers le ciel dans ce geste universellement connu signifiant "aboule le fric". Les autres s'exécutèrent de mauvaise grâce.

"Pleurez pas les gars, j'fais que commencer. Z'allez avoir l'occasion de reprendre des paris. J'compte bien continuer ainsi jusqu'à ce que je puisse tenir 3 minutes complètes. La journée est encore longue. Alors rallumez moi ces charbons, j'veux que ça brûle bien !"
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Crack Joe était debout au milieu d'un vaste espace déboisé qui s'étendait de la Villa Rubis aux premiers arbres de la jungle. Ses pieds l'élançaient toujours. Il faut dire qu'il avait passé la journée de la veille ainsi qu'une partie de la nuit à marcher sur des charbons ardents, littéralement. Alors certes, il s'était depuis enduit les pieds de pommade mais ça ne l'empêchait pas de souffrir. Cela étant dit, le prix à payer était bien faible en échange de l'avancé que cet entraînement lui avait permis d'effectuer.

Trois minutes, un round de boxe. L'essentiel des combats duraient moins que ça, à peine quelques secondes. Il ne restait plus qu'à apprivoiser le dernier aspect du Haki de l'Armement: le bouclier.

"Bon c'est pour aujourd'hui ou pour demain ?"

Face à Joseph, un des membres d'équipage lambda des saigneurs tenait un canon portatif plus gros que lui. L'homme paraissait terrifié et derrière lui, à distance prudente, le reste des membres d'équipage spectateurs remerciait leur bonne étoile de ne pas avoir tirer la courte paille.

"Mais je euuuuh. Si jamais je vous blesse ?"

"Mais puisque c'est moi qui te le demande... Je te dis que je vais rien te faire si tu me blesses."

L'homme au Bazooka semblait à tout le moins dubitatif. Son regard alternait entre son arme et l'homme face à lui. Il avait déjà vu le Crack exploser des crânes pour des broutilles et n'osait s'imaginer ce qu'il subirait s'il le blessait.

"Si tu ne tires pas maintenant, je te jure que je te pends avec tes putain de tripes !"

"Vous l'aurez voulu !"

Joseph fit un pas en avant, l'air menaçant et l'autre se décida enfin à tirer. Le boulet de canon arrivait droit sur le Crack. Il savait ce qu'il avait à faire. Il ne devait ni esquiver, ni frapper le boulet pour le faire exploser. Il devait le dévier.

Le boxeur inspira profondément et fit apparaître l'aura noire désormais si familière sur ses mains. Il adopta une posture plus basse, plus stable et plaça sa main droite, paume grande ouverte devant lui, à la façon d'un sumo. Le boulet arrivait, la main jaillit et...

BOUUUUUM

La main du Crack avait frappé le boulet de plein fouet, le faisant exploser sur le coup. C'était un échec et les manches roussies du costume de Joseph en étaient le témoignage. La fumée n'était pas encore dissipée que le boxeur houspillait déjà le malheureux au bazooka, l'encourageant à tirer de nouveau. Il n'allait pas rester sur un échec.

"Allez ! Encore ! Tire ou je te jure que je vais te buter !"

"AAAAAAH !"

Un deuxième boulet arrivait. Le Crack connaissait son erreur, il avait faire avancer sa main. Il devait accompagner le mouvement du boulet, n'effectuer que le minimum de mouvements. Recevoir l'attaque et la dévier dans le même mouvement fluide, sans brusquer. Comme... Ça !

Le boulet de canon ne frappa pas la paume de Joseph, il la toucha doucement. Pendant un instant, tous crurent à l'imminence d'une seconde explosion mais il n'y en eut pas. Le boulet de canon repartir en sens inverse, suffisamment dévié pour ne pas ôter la tête du malheureux au Bazooka et allant se perdre dans les arbres où il explosa. Parmi les spectateurs, ce fut l'explosion de joie, en tout cas d'au moins une personne. Après la démonstration de la veille, le système des paris avait changé. Il s'agissait de parier sur le nombre d'essai avant que le Crack n'atteigne son objectif, étant donné qu'il ne s'arrêtait jamais avant. Visiblement un petit veinard avait parié sur le chiffre deux et exprimait désormais sa joie en dansant devant ses camarades médusés et un rien jaloux.

Le Crack lui haletait. Il l'avait fait, il avait réussi à dévier un boulet de canon. Il avait bien cru que sa main exploserait cette fois mais non, le Haki l'avait protégé et avait renvoyé le coup. C'était... Parfait. Il devait maîtriser cette technique.

"Encore !"

"Pitiéééééé !"

"J'ai dit, encore ! A moins que tu ne préfères que je m'entraîne avec ta tête ?!"

"Je parie que le prochain lui explose entre les mains !"

"Tenu !"
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