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La fosse

La fosse. Partie I

An 1624 – Ile inconnu – West Blue


De tout temps l’homme a toujours aimé répandre le sang et de préférence, celui de son opposant. Manfred était un de ceux-là. Un homme bedonnant et qui approchait de la cinquantaine. Il avait les yeux de ceux qui ont tout vu dans leur vie. Une mine grincheuse et lassée hantait constamment son visage tant et si bien que celui-ci en a été creusé par le temps et l’amertume jusqu’à devenir son faciès habituel. Il n’aimait personne et ne croyait qu’en une seule chose : les intérêts. Nous sommes tous régis par des intérêts et nous nous accomplissons en les défendant ou en œuvrant pour eux. Bien entendu, cela ne peut se faire qu’au détriment de son prochain. Voilà pourquoi ce jeune loup qui n’avait rien, avait à présent tout ou presque. Oui, il connaissait la nature humaine comme personne et son habileté à déceler les intérêts de chacun en avait fait un esprit avisé et pragmatique capable d’envisager plusieurs solutions à un problème jusqu’à en choisir la plus adaptée.

Cette faculté lui a valu les faveurs de plusieurs pirates ambitieux, de malfrats indépendants et plus régulièrement, de la mafia. Il élaborait pour ses clients des stratégies, des plans d’action ainsi que des placements financiers et, sur chacun de ces aspects, il gagnait une commission bien méritée. Cet esprit acéré avait su se constituer avec du temps et de la patience un portefeuille bien garni ainsi qu’un nombre de contacts impressionnants avec lesquels il nouait des liens le temps d’une opération.

En effet, il ne travaillait jamais longtemps avec les mêmes personnes et jamais deux fois sur un même centre d’activité. Etre imprévisible était l’un de ses credo les plus chers. Toutefois, avec les années, sa meilleure arme qu’était ce formidable esprit dont il était doté s’était révélé être son plus grand ennemi. Une dualité avait pris forme dans ses pensées. Un ennemi impalpable et invisible qui résultait de la somme des prévisions les plus néfastes et les plus dangereuses, la sève de ses craintes et de ses doutes. A présent il n’était jamais seul. Sans devenir schizophrène, il avait nourri un monstre qui sommeillait dans son subconscient au point d’en être devenu paranoïaque au dernier degré. S’il se méfiait de ses potentiels ennemis ou adversaires, aujourd’hui, il se méfiait de tout un chacun et surtout de ceux qui travaillaient pour lui. Dans ce monde, on ne pouvait faire confiance à personne, car chaque être devait satisfaire des intérêts qui leur étaient propres, des intérêts égoïstes. Il savait alors que dans l’ombre gigantesque de l’antre qu’il avait bâtie depuis tant d’années grouillaient des vermines qui ne juraient que par sa mort.

Après un pareil constat aussi amer que sa personne, Manfred avait trouvé une solution à cet épineux problème qu’il s’était lui-même posé. Aussi et parce qu’il ne perdait jamais le nord, il s’en était allé voir la grande majorité de ses comparses en leur exposant la situation. Suite à cela, chacun des concernés en étaient venus à douter des sous fifres qui les accompagnaient. Pour beaucoup, ils étaient entourés d’une vieille garde qui connaissait le moindre de leurs déplacements. Dès lors, éliminer le boss et s’autoproclamer roi n’avait plus l’air si nébuleux que cela. Les prévisions de Manfred s’étant toujours révélés payantes, alors, cette fois aussi, ils furent nombreux à le suivre et à soutenir sa solution : la fosse.

Il s’agissait réellement d’une fosse. D’une gigantesque arène à ciel ouvert dans laquelle étaient purgé dans le sang les collaborateurs qui auraient pu se révéler gênant. Certes, ces derniers n’avaient rien encore fait et pour la plupart, ils n’allaient ô grand jamais nuire aux intérêts de leur chef respectif. Cependant c’était une éventualité et à toutes éventualités il fallait y être préparé. La fosse ou la purge, comme certains l’appelaient, se déclinait en plusieurs éditions qui avaient lieu de manière irrégulière et jamais dans un même endroit. Tout ce qui entourait cette activité demeurait dans le plus grand des secrets. Saboter un plan avant même sa conception, il n’y avait que l’esprit singulier de Manfred pour y avoir songé et surtout, pour avoir mis en application une telle pensée.

L’homme était imprévisible et c’est ce qui faisait sa force. Si la fosse était pour lui un moyen de purger son entourage, c’était également devenu une attraction, un passe-temps, un plaisir, l’un des derniers qui le faisait encore jubiler et saliver lui qui, en plus d’avoir tout vu,  avait déjà tout goutté ou presque. Et c’est ainsi que ses sbires tombèrent les uns après les autres dans le plus grand silence. Bien sûr, il y avait également de ‘réels’ opposants dans le lot. A ceux-là vinrent s’ajouter des bras droits de familles mafieuses, des pirates avec qui il avait fait affaire ou avec qui il avait seulement échangé un mot.

En somme, il y avait de tout ou tout du moins pas tout à fait. Il manquait des marins et autres fidèles du gouvernement. Toutefois, ce n’était ni une erreur, ni un oubli. Non, Manfred se faisait un point d’honneur à ne jamais se frotter au gouvernement. Il le savait, une fois prit dans cet engrenage, on en sortait jamais indemne. De plus, il n’avait rien à gagner à se mettre la plus grande et puissante organisation du monde à dos. En revanche, si lui s’était fait une religion de ne jamais s’approcher du pilier du monde, le gouvernement lui, n’était pas dupe. Nombres d’opérations et de coups de filet avortèrent à cause de Manfred et de son génie de l’anticipation. Il n’en fallait d’ailleurs pas plus pour que la plus grande autorité ouvre un dossier sur lui.

Néanmoins, à de nombreuses reprises, on avait fait chou blanc. Il était réellement insaisissable. Poursuivi par cet ennemi qui n’était autre que lui-même et qui jamais ne lui laissait de répit, il bougeait sans cesse et les endroits qu’il fréquentait ne présentaient aucuns liens les uns avec les autres. Bien qu’il menait la grande vie, il pouvait se soustraire à son rang social pour dormir dans le bouge le plus infâme pour peu qu’il pensait que c’était la chose la plus prudente à faire.



Dernière édition par Sorrento Olin le Sam 14 Juin 2014 - 13:08, édité 4 fois
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Moi dans tout cela je n’étais rien ou presque, juste un rouage de la machine. Une pièce bien huilé qui participait à un ensemble bien plus grand et dont la finalité n’était sujet ni à discussion, ni à avis. Du reste je m’en contentais. Le sentiment de vouloir bien faire et de mettre celle qui m’était le plus chère à l’abri me dominait complètement. Cette mission, et bien, je la voyais comme une épreuve de plus, comme une étape dans la longue traversée que j’avais entreprise. Je n’étais qu’un agent en formation et bien qu’il me plait à penser que j’étais doué dans mon domaine, en vérité, je n’avais que très peu d’expérience.

J’avais pour moi mon opiniâtreté, un trait de caractère qui pouvait sans doute me desservir à l’avenir, mais que je cultivais naturellement. Comme un loup traquant sa proie, je ne renonçais jamais. D’ailleurs, je m’étais même porté volontaire pour cette mission. L’idée était de retrouver Jules, un homme qui jouait du couteau aussi bien dans ses activités criminelles qu’en dehors. Principal bras droit d’un des pontes locale, l’homme était à l’image des moyens qu’il employait : Efficace et discret. En bon agent, j’avais étudié son dossier. Il avait vu le jour pour la première fois dans une maison des plaisirs. Issu d’une relation d’une nuit entre une prostituée et un homme de passage, il avait partagé son enfance entre les petites débrouillardises du quotidien et la maison close dans laquelle sa mère travaillait. Toutes les filles avaient contractées nombres de dettes et pour les éponger, elles étaient contraintes à exercer ce métier ingrat. A l’âge de raison, Jules s’était fait une promesse, celle de sortir sa mère de cet enfer et ce, par n’importe quel moyen.

Le temps s’écoulait à mesure où grandissaient les vices de Jules. Sa promesse comme sa morale l’avait quitté et il n’était plus qu’un homme cupide comme il en existe tant d’autres. Cela faisait déjà quelques mois qu’il avait racheté pour une poignée de Berry, enfin, par une décharge de plomb, l’établissement des plaisirs dans lequel sa mère et d’autres pauvres filles travaillaient. Loin de la sortir de cet enfer, il l’avait laissée croupir dedans et avait coupé tous liens avec elle. Pour lui, seul comptait la rentabilité de ses investissements. Malgré ce qu’il avait fait, sa mère avait toujours gardé une place pour lui dans son cœur et celle-ci s’en voulait même. Selon elle, c’était de sa faute s’il était devenu à ce point mauvais. Dans cet environnement dans lequel il avait grandi, il n’aurait pu en être autrement et par conséquent elle ne le blâmait pas. Il voulait changer le monde, mais c’est le monde qui l’avait changé. Cette rengaine s’appliquait décidément à nombres de cas.

Après s’être fait un nom dans le métier, Jules entra au sein d’une famille mafieuse dont les jeux d’argent étaient la spécialité. Bénéficiant alors d’une protection, il jouissait désormais d’une immunité qui le mettait à l’abri des tracas qu’il avait pu connaître quand il n’était encore qu’un petit escroc. Couplant son activité première, celle des filles de joies avec celle des maisons de jeu, il avait rapidement provoqué l’admiration du chef de famille qui l’avait nommé bras droit au nez et à la barbe d’anciens de la famille. Sa réussite fut rapide et fulgurante et provoqua dans son sillage de la jalousie de la part d’envieux. Les mêmes qui chuchotèrent à l’oreille du boss des rumeurs de trahison à l’encontre de Jules. Alors, couplé aux paroles de Manfred, le parrain n’avait pas hésité longtemps à le mettre dans la longue liste des potentiels problèmes à faire disparaître.

Malgré cela, Jules échappa de justesse à la première rafle. Loin d’avoir eu de la chance, il reçut surtout un bon tuyau d’une de ses travailleuses qui n’était autre que sa mère et qui, par amour et malgré le comportement de son fils, l’avait prévenu du danger à venir. Danger qu’elle connaissait par le biais d’un de ses clients trop bavard, un gros bras qui était justement en charge de la première rafle. Lançant un dernier regard à sa mère qui s’était fait battre pour l’avoir prévenu, il n’eut pour elle qu’un bref instant. Le temps d'un regard échangé qui en disait toutefois long sur les sentiments qu’il lui portait toujours sous cette crasse d’immoralité qu’il avait laissé le recouvrir année après année.

Fuyant de toutes ses forces, Jules avait réussi à déjouer le piège avant qu’il ne se referme sur lui. Seul et sans un sous, en cavale, il n’avait plus rien si ce n’est du temps pour lui. Du temps qu’il mit à profit pour réfléchir sur la vie qui était la sienne et sur ses erreurs. Notamment la promesse qu’il avait rompue. C’était ça qui pesait le plus lourd sur ce cœur qu’il avait échangé contre une pierre. Longeant les côtes pour éviter le monde et les problèmes qui allaient avec, son regard s’était attardé sur son reflet troublé à la surface de l’eau. Un costume blanc impeccable l’habillait de la tête aux pieds. Des mocassins de bonne qualité, un chapeau haut de forme, lui et sa tignasse blonde avait tout du parfait dandy. Ce n’est cependant pas cette image qu’il vit, non, c’était celle d’un enfant de la balle. L’image d’un petit garçon au nez coulant et à la salopette usée par le temps.

Reprenant ses esprits, il finit par arriver à une boutique où l’on pouvait louer des barques et, dans une moindre mesure, se restaurer. Une fois accoudé au comptoir, Jules ne mit pas longtemps avant de s’apercevoir que l’ensemble des yeux de ceux qui peuplaient l’endroit étaient braqués sur lui. Ni une ni deux, il se mit en garde avant d’en découdre avec la bande de malfrat. Dans cette bastonnade générale, il avait au moins un allié, ou tout du moins, une personne qui ne s’en prenait pas à lui mais aux mêmes bandits. Dans un pareil contexte, c’était toutefois un allié se disait-il. A la fin, alors que la boutique ne demandait qu’à s’effondrer, il ne restait plus que deux hommes debout : lui et moi.




Dernière édition par Sorrento Olin le Dim 8 Juin 2014 - 20:43, édité 2 fois
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Le premier contact fut ainsi initié. Jules n’en avait jamais rien su, mais lui qui avait tout fait pour éviter les pièges était justement tombé dans l’un d’eux. Pareille à une toile tissée par une araignée experte, les quelques hommes de mains présent dans cette boutique étaient en réalité des sbires du gouvernement. Ces derniers n’avaient servi qu’à arranger une rencontre inopiné entre lui et moi. Ainsi, cela me permettait de rester à ses côtés, lui dont le temps était à présent compté. Affligé et fatigué par la rixe, j’en avais profité pour faire le tour du comptoir et me servir un verre. Curieusement, cela avait amusé Jules qui lorgnait sur le sien, vide. Je m’approchais alors pour verser le contenu de la liqueur qu’il fit disparaître cul sec. Moi j’avais dû m’y reprendre à deux fois, la boisson n’avait chez moi que peu d’intérêt. On pouvait même dire qu’elle me dégouttait tant le goût était infecte et les effets dévastateurs sur les malheureux qui peuplaient les eaux.

Après ce verre et quelques autres, je n’avais échangé aucun regard particulier avec lui dont le visage affichait à présent une mine résignée. Je pensais que c’était parce que fuir lui était insupportable et qu’il en avait assez, car il avait surtout été habitué à mener la grande vie dernièrement. Aujourd’hui je sais qu’il n’en était rien. Je crois que dans son escapade il avait enfin prit toute la dimension des choses qui importaient comme le choix de celle qu’il avait aimé plus que tout au monde. Tout ce qu’il avait conquis et possédé l’avait abandonné et il n’y avait qu’une seule chose qu’il n’aurait jamais pu se payer et qui était resté à ses côtés : l’amour inconditionnel d’une mère pour son fils.

Un à un, les faux bandits quittaient les lieux sans être inquiété ni poursuivi par moi ou par Jules. Lui était toujours assis au comptoir ou ce qu’il en restait. Là il ne bougeait pas ou presque, ses pensées l’absorbaient totalement, mais une chose était sure : il ne fuirait plus. Pour ma part j’étais assis au coin opposé sur l’une des tables qui, miraculeusement, était encore intact. Une main sur mon verre, l’autre posée sur mon genou, j’attendais, j’observais. Aux yeux de Jules, je devais être sensiblement dans la même situation : recherché et fatigué de fuir.  Tandis que le ciel déclinait à l’horizon, je faisais régulièrement le tour des lieux, errant comme un jeune loup, sans but apparent.

Non loin j’avais ramassé deux pieds de chaises brisés et en avait lancé un en direction de Jules. Bien qu’inerte, il avait tendu le bras dans la bonne direction et ce, sans préavis aucun. Comme je le pensais, lui aussi était en alerte et s’économisait pour le combat qui allait suivre et ce dernier n’allait plus tarder. Aux dernières lueurs du jour, j’avais pu assister à un déploiement de force tout autour de notre position. Rapide et discret, mais pas encore assez, les hommes de mains avaient désormais prit position et n’attendaient plus qu’une seule chose, le feu vert de leur chef. Lui aussi était dans l’attente. Oui, il souhaitait que l’astre du jour s’éclipse au plus tôt pour pouvoir commencer les hostilités. Dans la nuit noire, leur surnombre serait un atout de plus et il le savait.

Le jour s’était enfin fait chassé par la robe sombre de la nuit. La température avait chuté rapidement et le vent agité du littoral n’arrangeait rien à l’affaire. Au contraire, on dirait qu’il s’était levé simplement pour acclamer la bataille qui allait être livrée. Comme des chasseurs traquant leurs proies, ils sortirent tous de l’endroit où ils se terraient après le simple signal de leur responsable. Une nouvelle fournée était arrivée et tandis qu’au dehors régnait l’agitation, au-dedans, tout était très calme.

Jules venait de poser son bâton sur le comptoir et arrangeait quelques cocktails enflammés. Tandis que moi je comptais à voix haute les différents ennemis qui allaient se présenter à nous. Quarante-quatre à quelques ratés près, le compte devait être plus ou moins celui-là. A mesure qu’ils approchaient nous fermions les quelques doubles portes qui donnaient sur le hall principal. Oui, Jules était résigné à ne plus fuir, certes, mais il n’était pas non plus du genre à se laisser faire, non. S’ils voulaient sa peau, ils l’auraient, mais pour chère et non sans se battre. Bien que nous fussions rigoureusement opposé dans notre façon d’appréhender la vie, je portais une certaine estime quant à la résolution qui l’animait.

J’avais calqué, pour ma part, ma perception des choses sur la sienne. Il était inutile de fuir et bien que je n’étais en rien recherché par les hommes de Manfred, je savais pertinemment que me retrouver à ses côtés me donneraient, d’une façon ou d’une autre, un ticket d’entrée tout frais payé pour la fosse. Pour l’heure, nous étions barricadés à l’intérieur avec un simple moyen de repli, l’escalier qui menait à l’étage et que j’avais simplement désigné à l’aide du pied de chaise que j’avais en main. Après un signe entendu de la part de mon acolyte de la soirée, les choses sérieuses pouvaient enfin commencer.

Un bruit sourd et puissant s’était levé du côté de la porte principale. Lent et régulier, ils devaient s’y prendre de l’autre côté avec un bélier de fortune. Puis, une à une, les vitres avaient commencé à se briser sous les jets répétés de nos assaillants qui lançaient pierres et cailloux. Une fois les fenêtres mal en point, ils se faufilèrent au-dedans tandis que la porte, elle, tenait encore bon. Grâce à cela, les hommes de mains de Manfred pénétraient dans le hall par petit groupe. Les uns après les autres, ils s’élançaient dans ma direction avant de se faire cueillir par le bâton de la justice. Un coup de pied à la taille paré par mon tibia, un coup de poing au visage esquivé de justesse suivit d’un coup de boule en plein nez, mon style était brutal, simple, mais drôlement efficace.

Il fallait aussi reconnaître que ces malfrats n’étaient pas à la hauteur. Il ne pouvait décemment pas faire jeu égal contre moi qui avait été façonné frappé et forgé par un entrainement dur et répété. Telle une lame rougeoyante qui prenait forme et vie sous le marteau de la justice, j’avais été éprouvé pour devenir une arme. Une arme effilée et droite, tranchante et vive afin de foudroyer mes adversaires comme je le faisais lors de cette nuit. Les corps inerte jonchaient peu à peu le sol à mesure où m’échappait toujours un peu plus de force et d’énergie.



Dernière édition par Sorrento Olin le Dim 8 Juin 2014 - 20:56, édité 2 fois
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Dix !

J’avais crié ce chiffre vers mon compère d’une nuit. Concentré, il se contenta d’agiter son bâton pour me signaler qu’il avait bien compris. Les corps plongeant des ennemis se faisaient toujours plus nombreux et quant à leur agressivité, elle semblait trouver son origine dans la peur. Ils avaient la frousse et se battaient de toutes leurs vies. Poussé par une voix qui les menaçaient de finir à la fosse eux aussi, ils redoublaient d’ingéniosité et de roublardise dans leurs attaques répétées et à présent combinées. L’un s’emparait de ma jambe pour m’immobiliser et pendant ce temps, un autre m’empoignait par la taille. Pris au piège, je pouvais observer les yeux fous et désespérés de cet homme qui s’avançait en tapotant une batte qu’il tenait à la main.

Sous pesant celle-ci, il prit son élan et me frappa en plein dans l’abdomen non sans toucher celui qui m’empoignait jusque-là. Tous les coups étaient permis. Après un tel impact, j’avais titubé sur plusieurs mètres, le corps chancelant et déséquilibré, j’avais su garder mon calme pour finalement jeter mon bâton sur un lustre qui menaçait de tomber au moindre choc. S’avançant toujours, mon bourreau n’avait pas anticipé la chute de cette masse brillante qui finit par avoir raison de lui.

Sa batte avait alors roulé sur le sol avant de rencontrer la pointe de ma chaussure. D’un geste adroit, je l’avais ramené sur le dessus de celle-ci pour finalement la jeter en l’air en direction de ma main qui l’attendait avec hâte. Posée à présent sur mon épaule, la main dans une poche et un sourire faussement confiant sur le visage, c’était à mon tour d’avancer. Frappeur à la batte ! En un élan j’avais dégagé deux des leurs qui venaient de s’encastrer sur le mur qui menaçait de se rompre à tout moment. Loin de se décourager, mes assaillants revenaient toujours à la charge. Le pied en avant, l’un d’entre eux avait pris ma batte en plein sur le genou, après quoi, une poussette d’épaule eut raison de lui lorsqu’il alla choir sur le sol, KO pour le compte.

Dans ce bref moment d’accalmie, j’en avais profité pour observer comment se débrouillait Jules. Les gestes fluides et détaché, l’homme se contenait de jauger les coups de ses adversaires avant de contre-attaquer. Il avait sans cesse des couteaux qui jaillissaient comme par magie entre ses doigts et dans ses mains, ces lames étaient redoutables. Étrangement, il ne cherchait pas à tuer, mais à en finir en un minimum de temps. Ainsi, il lançait les couteaux comme des poignards au niveau des cuisses ou des épaules. Un à un, les hommes de mains de Manfred tombaient comme des mouches devant cet adversaire qui leur offrait une opposition farouche ainsi qu’une petite démonstration de son immense détermination.

Un bruit sourd me rappela bien vite à mes propres tâches. Là, je vis que la porte principale venait de céder et que par voie de conséquence, les vermines qui pullulaient au dehors pouvaient à présent nous submerger de toutes parts par leurs nombres écrasant. Loin de se démonter, Jules envoya ses cocktails dans leur direction. Une véritable barrière de flammes avait jailli du sol et à elle seule, elle contenait la menace tandis qu’ensemble, nous montions à l’étage afin de faire face sur la plus haute marche de l’escalier. Là aussi, nous pouvions alors les contenir dans un petit espace où ils n’auraient d’autres choix que de livrer bataille par devant et l’un après l’autre.

Les flammes s’estompaient sous les coups de vestes et les piétinements répétés de nos opposants qui étaient allé jusqu’à chercher de l’eau sur la plage afin d’atténuer le feu qui mourrait petit à petit. Continuer d’avancer ! Encore cette voix, cette même voix guttural et  puissante qui ne cessait de jaillir de l’extérieur et qui enhardissait par la peur le cœur de ces malheureux qui n’avaient d’autres choix que de nous livrer à la fosse pour pouvoir y échapper eux même. Ils ne tardèrent d’ailleurs pas à se présenter à nous. Des coups de bâtons volaient vers notre direction. Des pieds et des poings qui rencontraient fréquemment ma garde et qui, pour certains, la perçait.

20 !

Je souriais à ce diable de Jules qui osaient encore compter quand nous étions à deux doigts de sombrer. Il était dans un état bien plus alarmant que moi, mais pourtant, il semblait avoir le cœur léger et même content d’être en ici en cet instant. C’était comme si à chaque coups donnés ou encaissé, il châtiait sa propre âme pour tous les méfaits qu’elle avait accompli pendant sa carrière de criminel reconnu. Quelques instants plus, ses jambes ne le portaient plus, ses bras ne bougeaient plus. Ce n’était plus qu’un sac de frappe entre les mains de nos assaillants qui donnaient du cœur à l’ouvrage en tannant le cuir de la peau du malheureux avec force et rage. Ne pouvant plus résister, il me lança un dernier regard entendu avant de tomber au sol, plus mort que vif.

Moi je continuais à me battre. Bien que je n’avais qu’à me laisser sombrer pour être pratiquement sur de finir à la fosse en compagnie de mon prétendu allié du jour, un rien de fierté me tenait encore debout. Je repoussais tant bien que mal mes ennemis qui n’étaient plus qu’une grosse dizaine ou bien peut être moins. En réalité, comme j’avais les yeux boursouflés, je voyais double. Un poing droit devant moi, le même à quelques centimètres de là, il me fallait esquiver l’un d’eux et faire un choix. Malheureusement, je n’avais pas esquissé le bon pas et m’étais pris un direct en plein entre les deux yeux.

Alors que je tentais de revenir à moi et que mon être entier faiblissait en menaçant de s’écrouler à chaque instant, je pouvais entendre très distinctement le grincement du bois des escaliers se tordre. Ils gémissaient littéralement sous l’effet d’un poids bien trop lourd pour pouvoir être supporté. Malgré tout, j’entendais les pas s’approcher encore et encore. Dans ma tourmente, j’ai pu ouvrir un œil pour voir mes ennemis se mettre en rang de chaque côté de l’escalier afin de laisser place à une montagne.
Son ombre était complètement sur moi, son emprise également. Là, une fois face à face, j’ai pu très distinctement me rendre compte que j’étais tombé sur un client sérieux. De ceux qui pouvaient faire capoter ma mission, mais avant même que mon esprit ne me pousse trop loin dans la réflexion, son poing avait rencontré mon corps qui semblait s’être disloquer sous l’impact. Comme une poupée de chiffon, j’avais traversé plusieurs cloisons pour me retrouver prostré sur le sol, éteint.



Dernière édition par Sorrento Olin le Sam 28 Juin 2014 - 21:14, édité 1 fois
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La fosse. Partie II

Eveil. Réveil. Mon corps est engourdi et me semble même étranger, comme si j’avais été drogué. Je tente de reprendre connaissance, mon esprit souhaite sortir de ce marasme dans lequel il a été plongé. Combien de jours se sont-ils écoulé depuis notre vaillante résistance dans cette taverne ? Je n’en sais rien encore. Cependant, mon corps ne me fait plus mal, je me sens même bien, apaisé. Le doute n’est à présent plus permis, j’ai bel et bien été drogué puis conduit en ce lieu qui, lui aussi, m’est totalement étranger. Cela ressemble à l’antichambre de l’enfer. Il y a du bruit, des sons obscurs et glauques provenant de cet orchestre qui braille et crie plus qu’il ne chante. Leur accoutrement est aussi douteux que ne l’est leur musique : des tenues de cuir comme cousu à même la peau. Les visages peint et la langue plus rouge qu’à la normal, de toute évidence, de la drogue ils avaient dû en consommer aussi. Gageons que le contenu fut toutefois bien différent de celui que l’on m’a administré.

Soudain je m’enferme en moi. Et s’ils en avaient profité pour me questionner sous l’effet de cette substance ? Non... Non, s’ils avaient déjà tout découvert, je ne serais déjà plus et la présence même de visages recherchés ici me rassure, je suis bien à l’endroit où j’avais prévu d’être : à Perdition. Le gouvernement avait en effet entendu parlé de la veille des combats de la fosse et Perdition était le nom qui lui était donné. Il s’agissait en réalité de donner, à ceux qui avaient été choisi, tout ce qu’ils voulaient avant qu’ils ne combattent dans la fosse. Ainsi, ils n’auraient plus de regrets et le cœur léger,  ils pourraient distraire Manfred et sa clique d’une manière plus divertissante que s’ils entraient dans la fosse déjà plus mort que vif.

Ainsi je me retrouvais dans cet endroit, un espace dont les murs étaient teintés de rouge écarlate. La fumée des cigares est partout et chaque individu ici est vêtu plus richement que n’importe quel bourgeois à des milles de là. Ils sont souriants et vagabondent d’un canapé à un autre, d’un carré de cuir au comptoir en chantant et en buvant. Des femmes les aguichent de toutes part, des femmes de toutes beautés et soigneusement choisi pour nous égailler tout au long de cette soirée. Les rires gras des uns côtoient les moqueries des autres. A les voir, on ne croirait pas qu’ils se battraient dans quelques heures pour sauver leurs vies, ou tout du moins, essayer de faire reculer l’inéluctable.

Je tentais de me frayer un passage vers la scène improvisée où s’excitent les excentriques. Je jouais des épaules pour passer et j’observais de plus près des visages présents sur des affiches que j’ai longtemps fixées pour m’en imprégner. A croire que la fosse n’avait pas que du mauvais. Mes yeux se figeaient soudainement sur Jules qui étaient assis sur une banquette, seul. Tandis que je me rendais auprès de lui pour tenter de glaner d’autres informations, je pouvais apercevoir des den-den vidéo qui retransmettaient surement tout ce qui se passait à notre hôte installé, je l’imagine, bien confortablement en savourant déjà les prémices des combats à venir. Mes yeux s’agitaient et je notais tout ce dont je pouvais être le témoin. Je vis alors l’inquiétude se dessiner sur nombres de regards avant d’être chassé par les affres de la boisson ou par l’envie provoqué par l’une de ces hôtesses.

Alors que je prenais lentement place auprès de Jules que je venais de saluer, ce dernier me rendit la pareille puis désigna une large ombre qui avançait vers nous. Sous les feux des nombreuses bougies d’ambiance disposé çà et là pour l’occasion, j’avais finalement reconnu la montagne qui m’avait mis à mal lors du dernier assaut. Tout comme Jules, j’étais à nouveau prêt à en découdre, mais il en fut autrement. La montagne se contenta de prendre place à notre table, un cigare dans la bouche et une donzelle au bras. Je pensais aux premiers abords qu’il était en charge de faire régner l’ordre dans cet endroit en désordre, mais il n’en était rien : c’était aussi un des participants à la fosse.

Au final, lui aussi avait été jugé trop dangereux pour se tenir encore auprès du grand ponte qu’il protégeait et ce, malgré le fait qu’il nous ait attrapé Jules et moi. Toutefois, à le voir, on dirait qu’il s’était préparé à cette éventualité depuis longtemps déjà. L’homme savourait simplement l’instant présent en ne buvant qu’avec raison et en expirant la fumée de son cigare comme s’il soufflait hors de lui remords et regrets. C’était un véritable colosse, une arme humaine à n’en pas douter et sa présence à nos côtés était, à présent, un atout pour ma mission. Une mission qui consistait à me faire embarquer jusqu’ici et pour se faire, j’avais suivis Jules qui était lui-même recherché.

A présent, les sbires du gouvernement qui m’avaient à l’œil savaient surement où je me trouvais en ce moment. Il ne me restais plus qu’à faire durer le jeu de la fosse le plus longtemps possible pour laisser au gouvernement mondial le temps nécessaire à l’organisation d’un grand coup de filet. Voilà pourquoi avoir ce colosse prêt de moi était en soit un avantage alors qu’au début, c’était loin d’être le cas : quelle ironie…

Mélo. Cela me revient. C’était le nom de ce gorille. Un homme redoutable et discret malgré sa carrure. J’ignore totalement les raisons qu’ils l’ont conduit à ce style de vie, cela resterait sans doute une énigme pour moi, toutefois, il m’était aisé de voir que comme Jules, c’était un être singulier. Bien loin des simples plaisirs matérialistes de la vie. Ainsi nous nous retrouvions à trois, les yeux fixés sur la gigantesque porte qui s’ouvrirait dans quelques heures afin de marquer le début de la nouvelle édition de la fosse. Seulement, pour nous, dans nos esprits, cela avait déjà commencé et bien qu’assis et le regard hagard, nous étions pareil à des lames tranchantes qui attendaient bien sagement dans leurs fourreaux avant de pourfendre tout ce qui se trouveraient sur leurs passages.


Dernière édition par Sorrento Olin le Lun 9 Juin 2014 - 10:20, édité 2 fois
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Et le jour fatidique arriva finalement. Les hôtesses et l’orchestre improvisé s’en était allé en même temps que la fumée. Les visages enjolivés avaient laissés place à autre chose : soit à la peur, soit à l’angoisse, soit aux deux. Sur quelques facies, toutefois, subsistait un rien de fierté, un rien d’arrogance et de folie. Les derniers vestiges d’un courage enfoui sous les décombres d’une peur primale, intense et presque palpable. Tous avaient troqués les verres à soif contre des couteaux, des bouteilles ou tout ce qui pouvait s’apparenter de près ou de loin à une arme.

Puis, alors même que les portes de Perdition s’ouvraient, les uns et les autres se tenaient en rang, soudé et solidaire devant une même épreuve. Alors qu’ils ne pouvaient trouver les ressources nécessaires en eux, ils n’avaient d’autres choix que de combler les défauts de leur individualité dans le ciment du collectif. Oui, ils étaient tous égaux dans ce moment critique où tous périraient, ils ne le savaient que trop bien. Au bas mot, nous devions être une centaine. Certains se connaissaient de longue date. Plus encore, nombreux sont ceux qui s’étaient affrontés dans des querelles internes sous la manne de leur chef respectif. Et pour quoi au final ? Finir ainsi… Le goût de l’amertume était âpre. Un goût de cendre qui les amenaient en ce jour à réfléchir sur la vie qu’ils avaient menés jusqu’aujourd’hui et aux choix différents qu’ils auraient pu faire dans une autre vie.

A l’accoutumé j’aurais ignoré les sentiments qui étaient les leurs, j’aurais simplement tourné la tête, mais pas aujourd’hui. J’écoutais en silence le repentir et les regrets qu’ils exprimaient envers leurs ennemis d’hier. J’écoutais sans dire mot les regrets exprimés à haute voix en direction de leurs familles qui devaient attendre leur retour avec impatience, mais qui jamais ne les reverront. Puis, quand tout fut dit, quand les âmes eurent fini de confier ce que le cœur gardait jusqu’alors enfoui, nous entrèrent tous dans la fosse d’un pas décidé comme un seul homme. Si à nos corps ils souhaitaient arracher nos vies, cela ne serait pas sans peine pour eux, cela ne serait pas gratuit. En cet instant, ce que je vivais était bien plus qu’une mission, c’était un fragment de ma vie. Mon masque n’était plus, j’étais seulement un homme qui allait se battre parmi d’autres. La peur dévorait également mon cœur, mais leur présence me rassurait aussi. Je savais que si je devais partir pour l’autre monde, alors je n’aurais pas été seul. J’aurais été accompagné de bandits et de crapules. De voleurs et de tueurs. D’hommes de l’océan en définitive, au repentir certain et qui n’étaient déjà plus ce qu’ils avaient été jadis. Ainsi, devant le grand juge, je plaiderais pour le salut de leurs âmes, je le jure.

Les rayons du soleil nous rappelaient tous à la dure réalité qui allait s’en suivre. Nous venions d’entrer dans une arène à ciel ouvert et aux murs escarpés que nul ne pouvait escalader. Un son de trompette acclamait notre arrivée et nous tous à présent pouvions voir Manfred et quelques personnes influentes s’enivrer avec du vin, la mine joviale comme s’ils buvaient déjà notre sang et nos vies. Ils applaudissaient à présent à l’entrée de gladiateurs. Des hommes en armure accompagnés de bêtes dressées pour tuer. Les lames au clair, nous faisions pale figure avec ce que nous avions dans les mains. En revanche, loin de montrer une once de fébrilité, je pouvais entendre Mélo, Jules et bien d’autres ensuite resserrer l’étreinte de leurs doigts sur ce qu’ils tenaient, nous étions prêts.

Si nous venions de sortir des portes de Perdition, en face, nous pouvions aisément voir la porte du Salut. La règle de la fosse était fort simple et claire, si nous pouvions passer les portes du salut, nous serions alors épargnés. Seulement nulle n’y était jamais parvenue, car bien en ligne devant cette porte se tenait la mort matérialisée par cette armée qui semblait invincible. Le silence régnait, un silence pesant bien vite mis à mal par l’assaut des gladiateurs et le hurlement de leurs bêtes. Ils fondirent ainsi sur nous en courant avec hâte et précipitation. La centaine d’homme qui m’accompagnait en fit de même et c’est alors la collision de deux armées, de deux camps et de deux volontés qui s’opposaient qui éclata au centre de l’arène. On pouvait déjà voir des gerbes de sang s’élever dans les airs alors que les corps rompus s’en allaient recouvrir le sol. Les coups d’épées tranchaient net corps et jambes.

Le bloc qui faisait front commun fut vite dispersé et laminé dans de nombreuses escarmouches. Certains opposaient toutefois une résistance toute relative lorsqu’ils purent retourner les armes des bourreaux contre ces derniers. Jules s’était saisit d’un arc. Il était décidément très à l’aise dans les combats à distance et c’était à présent une véritable tour de garde qui frappait nos ennemis lorsqu’il tournoyait sur lui-même pour distribuer des traits assassins qui venaient cribler hommes et bêtes dans une même rafale. Quand les gueules des animaux tentaient de se refermer sur lui, certains lui faisaient don de leurs vies en barrant la route de tout leur corps, criant en tombant de continuer d’avancer. Mélo lui était notre tête de proue, notre colosse à la lance qui déblayait le chemin comme nulle autre. D’un seul passage, ses bras puissant transmettaient toute sa force et sa détermination dans la hampe de sa lance dont la lame fauchait tout ce qu’elle rencontrait. Les ennemis volaient en éclat avant de rencontrer le sol dur et fatal contre lequel ils venaient se briser, vague après vague.

Des flèches se plantaient parfois dans son poitrail où sur ceux qui faisait de leurs vies un rempart, souriant une dernière fois en direction de Manfred avant de recouvrir le sol, inerte. Les bêtes étaient à présent chevauchées par les hommes qui tentaient de nous prendre à revers. Nombreux furent ceux qui rencontraient le fil d’une épée salvatrice que j’avais récupéré sur le cadavre d’un de nos assaillants. Mes pas glissaient sur le sol et c’était une véritable danse de la mort que j’exécutais en tranchant dans le vif tout ce qui pouvait être à ma portée. Je ne me retenais plus, je ne me cachais plus. Jules avait alors été le témoin privilégié de ma démonstration sans que je ne su jamais ce qu’il avait pensé en cet instant.


Dernière édition par Sorrento Olin le Lun 9 Juin 2014 - 10:28, édité 2 fois
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La chaleur était presque insupportable et bien qu’installé à l’ombre, nombreux étaient les convives privilégiés qui assistaient au bain de sang en étant trempé de sueur. Ils étaient tous comme hypnotisé de voir leurs sous-fifres se faire ainsi décimer. Cas cela ne tienne, ils en trouveraient d’autres, des plus obéissants, des plus faibles d’esprit qu’ils pourront manipuler à leur guise. Parmi eux se tenait Manfred. Bien que de petite stature, nul ne pouvait contester ici son autorité sous peine de finir en bas, au cœur du désastre. Lui plus que quiconque était obnubilé par ce spectacle saisissant qui se jouait sous ses yeux. Plus rien ou presque n’avait de saveur, plus rien ne l’intéressait réellement si ce n’est ce jeu infâme qu’il avait créé à l’aide de son génie paranoïaque.

Sa main droite s’était saisie de son verre de vin qu’il avait vidé d’une traite. Un fin filet de ce nectar s’écoulait de ses lèvres pendantes. Sa main gauche, elle, apportait à sa bouche énorme une cuisse de poulet qu’il déchirait entre ses dents. Tout cela sans jamais quitter la scène de ses yeux globuleux et emplit de folie. Il vivait cet instant comme si sa vie entière en dépendait. Oui, il était happé par ce monstre fait d’armes, de sentiments, de sang et de vie qui se disputait là, juste sous ses yeux. Etant l’instigateur d’une pareille entreprise, il ne pouvait que jubiler du pouvoir immense qu’il avait acquis si durement tout au long de sa vie. Lui qui était parti de rien avait non seulement réussi dans le domaine des affaires, mais s’était aussi complet dans tous les vices et les jouissances du monde des hommes.

En bas, c’était le chaos le plus total.  Le bruit des épées qui s’entrechoquent était partout, les cris de douleur, de fureur et de peur étaient légion. C’est à ce prix que le trio avait pu se frayer un passage jusqu’aux portes du Salut. Ils le savaient, derrière, c’était la liberté, la fin de leur calvaire. Mais avant cela, il fallait encore affronter les vagues ennemis qui se jetaient sur eux constamment. Jules avait d’ailleurs troqué son arc contre une dague lorsqu’une épée trancha dans le vif son bras gauche qu’il ne pouvait plus bougé et dont le sang se répandait à grosses gouttes sur le sol.

L’allié de poids s’était transformé en fardeau pour les autres et il en était d’ailleurs conscient. Voilà pourquoi il quitta le corps principal en attirant vers lui une petite brigade d’ennemi en armure. Dans son échappée, il me jeta un dernier regard, un peu comme il l’avait fait à la taverne. Lui qui avait été un moyen pour moi s’était changé en autre chose que je n’avais su définir et dont je ne sais toujours pas quoi en penser aujourd’hui alors que son souvenir me revient. Il opposait une résistance farouche, ses jambes frappaient durement le plastron des hommes armés, puis, un nuage de poussière s’était levé et je vis les lances s’abattrent toutes en même temps vers sa direction.

Le cri puissant de Mélo, le colosse, me ramena à moi. Enfin nous y étions. Enfin, nous étions arrivés devant ces lourdes portes. Le corps criblés de flèches, la montagne respirait à grande peine. Ses bras puissant cramponnèrent l’acier de la porte et de toute sa force, de tout son poids, il poussait à présent. Son visage grimaçait sous l’effort et la souffrance. Puis, les voix des quelques-uns qui étaient encore en vie et debout se levèrent pour l’acclamer. Mélo ! Mélo ! Cela avait touché le colosse et l’avait enhardi. La porte cédait lentement, mais pas assez vite pour que nous puissions en réchapper. Alors, il cogna celle-ci avec rage. Ses poings saignaient de toutes parts, mais loin de se décourager, il redoublait d’intensité après chaque assaut. Moi, je me tenais dos à lui, face à l’ennemi, étreignant mon épée avec un courage et une détermination que je ne me connaissais pas. Dans toute cette épreuve, j’avais grandi et perdu peut être nombres de mes préjugés sur la nature de ce qui était bien ou mal.

Mon épée parait les coups d’estoc et repoussait encore et toujours nos bourreaux. Lorsque les bêtes s’élançaient sur moi, elles rencontraient bien souvent les lances des compagnons d’infortunes qui souriaient face à la mort lorsqu’une nuée de flèche s’était abattue sur nous. Levant haut les boucliers et nos armes afin de faire rempart, nous étions à présent pareilles à des marionnettes décousues dont les files étaient agités par des doigts maladroit tant nous étions brisé par cette fosse qui ne demandait qu’à nous dévorer. Puis, quand l’ennemi approcha de nous et alors que la force de nous battre nous avait quittés, un bruit puissant et sourd nous est parvenu. Le grincement de portes qui s'ouvrent et pivotent pour faire place à l’entrée du Salut.

Les rires s’étaient mis à fuser parmi nous. Les pleures d’avoir réussi un exploit aussi insensé retentissaient dans la fosse en même temps que les insultes de nos ennemis qui avaient jeté leurs épées au sol. Enfin, alors que je me tournais vers Manfred pour l’observer. Pensant découvrir un ennemi aux abois, j’avais pu déceler dans son regard vide une joie incommensurable, l’extase à n’en pas douter. Je ne compris pas tout de suite, non. C’est lorsque les coups de fusils provenant de l’entrée du Salut avaient rugit haut dans le ciel que j’avais réalisé la naïveté qui avait été la mienne. Depuis le début les dés étaient pipés. Depuis le début nous étions condamnés. La montagne à présent sans âme avait essuyés la majorité des balles. J’avais moi-même reçu l’une d’elle entre les côtés et lorsque mon corps tomba en même temps que celui de Mélo, j’avais cru apercevoir le visage de Jules, apaisé sur le sol. Plus rien ne comptait. Je me souviens m’être agité pour tenter de me remettre debout, mais sans succès. La dernière chose dont j’avais été le témoin, avait été celle d’une bande de fou, ivre de vivre. De personnes condamnés qui s’étaient vaillamment battu et dans ces tumultes, au cœur des ténèbres, j’avais été l’un d’eux.

Rapport de l’unité CP.
[…] Grâce à l’investigation de l’agent infiltré, nous avons découvert l’endroit où se tenait la fosse.]A notre arrivée, Manfred n’était déjà plus, il s’était suicidé avant que nous puissions l’atteindre. Ses complices ont eux, été tous arrêté. Le réseau qui sévissait fut complétement démantelé. L’agent 7727 a été retrouvé encore en vie. Ses blessures sont sévères, son état est jugé critique.
Fin du rapport
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