Voyage au pays des merveilles

Le navire de la translinéenne amorça son approche près de l’embarcadère de fortune de Innocent. Piteux n’était pas un terme encore assez proche pour décrire l’état de délabrement du ponton censé accueillir les navettes de passage. Dobb-Er-Mann nous avait guère fourvoyé quant au climat qui régnait dans la contrée, il n’y avait guère âme qui vive ici bas et pourtant dans l’ombre, j’avais la désagréable impression que nous étions épiés par une ribambelle de petits importuns. La translinéenne nous déposa sur le tarmac et fila aussitôt comme si elle avait pris les jambes à son cou. Nous avancâmes dans un silence de mort sur la cale avant de voir se profiler à l’horizon un immense plateau au sein duquel une forêt luxuriante s’épandait dans toute sa faune et sa flore sauvage. Nombre de bruits aussi intrigants qu’étranges émanaient de l’immensité boisé, c’était loin d’être de bonne augure mais ca avait au moins le mérite de d’emblée nous donner le ton.

« Hmmmh, eh bien ca promet, souvenez-vous, si on venait à se faire attaquer par les gamins de la forêt, tâchez de pas leur coller une correction et usez de diplomatie, il nous faut les mettre dans notre poche. Nous devons présentement rejoindre ce qu’il est coutume d’appeler le village des parents, eux seuls possèdent assez de crédit pour nous introduire auprès des mômes. «

Nous nous engagions dés lors dans l’épaisse forêt ombragée, en empruntant des sentiers sinueux et caillouteux. Scarlet allait sans doute avoir à faire à quelques ampoules avec ses escarpins rouge sang, ce n’était guère le genre de souliers adaptés à cet environnement hostile. Nous devions quoi qu’il advienne faire profil bas pour ne pas risquer d’anéantir notre couverture. Scarlet et Anna pouvaient très bien passer pour des mères adoptives pour les gamins quémandant. Elles avaient toutes deux pas loin d'une petite trentaine, étaient dans la fleur de l’âge et leurs tempéraments se prêtaient agréablement au jeu de la prétendue maternité. De mon côté, la chose semblait difficile, j’avais davantage la figure d’un patriarche, l’âge mur faisant. Une sorte de pater filiae, le genre de figure assez dure rigoureuse et drastique que des mioches n’ayant reçu aucune éducation ne peuvent guère voir en pâture. La cohabitation s’annonçait plus difficile avec moi mais il fallait que j’use à bon escient de cette figure paternaliste pour me les mettre dans la poche. Nous avancions circonspects dans l’épaisse flore jusqu’au moment où nous débouchâmes sur une grande prairie où les herbes hautes nous contraignèrent à une avancée pénible dans les fourrées. J’aime guère la topologie du lieu, une prairie à ciel ouvert cerné dans tout son périmètre par de grands arbres. A quelques lieues derrière, se dressant au dessus de la cime des arbres, des attractions de fête de foraine en tous genres, j’aperçois les rambardes métalliques de ce que je présume être une grande roue.  

Ca pue l’embuscade à plein nez cette affaire et je crains qu’on ait à faire face à une échauffourée imminente. Des bruits de pas, des murmures, du bois qui crépite, qui grince se fait entendre tout autour de notre position. Nous ne sommes guère les bienvenus en ces lieux et le comité d’accueil risque de nous le faire savoir bien assez tôt.


Voyage au pays des merveilles Mecafa10

Des gamins, étrangement fardés de peaux, de poils et plumes en tous genres jaillissent des futaies et se ruent, armés de bouts de bois taillés en pointe et de petites sagaies, vers votre serviteur et ses deux consœurs. Ils sont une bonne vingtaine et même s’ils se montrent relativement hostiles, ils ne sont guères inoffensifs. Ils montrent les crocs pour ne pas avoir à donner la patte hmmh.

« Bandes d’adultes, que venez-vous donc faire sur le territoire de la tribu des mécanos ?! Vous voulez nous prendre nos attractions, c’est ca ?!  Je vous ai jamais vu dans le coin, vous êtes des étrangers n’est ce pas«  

Le môme se montrait insistant bien qu’il n’avait guère l’air très confiant dans sa démarche. Son timbre de voix affichait une anxiété singulière. J’imagine qu’ils avaient dû prendre leur courage à deux mains pour nous venir à notre rencontre.

« Nous ne vous sommes pas hostiles, les enfants. Nous cherchons à devenir des parents pour ceux d’entre vous qui cherchent une paternité et une maternité. Nous cherchons à rejoindre le village des parents. Nous ne vous voulons aucun mal, les enfants. «


Dernière édition par Atsuji Kaitô le Dim 11 Mai 2014 - 9:19, édité 1 fois
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Innocent Island, l'île aux enfants perdus.
Première sur la voie n°4 de Grand Line, elle est connue pour son gigantesque parc d'attraction, aujourd'hui à l'abandon. C'est sur cette île que nous retrouvons Scarlet et ses nouveaux compagnons, Annabella Sweetsong et Atsuji Kaitô. Première mission en leur compagnie. Scarlet avait hâte de les voir à l'action, même si leur actuel objectif n'étais pas des plus réjouissants.


" Nous ne vous sommes pas hostiles, les enfants. Nous cherchons à devenir des parents pour ceux d’entre vous qui cherchent une paternité et une maternité. Nous cherchons à rejoindre le village des parents. Nous ne vous voulons aucun mal, les enfants."

A ces mots, Scarlet se mit à sourire, mais pas assez pour que ses dents ne soient visibles. Oh le gros mensonge que voilà. Mais l'idée se révélait plaisante et donnait l'occasion à la jeune femme de s'amuser un peu, et de tester un peu la personnalité d'Atsuji. S'approchant de celui-ci, Scarlet saisit le bras de son collègue et continua le discours en prenant une moue attendrie.

"Oui, nous sommes venus de loin mon père, ma soeur et moi. Vous savez, je ne peux pas avoir d'enfants, alors nous avons décidé de venir ici, afin d'offrir à ceux qui le désirent la possibilité d'avoir une famille. Je m'appelle Scarlet. Et la demoiselle qui nous accompagne est ma soeur, Maëlle."

Le gamin nous regarde avec un air légèrement surpris mais rapidement, celui-ci baisse son arme sans souffler un mot. Que pouvais t'il dire de toute façon, les adultes voulant adopter étaient protégés sur cette île. Scarlet continua son discours.

"Vous avez bien parlé d'attractions, n'est-ce pas? Il se trouve que je suis mécanicienne. Je vous propose un marché, je répare vos manèges et vous nous guidez jusqu'aux adultes, d'accord? Pour ça, je vais avoir besoin de tous les outils que vous pourrez me fournir et du métal aussi. Plein de métal, et de l'étain aussi."

Les yeux des gamins s'illuminèrent. Oui, pour amadouer les enfants, rien n'est plus simple que de leur offrir des jouets, Scarlet le savait et elle comptais bien en profiter. La proposition était alléchante, et les enfants ne tardèrent pas à accepter. Quelques secondes plus tard, le gamin descendit de son piédestal et nous fit signe de le suivre. Après avoir crapahuté durant un petit quart d'heure dans l'épaisse forêt, manquant quelques fois de trébucher sur les racines des immenses arbres dont tombaient de temps à autre des fleurs d'hibiscus, la petite troupe et les gamins finirent pas arriver sur le site de la fête foraine. Les attractions étaient pour la plupart recouvertes de lierre et de toiles d'araignées, la pêche aux canard contenait désormais de vrais volatiles ainsi que quelques grenouilles tandis que le train fantôme paraissait encore plus lugubre, avec sa façade défraîchie et ses personnages brisés, quand au grand huit, sa structure semblait vaciller et prête à s'effondrer à tout moment. L'attention de Scarlet se porta sur un vieux carrousel couvert de lierre, un mécanisme simple mais qui serait sans doute suffisant pour convaincre les enfants. Scarlet jeta un rapide coup d'oeil au mécanisme intérieur de l'engin, rien de bien sorcier, le mécanisme de rotation était sorti de son rail et quelques ressorts rouillés avaient fini par céder. Pour la scientifique, c'était pour ainsi dire un jeu d'enfant, même si réparer l'ensemble des manèges serait le défi était de taille. Les gamins, eux, avaient ramené celui qui se présenta comme leur chef. Quelques coups de clé à molette plus tard, le carrousel fut de nouveau en marche.


La musique sortant du manège surpris un peu Scarlet, il s'agissait de "London bridge", un vieil air populaire qu'elle appréciait beaucoup. Les gamins furent sidérés de voir le vieux manège et ses chevaux de bois tourner à nouveau. La joyeuse mélodie du manège résonnait à nouveau dans l'immense fête foraine figée dans le temps.


Dernière édition par Scarlet Verrci le Sam 3 Mai 2014 - 20:24, édité 2 fois
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Les aptitudes techniques de la nouvelle recrue s’étaient faites sensiblement remarqués au sein de cette petite assemblée. Scarlet avait fait des étincelles et était, grâce à ses illustres talents, parvenue à nouer une ébauche de contact avec tous ces mioches. Les expressions faciales des mômes s’étaient quelques peu transformés, stupéfaits et curieux à la fois d’être témoins de l’œuvre singulière de Scarlet. Certains mêmes s’évertuèrent à lui adresser la parole, taper un brin de causette avec la demoiselle et lui porter assistance pour resserrer des boulons. Une relation de confiance s’instaurait progressivement entre les jeunes agentes et les gosses, elles remplissaient merveilleusement bien leurs rôles. J’étais agréablement surpris de la faculté éminente d’adaptation de Scarlet, elle avait eu la présence d’esprit d’utiliser cet atout pour se mettre dans la poche les gamins. Tous les gamins ne demeuraient cependant pas sous le charme singulier de mes partenaires, certains affichent une profonde suspicion, une grande réticence, à l’instar du chef de ces mômes ou du moins celui qui jouit d’assez d’influence au sein du petit groupe pour être qualifié de tel sorte.

Le môme était recouvert de babioles en tous genres qu’il s’était greffé sur le poitrail en guise d’armure de fortune : des flotteurs sur les avant-bras, un casque où des espèces de cornes en acier trempé sont fixées, une ribambelle de plaques d’identification autour de la nuque et un tissu épais surmonté d’un motif étrange sur le bas du visage. Les gamins d’ici semblaient lui vouer le plus grand respect, il ne devait pas son statut à la peur qu’il suscitait auprès des siens, il avait su fédérer ses gamins et s’était hissé en toute logique à la tête de leur petit groupe. Il y avait fort à parier que le gus était le plus fortiche de la bande, c’était du moins ce que présumais à la vue de son indifférence manifeste devant les réparations orchestrées par Scarlet.

Le carillon se mit alors à tinter, signifiant la réparation effective des mimines expertes de Scarlet. Le carrousel était dorénavant en état de fonctionnement, entraînant le bonheur et l’euphorie à peine dissimulé de ces saletés de chérubins. Leur chef, demeurant jusqu’alors circonspect, s’approcha et noua la conversation :

« Hmmh, je m’appelle Méca Frankyky et cet endroit est notre quartier général, à nous le gang des mécanos. Nous n’aimons guère les étrangers par ici à fortiori lorsque ceux-ci sont des adultes… »

Un silence émergea, tous les mômes se placèrent alors en rang serré derrière leur leader désigné. Ils n’étaient pas nécessairement du même avis que leur boss mais avaient fait le choix de remettre leur libre-arbitre à cet homme. Toute hiérarchie impose un lien de subordination et d’autorité entre les différents maillons de la chaîne, Frankyky était en haut de la pyramide et conséquence de quoi, les chiards lui avaient fait vœu d’allégeance et lui vouaient une obéissance sans faille, qu’importe ce que cela impliquait.

« Cependant, je dois aussi avouer que vous nous avez enlevé une belle épine du pied en réparant le carrousel. Il me semble par ailleurs que vous avez un bon fond. Aussi vais-je accéder à votre requête et vous escorter jusqu’au village des parents »

Frankyky fit à ses troupes de relâcher la pression et d’un geste de la main, ouvrit la marche dans le bosquet. Des enfants mécanos partirent alors en éclaireurs pour pister la voie. De nombreux dangers parsemaient l’environnement impétueux de Innocent, il n’était guère fortuit d’employer des sentinelles pour s’en prévenir. Bien sûr, ils n'avaient guère le barda des mercenaires ou d’officiers d’élite mais je présumais que ces petites pestes avaient un don certain pour rester aux aguets et détaler comme des lapins si la situation se corsait. Le danger était omniprésent mais je me fourvoyais quelque peu sur la nature de ce celui-ci. De facto, Frankyky nous apercevant quelque peu surpris par l’usage de cet avant-garde nous expliqua plus en détail ce pourquoi les éclaireurs étaient indispensables pour la sérénité du groupe.

« Il y a bien des lunes, «  le Père «  comme nous l’appelions, avait apporté félicité et prospérité à Innocent island. Les commerces étaient en plein essor, les affaires marchaient du tonnerre, dynamisé par les multiples attractions, carrousels et manèges, que comptaient Innocent Island. L’île était placé sous le sceau du divertissement et nous autres, tous les fils du « Père » aimaient à nous amuser de ce climat florissant. S’ensuivit le passage des Sea Wolves et du pirate Mantle shoma qui mirent à mal la douce idylle que notre « Père » avait bâti de ses propres mains. Depuis nous nous sommes divisés en de nombreuses bandes et nous errons, chaque bande ayant ses propres codes, ses propres affinités. Le village des parents est censé demeurer une zone neutre cependant des vigies rôdent perpétuellement aux alentours du village, scrutant les moindres actes des parents logés dans le village. Il se pourrait bien qu’on tombe sur Till, le chef des pirates »

Ses allégations fort intéressantes avaient eu le mérite de poser le contexte dans lequel s’inscrivait Innocent et expliquait en partie la trame tragique dans laquelle s’était engouffré cette contrée. Tous ces gamins étaient livrés à eux-mêmes dans cet enfer à ciel ouvert, à mener des rixes pour des parcelles de terrain pour des motifs triviaux, des gamineries en tous genres. Il est intéressant aussi de  constater les rivalités d’ores et déjà bien instaurées entre les bandes de gamins. Ils se livraient tous une concurrence effrénée pour l’appartenance au groupe, ce sentiment si profond, si enfoui et indissociable de la nature humaine. Ce sentiment d’appartenance est un des jalons de notre misérable condition, nous avons besoin de nous affilier à une unité, à un ensemble, à une tribu de manière à nous faire apprécier et reconnaître par ceux et celles que l’on juge digne d’intérêt. Ces chiards n’en avait peut être pas conscience mais ils expérimentaient plus que quiconque cette notion singulière qu’est l’importance de la cohésion de groupe.

Nous nous engageâmes dans le dédale des sentiers boisés sous l’œil avisé de Frankyky, le soleil transperce les ombrages des arbres et éclaire d’une lumière diffuse notre périple. Une certaine tension se fait pressentir dans l’air ambiant, les âmes ne sont guères paisibles et rassurés tandis que nous arpentons le décor broussailleux. Une bonne heure s’écoule avant que nous rejoignions l’orée de que je présume être le village des parents. Une immense clairière se profile devant nous. Quelques bâtisses sont disséminés cà et là dans ce paysage dépouillé, des masures rudimentaires adoptant un style primaire, simpliste. Les adultes s’affairent à l’intérieur de l’enceinte du dit village, toute une petite vie se démène, s’agite pour le plus grand bonheur des mômes qui cohabitent avec les parents. L’éventualité que je doive m’occuper d’un môme avec Scarlet éveillait en moi un profond désenchantement. Je ne supportais en aucune manière les chiards et leurs pleurnicheries, ce serait donc un véritable test de sang-froid que d’avoir à assumer ces mioches des journées durant.

Frankyky nous faussa compagnie quelques minutes et finit par nous introduire auprès du leader de la communauté des parents.


Voyage au pays des merveilles Jil10



Un fier gaillard à la barbe hirsute, aux grandes mirettes azurées, aux oreilles en pointes et à la chevelure sauvage partiellement tressé rebiquant sur des épaules confortables et musculeuses. L’homme  semble enjoué de notre venue impromptue et déclare avec une fougue non dissimulé :

« Eh bien, Messieurs dames, c’est t’y bien un plaisir de croiser des visiteurs sur Innocent, qui plus est lorsq'uils veulent se joindre à notre petite communauté. Frankyky m’a fait part de votre situation et de l’aide que vous lui avez apporté. Pour ma part, je ne vois aucun inconvénient à ce que restiez parmi nous quelques temps. Allez vous présenter aux autres adultes et inscrivez-vous sur le registre des parents. C’est la procédure. «

« Avant que j’omette de vous poser la question, comment êtes vous parvenus ici bas  et quels sacrifices seriez vous prêts à faire pour la communauté ? »


La question était empreinte d’un certain cynisme, le ton employé traduisant une méfiance légitime à notre égard. Il ne devait guère avoir beaucoup de visiteurs dans notre genre, aussi cherchait t’il à connaître quelque peu les olibrius désireux de rallier la petite congrégation du village des parents.


Dernière édition par Atsuji Kaitô le Dim 11 Mai 2014 - 9:37, édité 2 fois
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La grande roue tournait, une magnifique attraction aux couleurs chatoyantes bien qu'un brin usées par le temps et les événements d'Innocent Island. C'étaient deux bambins, Kass et Kroph, qui l'avaient réparée à ce que j'avais entendu. Ouais, les gosses parlaient beaucoup et comme ils étaient tout autour de nous, leurs petites voix aiguës se faisaient entendre sans peine. Pourtant là, j'avais eu du mal à voir des mioches, mais plutôt une armée de mouflets entraînés pour se battre "au cas où". Kaitô et moi avions quand même fait notre petite enquête dans les archives de la base du Cipher Pol des Blues, c'était pas vraiment un passé glorieux que tenait l'endroit, ces gamins orphelins le prouvaient carrément. M'enfin bon, les deux bricolos qui avaient remis sur pieds le manège s'étaient visiblement pris d'affection pour Scarlet depuis qu'elle avait réparé le carrousel et la suivaient sans rien dire, si bien que j'étais visiblement la seule à l'avoir remarqué. Je restais légèrement en arrière, j'aimais pas les enfants. Non ils me rappelaient douloureusement Henri, le fils que j'avais abandonné. Je ne suis pas capable d'être une mère, ma maladie m'en empêche. Elle m'a empêchée d'être aux côtés de quelqu'un toute ma vie et quand je trouvais ce "quelqu'un" il mourrait au bout d'un certain temps. Non ça n'aurait pas été une vie pour mon fils, mais ça me pinçait légèrement le coeur et me rendait encore plus aigrie vis à vis des bambins. Pourtant, alors que je marchais, l'un d'entre eux vit le moyen de glisser sa main dans la mienne. Je ne fis pas directement attention, tellement j'étais perdue dans mes pensées, mais lorsque je le vis mon regard tomba sur le gosse qui agrippait à moi. C'était un p'tit gars blond, un peu plus jeune que les autres, une suce plantée dans la bouche et un bout de chiffon tenu par sa main gauche contre son cœur.

- Tu vas être ma maman ?

Je fondis à l'intérieur, incapable de répondre tant bien que de penser. La dernière image que j'avais eu de mon fils, pleurant dans les bras de l'infirmière qui l'emmenait en dehors de ma chambre d'hopital, restait bloquée dans ma tête. Je continuais à marcher sans rien dire, toujours accompagnée du petit qui semblait heureux d'être là. Enfin, nous arrivâmes à un village, le "Village des Parents" comme ils l'appelaient, suffisait de les écouter. Un grand gars avec une véritable tête de papa nous fit la présentation, et conclut :

- Avant que j’omette de vous poser la question, comment êtes vous parvenus ici bas  et quels sacrifices seriez vous prêts à faire pour la communauté ?

Depuis tout à l'heure je n'avais dit mot, j'étais restée en retrait, mais je ne sais quelle force me poussa à prendre la parole.

- J'ai eu un fils il y a bien longtemps. Je voulais être la mère idéale et l'élever, mais je l'ai perdu. Depuis ce temps je n'ai cessé de chercher un endroit où il serait possible à nouveau pour moi d'être une mère, de donner mon amour à des enfants qui en ont besoin. Mon père, Nicolas et ma sœur, Scarlet, ont entendu parler de cette île et lorsque je pris la décision de venir ici, ils proposèrent de m'accompagner.

Ma voix trahissait mon émotion, légèrement fluette au début, mais totalement maîtrisée à la fin, ça ne peut qu’accréditer mes dires. Les hommes restent méfiants, probablement à cause mon bandeau sur l’œil gauche mais les femmes sont conquises sans mal. Le sentiment de parent est toujours plus proche chez les femmes, c'est notre corde sensible, on sait ce que ça fait de donner la vie. Le porte parole quant à lui reste perplèxe :

- Ça ne répond pas au comment...

- Nous avons pris la translinéenne depuis Marijoa. Dis-je tout simplement.

Une expression de stupeur déforme le visage des adultes, chacun d'entre eux. Aurais-je commis une bourde ? Le Chef des Parents s'exprime sur un ton dur et méprisant, les sourcils froncés au possible :

- Vous êtes... des nobles ?!

Olalala, je dois redresser le tir, c'est pas bon ça... Ma main gauche cherche fébrilement l'une de mes armes à feu camouflées dans mon dos, sous mon trois-quart noir, par simple précaution. Seraient-ils d'anciens esclaves ? Je m'empresse de mettre notre situation au clair.

- Non du tout ! Mon père est marchant de tissus, il est bon en affaires. Ma sœur est mécanicienne, comme vous avez pu le voir : elle a réparé le carrousel en quelques coups de tournevis. Nous ne sommes pas de ces gens là, grand dieu non.

L'ambiance s'apaise, je relâche mon bras gauche et le laisse glisser le long de mon corps, pas besoin d'en venir aux mains. De toute façon notre mission aurait été corrompue, nous n'étions pas censés faire un carnage. Le barbu hoche la tête, visiblement satisfait, sa bouche se mue en un grand sourire s'étirant d'une oreille à l'autre. Nul doute que c'est lui le chef, il a le pouvoir de réchauffer les cœurs comme de les refroidir.

- Bien, je m'excuse pour cet accueil, mais les nobles sont des gens extrêmement mauvais et nous devions être sûrs. Vous pouvez suivre la procédure pour nous rejoindre, hahaha. Bienvenue !

***
- Serre-le dans tes bras ! Allez, il est trop mignon !

- Non !

- Si, fais lui un câlinou, t'en meurs d'envie.

Ça allait faire un moment que j'avais pas eu une crise de Bachibouzouk, tiens. Je déteste les gamins et il le sait, mais cette fois-ci il me demande carrément de serrer le p'tit gars qui s'est pris d'affection pour moi toute à l'heure dans mes bras. Jamais. Mais bon, au bout de quelques minutes de résistance, je finis par abdiquer, la tête au bord de l'explosion. Le marmot est en train de manger une glace à la fraise et en a partout sur la bouche et sur les doigts, mais tant pis. Je m'agenouille et enlace mes bras autour de son petit corps et reste figée ainsi quelques minutes. C'est absurde, c'est même pas comme si je faisais ça par sentiment. Le gosse ne bouge pas non plus. Enfin il me dit :

- Je t'aime bien, t'es gentille !

Ah, sale gosse, c'est qu'il me ferait mal au cœur. Les joues empourprées, le tee-shirt et les cheveux collants, je me relève d'un bond. Voilà, c'est fait, bon je dois m'occuper de lui encore longtemps ? Ah, ça fait déjà trois heures... Je prends l'une des chaises de la table à manger, m'assois dessus et admire le chef d’œuvre de tapisserie. Sarcasme. C'était une petite maison rustique bâtie de bois de chêne et de briques, comme on en voit dans tous les patelins, rien de spécial. En revanche, ce qui était saugrenu, c'était qu'on était cinq adultes à y habiter ! Bon là j'étais seule, les autres étaient partis en excursion avec leurs enfants adoptés, mais sinon ça faisait un sacré bordel avec tous les gamins autour. Du coup j'étais restée mâter tranquillement l'escargot-projecteur en veillant à ce que le mioche ne fasse pas trop de bêtises.

Car à peine avions nous été intégrés que l'on avait distribué à chacun de nous trois un ou plusieurs gosses. Kaitô avait eu une obscure petite racaille, Scarlet se coltinait les deux mécanos et une autre gamine et moi j'avais lui, Pierrot, un enfant baignant dans la mignon-attitude, le plus gentil et le plus calme qui soit. En vrai, il ne demandait rien : des sucreries, quelques jouets et un peu d'attention. Patiemment, j'attends donc d'avoir des nouvelles des autres pour être délivrée de cet enfer. J'imagine déjà le drame auquel l'agent du CP9 doit assister, haha ! Et puis soudain :

- Maman Maëlle, j'ai envie de faire pipi...


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Ven 18 Avr 2014 - 0:37, édité 3 fois
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La stratégie de Scarlet avait marché mieux que celle-ci ne l'avais espéré. A présent, elle était devenue la coqueluche des mécanos, qui ne voulaient plus la quitter d'une semelle, même si ils ne désiraient pas être adoptés. Et jusque là, tout se passait bien. A peine les papiers d'inscriptions signés, Scarlet s'est vu attribuée une gamine en plus des deux mécanos, les gamins firent d'ailleurs une drôle de tête lorsqu'ils entendirent le nom de l'enfant qui lui fut désignée : Alice Cohen. Leur réaction était un peu étrange, mais cela n'inquiéta pas Scarlet. Elle devais cependant aller chercher la gamine avant de pouvoir vaquer à ses occupations et d'après les parents, Alice avait pour habitude de passer son temps sur le terrain de la fête foraine, mais ils ne savaient où précisément. Scarlet et "ses" deux mécanos reprirent alors la direction de la foire, où la carrousel fraîchement réparé tournait sans discontinuer. De nombreux enfants la remercièrent, mais lorsque celle-ci leur demanda où étais Alice, la même mine dégoûtée apparu sur leur visage.
"La cinglée ? Elle doit encore être dans le Palais des Miroirs, à côté du train fantôme. Faites gaffe, m'dame Scarlet, elle fait vraiment trop peur."
Faire peur ? Cinglée ? Scarlet ne voyait pas ce qu'une gamine pouvait avoir d'effrayant, mais lorsqu'une fois arrivés devant le Palais les deux mécanos refusèrent d'entrer, elle comprit que la peur que suscitait Alice chez les autres enfants était bien réelle.


Le Palais des Glaces, comme les autres attractions, faisait lui aussi peine à voir. La bâtisse avait murs bariolés de figures défraîchies et écaillées par le temps lui donnant un petit air lugubre supplémentaire, sans compter sur la tête de clown géante sur sa façade, sale et recouverte de toiles d'araignées. Scarlet pénétra dans le Palais, seule, et elle comprit pourquoi les enfants avaient refusé d'entrer. Ce n'était pas un Palais des Glaces, comme le lui avait indiqué les enfants, mais un Labyrinthe des Miroirs. Devant Scarlet se reflétaient une infinité de reflets d'elle-même, tant et si bien que pour progresser, il lui fallait avancer à tâtons pour ne pas se cogner aux miroirs. Après une dizaine de minutes, la jeune femme finit par arriver dans une grande salle, vraisemblablement la pièce centrale du labyrinthe. Celle-ci était pavée de carrelage en damier brisé ça et là, et en son centre une grande table recouverte de tasses, théières et autres ustensiles.
*Allons bon, 'manquerais plus qu'un Jabberwocky apparaisse et le cliché serait complet.* pensa Scarlet.
Alors que la jeune femme allait sortir par l'autre côté de la pièce, une petite voix se fit entendre derrière elle.
"Quelle est la différence entre un corbeau et un bureau ?"
Scarlet pivota sur ses talons, les volants de sa robe se soulevant au passage. Une petite fille d'environ huit ans était apparue sur l'une des chaises jouxtant la table de thé. Les cheveux bruns, la peau d'une pâleur morbide et les yeux d'un jaune d'une telle intensité qu'ils paraissaient phosphorescents. Elle devait sans doute être malade, même si Scarlet n'aurais su dire de quel mal elle souffrait.
Spoiler:
" C'est toi Alice ?"
"Oui, t'est qui ?"
"Scarlet, ta nouvelle maman. On m'a demandé de m'occuper de toi. Tu veux bien ?"
Alice fit la moue, à moitié entre la surprise et l'indécision. Tous les adultes qui l'avaient vue jusque là avaient le même dégoût dans les yeux, et même les autres enfants refusaient de jouer avec elle à cause de son apparence, déguerpissant à sa simple vue. Mais cette maman là était bizarre, elle n'ouvrait jamais complètement la bouche, comme si elle voulais cacher quelque chose dedans.
"Moi aussi, on m'a dit que j'étais bizarre quand j'étais petite, j'avais pas beaucoup d'amis non plus. Mais si tu me laisse devenir ta maman, tu ne sera plus jamais seule. Regarde, je vais te montrer pourquoi on m'a traitée moi aussi comme un monstre, mais n'aie pas peur, je n'en suis pas un."
Scarlet ouvrit alors la bouche révélant sa mâchoire aux crocs pointus. Mais étrangement, Alice ne dit rien, malgré un léger sursaut dû à la surprise. La fillette de contenta de sourire à son tour avant de rejoindre Scarlet pour lui sauter dessus et de fourrer ses doigts dans la bouche de la jeune femme.
"T'as des dents de requin, c'est trop cool, maman!"


Dernière édition par Scarlet Verrci le Sam 3 Mai 2014 - 20:23, édité 1 fois
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J’ai jamais aimé les chiards, à fortiori lorsqu’ils ne sont pas les miens. Ca piaille, ca chiale, ca laisse un sacré bordel partout où ils passent et il faut toujours garder un œil sur leurs bouilles dégueulasses. Je vous en prie, épargnez-moi l’éternel refrain sur les bienfaits et autres bénéfices que vous procurerait ces teignes hirsutes, turbulentes, souillonnes et assommantes que sont ces maudits mioches. Dix minutes de plaisir véritable et 25 ans de tuiles et d’embarras, réfléchissez-y messieurs avant de vous faire presser à vous apprêter au labeur pour donner un condensé du meilleur de vous-même. Le fait est qu’après après avoir été introduit dans le village des parents, le leader du patelin avait décidé de nous dispatcher dans différentes cahutes afin de faciliter notre acclimatation aux us et coutumes d’ici bàs. L’instruction avait le mérite de nous offrir des perspectives distinctes sur cet environnement inaccoutumé et ainsi confronter nos opinions ultérieures. Innocent avait de la suite dans les idées. Sous ce couvert d’adaptation à la communauté, il pouvait vérifier aisément nos propos et s’assurer du fait que nous demeurions vraiment des parents résolus à adopter.

C’était assez ingénieux et nous devions de facto nous résigner à nous fondre dans le moule et jouer les mamans et papas poules. On m’avait dégoté un énergumène bien singulier, un lascar démoniaque du genre des caïds des bacs à sable qui aiment à étriller ses petits camarades pour attirer sur lui tous les regards et compenser le manque d’amour significatif de ses géniteurs. Tous ces mômes percevaient les parents comme une sorte de complément additionnel à leurs existences, c’était davantage des partenaires de jeux à qui l’on pouvait au cas échéant confier quelque uns de ses problèmes, ca n’allait guère plus loin. Le parent n’était en rien considéré comme un tuteur légal, il n’y avait de base, pas de lien de filiation et la transmission opéré par les parents se cantonnait à des valeurs très usuelles et terre à terre. Tout était laissé à l’initiative du môme tout comme le fait de digérer ce qui avait pu lui être inculqué en amont. Cette enclave n’était en réalité qu’un repaire de familles à enfants rois, lesquelles dictaient leurs moindres volontés et escomptaient que les parents respectent leur bon vouloir et suivent leurs prérogatives avec minutie.  


J’avais hérité de l’idiot du village, du demeuré congénital comme rares sont les cas. Il faisait bien trois têtes de plus que les autres chiards cependant il en était guère plus intelligent. Le quotient intellectuel d’une moule, sa tenue à elle seule suffisait à dresser le portrait de la brute épaisse. Une corpulence ample, des épaules larges et trapues, une gueule osseuse qui faisait bien trois pis de long, quelques mèches graisseuses sur le coin du caillou, un bon gabarit de muscles, une mine renfrogné et un sourire rempli de malice, de ceux qui laissent présager qu’il va t’en faire voir de toutes les couleurs. Engoncé dans des fringues trop étriqués, des crocs rougeasses aux panards, notre gosse était l’archétype de la mauvaise graine qui avait des idées à revendre pour commettre son lot de bêtises.


Spoiler:


Augusto était l’un de ces gosses qui était venu se dénicher un parent essentiellement pour un motif purement trivial. Le genre de môme insupportable qui a toujours besoin d’un partenaire qui fait davantage office de tête de turc plutôt qu’autre chose. Augusto n’avait guère beaucoup d’amis ou du moins il n’en avait désormais plus, il avait toujours ses bouc-émissaires préférés à qui il pouvait grappiller le goûter ou encore les attacher sur la cime des arbres. Embêter les mômes de son âge ne l’intéressait plus, la chose le lassait au point qu’il avait décidé de passer au cran supérieur et de se concentrer sur les adultes. Seulement, notre gus avait fait mauvaise pioche en tombant sur mon cas. Il avait beau avoir la tête solide comme un roc, la mienne était encore bien plus résistante. J’allais avoir du fil à retordre avec pareil olibrius. Si ca ne tenait qu’a moi, je l’aurais savaté et lui aurait appliqué quelques coups de ceinturon, histoire que l’hémoglobine circule un peu mieux à travers sa carcasse et alimente les quelques neurones se battant en duel dans l’encéphale du garçon. Je décidais d’adopter une approche fraternelle afin de mieux appréhender le môme.

« Hé bien, Augusto, si tu me parlais un peu de toi, de tes ambitions et de tes envies pour plus tard ? »
« Béhé moi ce que je veux, c’est taper, taper de ma batte le plus loiiiin possib’, M’sieur. Alors, je tape tout, les têtes, les pifs, les chaussures. C’est ce que je veux faire quand je serai plus grand m’sieur et toi, t’vas m’y aider ! »
« Hmmmh comment ça Augusto ? »
« Bah t’vois bien, que j’ai pas de balle pour m’entrainer. Alors t’vas m’en payer une sinon je vais aller cafter à Innocent que t’es méchant avec moi »

*Saleté de rejeton*
« Bien sûr Augusto, je suis ton ami, ton partenaire, ton confident, tu sais bien, on peut tout se dire. »

Foutu mioche, il était plus lucide que je ne l’imaginais le bougre. Si jeune et déjà adepte du chantage…pourrait-faire une bonne recrue du Cipher Pol d’ici 15 ou 20 ans.


*** ~~~~ ****


La pièce de cuir, grosse comme un poing, file, sifflante, à travers l’atmosphère, Augusto trépigne de bonheur de taper des balles. Son faciès de demeuré s’éclaire singulièrement lorsque la batte cogne le cuir, le chiard est aux anges et il me colle plus aux basques. L’esprit ainsi occulté, le gosse devient plus malléable, plus façonnable, l’heure est propice à la récolte d’informations.

« Augusto, tu m’as l’air d’un fier gaillard bien au courant de ce qui se trame ici. Une amie à moi avec un œil robotique est sur l’île. Tu ne saurais pas où je peux la dénicher ? «

« La reine ? Baaaaaah, j’ai oublié héhé »

Je lis la malice dans le verbe du gamin, le môme espère que je lui rince foutrement le gosier. Je m’exécute et lui file une petite bourse de berry. Hésitant, le gamin semble quelque peu intéressé, il ne s’attendait sans doute pas à ce qu’il se voit autant rétribuer mais finit par donner du mou.

« La reine nous protège et veille sur nous du haut du palais. Elle est tellement balèze qu’elle a évincé le roi zombie ! Elle est vingt fois plus forte que toi vieux crouton ! Hahahaha »
« Hmmmh et ce palais, il se trouve où ? «
« Pourquoi je te le dirais ? héhé »
« T’as pas envie de voir un vieillard décrépi se faire botter le train par ta reine. Ce serait amusant non ? »
« Owwwwwwi! le palais est au centre de l’île, une gigantesque tour d’ivoire y est aussi et notre reine y séjourne mon pote ! héhé «

Je ruminais ma frustration et l’enfouissais au plus profond de mon être. Bien que ce sale mioche fût impudent, il avait cependant la langue bien pendue. J’avais ouïe dire de ce fameux roi Zombie, j’avais consulté les registres des archives du Cipher Pol quant à ce qu’il s’était auparavant dans la contrée. Mantle Shoma s’était évertué à transformer le fameux seigneur en un pantin désarticulé, sort légitime et bien mérité pour une sale enflure pactisant avec la révolution. J’espérais intimement que mes comparses avaient elles aussi de quoi se mettre sous la dent ou plutôt que leurs instincts maternelles ne se soient pas trop soulevés dans leurs poitrines au point d’en oublier la collecte d’infos.
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Dernière édition par Atsuji Kaitô le Dim 11 Mai 2014 - 9:46, édité 1 fois
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Purée, il faisait un temps à suffoquer. La chaleur avait augmenté progressivement si bien qu'il n'était carrément plus possible de rester dans la maison, à moins de vouloir cuir à petit feu. Puis le gosse ça lui disait bien de sortir. De toute manière c'était la meilleure solution, il nous fallait en savoir plus sur cette "Reines des Enfants" que nous traquions.

Le village des parents n'avait vraiment rien de spécial, comme je l'avais dit auparavant, il s'agissait d'un regroupement de baraques comme celle dans laquelle j'avais été placée, peuplées d'anciens esclaves relâchés par le pirate Ishii Mosh sur l'île après que le fameux agent du CP9 que nous avions ordre de descendre eut fait le ménage dans le coin. De toute manière c'était la version que s'évertuaient à raconter tous les adultes présents et une bonne partie des enfants. J'avais vite fait le tour, en gros, c'était pas ici que je trouverais des indices ou autres types d'éléments qui puissent nous aider dans nos quêtes. Et c'est pourquoi, en compagnie de Pierrot, j'étais donc partie à la "chasse aux trésors", comme je lui disais, à travers la forêt des joies.

Le gigantesque parc à thème s'étendait sur des lieues et des lieues, regroupant des attractions toutes plus fantasmagoriques les unes que les autres. Un véritable rêve pour enfants. Pierrot léchait tranquillement sa sucette à la framboise que je lui avais déniché en sortant du village et ne semblait pas faire de cas au paysage autour de lui. Il avait grandi dedans et toutes ces grandes roues cassées, ces montagnes russes et ces maisons fantômes constituaient pour lui une gigantesque maison. Mais tout ce que voulait le petiot au fond, c'était des parents... une mère... Ah qu'est-ce que je fous, je suis en train de me ramollir. C'est pas pour ça que je suis venue. Considérant Kaitô comme enfermé avec sa racaille et Scarlet très prise par ses trois rejetons, je suis peut être la seule capable de mener des investigations dignes de ce nom. L'île est plutôt grande, mais je suis persuadée que c'est dans ce coin que j'ai le plus de chance de trouver quoi que ce soit sur la bien connue Lyla.

Je passe à côté d'un petit bâtiment rectangulaire aux murs peints alternativement de rouge et de jaune. Y'a les deux jumeaux Kass et Kroph qui attendent devant.

- Que faites-vous là vous deux ? Leur demandé-je.

- On attend Maman Scarlet, Maman Maëlle ! Elle est partie chercher Alice dans le Palais des Glaces. Et vous ?

- Je suis venue me balader avec Pierrot.

Cette réponse n'est qu'une palissade, en réalité je réfléchis. Les gamins ne pouvaient pas rester ici à attendre ma partenaire, Pierrot ne posait pas de soucis mais ces deux là étaient bien trop alertes. Je dois m'en débarrasser.

- Je suis bien désolée que ma sœur vous fasse attendre, vous avez probablement des tas de choses à faire. J'ai vu la chenille là-bas qui menace de s'écrouler, peut-être pourriez vous faire quelque chose ?

Les mécanos hochent synchroniquement la tête et affichent leur béatitude de se voir considérés comme de véritables techniciens. Sans plus attendre ils prennent la poudre d'escampette en direction de l'attraction en panne. Et voilà une bonne chose de faite. Plutôt que de m'aventurer dans cet endroit labyrinthique et mettre mon sens de l'orientation à l'épreuve, je décide donc d'attendre que la nouvelle en ressorte. Ce ne fut qu'au bout de cinq longues minutes que la rousse pointa le bout de son nez accompagnée d'une gosse à l'aspect maladif et aux yeux jaunâtres.

- Qu'est-ce que tu t'es dégotée là ? Elle est malade cette pauvre gosse. M'enfin bon, c'est pas grave, je vois qu'elle te suit sans rechigner alors continuons.

Discrètement j'informe ma camarade de mon idée de fouiller la zone. Je me dis qu'au fond, si le cyborg a ratissé toute l'île de ses zombies, il doit bien y avoir des traces d'elle qui pourraient signaler sa position, ne serait-ce qu'une zone particulièrement sinistrée qui pourrait nous donner plus d'informations. On poursuit donc notre marche et arrive finalement à cet endroit particulièrement ténébreux de l'île. Le petit Pierrot frissonne, ça me fait presque de la peine de l'avoir amené avec moi. Quelque chose me donne envie de le planter là, de lui dire de rentrer au village, mais ça pourrait faire capoter notre couverture. Je suis censée être une mère aimante qui n'abandonnerait pour rien au monde ses enfants. Du coup, pas le choix, je le prends dans mes bras, sous l’œil amusé de ma collègue.

- Va au diable, Scar'. Que j'lui chuchote en passant sous le formidable panneau d'entrée.

LE TRAIN FANTÔME
Je m'arrête devant l'imposante bâtisse en bois, savant mélange de montagnes russes et de "palais de l'horreur" dans lequel on est normalement censé traverser en wagon. Contrairement aux trains fantômes habituels, ici il s'agit d'un véritable bâtiment, avec quatre murs, un toit, des fondations bien plantées et juste des trous d'où jaillissent des rails indiquant l'utilité du machin. C'est glauque, mais pas véritablement surfait ; c'est bien trop sérieux pour avoir l'air destiné aux enfants. Tout a l'air particulièrement en sale état. Je fais signe à ma camarade d'aller vérifier la fonctionnalité du petit train, mais comme l'indique l'état cruel du mécanisme, ce-dernier est bel et bien hors service. Le petit chérubin tremble contre moi ; manquant de me donner un coup de tête involontaire, il se retourne pour passer ses petits bras autour de mon cou.

- Maman Maëlle j'ai peur !

- Bon on va devoir faire le trajet à pieds. Ne t'en fais pas mon amour, Maman est là pour te protéger si tu as peur.

D'un œil suspect je considère la réaction de la petite Alice que trimballe la fair lady : aucune réaction. Un petit haussement d'épaules et voilà que je m'embarque la première en pénétrant dans le petit tunnel obscur où disparaissent les rails de la station. D'un coup de botte je fais sauter les planches et ouvre le passage.

Spoiler:

A l'intérieur, quasiment pas de lumière. Y'a bien un interrupteur mais il actionne rien du tout. Je tente quand même, une fois, deux fois, trois fois...

*SCHLONG*

Une étincelle gerbe, une lumière diaphane se déploie instantanément à travers des lampes accrochées au plafond, une trappe s'ouvre et un truc jaillit du plafond, j'ai pas le temps de voir ce que c'est : je crie. Pierrot crie. Scarlet crie. Mais la petite Alice, rien du tout. Je me pousse contre un mur en protégeant machinalement la tête du petit que je tiens dans mes bras. Impossible de prendre mes armes pour me défendre vu que je tiens le bambin. Soudain, j'entends une voix, une voix pas familière du tout que j'ai jamais ouï jusque là.

- C'est juste une marionnette, c'est même pas un vrai squelette.

***
Il s'avère que l'endroit est tout bonnement gigantesque. Bâti comme un réseau de mines, le Train Fantôme s'étend sur plusieurs kilomètres sous la surface et ressort parfois du bâtiment à plusieurs étages. Petit à petit nous nous sommes perdus en passant à travers divers embranchement. L'attraction est conçue pour être interactive : il y a des boutons à pousser pour ouvrir des portes, des interrupteurs pour allumer ou éteindre la lumière, rien n'est laissé au hasard et tout est plutôt bien conservé. Alice est en tête, suivie de Scarlet. Tour à tour, squelettes parlants nous interpellent, sinon fantômes en carton et monstres de tissus. Je ne sais pas si c'est voulu, mais progressivement une odeur de charogne de plus en plus forte me chatouille les narines.

- Maman, ça pue !

- Je sais mon chéri, tiens mets ça sur ton nez. Le rassuré-je en lui donnant un mouchoir.

Puis, soudainement, nous arrivons dans une grande salle circulaire sur deux étages.

Spoiler:

Alice s'arrête brusquement. L'endroit est peu éclairé mais la puanteur fait que l'atmosphère est irrespirable. Tout en bas, la lumière semble se réfléchir sur des petites surfaces blanches. Au centre de la pièce, un gigantesque trône de bois pourri est installé. Prenant mon courage à deux mains, je dépose Pierrot et enfonce la porte moisie cadenassée qui bloque l'accès. Trop d'élan. Je poursuis ma course jusqu'en bas en roulant sur la pente en bois, puis sur un sol rocheux pour finir par atterrir dans une espèce de boue caoutchouteuse. Ma main droite rencontre une sorte de caillou que je retire machinalement de la terre. Je me relève difficilement en me massant les reins de la main gauche, puis brandis la pierre devant moi pour l'admirer de plus près. La surprise m'arrache un hoquet de terreur, tandis que je lâche tout aussi directement le débris.

- Scarlet, laisse les enfants en haut et rejoins moi. J'ai trouvé quelque chose.

Cet endroit n'était pas une mine, en tout cas plus à partir d'ici et ça ne faisait sûrement plus partie du train fantôme. C'était la sépulture du Roi Dagobert et de ses serviteurs, tous dans un sale état.

Qui pouvait bien les avoir mis là ?


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Ven 25 Avr 2014 - 22:23, édité 1 fois
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Le train fantôme... Qui aurait cru trouver un tel charnier au milieu des monstres en carton pâte et fantômes de tissu? Alors que l'odeur de chair en état de décomposition donnait des nausées à Annabella et Pierrot, Alice et Scarlet ne semblaient pas plus incommodées par les effluves nauséabondes que s'il s'agissait d'une vulgaire odeur de chien mouillé. L'odeur de viande avariée ne gênait en effet plus la jeune femme depuis longtemps, étant donné les différents sujets sur lesquels portaient ses recherches, certains d'entre eux exigeaient d'étudier la décomposition de divers fluides organiques afin de mieux savoir comment les régénérer.
Annabella venait d'effectuer un superbe roulé-boulé saut de carpe digne du plus gracieux des hippopotames, Scarlet tenta de la rejoindre en bas de la salle, accompagnée d'Alice et Pierrot, à chaque pas l'escalier de bois pourri semblait sur le point de céder, sans doute fragilisé par la prestation gymnastique du gros cul d'Annabella, mais il tint miraculeusement bon. Après avoir rejoins Annabella qui pataugeait dans la fange, Scarlet examina les restes pourris du Roi zombie, tout en prenant soin de ne pas tacher sa robe. Le cadavre n'étais pas entièrement décomposé, ce qui était étonnant étant donné ses conditions de conservation et la date de la mort du sujet. Le torse était partiellement enfoncé et de multiples côtes brisées à de multiples endroits, avec une force exceptionnelle en petits points d'impact, de la taille d'un poing d'enfant. Lyla avait battu à mort le roi jusqu'à ce que mort s'en suive grâce à sa force impressionnante. Alors que Scarlet avait les mains pleines de fluides corporels incertains, Alice la regardait froidement tandis qu'un léger rictus se dessinait sur son visage, comme si elle appréciait le spectacle. Annabella, elle, était restée loin du charnier avec Pierrot, se masquant le visage derrière un mouchoir, laissant de temps à autre échapper un hoquet écœuré entre deux haut-le-cœur tandis que le gamin avait déjà rendu son quatre-heure .
Scarlet se releva, les mains couvertes du mélange de boue et de fluides corporels, et vint chuchoter à l'oreille d'Annabella.
"Bon, je vais pas y aller par quatre chemins, si c'est leur reine qui a mis ces cadavres dans cet état, on va avoir du fil a retordre. On aura besoin de Kaito pour s'en débarrasser, sinon aucune chance de s'en sortir. Bon, pour le moment on doit sortir d'ici, peut-être qu'il aura obtenu des renseignements plus utiles que ces carcasses pourrissantes. Par contre, y'a un truc que je m'explique pas, tous ces cadavres ont des traces de sodium dans la bouche, du sel de mer..."
Alors que Scarlet finissait sa tirade, Alice observait les deux femmes avec attention, avec l'air de celle qui en sait plus qu'elle ne le devrait. La jeune femme se pencha vers sa "fille".
"Ma chérie, quelque chose ne va pas?"
Le rictus de la gamine s'élargit.
"- Toi aussi, tu veux tuer la Reine Blanche? Alors c'est ce que je pensais, tu est la Reine Rouge, maman, la Reine du royaume des Coeurs."
"- La Reine Rouge, ma chérie?"
"- Oui, Maman. Le Roi de Pique et ses sujets ont été tués par la Reine Blanche, qui dirige les Trèfles, les autres enfants. Moi, je suis pas comme eux, je suis un Coeur, comme toi. Et je déteste la Reine Blanche, elle se croit tellement parfaite, entourée de ses Trèfles, je veux la voir morte mais je suis pas encore assez forte, même le Roi de Pique ne l'était pas."
Scarlet réfléchit en regardant Annabella d'un air pensif, puis elle lui adressa un signe de tête signifiant "joue le jeu". Apparemment, Alice croyait vraiment être le personnage de fiction éponyme, mais cela ne gênait pas Scarlet, pour peu que l'enfant se révélât utile à sa mission.
"Dans ce cas, aide-moi à renverser le trône de Trèfle. Le Griffon et le Chapelier nous aideront. C'est pour cela que nous sommes venus sur cette île, mais on va avoir besoin d'Alice, toi, pour ça."
Appeler Kaito et Annabella respectivement Griffon et Chapelier parut tout à fait adapté à ce que Scarlet avait aperçu de leurs personnalités respectives, et si d'aventure Balisto montrait le bout de son museau, il serait désigné comme étant le Loir. Alice avait ses propres repères et il ne serait certainement pas bon de la perturber plus qu'elle ne semblait déja l'être.
D’ailleurs, où était Kaito en ce moment? Les deux membres du Cipher Pol 8 devaient lui faire leur rapport sur leurs découvertes, mais alors que la petite troupe tenta de remonter les marches branlantes de bois, celles-ci s'effondrèrent dans un craquement sinistre. Après avoir vérifié que personne ne soit blessé, la troupe commença à chercher une autre échappatoire. Après quelques instants, Pierrot finit par découvrir une petite ouverture sous le trône du roi mort, qui au final se révéla être un passage vers un obscur tunnel après que Scarlet et Annabelle eurent déplacé la tas de bois pourri.
Bien que Pierrot rechigna au début à y pénétrer, sa "mère" réussit à le convaincre. Alice, elle, continuait de sourire, agrippée à la main de Scarlet. Equipés de torches faites d'os et de tissu, puis trempées dans la graisse suintant des cadavres et allumées grâve au briquet d'Annabella, la troupe s'engagea dans le tunnel dont le plafond dégoulinait du jus poisseux des cadavres de la salle du trône. Après un bon quart d'heure de marche, un étrange cri se fit entendre dans le tunnel et aussitôt, le décolleté d'Anna' commença à gigoter dans tous les sens, ne tardant pas à libérer Balisto. Celui-ci ne cessait d'émettre de petits cris suraigus et semblait pris d'hystérie, même sa maîtresse ne semblait jamais l'avoir vu dans un tel état de panique. Malgré cela, la troupe continua d'avancer jusqu'à arriver dans une grande salle, elle aussi remplie de cadavres. De l'autre côté de celle-ci, le tunnel sembla remonter, mais à peine Scarlet eut-elle fait un pas dans la salle qu'un nouveau cri, semblable au précédent, résonna de nouveau. Du tunnel émergea alors la chose la plus immonde qu'elle vu jusqu'alors.

Spoiler:


Dernière édition par Scarlet Verrci le Sam 3 Mai 2014 - 20:23, édité 1 fois
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La sale teigne avait lâché le morceau escompté et bien qu’il ait fallu quelque peu cracher au bassinet pour, le jeu en valait la chandelle. La vie au village des parents était tumultueuse et bien plus mouvementée que je ne l’aurais imaginé et ce bien que les chiards menaient la danse en sous-main sur toute cette petite congrégation qu’ils étaient. J’étais intimement persuadé que tôt ou tard, les parents finiraient par reprendre les rênes de ce simulacre de village, le temps qu’ils sèment les graines de la discorde et de la confusion dans les esprits candides de ces petites têtes et qu’à terme, ils soient assez nombreux pour renverser cet équilibre hypocrite garanti par leur reine. Il est assez paradoxal de constater que même dans une société aussi insolite et singulière, un ordre hiérarchique a été établi par ces mômes demeurés où seuls primaient la loi naturelle et le ludisme des dits gosses. Ils ne paieraient rien pour attendre, c’était là une conséquence inéluctable de l’acceptation des parents dans leur communauté primaire, en fin de compte, notre mission permettait d’amener et de faciliter le renouveau de cette contrée, nous éliminions l’élément le plus récalcitrant au changement et contribuions à la félicité affleurant à l’horizon.

Quoi que revête un assassinat,  notre action était empreinte d’un humanisme profond pour tous ces petits chérubins. Ils allaient bientôt pouvoir prétendre à un avenir prometteur placé sous le sceau de la prospérité, bénéficier de véritables soins et d’une prompte éducation leur permettant de se voir octroyer un métier qu’ils auront choisi et à leur tour, donner lieu à leur descendance et ainsi de suite. Bien qu’ils considéraient Lyla comme un icône bienveillant et généreux pour la plupart, elle était sans doute ce qui leur était arrivé de pire après la destitution du feu roi zombie, elle s’était contenté de poser ses hanches robotiques dans le palais du défunt monarque et laissait s’étioler tout ce qui n’avait aucune once de trivialité, le royaume périclitait à vue d’œil et l’action commune des parents permettaient d’endiguer ce désastre annoncé. Je vous vois arriver, n’allez pas me dire qu’il aurait fallu privilégier une autre approche que celle de l’assassinat… croyez-vous vraiment que cette audience de tête brunes et blondes pige quelque chose à la persuasion et à la suggestion ?

La sensibilisation n’est valable qu’après d’un public averti, alerte, possédant suffisamment de discernement et de lucidité pour penser de lui-même… c’était loin d’être le cas de ces mômes pour qui seul importait la dimension purement ludique inhérente à la vie. L’enfer est pavé de bonnes intentions comme dit la maxime, et dans cette affaire, nous demeurions le mal nécessaire officieux mais pourtant indispensable.

Je m’efforçais de jouer mon rôle avec Augusto, tout en prenant un soin précautionneux à rester aux aguets quant à ce qu’il tramait dans l’enceinte du village. Bientôt, une effervescence inhabituelle émergea du petit patelin, un cortège de gosse aux allures dépareillées pénétrait dans le village sous l’œil suspicieux de Innocent et de quelques autres parents rassemblés pour l’occasion. Le groupe de gosses s’avance avec une certaine nonchalance, ce qui leur sert de chef par le-devant. Une tête chevelue, aux mèches blondes et bouclés, un large sourire remplie de malice, le teint cuivré, un nez busqué rosâtre, une fourrure sombre de renard sur le coin du poitrail et une sorte de batte plate en bois poncé comme arme de poing.  

« Innocent, rends moi les gamins pirates qui sont venus se réfugier chez toi. C’est la quatrième fois ce mois-ci, il est temps que je leur assène la correction qu’ils méritent. Alors t’as plutôt intérêt à t’aligner sinon on va allez cafter à la reine que t’es un foutu méchant «

L’échevelé barbu est partagé. Sa moue en dit long sur ses états d’âme. Il sait que s’il rend les chiards à ce chef, ils risquaient probablement de se faire rosser. Pourtant, l’épée de Damoclès au-dessus de ses franges chevelues, lui intime de rendre les chérubins qu’il a accueilli au sein du village. Après tout, ce ne sera que la quatrième fois qu’il rendra les gosses ce mois-ci mais cette fois-ci, Innocent le bienheureux, a une monnaie d’échange à faire valoir auprès du blondinet.

« Eh bien, je t’aurais bien donné les enfants, Till, mais vois-tu l’un d’eux, ton frère Pierrot, s’en est allé promener avec des adultes fraîchement arrivés au village et je crois bien qu’ils se sont enfoncés dans la brousse sauvage du côté du parc. «

Innocent est un manipulateur avisé et le fin tacticien qu’il est, suffit présentement à faire naître dans l’esprit impétueux du jeune Till, une certaine aigreur, une amertume pleine de fiel à l’égard de celui ou celle qui lui a pris son précieux subordonné et frère.

« Commmmeeent ca ?! Pierrot ? Pierrot ?! Qui a eu l’audace… qui a osé se rendre coupable de cet odieux crime ? «

« Une certaine Mäelle, elle doit faire dans le mètre soixante-dix et était accompagné d’une jeune demoiselle aux mèches écarlates. «

Innocent a répandu tout son fiel, il ne nous a jamais guère accordé sa confiance, il semblerait. A moins qu’il ne souhaite protéger subtilement ses ouailles, au point de nous mettre des bâtons dans les roues et ce qu’importe ce que le Till pourrait nous faire. Après tout, c’était qu’un gosse, armé d’une batte plate, parfaite pour pratiquer la thèque, qu’est-ce qu’on pouvait redouter d’un chiard dans le genre ? Et pourtant…

« Je m’en vais le récupérer, nom de diu ! Venez donc avec moi vous autres ! «

Le cortège fait alors demi-tour et s’enfonce dans le bosquet en direction de la fête foraine. Mes comparses risquent bien assez tôt de recevoir la visite de quelques importuns. Ont-elles vraiment à craindre d’une bande de gosses intenables comme ils étaient ? Je comptais bien leur laisser gérer pareille entreprise. Ca me laissait les pieds et mains libres de mon côté pour mener ma petite enquête. Enfin, mains libres, c’était vite dit, j’avais Augusto sur les épaules à me débarrasser. La brute épaisse semblait étrangement intéressé par le groupe d’enfants pirates, comme si il rêvait de faire partie de leurs rangs. La lueur au coin de l’œil, le faciès empli de béatitude, le gosse était subjugué :

« Eh bien Augusto, tu connais ces enfants ? »

« Bien entendu ! Gwahaha, c’est les enfants pirates menés par le grand Till ! Tout le monde veut faire partie de son groupe mais ils prennent que les meilleures et on m’a déjà recalé à trois reprises. Le Pierrot dont il parle, c’est son frère. Il a encore dû faire des siennes !«

« Va donc les rejoindre Augusto, tu pourras les aider à trouver Pierrot si tu débrouilles comme un chef. Allez file ! «

Le gamin se précipite bientôt dans les fourrées et court, à l’instar du gros balourd qu’il est, dans le sillon des pirates. De mon côté, j’arpente la broussaille sauvage, multipliant les acrobaties sur les branches cassantes, prenant appui sur les ramifications des arbres centenaires pour me propulser à toute hâte à travers l’immensité boisé. La tour de cristal, pourfendant l’azur, comme seule boussole de cette petite exploration forestière.



Voyage au pays des merveilles 09-vkq10



Après une demi-heure de baroudage dans les terrains vallonnés, je finis par débusquer le fameux repaire de leur grande et éminente reine. La grande roue est à peine à un kilomètre de notre position, il s’agirait pas de tomber sur des sentinelles mécanos. La tour de cristal jalonne le ciel du haut de sa cinquantaine de mètres. L’enceinte du palais est plus petite que je ne l’imaginais mais ça n’allait pas être une mince affaire que de me faufiler à l’intérieur de celui-ci. Je me rapproche précautionneusement de l’édifice en prenant garde aux quelques gamins disséminés çà et là en patrouille pour le compte de la reine et m’engage après moult acrobaties dans l’un des bâtiments annexes au palais.

Les anciennes écuries… le fumier et le purin de cheval sont caractéristiques, je descends des combles sous lesquelles je m’étais réfugié et pose le pied au sol. M’avançant vers le battant de la porte en bois, je glisse un œil à travers l’entrebâillement, des gamins en faction, rôdent et vagabondent dans la petite cour pavée, jouant les gros durs. Je présume que Lyla est au somment de la dite tour dans ses quartiers avec ses plus proches fervents admirateurs. Fort de mon expérience du septième style, je m’évapore et me mue dans l’environnement, faisant de celui-ci ma seconde peau. Je récupère le toit de l’écurie et après quelques pas de lune, m’accroche à une corniche en pierre de taille, suspendu à 15 mètres de haut. Je prends soin de jeter un œil derrière les ventaux colorés de l’épaisse fenêtre en hêtre, m’assurant qu’il n’y ait aucune âme dans la pièce. Chose faite, je pousse avec précaution le linteau de la fenêtre et m’engage discrètement dans ce qui semblait être la bibliothèque du palais. Infiltration réussie
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Dernière édition par Atsuji Kaitô le Dim 11 Mai 2014 - 10:01, édité 3 fois
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- Ma dame, il y a quelque chose.

Ce n'est pas faute de ne pas avoir un talent de nyctalope, mais cette fois-ci j'aurais préféré être aveugle. Il n'y avait aucun indice qui nous aurait permis dans cette purée de pois d'identifier la monstruosité qui nous faisait face, si ce n'est la lueur de nos torches sur sa peau blanche. C'était indescriptible, une sorte de colonne de troncs humains entassés les uns sur les autres, et ça rampait sur le sol comme un véritable scolopendre. Voilà deux dizaines de minutes que nous marchions dans la boue, dans l'espèce de glu qui recouvrait le sol et rendait la traversée du boyau laborieux. Pourtant nous étions sur une côte plutôt ingrate qui semblait nous renvoyer à la surface, mais nous n'avions pas prévu de tomber sur une abomination du style.

Je prends les rennes pour braver la situation la première, suivie de ma partenaire et de sa gosse illuminée. Je n'ai jamais vraiment eu l'occasion de me mesurer face à une créature irréelle, mythologique, mais après tout nous venions d'entrer sur la Route de tous les Périls. Étrangement, la bestiole ne cherche pas à nous bouffer ou à se rapprocher de nous, mais conserve une distance raisonnable. Je fais passer Pierrot sur mon autre bras. Ah, la voilà qui réagit. Je passe ma main droite dans mon dos et en ressort l'un de mes flintlocks.

- Je n'aurai aucun scrupule à tirer sur un enfant.

Le temps semble se stopper soudainement, la silhouette blanchâtre ne bouge plus. J'ai deviné clair dans leur jeu, rien qu'en entendant leurs chuchotements sous le déguisement et les petits cris aigus que la bestiole pousse depuis tout à l'heure. Une petite tête blonde sort, suivie de deux autres gamins aux allures crasseuses et au visage barbouillé. Sans plus attendre, le premier prend la parole et découvre une voix nasillarde et provocante :

- Not' chef l'nous a dit d'ramener son p'tit-frère, car l'a pas l'droit d'fréquenter les parents et il l'sait bien. Héhé, pour une fois qu'les mécanos ils ont pas bidonné en disant que vous z'étiez partis dans l'train fantôme... Du coup on a bloqué toutes les issues ; pis nous on en a profité pour s'déguiser, haha... Ah ! Maint'nant ferme-la stupide adulte et rends-nous Pierrot !

Je soulève un sourcil : un chef, un petit-frère, les mécanos ? Kass et Kroph devaient sûrement nous avoir suivi jusqu'à l'entrée de l'attraction. Mais bon, qu'est-ce que ça peut me faire. Depuis tout à l'heure le marmot est en état de choc, baignant partiellement dans sa propre urine et avalant les larmes qui lui coulaient sur les joues. Je l'aime bien, mais vu le poids que c'est pour la mission, je préfère encore le rendre à ses congénères. Seulement voilà, le gosse, lui, ne veut plus me quitter, il s'attache à mon cou comme un mollusque à sa coquille. Scarlet et Alice restent muettes, leurs torches continuent d'éclairer l'endroit silencieusement. Le vilain rejeton s'exaspère et perd patience.

- Qu'est-ce que tu fiches sale adulte, arrête de jouer, on est pas là pour plaisanter. On est des pirates, les pirates de Till le Rapide !

V'la des menaces maintenant. Mon interlocuteur sort un couteau et me le pointe sous le nez. Des pirates hein ? La moutarde me monte au nez, car j'ai pas que ça à faire de remettre des gamins dans le droit chemin à grands coups de fessée. Je choppe le cure dent du nabot par la lame et le balance dans la pente. Le poignard tombe, ricoche sur une pierre et plonge dans l'eau stagnante plus bas avec un léger "plouf". Balisto sort sa tête et recommence à pousser d'étranges cris, mais personne ne le remarque. Rouge de la tête au pied, le nain beugle :

- Moussaillons, faites-lui la pe-

*Clac*

***
*Clac* *Clac*
Le bruit vient d'en bas, au niveau de la zone où j'avais balancé le couteau quelques instants auparavant. En tout cas ça avait eu le mérite de couper la chique au nimbus et de lui faire changer de couleur. Vous savez, les gosses, ils aiment bien les histoires qui font peur, les légendes urbaines, tout ça. Alors ça m'a pas étonné du tout quand celui-i s'est mis à bredouiller, penaud :

- L-la... La-la... La-la L-Li... LA LICHE !

*Clac*

Allons bon c'était quoi encore ces foutaises. Y'en a même un qui mouille son froc, qu'est-ce qu'il faut pas faire quand même pour bien jouer le jeu. Même la p'tite Alice elle s'y met en agrippant avec zèle le bras de ma camarade. Pourtant, je commence à perdre mon calme tandis que le bruit recommence et recommence à nouveau, ce petit claquement digne des mâchoires d'un homme frigorifié qui s'entrechoquent. Et puis surtout quand Alice se met à dire :

- Alors l'As de Cœur existe vraiment... Maman, il faut partir d'ici en vitesse.

Malgré ses inepties elle semble en savoir plus qu'elle ne le prétend, la petite. C'est clairement pas un "As de Cœur" qui monte la côte, mais il doit y avoir une métaphore là-dessous ; pis c'est animé, mais est-ce que c'est vraiment vivant ? J'veux dire, ça vaut vraiment la peine de courir ? Répondant illico à la question que je me pose dans mon crâne, les trois mini-pirates prennent leurs jambes à leur cou, sans même plus faire gaffe à Pierrot ou qui que ce soit.

*Clac* *Clac*

Spoiler:

Le bruit n'est plus qu'à quelques mètres, le petit Pierrot s'accroche plus que jamais à mon cou, à deux doigts de m'étrangler. La chose s'approche, entre dans le faisceau de lumière provoqué par les flammes vacillantes, tranquillement. D'abord se discerne une espèce de branche toute tordue, qui se révèle finalement être rattachée à une boule de chair desséchée avançant lentement sur ses trois autres membres. Le claquement provenait en effet de ses incisives inférieures et supérieures qui se cognaient régulièrement entre elles. On ne sait trop comment, mais lorsque la bestiole nous vit, elle se mit à s'exciter et à claquer des dents de plus belle. Le marmot hurle comme un diable tandis que je commande à mes jambes de prendre la fuite, bien que tétanisée par la peur. C'est vain. La Liche se rapproche dangereusement, visiblement prête à nous dévorer la chair. Sa main n'est plus qu'à quelques centimètres de mon épaule quand l'étau se desserre et me permet de m'enfuir. En passant je prends le bras de ma compagne qui à son tour choppe celui de sa gosse adoptive. Et tous les quatre nous prenons, à notre tour, la poudre d'escampette vers la surface.

***
Finalement après plusieurs minutes de course effrénée dans une côte à trente degrés d'inclinaison, nous débouchons dans une sorte de cave obscure à travers une trappe dans le sol. Une fois tout le monde en sûreté, je me détache du gosse greffé à mon échine, referme le portillon et le bloque avec une poutre en bois prévue à cet effet. Au loin on peut encore entendre un très léger claquement de dents, mais celui-ci se fait moins activement, comme exprimant la déception de l'horrible monstre qui s'en retourne bredouille. L'écureuil super-héros saute sort de son logis et se dresse sur mon épaule. Essoufflée, je m'agenouille ; ma main rencontre un sol minutieusement pavé. Finalement, le doute s'immisce : où sommes-nous ?

- J'ai entendu les pirates de Till aller dans les égouts, mais y'a pas le droit d'aller là-bas. C'était une bonne idée de demander aux mécanos de me fabriquer un automate zombie, comme ça il garde l'endroit : c'est dangereux en bas. Pis c'est pas la première fois...

Je me lève, Scarlet et Alice ne font pas un geste. La pénombre règne et la voix de l'inconnue ne me dit rien, si ce n'est que dans son tons aigus et féminins une part de mystère demeure quant à véritable nature.

- ...et vous connaissez les garçons, ils font vraiment tout un pataquès pour rien, hihi. D'ailleurs j'ai jamais tué de zombie, moi. Y'en a jamais eu en fait, rumeurs de garçons, héhé !

C'est quoi cette histoire de zombie ? Tout ça n'était d'une qu'une vaste rumeur ? Mes doutes semblent se confirmer petit à petit quant à la personne qui tient ces propos. Un cliquètement d'enclenchement d'interrupteur précède l'allumage des chandelles disposées au sein d'alcôves creusées à même les murs. Je me retourne lentement pour voir à qui j'ai à faire. Un enfant moitié-robot moitié-humain se tenait sur le seuil d'un petite porte en fer, au sommet d'un petit escalier qui montait le long du mur. Il ne pouvait s'agir que d'elle : Lyla B VI. Elle n'était en réalité pas plus grande que trois pommes, son expression n'abritait nulle envie de tuer et ses vêtements dissimulaient aisément ses prothèses robotiques : cela se voyait qu'elle n'était plus le monstre cyborg figurant dans nos rapports. Seule sa tête trahissait vraiment son identité : semi-cybernétique, elle était légèrement disproportionnée et déformée par rapport à son petit corps et habitait dans son orbite mécanique une prothèse oculaire issue du plus grand des génies. Balisto, qui depuis tout à l'heure était perché sur ma clavicule, arme son minuscule arc avec un cure-dent, alerte. Cette drôle de bestiole n'en finissait jamais de me surprendre.

- Oh le meugnon petit n'écureuil... Vous êtes les nouveaux parents non ? Pourquoi vous trainez dans cet endroit lugubre ?

Je ne réponds pas et sers les poings, sur mes gardes. Nous l'avions trouvée, il était inutile de se répandre en paroles inutiles, tout ce qu'il nous restait à faire était de la descendre. Mais curieusement Lyla n'exprimait aucune haine ni ne semblait prête à vouloir se battre, pourtant elle savait très bien qui nous étions et ce pour quoi nous étions là, ça se voyait. Le petit Pierrot qui était resté caché derrière moi pendant tout ce temps sort alors de sa cachette et se précipite dans les jupons de la mécha-gosse.

- Lyla, lyla, j'ai eu peeeeeur !! Heureusement que Maman Maëlle était là pour me protéger ! Elle est gentiiiille, je l'aime bien !

Tout d'un coup l'expression du cyborg se fait plus méfiante, comme si nous avions touché une corde sensible. Son regard se fait nettement plus dur tandis qu'elle pousse l'enfant derrière elle et zieute tour à tour Alice, Scarlet et moi. Je m'étonne d'ailleurs que la présence de la fillette maladive ne l’inquiète pas plus que ça, bien qu'après tout elle ait déjà exprimé plus d'une fois sa haine vis à vis de la "Reine Rouge" qui ne devait être que Lyla. Ma comparse quant à elle reste muette. Quelques chuchotements puis finalement le bambin finit par quitter la pièce juste après m'avoir fait un discret signe de la main.

- Que faisiez-vous avec Pierrot ?

Alors c'est ça qui la préoccupe ? Son brusque changement de comportement est simplement du à un gamin sans importance ? C'est pas très cohérent...

- On s'en fout, baston !

- C'est toi Lyla B VI ? J'vais faire les présentations, euh... Inutile de te cacher qui nous sommes ! On est venus pour... te faire disparaître de la surface du so- de la terre !

C'est catastrophique. Bon, aucune trace de Kaitô dans le coin, je prie pour que sa couverture reste intacte, une anomalie dans les renseignements de la reine étant toujours possible. Plus ça va et plus son air se fait terrible. De mon côté la pression commence à me jouer sur mes nerfs et Bachibouzouk à se faire violence.

- Après autant de temps, le Cipher Pol n'est vraiment pas tombé le bon jour pour venir m'embêter ! J'ai des tas de choses à faire, je dois me préparer, me coiffer, organiser une réunion avec Lydia, Till et Frankyky...

- Bastoooon !

La gosse semble se perdre dans son emploi du temps de gamine, je perds patience et dégaine mon arme sans prévenir et cash lui tire une balle en plein dans la tête. Ah, elle a disparu ! Qu'est-ce que c'est que ce bordel. J'entends Scarlet pousser un petit cri. Pas le temps de me retourner, une voix robotique provenant de mon angle mort résonne dans mes oreilles.

- Ficher D158K, Shigan entièrement disponible.

J'écarquille les yeux sous la soudaineté de l'attaque. J'ai à peine le temps de me décaler pour éviter que le coup soit mortel, cependant le doigt fuse tout de même et me transperce l'épaule droite. Balisto bondit à terre, paniqué. Le Rokushiki, ah, c'est con. Je tombe sur les rotules, tâchant de respirer, le poumon douloureux. Inutile, un second coup arrive et m'envoie valdinguer avec une force incroyable contre un mur à ma gauche, appuyant en plus sur ma blessure. Mon crâne rencontre une brique, ma vue s'obscurcit, se trouble, je demeure inerte. J'entends juste :

- De toute façon vous n'auriez jamais quitté ce château vivants, tueurs d'enfants !

Je me déhanche le cou pour essayer de me redresser, mais l'effort en vient finalement à me vider de toute l'énergie qui me reste. Je croise les doigts pour que Scarlet s'en sorte... c'est sa première mission.

Noir. Tout devient noir, je tombe inconsciente.


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Sam 26 Avr 2014 - 17:14, édité 2 fois
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"C'est toi Lyla B VI ? J'vais faire les présentations, euh... Inutile de te cacher qui nous sommes ! On est venus pour... te faire disparaître de la surface du so- de la terre !"

Oh la conne... Scarlet dévisagea Annabella. Comment avait-elle pu annoncer de but en blanc la raison de leur présence? Des mensonges supplémentaires auraient peut-être permis de grappiller des renseignements supplémentaires, ou encore de dévoiler un quelconque point faible chez Lyla.
Au lieu de ça, Annabella avait délibérément provoqué la cyborg alors que Scarlet lui avait démontré la puissance de frappe de la cyborg grâce aux cadavres de la salle du trône. A présent, le calme indifférent de Lyla avait fait place à une aura glaciale, une envie de meurtre. Scarlet ressentit la pulsion meurtrière de Lyla avant même que celle-ci ne fasse le moindre geste et par réflexe, celle-ci serra Alice dans ses bras pour la protéger. Elle même ne savait pas pourquoi, alors qu'elle n'avais jamais pu supporter les enfants auparavant. Le temps de se retourner et Annabella est déjà à terre, le torse perforé par le doigt de la petite cyborg. Merde, c'est vrai qu'elle faisait partie du CP9 la merdeuse, alors rien d'étonnant à ce qu'elle maîtrise les six formes du Rokushiki. La seule chose que pouvait faire Scarlet contre la gamine d'acier, c'était fuir, mais ça signifiait abandonner Annabella et Alice. Non, elle devrait défendre sa collègue et Alice.

"De toute façon vous n'auriez jamais quitté ce château vivants, tueurs d'enfants !"

Tueurs d'enfants? Scarlet n'avait encore assassiné personne, bien que ses mains soient encore rouges du sang des cadavres de zombie. Elle devait stopper Lyla dans son élan, l'empêcher de tuer Annabella. Scarlet n'avait pas encore eu l'occasion de tester en conditions réelles l'air qu'elle s'apprêtait à jouer, et encore moins sur une cyborg. A quel point Lyla était-elle une machine? Avait-elle encore au fond d'elle son coeur d'enfant, capable de ressentir des émotions?

"- Ecoute, et entame toi aussi la valse des morts. Saint-Saëns - Danse Macabre!"
Saint-Saëns - Danse Macabre:

Scarlet ordonna à Alice de se boucher les oreilles tandis qu'elle ajustait son Cracordéon. A peine la jeune femme commença à frotter les cordes de l'instrument à l'aide de son archet que la pièce sombra dans la pénombre la plus totale devant les yeux de Lyla. Peu à peu, des cadavres commencèrent à sortir du sol, vêtus de lambeaux de vêtements. Au rythme de la valse macabre, ceux-ci entamèrent la danse macabre, tandis que certains d'entre eux tentaient d'entraîner Lyla avec eux. La petite cyborg cligna des yeux, comme si elle ne comprenait pas ce qu'elle avait face à elle. Celle-ci poussa un soupir.

"Fichier 207W, recherche en cours... Rankyaku."

La gamine fit un drôle de geste avec sa jambe tandis qu'une grande lame d'air apparut, balayant les morts et dissipant l'illusion. Scarlet, surprise par la violence de l'attaque, n'eut que l'espace d'un instant pour se dégager de la trajectoire de l'attaque afin de protéger Alice.

"Fichier 497F, Soru."

Lyla disparut instantanément et réapparut derrière Scarlet.

"Décidément, le Cipher Pol recrute vraiment n'importe qui... Tu a l'air de tenir beaucoup à Alice, la rouquine. Tu sais pourtant que le règlement du Cipher Pol interdit toute implication émotionnelle lors de ses missions. Tu n'est pas faite pour être un agent, ni pour être mère..."

Ce qui arriva ensuite, Scarlet ne s'en rappelle pas, excepté une immense douleur au niveau du crâne et le cris d'Alice l'appelant.


Dernière édition par Scarlet Verrci le Sam 3 Mai 2014 - 20:22, édité 1 fois
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Une bibliothèque aux allures bien particulières s’épandait devant mes yeux ébahis, des livres de contes pour enfants, des coloriages, des livres où seules des images figuraient avec une légende en dessous, des bouquins à chansons pour enfants et autres chiards en devenir. Ce recueil à bouquins n’avait rien du sérieux de la pièce austère et sévère qu’on tend à se représenter. Cette bibliothèque-ci était ornée d’objets insolites et inédits auxquelles on ne s’attendait guère à voir dans une pièce dédié à la lecture. Un papier peint rose bonbon, un gigantesque tapis en fausse fourrure aux couleurs criardes, des tableaux tape-à-l’œil au possible en passant par des décors féériques étaient accrochés ca sur les pans de mur. Je jetais un œil aux rayonnages d’ouvrages, des titres très évocateurs quant à l’âge des lecteurs fréquentant la dite bibliothèque, Alice aux pays des groseilles, le conte des mille et un fanfarons, Finfin et le chaudron et tout une ribambelle de héros haut en couleurs qui me rappelaient les histoires qui avaient bercé mon enfance.

Cette pièce avait davantage des airs d’une salle d’éveil où petits et grands pouvaient partager et s’amuser dans une atmosphère ludique, presque hors-du temps, loin du monde de brutes figurant derrière les remparts du château. Mon œil parcourt la pièce et tombe bien assez tôt sur un immense triptyque logé dans une alcôve au-dessus des étagères et autres meubles de rangement. L’immense tableau représente la victoire de Lyla B VI sur le roi zombie et ses sbires, l’arrière représentant la fête foraine et les enfants émerveillés devant la gamine cyborg terrassant le monarque. Au premier plan, les parents tendent leurs paumes en direction de Lyla derrière qui, l’astre solaire semble embraser la silhouette de la jeune guerrière libératrice. Une sacrée belle mise en scène que cette toile-ci, chapeau bas pour le peintre, c’était proprement sublime. En bas du cadre, figurait une petite tablette dorée où on pouvait lire l’inscription suivante : « La Reine des cœurs, triomphante de la méchanceté du roi zombie ». Nul doute que la reine avait fait en sorte qu’on la dépeigne de telle sorte, une sorte de propagande rondement mené et dissimulé par l’esprit de Lyla qui, sous couvert d’enfantillages et de gamineries, menait toute cette troupe.

Laissant derrière moi cette pièce singulière, je m’engageais dans le grand escalier en colimaçon de la tour de cristal. Le décor infantile et espiègle était à l’aune de la bibliothèque que je venais de traverser. Les briques avaient toute étés crayonnées de dessins élémentaires, de griffonnages et de figures de toutes sortes dessinés de telles sortes que j’associais ces œuvres au crédit des bambins. Arpentant l’escalier avec précaution, mon attention se porte bientôt sur une porte en trompe-l’œil de laquelle émane des intonations féminines particulièrement marqués. Je glisse un œil à travers la serrure et observe le remue-ménage qui s’opère dans l’endroit.

« Rends-la-moi ! Je l’ai trouvé d'abord, rends la moi, je te dis. «

« Noooon ! Tu m’as dit hier que tu me la donnais ! Donner c’est donner, reprendre c’est vol…Maaais Aieeeuh. JE vais le dire aux pirates, tu vas voir ! »

Deux gamines se prennent le chou. L’objet de leur querelle ? Une poupée en plastique recouvert d’un long tissu. Un bon crêpage de chignon en règle, comme quoi les vieilles habitudes, même à cet âge-ci, se perdent pas bien longtemps. Les deux gamines se tirent les cheveux, les joues, les habits avec une certaine fougue que je ne prêtais pas à leur âge si infantile. Après quelques minutes de chamailleries farouches, les deux gaminent fondent en sanglots dans les bras l’une de l’autre. Une troisième voix plus sérieuse et posé dans son ton s’élève pour trancher entre les deux mômes.

« Allons-bon les filles, tenez, je vous en donne une chacune. Allez jouez ailleurs »

« Mais maîtresse Lydia ? «

« Voulez-vous vraiment que j’en appelle à la reine de cœur ? »

Un regard suffit, une expression un tantinet sérieuse sur le visage de la gamine témoignant de tout son aplomb, de toute son assurance, suffit à esseuler les deux mômes qui ne demandent pas leur reste et s’isolent pour jouer dans leur coin. Non pas qu’elles redoutaient la reine mais elles ne voulaient guère tomber dans l’estime de l’icône qu’elles chérissaient avec véhémence.

La fameuse lydia, 12 ans à tout casser,  vêtu telle une gourgandine n’était pas à s’y méprendre une gamine comme les autres. L’expression de son faciès seul avait suffit  à faire courber l’échine aux deux gamines. Une longue robe, de longues mèches brunes, des ongles manucurés, un minois, innocent, chaste, surmonté d’un couvre-chef avec une tête de mort stylisée. La gamine avait de l’autorité et il ne m’étonnerait guère qu’elle soit en cheville avec Lyla pour ce qui est de la gestion de ce château.

« Maîtresse, maîtresse, quand est-ce qu’on pourra aller voir la grande reine ? »

Lydia se pencha vers les deux mômes, elle avait repris toute sa bienveillance et sa complaisance pour les deux fillettes. Posant ses paumes sur les deux têtes avec humanité, elle leur adressa un sourire plein de prévenance.

« La reine est occupé, elle doit préparer le couronnement du petit frère de Till, Pierrot, mes petites amies. Elle a tout arrangé avec Till et Innocent. D’ailleurs, elle a dû rejoindre le sous-sol pour récupérer notre futur monarque. «

« OOOH OUIIII »

Les deux gamines ne purent s’empêcher de sauter de joie à l’unisson et bondirent dans toute la pièce, une gaieté profonde se lisait sur leurs visages candides.

Le futur roi ? Alors Lyla, s’est décidé à passer le flambeau ? Voilà une intéressante découverte qui pourrait arranger nos affaires Hmmmh. Pierrot, frère de Till, prendrait la gouvernance de l’île ? Belle diablerie que celle-ci, le Till doit pas avoir plus de 17 balais, comment son petit-frère pourrait t’il prendre les rênes de Innocent Island ?  Le temps de ces quelques réflexions restées en suspens vint bientôt s’interrompre lorsque la porte s’ouvrit brusquement de l’intérieur, j’eus à peine le temps de me propulser avec un pas de lune et d’opérer un grand écart entre les deux remparts de la tourelle, pour éviter la rencontre inopportune. Les trois filles sortent de l’antichambre et dévalent les marches de l’escalier, en donnant de leurs voix insupportables. Je pénétrais dans la pièce, l’archétype de la chambre pour fille par excellence, des présentoirs à poupées de porcelaine, des jeux multiples, des petites figurines d’animaux figuraient sur les étagères, un sens du rangement et de la rigueur, déjà, sans faille, bien loin du capharnaüm qu’était ma piaule lorsque j’avais le même âge. Je passe la salle au peigne fin, recherchant le moindre indice lorsque je tombe nez à nez avec un tiroir verrouillé dans le petit secrétaire disposé sous la fenêtre aux linteaux pailletés. Le temps de crocheter la serrure avec minutie et d’ouvrir le compartiment et je découvre le graal : le journal intime de lydia. Le genre de petit ouvrage de poche où toutes les petits gamines de son âge couchent sur papier tous leurs petits secrets chaque soir venu dans leur petit jardin secret. Nul doute qu’au regard de cette pièce, lydia doit entretenir le carnet avec assiduité.

Je parcours son contenu avec intérêt, lis les gribouillis, les griffonnages, sa plume est clair, nette et lisible, son orthographe propre et sa syntaxe dénué de toutes fautes, un style sans fioritures malgré l’âge de la jeune fille. Bientôt je tombe sur une perle :

3 août 1624

Gnihihihihi aujourd’hui, le roi est mort, vive la reine. Notre nouvelle reine a terrassé le grand méchant mais j’ai un secret à te confier ô mon journal. Le roi n’était pas du tout zombie, c’est là une rumeur, un bruit de couloir qui a été répandu de sorte que notre belle reine fasse l’unanimité auprès des enfants gnihihihi. D’ailleurs gnihihihi, Pierrot m’a avoué aujourd’hui qu’il était amoureux de Georgina, ma petite soeur gnihihihi. Je le savais, je m’en doutais gnihihihi.

Que de révélations, toute cette vaste fumisterie sur les zombies n’était qu’un canular, une tromperie orchestrée par lyla elle-même pour légitimer son trône. Le concours de circonstances avait penché en sa faveur et il fallait bien avouer que c’était plutôt bien trouvé de sa part. Je refermais le journal, le replaçait précautionneusement dans le secrétaire et m’empressais de faire machine arrière pour aller espionner l’instigatrice de ce gros mensonge. En bas de l’escalier, des sentinelles, enfin pardon, des gamins habillés à l’image de sentinelles faisaient le guet, paré à sommer la garde des enfants au moindre incident. Sur le mur droit, une arche empierré dans laquelle un étroit passage, modiquement illuminé par des chandelles,  menait à la cave. Un pas régulier, continu, non, plusieurs pas résonnèrent dans sur les marches en grés du passage, une discussion s’opérait entre deux protagonistes, à priori encore des chiards à entendre leur timbre de voix.

« Puisque je te dis qu’il ne faut pas parler aux parents, Pierrot. Ils te pervertissent et t’influencent et tu ne voudrais pas faire de peine à ta reine n’est-ce pas ? »
« Oh bah noon, excuse-moi grande reine, c’est juste que Maman Maëlle et la fille aux cheveux rouges étaient si gentille et et je les aime bien et et… »
« Allons Pierrot, suis-moi, nous avons des choses à préparer. »

Lyla et Pierrot se dirigèrent vers l’aura lumineuse de la porte de sortie, le petit tenant fermement la main de Lyla, comme si elle avait été sa mère. Il se pourrait bien d’ailleurs qu’il la considère comme tel…attendez une seconde, Maman Maëlle ? Miss Papillon ? Bordel…

Lyla leur aurait réglé leurs comptes ? Je leur avais bien dit de ne pas fouiner partout et n’importe où sans m’en tenir informé pourtant. Autant pisser dans un violon, bordel. Comment j’irais expliquer un truc pareil aux autorités ? Pertes collatérales ? Mouais, je me doute qu’ils risquent d’apprécier le motif. Je m’empresse de me dérober à la vue de la petite patrouille en disparaissant dans le déplacement d’air crée du soru et me calfeutre dans l’angle mort du passage. Descendant marche par marche, sur la pointe des pieds, les sens tout en éveils, l’oreille alerte. Rendu dans la salle carrelée en bas, j’entrevois mes deux comparses en sale état, Annabella à moitié encastré dans le sol et Scarlet assommé, les deux inanimées. Le temps de vérifier leurs pouls pour m’assurer que la faucheuse ne les a pas emportés. Collant des petites baffes aux deux amies, enfin petites, j’au plutôt la main lourde lorsqu’il s’agit de ca, elles finissent par revenir à elles avec pénibilité, se frottant le derrière du crâne.

« Vous avez eu du bol qu’elle ne vous ait pas trucidé sur place. Si elle l’avait voulu, vous ne seriez déjà plus de ce monde ! «

Les laissant se remettre de leurs émotions et se reprendre du poil de la bête, je poursuis :

« Le gamin que t’avais Annabella, Pierrot, est appelé à devenir le futur roi de l’île et est amoureux d’une certaine Georgina, la soeur de celle qui se fait appeller Lydia et qui semble très proche de Lyla. Le couronnement du môme est prévu pour bientôt et cerise sur le gâteau, il est le frère de Till, le leader des pirates et … »

« BORDEL VOUS M’ECOUTEZ ???!! Faudrait pas me prendre pour un vieux sénile qui radote ! »


Dernière édition par Atsuji Kaitô le Mar 13 Mai 2014 - 10:16, édité 1 fois
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Vous savez ce qu'il y a d'énervant lorsque l'on fait ce boulot et qu'inlassablement on se retrouve souvent dans des situations où l'inconscience nous prend et que l'on se réveille soudainement ? C'est qu'à chaque fois, le corps dit stop, les organes brûlent mais y'a pas le choix, faut avancer.

- Vous avez eu du bol qu’elle ne vous ait pas trucidé sur place. Si elle l’avait voulu, vous ne seriez déjà plus de ce monde !

Le réveil de Kaitô venait de faire l'effet d'un grand seau d'eau jeté dans la figure, avec le plaisir d'y trouver à l'intérieur des clous et des vis pour bien faire mal. Tout mouvement m'était insupportable, je souffrais comme pas deux et c'était une vraie plaie de me lever, mais néanmoins je me réjouissais d'être encore en vie. Je ne savais pas non plus si c'était grâce à Scar', mais j'avais tout de même le sentiment de devoir lui être reconnaissant. La pauvre s'en tirait mieux que moi, mais avec tout de même la commotion cérébrale qui allait bien.

- Le gamin que t’avais Annabella, Pierrot, est appelé à devenir le futur roi de l’île et est amoureux d’une certaine Georgina. Le couronnement du môme est prévu pour bientôt et cerise sur le gâteau, il est le frère de Till, le leader des pirates et…

Hein ? De quoi il me parle. Attends, c'est vrai, ce nom me dit quelque chose. Petit à petit je me disais que rien n'avait été laissé au hasard. Un couronnement ?


...même que plus tard je me marierai avec la petite soeur de la cheffe des filles ! Nah !

...le Cipher Pol n'est vraiment pas tombé le bon jour pour venir m'embêter ! J'ai des tas de choses à faire, je dois me préparer, me coiffer, organiser une réunion avec Lydia, Till et Frankyky...

...Tu vas être ma maman alors, hein ? Héhé ! Moi c'est Pierrot, le plus petit des mécanos !

Ah... Ah attends. Pierrot, futur roi ? Non j'ai trop mal au crâne pour réfléchir, il faut me laisser encore plusieurs minutes.

- BORDEL VOUS M’ECOUTEZ ???!! Faudrait pas me prendre pour un vieux sénile qui radote !

Je fais ripper mes ongles contre les blocs de pierre fixés dans le mur, essaye misérablement de trouver des appuis pour me relever. Je sens des gouttes de sueur perler sur mon front, une fièvre qui prend progressivement possession de moi, le sang qui coule abondamment de ma plaie à la poitrine et de mon cuir chevelu maltraité au dessus de mon oreille gauche. Et merde. Les forces me quittent soudainement tandis que je m'écroule à terre, la respiration bruyante, du sang dans la bouche. Peut-être que je devrais demander de l'aide à mes camarades, mais Kaitô semble trop occupé à converser avec Scarlet, aucun des deux ne remarque mon incapacité à tenir debout. Je passe deux doigts de ma main droite au dessus de mon sein gauche : un trou béant tranche ma chair à vif et mes vêtements rougis par l'hémoglobine se collent à ma plaie. Argh, mon manteau noir est fichu...

Il fait étonnement froid, néanmoins j'essaye du mieux possible de garder mon calme face à la gravité de la situation. Après tout, c'est un peu trop tôt pour mourir non ? Je grelotte, mes membres tremblent et s'engourdissent. Du mieux que je peux, j'ôte mes couches de vêtements. Mes deux comparses remarquent finalement mon état maladif et se précipitent vers moi. Balisto est là lui aussi avec ses grandes prunelles noires, l'air d'un héros impuissant face à sa Lady qui se meurt. Je me souviens alors avoir réussi à enlever mon trois-quart et ma chemise, avoir vu le sang continuer à fuir irrémédiablement mon corps à travers le disque de vide dans mon poumon, à l'avoir vu tâcher de pourpre mon soutien-gorge immaculé. Magnifique rouge sur le blanc d'une pâleur extrême de ma peau.

***
J'étais restée consciente tant bien que mal, tantôt sombrant dans un sommeil léger dénué d'esprit et de douleur, tantôt pleinement réveillée et souffrant comme un chien. En gros je me battais pour ne pas trépasser, portée dans le dos de Kaitô, les bras ballants au niveau de ses épaule et la tête dans le creux de son cou. Nous étions sortis de la cave et n'avions cessé de monter des escaliers depuis, évitant au mieux de tomber sur un gosse maintenant que la cérémonie avait commencé. Car oui, ils grouillaient dans le château, et des fois Kaitô et Scarlet devaient se tapir dans l'ombre et traverser des embranchements en catimini. A un moment où nous étions seuls, je crus saisir des bribes quasi-compréhensibles se voulant rassurantes.

- T'inquiètes fillette... va sortir... tiens bon.

Mon crâne se faisait de plus en plus lourd et il m'était de plus en plus impossible pour moi de rester éveillée. Nous arrivâmes finalement sur le toit de l'édifice, à plusieurs dizaines de mètres de hauteur du sol. Il s'agissait d'une terrasse carrée, sans sortie possible sinon l'entrée que nous avions emprunté. La situation se voulait critique. Tout autour, les toitures du bâtiment inférieur effectuaient une pente légère qui semblait pour le moins stable et elles n'étaient qu'à quelques mètres de hauteur. Le vieil homme fit d'abord signe à l'agent du CP8 de passer par dessus la rambarde et de descendre progressivement en se tenant fermement aux colombages.

- ...sont... haut... toit !

Les voix criardes de petites filles croisées avec des guerrières amazones venaient de derrière nous et laissaient invariablement présager l'arrivée de fillettes. Kaitô agrippe la rambarde à son tour et commence la descente, fixe sur ses appuis et détendu au possible. C'était quelque chose que j'admirais beaucoup chez le p'tit père, mais j'osais pas souvent le lui dire. Y'avait ça, et sa moustache. Son pied dérape et le déstabilise, manquant de nous faire tomber dans le vide, mais l'homme reste imperturbable et retrouve ses marques avant de sauter sur les tuiles rouges de la toiture. Ça y est, les gamines sont juste au dessus de nous. Encore un palier à rejoindre avant d'entamer la dernière descente vers la terre ferme. Seulement voilà, les jardins environnant le château sont sous la bonne garde des pirates de Till le Rapide.

***
J'ai quasiment du mal à garder mes yeux ouverts. J'essaye de le faire savoir à mon compagnon porteur, mais c'est plutôt difficile.

- Gnahaha-bleu, yeux... dormir... glouglou-ananas...

C'est pas exactement ce que je voulais dire mais je pense qu'il a saisi le sens de mes propos. Ma langue se fait pâteuse tandis mon cerveau met de plus en plus de temps à comprendre les mouvements autour de moi. Paf ! La descente se termine sans une égratignure, sauf pour Scarlet qui a dévalé la moitié d'une toiture et a conservé des marques de griffures de la part des gentilles tuiles ébréchées sous son corps plus en chair qu'il n'y paraît.

Même si mon champs de vision est plutôt rétréci et si la sueur de ma fièvre me dégouline dans les yeux, j'arrive à voir qu'il n'y a pas de trace de garde dans les parages, nous sommes plutôt chanceux. Scarlet fait rapidement comprendre que nous devrions dégager et complète en nous renseignant sur un lieu où nous pourrions être en sécurité le temps de recouvrer des forces.

- Tiens Scarlet... falloir... Anna... là-bas. Moi... rester... assiste à... cérémonie... probablement... parmi les parents. ...perdez... temps.

Me voilà trimballée sur le dos de ma camarade, son pas se fait moins léger, plus troublé et stressé. Si la charge sur son dos que je représente la perturbe, elle n'en laisse rien paraître, mais l'effort se ressent tout de même. Nous traversons donc un léger terrain boisé avant d'atterrir à nouveau dans la fête des joies. Vadrouillant entre les différentes attractions, on finit néanmoins par atteindre le fameux endroit où je pourrais enfin dormir. C'est quasiment un miracle que j'aie tenu jusque là. Le palais des glaces. En entrant je vois mon reflet dans l'un de ces miroirs ayant le don de déformer votre image. Je vois mon teint maladif, je vois le sang qui me barbouille la poitrine, le ventre et la veste de ma camarade, je vois mes yeux chassieux et mes cheveux constellés de perles de sueur. N'importe qui aurait dit qu'il ne m'en reste plus pour très longtemps à vivre, mais je sais que je vais survivre.

Scarlet dépose mon corps quasiment inanimé sur le sol, la conscience me quitte ; ma main balaye le carrelage et amasse un petit tas de poussière. Je sens quelque chose me compresser la poitrine, je distingue une ombre penchée au dessus de moi. Du sang me remonte dans la bouche et me laisse un goût acre. Je rigole intérieurement, quelle idiote j'ai fait.

Car non je ne peux pas partir maintenant, il faut que je reste et que je devienne plus forte. Car je ne dois plus être un poids pour mes alliés. Car en agissant comme je l'ai fait, je n'ai réussi à protéger personne. Alors je vais récupérer et devenir assez forte pour protéger mes camarades.

Mais tout ce qu'il me faut avant, c'est un peu de sommeil, juste un peu...


Dernière édition par Annabella Sweetsong le Ven 2 Mai 2014 - 3:41, édité 1 fois
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ZBAFF ! ZBAFF !
C'est par une paire de claques à faire sortir les yeux de ses orbites que Scarlet fut réveillée par Kaito. Comment osait-il la molester de la sorte ? Surtout qu'avec ce qu'elle s'était déjà pris sur le crâne, elle n'avais vraiment pas besoin qu'on en rajoute...

"Vous avez eu du bol qu’elle ne vous ait pas trucidé sur place. Si elle l’avait voulu, vous ne seriez déjà plus de ce monde !  Le gamin que t’avais Annabella, Pierrot, est appelé à devenir le futur roi de l’île et est amoureux d’une certaine Georgina, la soeur de celle qui se fait appeler Lydia et qui semble très proche de Lyla. Le couronnement du môme est prévu pour bientôt et cerise sur le gâteau, il est le frère de Till, le leader des pirates et … »

Scarlet se releva avec un air grognon, à vrai dire, son crâne lui cognait encore trop pour qu'elle puisse se concentrer sur ce que disait son supérieur. A défaut, celle-ci fit une minable tentative pour faire lui faire croire qu'elle l'écoutait, mais...

« BORDEL VOUS M’ECOUTEZ ???!! Faudrait pas me prendre pour un vieux sénile qui radote ! »

Aïe ! Et le voilà qui se met à beugler comme une poissonnière, maintenant, tandis que la borgne se remet à tomber dans les vapes.

"Ta gueule, le vieux."

L'insulte eut l'effet escompté, Kaito la regarda d'un air médusé, peu habitué à ce que Scarlet se montrât vulgaire avec qui que ce soit. La rousse se précipita près d'Annabella et examina la blessure, laissée béante par le doigt de la cyborg.  Lyla avait fait des dégâts, de gros dégâts même, en perçant la cage thoracique d'Annabella jusqu'à atteindre le poumon gauche. Scarlet s'estima très heureuse de n'avoir qu'une grosse bosse en comparaison. Le souci est que sans soins rapides, Annabella risquait de mourir d'anémie ou de se noyer dans son propre sang, ce qui serait bien plus douloureux.

*Putain, Anna, t'as pas intérêt à nous claquer dans les pattes. Et c'est pas avec le matos que j'ai sur moi que je vais pouvoir faire grand chose.*

Que faire ? Anna n'était pas transportable en l'état, mais la laisser là serait la condamner à une mort certaine... Le mieux serait de l'emmener jusqu'au village des parents, là bas y'aurait sûrement de quoi rafistoler la borgne. En attendant, Scarlet déchira des lambeaux de sa propre robe afin de bander la plaie et ralentir le saignement, usant de la chemise d'Anna comme d'une compresse de secours.

"Kaitô, 'faut vite la ramener dans un endroit calme, le palais des glaces fera l'affaire. Elle risque d'y rester avec le coup qu'elle s'est pris. Et là, je peux pas faire grand chose, alors porte la, grouille toi. Faut pas attirer l'attention, parce que sinon la gosse va nous retomber dessus et je doute qu'elle nous épargne une seconde fois"

Aussitôt, le membre du CP9 s'exécuta, portant l'étrange fagot que constituait Annabella sur son dos. Scarlet, qui avait une ouïe bien plus développée grâce à ses gênes de sirène, ouvrait la marche, s'assurant qu'aucun enfant ne se trouvât dans les couloirs de la tour. De temps à autre, l'étrange cortège se tapissait dans l'ombre au moindre bruit, jusqu'à arriver au niveau d'une ouverture menant au toit de l'étage inférieur. Ce serait certes moins discret de l'extérieur, mais plus rapide. Cependant, l'idée ne se révéla pas aussi bonne car à peine une vingtaine de minutes plus tard, des cris de fillettes se firent entendre par depuis le bas du bâtiment.

"Ils sont là-haut ! Sur les toits !"

Merde. Pas assez rapide, voilà que les merdeuses rappliquent elles aussi. Sous le coup de la surprise, Kaito manque de tomber du toit, mais un rapide coup de Geppou suffit à lui rendre sa stabilité. Chose qui impressionna Scarlet pour le coup, celle-ci ayant hâte de maitriser cette arcane du Rokushiki, une fois sortis de ce guêpier 'faudrait qu'il la lui apprenne, pouvoir marcher dans les airs, c'est quand même super utile. La rousse, elle, n'a pas cette chance, et c'est après une rapide glissade sur les fesses qu'elle chuta du toit avant d'atterrir dans les jardins du château, heureusement ralentie dans sa chute par son épaisse robe qui forma une sorte de parachute grotesque grâce aux baleines contenues dans son tissu.

"Bon, maintenant, 'faut aller au palais des glaces. Y'a que là-bas qu'on ira pas nous chercher, il faudra que tu te débrouille pour me ramener ma valise. Dedans, y'a tout mon matériel de chirurgie et de quoi rafistoler Anna'."

Kaitô prends un air pensif puis prends Annabella dans ses bras, à la manière d'une princesse.

- Tiens Scarlet, il va falloir que tu portes Anna jusqu'à là-bas. Moi je vais rester, il faut que quelqu'un assiste à cette cérémonie, je pourrai probablement me glisser parmi les parents. Allez, ne perdez pas de temps.

Scarlet dévisagea son supérieur, mais celui-ci avait raison. Elles étaient toutes deux blessées et Lyla était toujours vivante. La mission devait être remplie. La rousse soupira en hochant la tête avant de prendre tant bien que mal Miss Vingt-kilos-de-trop sur son dos. Peu de temps après, Kaitô était déjà reparti dans les airs, en direction du lieu de la cérémonie, tandis que Scarlet se dirigea tant bien que mal dans la forêt des joies. Un bon quart d'heure plus tard, le palais des glaces fut en vue et c'est sous les borborygmes d'Annabella que Scarlet pénétra à l'intérieur. A peine la rousse arriva t'elle dans la salle centrale qu'elle tomba nez-à-nez avec la petite Alice qui se rua sur elle en sanglotant.

"Maman ! Tu est revenue ! Les autres avaient dit que la Reine Blanche t'avais tuée !"

Scarlet regarda Alice d'un drôle d'air.

"Oui, ma chérie, je suis là. Mais je t'en supplie, j'ai besoin d'aide. Le Chapelier est blessé. Je dois vite le soigner, sinon il va mourir. Il nous faut des pansements. Tu  sais où se trouve notre maison, non ? Il y a une grande valise en cuir noir dans la chambre du premier étage. Rapporte-là le plus vite que tu peux."

Alice regarda à son tour Scarlet, un grand sourire baigné de larmes, puis celle-ci partit en courant de la salle. La rousse déposa le corps inanimé d'Annabella sur le carrelage poussiéreux, épongeant son front perlé de sueur et compressant la blessure de sa poitrine. Malgré la poussière et autres substances aériennes, Scarlet en profita pour examiner ce qui l'intriguait depuis sa rencontre avec elle, à savoir son œil borgne.L'oeil avait sans douté été arraché, comme en témoignait les lambeaux de chair éparts dont seul restait un petit bout de nerf optique. Ca avait dû être douloureux, très douloureux, mais cela offrirait peut-être à Scarlet l'occasion de tester deux ou trois expériences en matière de réparation oculaire, si Annabella le souhaitait. Cinq minutes plus tard, Alice revint chargée de la valise ce qui permit à Scarlet de se mettre rapidement à l'ouvrage. L'opération dura une bonne demi-heure, et les soins qu'avaient exécutés la rousse ne seraient guère miraculeux. Sans greffe, un bon mois de convalescence ne serait pas de trop pour que les chairs se réparent d'elles-même.


Dernière édition par Scarlet Verrci le Ven 2 Mai 2014 - 23:58, édité 2 fois
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Où suis-je ? Il fait si froid, si sombre. J'entends des gens parler, des voix qui chuchotent dans la pénombre, qui se tarissent avant de reprendre subitement. Je n'y vois rien, même pas ma main quand je la tends devant moi. Mon corps est lourd, Suis-je morte ?




- J'attendais ce moment depuis longtemps, Annabella. Annonce une voix dans mon dos.

J'ai peur de me retourner, de faire face à qui je suis vraiment. Alors c'est là, à l'article de la mort qu'elle a choisi de venir me parler. Oui, elle, son timbre est féminin et même sans les voir, je devine ses courbes gracieuses, si semblables au miennes et son odeur si particulière ; c'est comme si elle avait toujours fait partie de moi.

- La fleur s'est épanouie on dirait, héhé.

Je fais volte-face, transportée miraculeusement dans ce néant total vers l'endroit d'où provient la voix de l'entité qui compose une partie de moi. Je m'approche, contemple mon reflet quasiment parfait, à quelques différences près : tout d'abord les cheveux d'un blanc éclatant, flottant délicieusement dans l'éther improbable de l'endroit, puis ses vêtements immaculés, épurés et flamboyants de charisme. La métaphore de la fleur me semble pertinente : elle a grandi au fond de moi, est devenue quelqu'un, même si petit à petit elle s'est faite plus discrète, plus sage, mais quelque part je sais qu'elle ne parle pas d'elle. Que suis-je pour elle, d'ailleurs, qui suis-je au fond ? Et pourquoi ? Cette question que je me suis posée tant de fois, pourquoi ? On m'a dit, répété, tout ça c'était à cause d'une chute de balançoire, pourtant désormais ça me semble tellement flou quand j'essaye d'y repenser, un souvenir cadenassé par le temps... Je connais la réponse, elle connait la réponse, elle reste éveillée lorsque je dors à poings fermé, elle est la gardienne de mon inconscience. Oui je sais tout ça.

- Mais qui es-tu ? Demandé-je finalement, avide de savoir la réponse à cette infâme question qui me hantait .

- Je suis une déesse, la tienne, la divinité de ta folie ou encore une maladie. Je suis ce que tu veux que je sois, bécasse. Et je m'amuse à te faire réaliser tes pensées les plus secrètes, quand bien même celles-ci sont stupides, à te rabaisser constamment, à rire de tes cocasses aventures. Je suis ton subconscient ; spectatrice, je répare ton corps pendant ton sommeil, je suis éveillée chez toi car tu as un don, Annabella, tes parents te l'ont donné.

Mes parents, je les avais oubliés. Ils étaient coupables, cela ne faisait aucun doute. Des bribes de pensées voltigeaient dans mon crâne : la haine, la rancœur, la tristesse notamment s'illustraient sous la forme de mon père et ma mère. Mon subconscient me fournit une image bien distincte, digne d'un trauma qui ressurgit après des années : des pilules roses. Ces petites pilules roses que Tyrell et Carry Sweetsong me faisaient avaler chaque matin, le seul moment de la journée où ils posaient réellement les yeux sur moi. Tout devient clair. Je me mords la lippe, les sourcils froncés en déduisant mélancoliquement :

- Ils m'ont rendue schizophrène, mes propres parents...

Mon double aux cheveux blancs éclate d'un rire tonitruant qui se dissipe progressivement dans le vide, comme aspiré par une bouche gigantesque qui nous envelopperait.

- Nous avons plein de choses à nous dire, haha ! Profitons de ce moment. Tu as grandi, tu m'as acceptée, j'ai toujours été la part obscure pour toi...

Lentement des tracés se font tout autour de moi, puis des contours, des formes, des couleurs ; le sol se détaille d'un sable fin et chaud, l'air sent le parfum d'un jardin de printemps, j'apparais au milieu de tout cela, en chair et en os. L'illusion semble si réelle, basée sur un monde que j'ai à moitié observé, à moitié imaginé.

- Prends donc place avec moi sur ce banc.

Un léger vent souffle sur ses cheveux fins qui ondulent dans les courants de l'air tandis qu'elle se déplace. Je la rejoins, admire la beauté de ses traits, seule l'absence d’œil gauche, à mon instar, limite la richesse de son charme. Son arôme renvoie les odeurs de la fleur de rose à peine cueillie et du sang. Elle se dessine comme redoutable mais paradoxalement juste, elle balance mon tempérament. C'est ce qu'elle me dit, en tout cas. Petit à petit je comprends, accepte d'autres points de vue et reviens sur certains actes, certaines pensées, certaines choses qui me caractérisent. Le temps semble passer si lentement, les sujets de discussions variables retracent l'intégralité de ma vie jusqu'ici. Je fais face à des remises en question, à certains détails qui m'auraient échappé, à certains dévoilements inattendus.

- Annabella, j'ai quelque chose à te montrer, héhé. Mais je veux savoir si tu veux vraiment que je le fasse, tu ne seras plus jamais pareille après cela... Tu seras moi et je serai toi. Le veux-tu ?

Je me sens au bord d'un gouffre, d'une décision à prendre, de deux chemins qui se séparent. Tout cela sonne comme l'apogée de ce rêve dans lequel je me trouve, dans cet état d'inconscience et ma plongée dans ce monde. Le doute me prend et me secoue. "Tu seras moi et je serai toi." : qu'entendait-elle par là ? Mais la curiosité et le gout de l'aventure l'emportent, je me lance.

- Oui. Répondis-je enfin.
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Les blessures d’Annabella étaient éminemment sérieuses, l’hémoglobine coulait, s’épandait encore et encore, bien plus que la dernière fois où je l’avais tiré des griffes de la famille Callagio. Allais-tu rendre l’âme sur cette ile Miss Papillon ? Innocent Island constituerait t’il ton tombeau ? Périr dans les bras de celle dont tu te devais de former au terrain. Périr au chevet de celle qui aujourd’hui, s’efforce de te maintenir coûte que coûte vivante ?  Ressens tu l’esprit de corps inhérent au Cipher Pole 8, celui que Novas s’efforçait de vous enseigner plus que tout autre chose, celui qui rendait ton alter égo si indissociable à ta survie et réciproquement ? Surveille mes arrières, je surveillerai les tiens, tel est votre doctrine, tel est le dogme professé par Novas, celui qui lui a permis de mettre aux fers Toji Arashibourei et pourtant, tu gis là avec ta partenaire, dans le palais des glaces, plongé dans ton subconscient, ton existence se délayant devant tes mirettes. Devant la mort, on est toujours seul, aussi seul que lorsque l’on a vécu pour ainsi dire. Dans l’espace confiné t’emmenant pas après pas vers la lumière salvatrice, tu chemines,  Tu offres une belle entrée en matière à ta partenaire, un baptême du feu singulier qu’elle ne risque pas d’oublier de sitôt. Eprouvé par le flot des évènements, elle s’affaire de toute sa hargne, de tout son pouvoir à maintenir la moindre parcelle de chance que tu nous reviennes.

Comment t’imaginais tu passer l’arme à gauche Annabella ? Tu avais d’ores et déjà perdu une partie de toi-même sur le champ de la bataille. Tu avais sensiblement dû te poser cette question singulière. Trépasser ici-bas s’accompagnerait des honneurs et lauriers du champ de bataille, bien sûr tes funérailles n’auraient rien de la grande pompe de ceux des marins, nous sommes et restons la face officieuse. La morale aurait voulu que la chose m’ébranle au plus profond de mon être, que transi par l’émotion, je laisse la haine me submerger et que je la déverse avec virulence sur celle qui s’était porté responsable de ton état. Pourtant, aucune once de sentiment ne m’habitait, pas la moindre parcelle d’amertume ou de rancœur à l’égard de la gamine du CP9, les années de terrain avaient dévorés les tendres illusions qui semblent encore bercer vos cœurs, la réalité inextricable dont on ne peut s’extirper, vivre ou mourir, partir lorsque l’heure était venue, c’était en cela que résidaient nos vérités absolues.

Quand bien même Annabella, Lyla serait à blâmer pour ce qu’elle t’a fait subir, elle n’avait fait que profiter de faiblesses bien trop apparentes, nous le savons tous deux. Mais ne t’inquiètes pas Miss Papillon, Lyla trépassera, pas pour ce qu’elle t’a fait non, pour ce qu’elle a fait cette esprit de corps si cher à Novas, elle nous a sciemment tourné le dos, préférant subsister parmi ces mômes infâmes plutôt que d’œuvrer pour la paix du monde. Elle a choisi l’égoïsme et a balancé du revers de la main toute l’abnégation de ses débuts. Le gouvernement a rendu son verdict et fort de son jugement, je deviens son exécuteur des basses œuvres.  

J’avais regagné les hauteurs de l’enceinte du château, zieutant avec attention tout ce beau monde. Un rare tumulte opérait à l’intérieur de la tour de cristal, une effervescence qui n’avait rien d’un jour accoutumé pour la reine et ses sujets. De nombreux éclats de voix jaillissaient des couloirs du château, une grande messe se préparait. La reine blanche se préparait là-haut dans ses quartiers, c’était un évènement singulier au cours duquel tout les villageois et les chiards avaient été conviés. En haut, les filles avec lydie en tête préparaient leur reine pour sa grande cérémonie, c’était une nouvelle heure de gloire pour Lyla et ce serait sans doute sa dernière à la fois en tant que reine mais aussi en tant qu’être vivant. Je me déplace d’arpent en arpent pour rester à l’affût de ce qui se trame en contrebas, je finis par m’engager dans une coursive protégé à la hauteur au balcon de la reine des enfants, je me glisse dans l’embrasure d’un des angles de la terrasse et prête une oreille attentive aux propos tenus dans le salon intérieur.

« Pierrot est prêt ?! Pas encore grande Reine ! Nous finissons les préparatifs mais il peine à se tenir tranquille «

« Pourtant, je lui avais bien dis de se tenir tranquille… »

Lydie reprend alors la parole sur un ton posé, moins enfantin que celui de ses congénères et amies.
« Tu connais bien les garçons, ils sont tous pareils. On a la chance que Pierrot soit très gentil et pas turbulent pour un sou »

Les paroles de Lydie semblaient donc bel et bien corroborer ce que j’avais pu lire dans son journal intime. Dans la cour en bas, se dressaient en rangs serrés tous les pirates de Till rassemblés pour l’occasion, plus loin encore des cortèges d’enfants des différentes bandes faisaient route vers notre position. Lyla n’avait pas fait les choses à moitié, la nomination de son successeur tout comme la passation de pouvoir devait se faire en bonne et due forme et chaque âme que compte cette contrée devait reconnaître et prêter allégeance à leur nouveau monarque.

Lyla ne se devait en aucune façon de m’apercevoir avant d’avoir donné le sceptre, nous restions tous les deux à part entière des éléments du CP9 et comme dans chaque unité, on a vent des bruits de couloir, des faits d’armes perpétrés par les agents qui composent son unité, moyen de consolider des liens et de renforcer l’esprit de corps et ce même dans la nôtre où l’individualisme reste la plus grande des vertu. Botter les miches à des éléments du CP8, ca pouvait encore aller, c’était dans leur nature de se faire allumer le train par plus fort qu’eux…cependant un agent du CP9 changeait éminemment la donne et conséquence de quoi, si ma présence devait à être dévoilé, il y aurait fort à parier que la cérémonie tombe à l’eau avec tout ce qui s’ensuit.

Lyla quitta bientôt ses appartements avec sa cohorte de suivantes, pour répéter le discours qu’elle avait minutieusement préparé, ou plutôt que Lydie avait précieusement concocté pour son compte pour le grand moment solennel. En bas, la garde du château s’était mise en place pour la cérémonie, uniforme de rigueur, s’apprêtant à lancer la fanfare pour célébrer l’évènement. Je profite de cette petite ouverture dans l’emploi du temps chargé de Lyla pour pénétrér dans sa chambre, transformé en véritable capharnaüm. Je n’ai que peu de temps pour savoir ce que Lyla prépare, je ne crois guère à l’idée selon laquelle elle partirait pour porter assistance à tous les enfants de la planète, qu’il en est de son devoir de Reine et de bonne samaritaine etc. Tout ca, je suis prêt à parier que c’est du flan, de la poudre aux yeux pour les ânes bâtés que sont ces chiards. Je me dépêche d’inspecter la ville mais le fourbi ne m’aide en rien dans mon entreprise. Je finis par dégoter une sorte de petite valise en croute de cuir que je m’empresse d’ouvrir avec hâte, entendant un brouhaha dans l’escalier du colimaçon.

Des vêtements, une boussole, des sortes de batteries de rechange pour son corps bionique j’imagine, une carte et un log pose. Nom de dieu ? Est t-elle seulement sérieuse ? Envisage-t-elle réellement de mener à terme une telle folie ? Brave petite va, ta désillusion n’en sera que plus belle, lorsque je ramènerai le boulard d’acier qui te sert de tête au grand patron, histoire qu’on soit pas la risée du gouvernement comme le sont les membres du CP5 et que nous nos traîtres, ils finissent la tronche sur une pique devant la jetée de Marie-joie. Le brouhaha se rapproche progressivement, je reconnais la voix de Lydie qui maugrée quelques paroles dans sa barbe à l’encontre des filles qu’elle a placé au chevet de la reine.

« Faut encore que ce soit moi qui aille faire les commissions. Elle ne pouvait pas aller se la chercher elle-même, son épingle à nourrice ? »

Je m’empare instinctivement du log pose et me carapate sur la terrasse, employant un pas de lune pour me propulser sur une échancrure apparente de la tour. Heureusement pour mon compte, lydie ne fait que passer et reçoit bien assez tôt un appel de sa maîtresse, requérant ses services au plus vite. S’exécutant promptement, elle s’éclipse de la pièce tandis que je pose à nouveau pied sur l’épaisse dalle de béton. Tous les convois d’invités semblaient dorénavant arrivés à bon port dans la cour pavée du palais. Le temps de m’éclipser de ma position et de regagner la terre ferme en bas afin de me mêler à la foule des parents et me fondre parmi eux. Bientôt la garde se mit en position et claironna trois bons coups avant que la reine blanche n’apparaisse sur le parvis de son balcon privé. Elle était revêtue d’une tunique pourpre brodé de fils dorés, un long manteau de velours imprimé de fleurs de lys trainait dans son sillon, lequel était soigneusement porté par 3 fillettes derrière elles. Bientôt, un chœur de fillettes se plaça sur une estrade en contrebas prévu à cet effet, quelques parents, visiblement des musiciens, à en croire les étuis qu’ils portaient, eurent également le privilège de monter sur cette dernière.

Après quelques minutes de préparation, les musiciens se mirent brusquement à jouer et les voix singulières de la petite chorale retentirent pour le plus grand plaisirs des invités conviés à la cérémonie. C’était là une ode à Lyla, à leur reine, une reine protectrice qui les avait prémunis du mal de l’extérieur pendant un bon paquet de temps. Tous les membres de l’assemblée apposèrent leurs mains sur leurs cœurs pour ce moment solennel. Etait-ce l’hymne de Innocent ? Voilà chose bien abracadabrante mais je reconnaissais bien là le formalisme d’un ancien agent Cipher Pol, être bionique ou pas, elle n’avait pas perdu son souci des conventions. L’hymne entonné semblait éveiller un émoi profond auprès des autochtones. Le chant terminé, des canons firent exploser une nuée de confettis sur toute la surface de la petite cour. La cérémonie était jusqu’alors très guindé, il n’y avait pas d’euphorie collective, pas encore tout du moins, cet évènement obéissait à un rite stricte et rigoureux et c’est dans cette atmosphère très protocolaire que la reine débuta son discours :

« Chers concitoyens d’Innocent, que vous soyez pirates, mécanos, faisant partie du gang des filles, je vous remercie d’être venu à cet auguste évènement, mes amis. Aujourd’hui est une journée à marquer d’une pierre blanche, vous le savez, je dois débuter mon périple pour sauver tous les enfants du monde, comme je vous ai sauvé, vous, mes tendres amis. »

Des pleurs émergèrent parmi les spectateurs, certains se frottèrent les yeux pour s’empêcher de verser une larme à l’écoute de ces mots. Une marée vivante de sanglots, paré à couler et couler encore.

« Aussi ai-je décidé en mon âme conscience de vous présenter à vous mes chers sujets, un nouveau roi et une nouvelle reine pour vous guider dans des lendemains ténébreux. »

Derrière elle, Pierrot se faufile en costume de sacre lui aussi, derrière Lyla. Il est jeune, beaucoup trop pour prétendre à ce titre mais Lyla en a décidé ainsi, ne pouvant accorder sa confiance aux parents et devant cimenter l’union des différentes bandes de gamins par le couronnement d’un roi qui saurait concilier avec les intérêts de chacun.

« Mes amis, voici votre nouveau roi, j’ai nommé Pierrot le Grand ! Accueillez-comme il se doit votre nouveau roi ! «

Les sujets du nouveau roi s’abaissent tous, genoux au sol, devant leur nouveau seigneur et maître, peu importe l’âge risible du monarque. Personne n’est dupe, on sait que derrière toute la crédulité d’un enfant de cinq années, des jeux d’alliances et de d’influences agissent. Une nouvelle monarchie qui ressemblerait davantage à une régence si vous voulez mon avis mais écoutons donc la poursuite du discours de Lyla.

« Pierrot le Grand a choisi sa future promise en la personne de Georgina, sœur de Lydie ! Quel évènement merveilleux et fabuleux ! Si jeunes et déjà ils se promettent un amour éternel. »

Lydie amena alors sa petite heure sur le balcon afin que le peuple puisse reconnaître les deux nouvelles éminentes figures gouvernantes de Innocent Island. Dans la cour pavée, des voix s’élevaient déjà vantant les louanges du futur monarque, le décrivant comme un être bon et attentionné. Ovation générale pour les deux nouveaux monarques à laquelle s’ensuivit le début des festivités. Chants et copieux festins étaient au programme, les gamins dansèrent en se tenant la main, les parents firent de même puis les deux groupes s’entremêlèrent encore et encore, permettant de franches retrouvailles entre parents et marmaille. Lyla en tête de cérémonie savourait ce précieux instant. La fiesta dura bien plusieurs heures avant que l’évènement ne soit clôturé par un nouveau discours de Lyla au crépuscule. Elle remercia ses sujets et confia, avec tout le symbolisme que la manœuvre représentait, la clé du royaume à Pierrot le Grand.

Lyla prit bientôt la route dans le soleil couchant, pour une dernière fois, acclamé à l’unisson par tout une foule redevable et tributaire de sa protection. Nous touchions finalement au but, le terrain était dégagé et plus rien ne pouvait nous empêcher de mener à terme son assassinat. J’attendis qu’elle disparaisse de l’horizon de ses feux sujets pour la pister avec précaution. Elle allait en direction de l’embarcadère de l’île où un navire spécialement affrété pour son départ l’attendait, paré à fendre l’écume…seulement, elle n’arriverait jamais à bon port.

Une immense clairière séparait le palais de l’embarcadère, la clairière par laquelle nous avions cheminé en posant le pied en cette contrée. L’endroit boisé était pour ainsi dire notre seule chance de l’éliminer. J’avais pris soin d’indiquer ma position à Scarlet et Annabella de manière à ce qu’elles soient prêtes au cas échéant pour qu’on puisse s’éclipser rapidement dès que nous aurions réglé le sort de l’ex-monarque. Scarlet était parvenu à stopper tant bien que mal l’hémorragie interne et ce au prix d’un travail acharné et de litres d’hémoglobine déversés, elle avait sauvé les meubles et c’était tout ce qui importait.

Lyla était parti la conscience tranquille, l’esprit apaisé d’avoir légué les rênes du pouvoir à un proche de confiance, qui s’affairerait au bien-être de ses concitoyens…pourtant Lyla n’était désormais plus une reine, elle était redevenue une transfuge du Cipher Pole, une traîtresse de la pire espèce qui allait périr dans l’indifférence générale. Son nom allait disparaître dans les limbes et elle ne serait considérée à l’instar d’un agent renégat, un déserteur aux yeux du monde et c’était là tout ce qui importait.
Je décidais de la prendre de court mais de face afin qu’elle aperçoive distinctement le visage de celui qui allait lui apporter une mort lente et douloureuse. J’avais aussi, à son instar, le souci des conventions. Me camouflant dans l’ombre d’un chêne, je décidais de la prendre au dépourvu via un shigan bachi localisé dans la cuisse. L’index fendant l’atmosphère à grande vélocité, provoquant un mouvement d’air perçant, eut l’effet d’une balle sur notre chère amie, sorte d'amuse-gueule pour nos deux protagonistes

« Tu n’es désormais plus reine d’aucun patelin, Lyla B VI, tu n’es plus qu’une pièce rapporté, un boulet, dont le Cipher Pole traîne depuis bien trop longtemps le cas. Tu savais que ce jour allait arriver n’est-ce pas ? Ne l’avais tu pas pressenti lorsque tu as réglé le compte de mes deux comparses ? Croyais tu vraiment que le gouvernement avait sous-estimé ta force si particulière ? »

« Il est temps de régler ta dette Lyla. Je tiens les traîtres en horreur, à fortiori lorsqu’ils sont du même groupuscule que le mien. »
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Mon regard s'aventurait dans les méandres des fissures qui disloquaient les miroirs suspendus au plafond depuis plusieurs minutes. Quel étrange endroit, il semblait que le palais avait été pris tellement au sérieux dans sa construction que les dispositifs réfléchissant avaient été installés carrément partout, et que même sous le sol poussiéreux l'on pouvait trouver sa propre image. Ainsi donc, sur le dos, j'étais restée contempler le reflet blanchâtre disloqué de ma peau et de mon corps tâché de pourpre. Je me sentais faible, fatiguée et totalement vidée. Étrangement, le sommeil m'avait été foncièrement réparateur et il m'était possible de bouger les membres tout en restant sur le dos sans trop de mal, en revanche ma respiration se faisait lourde et douloureuse. Il me fallut encore quelques minutes supplémentaires pour me débarrasser de l'état de transe dans lequel je me trouvais et revenir à flots dans le monde réel.

- Blanc...

Scarlet semble s'être assoupie, tandis que la petite Alice est revenue avec toutes les affaires auparavant laissées au village des parents. Je me traine jusqu'à mon sac de voyage dans lequel se trouve mes effets ainsi que mon canon à main et me vautre dessus, à bout de force. Nul doute qu'il me faudra du temps pour récupérer, en espérant que je ne choppe pas une quelconque infection vu que sur Grand Line, les cas de décès dus à cette cause étaient légions. Ma paranoïa prend fin lorsque je me rappelle, difficilement, que la rousse a des qualités de médecin et que si je suis encore en vie, c'est en partie car elle s'est occupée de moi. De ça donc, pas à m'en faire, j'imagine. Cette gamine est vraiment bizarre, elle reste dans son coin à nous regarder avec ses yeux fiévreux sans demander quoi que ce soit. Je ne cherche pas à affronter ou réprimander le regard qu'elle fixe sur moi, j'ai en quelques sortes l'impression que ce n'est pas ma personne qu'elle zieute véritablement. J'ai probablement pas autant de patience que Scarlet pour m'immiscer dans les jeux psychotiques d'une gamine malade et me faire appeler chapelier. Enfin, peut-être avant aurais-je pu trouver ça drôle, mais cela me m'indiffère totalement désormais.

Le bras droit reposant sur les affaires tassées à l'intérieur du sac, je triture l'une de mes mèches de cheveux avec curiosité. Personne ne me croirait, mais tout ce qu'il m'était arrivé dans mon sommeil, ça n'était pas que les délires vicieux d'une femme au point de mourir. Non, il y avait une once de vérité dans ce que j'avais vu et à la limite vécu. Les détails voletaient encore dans mon crâne tourmenté par la douleur de mes plaies et il m'était difficile de faire le tri, cependant j'avais la certitude qu'au réveil, quelque chose avait changé. Aucun phénomène physique ne pouvait expliquer le fait que lorsque j'ouvris mes yeux et que mon regard retrouva sa vivacité, qu'il s'apposa sur le plafond dallé de miroirs, je vis que - de la racine jusqu'à la pointe - au sommet de mon crâne dans l'une des premières mèches se courbant au dessus de mon front, une poignée de mes cheveux avaient tourné au blanc. Non, pas au blond léger ni à cette décoloration si significative de la vieillesse, mais d'un blanc pur et symbolique, similaire au laiteux de la fleur de lys. Cependant ce phénomène étrange n'était pas l'unique chose qui avait fait tilt et m'avait accordé ce sentiment de doute quant à ma propre identité, non, un truc s'était tout bonnement modifié en mon seing sans qu'il soit possible de mettre le doigt dessus. Bref je demeurais totalement sceptique quant au fait que la Annabella que j'étais eut pu totalement survivre à cette approche de la fin que je venais d'expérimenter.

Incontestablement, depuis le décès de ma sœur adoptive, je n'avais cessé d'évoluer et de devenir plus performante dans mon travail, plus mature et de trouver ce sérieux qui caractérisait les agents secrets. Pourtant, j'étais restée Annabella Sweetsong, la fille un peu perchée, folle et stupide qui ne correspondra jamais aux attentes du Cipher Pol. Nombre de fois j'avais failli mettre mes missions en péril à cause de ça quand ce n'étaient pas mes camarades. Encore une fois j'avais échoué, je m'étais faite lamentablement ramasser à la petite cuillère par une gamine cyborg et ce rêve que j'avais fait était probablement l’œuvre la plus complète d'une incroyable remise en question. Cette fois-ci, j'avais l'intime conclusion qu'une transition s'était opérée pendant ma rencontre avec mon moi profond. Cette femme aux cheveux immaculés, étrangère mais si ressemblante, correspondait à la schizophrénie qui m'avait hantée jusque là, maladie que j'avais lourdement souhaité de disparaître pour enfin être normale. Pourtant, jamais je n'avais été autant libérée, autant heureuse qu'aujourd'hui, enchantée à l'idée d'accueillir une deuxième conscience qui ait pu me rendre la vie si difficile mais finalement faire de moi quelque chose. Si tout cela était arrivé, ce n'était pas la faute du hasard, mais probablement car c'était mon destin. Si j'avais survécu à toutes ces épreuves, c'était car j'avais un but, un rôle à jouer et que ce n'était que le début.

Puru, puru, puru, puru...

Je m'arrache à mes réflexions farfelues et fouille dans mon manteau couvert de sang que Scarlet avait pris soin de récupérer dans le château. J'en ressors le Den Den Mushi distinctif de l'appel de mon coéquipier et décroche.

***
Affublée de mon corps impuissant, la traversée de l'île jusqu'aux quais d'embarquement se fit plutôt lente pour la femme aux dents pointues. La petite Alice était responsable de nos affaires, son trottinement régulier ne semblait pas ralentir mais n'était pas véloce non plus. Nous rejoignîmes donc à la marche ce qui servait de port, cet endroit où les navires de la société translinéenne passaient deux fois par jour. Fort heureusement pour nos porte-monnaies, ce n'était pas ce moyen de transport que nous avions choisi. Les instructions de Kaitô étaient claires et pas franchement difficiles, mais étant donné l'état dans lequel nous étions il nous était carrément inimaginable d'aller nous battre en sa compagnie. De ce fait le combat décisif reposait entièrement sur ses épaules, puisque je le savais véritablement à même de mettre un point final à l'existence de Lyla. Nous abordâmes donc le bateau que nous étions censées dérober et surveiller jusqu'à l'arrivée de notre camarade. Et cela aurait vraiment été chose aisée si ce n'étaient deux p'tits gars costauds qui gardaient l'embarcation.

Chose incroyable alors : pressée par le sentiment d'obstacle au bon fonctionnement de notre travail, mon instinct me disait de me débarrasser tout simplement des deux mioches comme s'ils n'étaient que deux morceaux de barbaque. Du véritable gibet à envoyer à l'abattoir, alors que ce n'étaient que deux pauvres gosses innocents qui, ce soir, iraient sûrement se coucher en rêvant de devenir des gentils pirates auprès de leur Till de capitaine et chercher des trésors sur tout Grand Line en battant des méchants. Pourtant, tout serait tellement plus facile si on les liquidait, là, maintenant. Alors qu'on approche donc et que les embruns de l'air marin caressent délicatement mes nerfs à fleur de peau, je fais signe à Scarlet de me déposer à terre. Immobile, j'arrive miraculeusement à tenir debout et à déambuler cahin-caha sur le ponton sans m'effondrer de tout mon long. Ma respiration est lourde et les sueurs froides me glacent les muscles, néanmoins je m'essaye à n'y laisser paraître que du feu et en compagnie de ma camarade et de l'autre maladive, embrasse d'un regard glacial mais d'une expression qui se veut amicale les deux gardes. Parler m'est difficile, même mon timbre semble se faire plus rauque, plus sérieux alors qu'il n'en avait jamais été le cas. Mes habitudes à me foirer grossièrement toutes les deux phrases que j'entame semblent elles-mêmes compromises. J'ai confiance en moi, comme lors de ma rencontre avec Di Auditore quelques années auparavant.

- Nous sommes venues prendre la relève, Till veut que vous participiez à la grande fête en l'honneur du couronnement du roi.

Les chiards semblent sceptiques mais voient bien que je ne rigole pas. Leur visages se veulent audacieux et braves tandis qu'ils me toisent, moi, vulgaire adulte qui ose leur parler sur ce ton.

- Et pourquoi qu'il veut ça, Till, hein ? Pourquoi que c'est pas un pirate qui vient nous dire ça ?

La fatigue me taraude tandis que mes pulsions meurtrières se font violence comme jamais. Je garde les mains dans les poches de mon manteau noir, grossièrement nettoyé du plus apparent de l'hémoglobine qui avait coulé dessus. Cependant, tandis que leur réponds, je ne peux m'empêcher de les fusiller du regard et imaginer leurs corps inertes flotter sur l'eau ; je me surprends avoir peur de moi-même pour la première fois de ma vie et mets ces envies sur le compte de la douleur et du besoin de sommeil.

- Oh c'est que tous les pirates sont très occupés à courtiser le clan des filles. Till pensait qu'il serait vraiment triste que vous restiez là alors que les autres trouvent des amoureuses...

Les garçons rougissent et baissent le regard, penauds, il me semble avoir tiré juste. Même pas le temps de répondre que la petite Alice s'est déjà faufilée en douce à bord et nous fait coucou.

- Bon, d'accord. On vous laisse le bateau, sales adultes. Veillez bien à ce que personne ne le vole jusqu'à ce que la Reine Lyla arrive ! Compris, hein ?!

Je hoche la tête et desserre les poings. Le zigoto part en tapant l'épaule de son compère, souriants et visiblement soulagés d'un terrible fardeau. J'enjambe le bastingage suivie de Scarlet - non sans esquisser une grimace de douleur due à la pression de ma main droite sur le bois - et entre dans l'unique loge du capitaine. Le rafiot est visiblement plus un bateau de pêcheur qu'autre chose et il nous serait bien difficile d'aller loin sur Grand Line avec, mais toujours est-il que c'est mieux que rien. Je m'allonge sur l'une des deux couchettes, songe à ce que je suis devenue, à ce qu'il aurait très bien pu se passer et glisse irrémédiablement dans un sommeil sans rêve.
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Le duel, qu’il soit au sabre, au flingue, ou à mains nues revêt toujours une éminente symbolique, tout aussi puissante que celle de confier un royaume aux mains d’un gamin. De siècles en siècles, la tradition s’est perpétrée, s’est modernisé, s’est agrémenté de règles spécifiques et tout un formalisme inhérent à la confrontation de deux volontés a émergé. L’un devait mourir pour que l’autre puisse prospérer et continuer le combat, il n’y avait aucune animosité dans l’acte en lui-même, ce n’était ni plus ni moins qu’un code que les duellistes s’engageaient à respecter par respect et égard envers celui à qui ils s’apprêtaient à subtiliser la vie. Même si je haïssais profondément Lyla, je respectais à ma manière son passif d’agent à la solde du gouvernement et compte tenu de ses antécédents, j’observais aussi le protocole dans ces instants de grande intensité. La perspective de prendre la vie de l’une des nôtres était chose toujours difficile, elle avait été de la maison, avait œuvré pour le compte des grands pontes, et avait un beau palmarès de succès à son actif.

Je m’étais documenté sur la gamine, ses supérieurs ne tarissaient guère d’éloges à son encontre mais parmi tous les louanges qui lui furent adressés, le plus significatif et redondant était son absence de scrupules lors de l’exécution des basses besognes qui lui avaient été confiées. De grands espoirs et un avenir prometteur lui était voué, bien qu’à l’époque les tests psychologiques perpétrés sur Lyla débouchaient sur des résultats étranges. Pourtant, elle était le prototype de l’agent de terrain incarnée. Son faciès enfantin ne payait pas de mine et suscitait la pitié de ses adversaires avant qu’elle ne s’empresse de les massacrer de ses petites mains impitoyables. Elle était rapide, agile, puissante, maitrisait le rokushiki à un degré élevé et ses membres cybernétiques lui octroyaient un lot d’avantages certain. Pourtant une question me triturait le cervelet, une interrogation logique et légitime avant de mettre un terme à son existence : Pourquoi donc avait t’elle ainsi joué les transfuges ? Qu’avait t’elle vu à Innocent Island pour ainsi tourner le dos au Cipher Pole ?

Tout cela ressemblait à un comportement bien opportuniste. Elle avait préparé son coup, fait en sorte d’éliminer minutieusement l’ancien monarque pour prendre sa place et prêcher la bonne parole des chiards comme « enfants-roi ». Devenir Calife à la place du calife, agir dans son propre intérêt, cela ne ressemblait guère aux rapports faisant état de son comportement. Je n’ai jamais aimé les coups de poignards à l’insu de celui à qui on l’assène, surtout lorsque vous avez avec ce même quelqu’un rompu le pain et avez dégusté le vin  ensemble. Lyla restait là, impassible, devant la petite mesquinerie commise, évaluant les options pour mener à bien ses projets. Sa rétine cybernétique s’agitait, des cercles circocentriques tournoyaient en produisant des tonalités électroniques en tous genres, analysant l’environnement sous toutes ces coutures.

Lyla n’avait pour ainsi dire plus grand-chose à voir avec un être humain. Là où on aurait pu croire que ses implants n’étaient qu’un complément à son enveloppe charnelle, était chose complètement biaisée. Dans les faits, c’était plutôt l’inverse dont j’étais témoin. Il y avait davantage d’acier et d’écrous en Lyla que de chair et d’organes, le visuel humain n’était que de l’apparat au service de la mécanique, ce n’était là que par pure commodité de se revêtir de cette pseudo apparence enfantine. Lyla était loin d’être une môme comme elle pouvait le laisser croire, ce n’était qu’une boîte de conserve, froide et calculatrice à souhait, n’éprouvant pas la moindre émotion à en croire les rapports quant à son sujet. Bientôt, elle se mit à gesticuler de manière machinale, tel un automate répondant aux désirs de son maître, et finit par prendre la parole pour déclamer d’une voix robotique :

« Sujet : agent du CP9. Recherche base de données, états civil agents de l’unité 9. Chargement. Résultat obtenu : Atsuji Kaitô, 49 ans. Chargement des données de combat dans le cortex cérébral. »

Une lueur scintilla dans les yeux de la gamine, elle avait récupéré par je ne sais quel artifice les données sensibles du Cipher Pol quant à mon cas, histoire de pouvoir s’en approprier et anticiper mon style de combat. Il allait falloir ruser pour l’abattre, il y avait fort à parier qu’elle allait opter pour un style entravant sensiblement l’efficacité du mien. Le téléchargement des données opéré, elle se fendit finalement d’une réplique où l’on eut pu croire que la fille encastré dans l’amas de ferraille avait repris le contrôle.

« Mode rokushiki activé, cible identifié, démarrage et configuration des paramètres du sixième style terminé… »

« Je n’ai que faire de tes reproches, je n’ai aucun remords quant à ce que j’ai produit ici, j’ai créé l’impossible, une utopie pour des gamins, j’ai fourni un avenir à ces rescapés, une famille comme je n’en ai jamais eu au Cipher Pol »


Une famille ? Etait-ce cette trivialité qui avait corrompu son esprit au point de faire émerger toute cette folie ? Il est vrai que nous n’avions que peu ou prou de fratrie à qui songer mais qui aurait besoin d’une telle chose lorsque l'on bénéficie d’une muse qui oblitère ce genre de considérations. Tu t’es fourvoyé Lyla, tu t’es égaré dans les méandres de la tentation et tu as succombé cruellement à un idéal qui nous était interdit, une aspiration inaccessible à des êtres qui avaient dépassés ce stade primaire.

Lyla disparut bientôt de mon horizon, ses facultés cybernétiques faisant, avant de réapparaître à mon insu et d’asséner une frappe sourde en visant ma colonne vertébrale. J’eus à peine le temps de me prévenir de cette intention fatale grâce au Tekkai pour éviter le K.O technique. Je n’avais guère l’ascendant sur la gamine, son bras métallique ne ressentait guère la douleur non plus, elle visait les points névralgiques de l’anatomie de manière à s’assurer la mainmise sur l’affrontement. Il suffirait d’une offensive faisant mouche pour régler le sort de notre altercation. C’était simple mais efficace et avait le mérite d’être sans bavures. La tentative loupée, elle disparut à nouveau dans un nuage de poussières en suspension, employant habilement le combo Geppou/soru pour faciliter ses déplacements et m’empêcher de les prédire. Toute une mécanique bien huilée s’agitait avec précision, aucun mouvement superflu n’était à dénoter, elle veillait scrupuleusement à commettre le stricte nécessaire dans ses élans véloces.

A mon tour, je me mettais en mouvement préférant les offensives à distances plutôt que le simple corps à corps, domaine au sein duquel elle excellait. Je savais que l’esprit humain était la clé de voûte pour parvenir à la terasser. Elle agissait avec une logique implacable, aussi semblait t’il tout indiqué de la surprendre avec des mouvements insolites et inédits qu’elle ne pouvait même pas s’imaginer. Je décidais de multiplier les shigan bachi pour noter ses déplacements, tentatives infructueuses, je l’avais eu une fois avec cette attaque et dés lors elle avait corrigé le tir pour que la chose ne puisse à nouveau se reproduire. Progressivement, je décomposais ses déplacements un à un, passant au crible chacun des mouvements conduit, espérant y voir une faille suffisamment importante pour me créer une ouverture et régler le sort du combat.

Bientôt elle tira parti de l’environnement, faisant éclater les écorces de chênes centenaires en guise de projectiles à mon encontre. C’était finement joué que d’utiliser des leurres pareils pour frapper à l’instant où l’on s’y attendait le moins. Je décidais de ratiboiser notre zone à grand renfort de rankyaku pour prévenir ce genre d’initiatives. L’odeur de sève se répandant dans l’atmosphère, Lyla se faufilait dans cette tornade d’ondes tranchantes puis finit par arriver à ses fins. L’angle mort, une ouverture, et son poing traversant la fine couche de métallium. Propulsé à toute berzingue dans le décor, je percutais dans ma course effrénée tronc sur tronc, finissant la tronche encastré dans un nœud d’arbre. Le temps de m’en extirper avec pénibilité et elle était déjà là, imperturbable, à frapper tour à tour de ces petites mimines expertes le quinqua grisonnant qui lui servait de souffre-douleur. Ses poings s’enfonçant, toujours plus profondément, avec toujours plus de hargne, tel un métronome, dans ma chair.

Lyla était une barbare dans un corps de mioche, elle anéantissait ses opposants avec une rigueur méthodique et au moment où elle s’apprêtait à me coller le coup de grâce, elle leva une dernière fois le poing avant de l’abattre sans vergogne sur le coin de ma tronche, tentative avorté par un shoot dans les cannes qui l’a fit se déséquilibrer et manquer la trajectoire escomptée. Profitant de la situation je lui fourrais mon poing renforcé au métallium droit dans la trombine et à mon tour, fit voler cette dernière dans le décor.

Reprenant mon souffle à grand renfort de bouffées, je ne pus que constater les dommages que la gamine m’avait asséné, elle y était pas allé de main morte. Plaquant ma main la poitrine, l’odeur âpre de mon hémoglobine s’instillant dans la chemise, je prenais conscience que la prétendue môme avait une sacrée poigne et ce en dépit de la taille de ses paluches. Entre temps, Lyla avait aussi repris du poil de la bête mais ces mouvements semblaient progressivement moins fluides et plus brouillons, nous entrechoquions tour à tour nos poings, la sueur contre l’acier, l’homme contre la machine. Elle finit par abattre son tibia violemment sur le sol, l’intensité de la frappe vint faire éclater la roche et de profondes nervures étaient apparues tout autour de l’épicentre de l’impact. L’humain dérrière l’être bionique semblait peu à peu faire surface, il semblait peu à peu prendre le pas sur les réflexes purement cybernétiques mais ce n’était pas tout. J’avais étudié la donzelle sous toutes ces coutures avant de poser le pied ici-bas. Les scientifiques du gouvernement m’avaient confirmé que les parties cybernétiques de la gamine nécessitaient un apport énergétique constant, nécessitant bien plus que le simple cœur humain pouvait supporter. De facto, la gamine était alimentée par un générateur d’énergie localisé à la place de son cœur, dont elle devait fréquemment changer les batteries. Techniquement, plus l’affrontement devait s’éterniser, plus elle viendrait à perdre ses aptitudes et plus mes chances d’en sortir vainqueur seraient grandes. C’était une véritable aubaine qu’elle n’ait pu remplacer la batterie présente par une nouvelle avant notre affrontement. La cérémonie et les fastes avaient, j’imagine, d’ores et déjà bien entamé l’autonomie existante et notre combat n’avait fait que taper un peu plus dans les réserves de l’agent du CP9.

Au moment où elle s’isolera pour procéder au rechargement, je la frapperai de manière assassine en ne lui laissant pas l’ombre d’une chance. Je présumais qu’elle n’avait plus guère la présence d’esprit nécessaire pour se figurer ce genre de stratagème, son esprit dorénavant purement cartésien n’était plus à même de songer en de telles circonstances à de tels éventualités, du moins pas en tant que stratégie d’opération. Le combat se poursuivit entre les deux protagonistes, la gamine s’hasardant de plus en plus, prenant parfois des risques inconsidérés, consciente de l’épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Cette épée n’était pas que le spectre de sa cuisante défaite, c’était l’ombre vengeresse du gouvernement, paré à lancer ses foudres contre l’une de ses renégates. Il n’y avait ni gloire, ni peine dans cet affrontement. L’altercation ne désemplissait pas, le déchainement de puissance était à la hauteur de la réputation de la gamine, elle donnait du cœur à l’ouvrage, une niaque qui allait crescendo au fur et à mesure du temps s’écoulant inexorablement de son coeur robotisée, tel un cancéreux en phase terminal.

« Batterie faible. Rechargement imminent. Procédure de camouflage activé. »

L’instant précieux affleura finalement, elle disparut de la zone de combat et se propulsant d’arbre en arbre, tenta de se dérober à ma vue. Il n’était plus temps d’aiguiser ses crocs, le prédateur allait frapper, loi naturelle faisant foi, maillon suprême de la chaîne alimentaire. Je n’avais aucune idée de combien de temps devait prendre l’opération mais il y avait fort à parier que la chose devait s’opérer très rapidement. Pressentant le moment propice, je ne l’avais pas quitté des yeux et, me déplaçant avec minutie et discrétion, je me glissais à travers les fourrés pour prendre au dépourvu ma proie. La petite m’avait facilité la tâche, elle avait d’ores et déjà ouvert le compartiment où son générateur d’énergie était logé et s’appliquait déjà à en extraire la batterie usagère. Je plaçais un rankyaku discret au-dessus d’elle pour lui faire tomber un branchage sur le coin du museau, histoire de détourner son attention, et profitant de la manœuvre, je lui assénais un poing ravageur, d’une intensité extrême, directement à l’intérieur du noyau d’énergie, le morcelant de part en part. Un coup mortel, fatal et bien qu’elle s’extirpa de mon poing recouvert de métallium, il était d’ores et déjà trop tard pour elle. Des fissures béantes apparaissaient sur l’appareil, l’énergie n’était plus à même d'être filtré et condensé pour produire l’effet détonant de ces frappes, un liquide opaque noirâtre jaillit bientôt du mécanisme, des fuites d’énergies bleuâtres irradiaient du moteur, c’en était bel et bien fini.

Voyant sa fin imminente, des éclairs jaillirent de tous parts de la plaie béante de l’humanoïde, Lyla frémit de tout son être en écho à cette blessure fatale, son œil rougeoyant perdait peu à peu son afflux sans cesse renouvelé d’énergie pure. Sa voix aussi perdait peu à peu de la vigueur, empruntant dorénavant des sonorités robotiques.

« Je devais le faire…Atsuji Kaitô. Un jour peut-être, tu connaîtras la même sensation et lorsque ce jour arrivera, tu comprendras ma position. J’ai délivré ces gosses d’un avenir néfaste, d’un avenir au sein duquel ils n’avaient pas leurs places. »

« Tu savais pourtant que tôt ou tard, la marine viendrait pacifier cette zone, sa position stratégique la rend pourtant éminemment importante pour le gouvernement. Trahir pour mener tes propres idéaux est un luxe qui ne nous est guère permis. En rejoignant le gouvernement, tu mets au service tes idéaux à une cause suprême, beaucoup plus grande que le simple entendement d’un être. Par ailleurs, tu t’es évertué à ce que ces mômes ne se rapprochent pas des parents... quel avenir en société pouvaient t’ils avoir ? Tu es arrivé tel le Messie et tu meurs tel un judas, causalité évidente et logique, Lyla B.VI. »

Pas après pas, la cybernétique n’agissant plus, la douleur reprenait le pas sur les résistances mécaniques et organiques éradiquant la souffrance lié aux coups engrangés. Elle reprenait goût à l’humanité et tout ce qu’elle supposait. La mécanique avait été enrayé, les rouages avaient été sabotés et désormais la douleur était insondable, son exosquelette finirait tantôt par lâcher tant le dommage perpétré était funestement irrémédiable. Ton heure était venue, Lyla, l’heure de repartir au royaume des songes, dans l’indifférence générale du peuple qui t’a érigé renne.

« Un dernier mot pour Noxe ? »

« Je…. »

Un bruit métallique sonna le glas de la môme robotisée avant même qu’elle ne put balbutier la moindre parole. La lueur dans ses yeux s’était estompée, Lyla n’était plus qu’une boîte de conserve sans âme, un automate dont le nom allait bientôt finir dans les limbes. M’approchant de son cadavre, je lui arrachais l’espèce de rétine bionique qui lui servait de pupille en gage de bonne exécution de la mission puis plaçais le macchabé sur mon épaule. Il ne fallait laisser aucun témoin de ce qui était advenu à leur reine bien aimée.
 
Me dirigeant vers le point de rendez-vous convenu avec Annabella et Scarlet, je fus agréablement étonné de n’avoir guère de chiards à dérouiller, elles avaient fait le ménage comme il se doit pour nous laisser le champ libre et ainsi mettre les voiles. Subtiliser le navire de Lyla était savamment pensé. Qui pourrait croire que trois des invités pourraient se faire ingénieusement la malle pendant que tous s’affairaient à tourner la page sur leur monarque éploré. Mettant pied sur la cale du navire, avec le corps de Lyla sur l’épaule, je le balançais à terre tel un vulgaire paquetage pour hisser la voile et laisser à Scarlet la barre, histoire que je passe à l’infirmerie me recoudre les plaies.

« Scarlet, fais-en ce que tu veux, elle ne nous est de plus aucune utilité désormais. Elle m’a donné du fil à retordre cette gamine…bien plus coriace que je l’avais imaginé «

La rouquine m’informa bientôt de l’état de santé d’Annabella qui était dorénavant plongé dans un sommeil profond et réparateur. Elle ne semblait guère enthousiaste mais le plus dur était passé, on avait évité le pire. Le vaisseau fendit bientôt l’écume et prit le large sous un tonnerre d’applaudissements des autochtones, retentissant dans le lointain
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Dernière édition par Atsuji Kaitô le Ven 16 Mai 2014 - 22:48, édité 1 fois
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Je prends à nouveau une bonne lampée de rhum directement à la bouteille, ébahie par mon nouveau pouvoir : ma capacité à rester debout, même cuite. L'alcool n'avait jamais eu du bon chez moi, mais faut croire que l'entrainement drastique de ces derniers jours venait de clouer le bec de mon cerveau moralisateur à deux francs. Qui aurait cru qu'il serait possible d'éveiller un penchant pour la binouze aussi vite ? Faut croire que le passage au ras de la mort avait changé bien des choses. Le bateau continue sa route, aucun d'entre nous ne sait vraiment où aller. Voilà des jours que nous avons quitté Innocent Island, que la Reine Lyla avait été mise hors-circuit et jetée par dessus bord avant que les charognes ne contaminent le pont. Il s'était pas passé grand chose pendant mon coma dans la loge du capitaine, mis à part le retour de Kaitô apparemment bien amoché et du cadavre qu'il avait ramené pour que Scarlet voie s'il y avait des choses à récupérer. Je vois pas trop pourquoi, de toute manière un mort c'est un mort.

Allez, encore un coup et j'arrête. C'est ce que je me suis dit pendant toute la durée de notre voyage sans véritablement y arriver. Au début il y a bien fallu deux ou trois chutes, mais maintenant c'est bon. Je tiens, je tiens l'alcool. Ça m'aide à oublier que j'ai éveillé quelque chose d'encore plus psychotique en moi, que ma schizophrénie est probablement passée au niveau supérieur. Plus de voix dans ma tête, non, juste celle de Balisto qui s'était pas faite très violence ces-derniers temps. Très affligé par les événements, l'écureuil n'avait visiblement pas bougé du lit dans lequel j'étais restée clouée un bon moment. Puis finalement, il avait retrouvé son balcon quotidien quand j'avais été en mesure de me lever. Bon, ça me faisait toujours un mal de chien, mais selon Scarlet si j'arrive à respirer c'est que c'est bon signe.

Puru Puru Puru Puru

Les deux lascars font une bonne sieste, visiblement pas enthousiasmés par l'idée de parcourir les dangereuses mers de Grand Line sans véritable mission. Pour ma part j'arrive plus à dormir, bien que je sois véritablement fatiguée et en période de rétablissement, ce qui devrait nécessiter que je m'enchaine à ma couche encore un bon moment. J'avais même eu le droit à un : "quelqu'un d'autre que toi garderait les fesses vissées sur un lit d’hôpital" mais moi j'arrive à tenir debout. Alors du coup je noie ma détresse dans la liqueur, ça gangrène ma douleur et réduit ces idées absurdes qui me dévorent l'esprit à l'état de silence. En fin de compte, pourquoi je devrais me battre contre ce besoin de liquider les obstacles sur mon chemin ? D'autres le font bien, le CP9 par exemple. Peut-être que faire preuve de moins de scrupules, moins de compréhension à l'égard de mes victimes serait plus astucieux. Il me faut bien de la force, il me faut bien réfléchir à des stratégies pour améliorer mes compétences d'agent secret. Déjà aujourd'hui, si je regarde tout le chemin que j'ai fait, je dois avouer que je me sens déjà plus dans la peau d'un pendant du CP8. J'échoue moins, je tiens bien mon rôle et il m'arrive même de briller un peu. Un peu.

Puru Puru Puru Puru

Cependant je découvre désormais avec ce changement soudain une soif de pouvoir qui n'avait jamais été mienne, cette envie de mettre mon humanité de côté définitivement, de m'ôter les frontières et devenir quelqu'un de sérieusement dangereux. C'est quelque chose que je me suis déjà dit, pourtant, mais jamais je l'ai autant ressenti que maintenant. Tant bien même certains événements aient pu conduire à me façonner ainsi, jamais je n'avais ressenti ce besoin d'accomplir victorieusement des missions d'ordre personnel comme professionnel. L'assassinat de Lyla était un job, j'ai échoué, cependant j'ai aussi échoué à la protection de mes camarades et, bien au contraire, j'ai mis la quête en péril à partir du moment où nous étions aux mains de l'ennemi. J'avais agis imprudemment, instinctivement et désormais mon instinct était tout autre, il me disait de me méfier, de rester sobre et morne, de ne pas montrer mon vrai visage.

Puru... Captcha.

- Annabella Sweetsong à l'appareil, j'écoute ? Ma voix se fait lourde et légèrement anesthésiée, néanmoins je garde le contrôle sur les spasmes qui me parcourent et tente de me concentrer sur la conversation.

- Agent Sweetsong ? Bien, vous êtes rétablie. Nous venons de recevoir les résultats concernant votre mission sur Innocent Island. Comme l'agent Atsuji l'a précisé il y a quelques jours, il y a un nouveau roi en vigueur, un enfant, dénommé Pierrot. D'autre part les habitants pensent bel et bien que Lyla B. VI est partie sur d'autres îles. Nous prendrons la suite des opérations, la Marine est déjà en chemin pour rétablir l'ordre là-bas.

Légèrement déboussolée, j'acquiesce avant de me rendre compte que mon interlocuteur ne peut pas me voir. Le responsable que j'ai à l'appareil n'en a pourtant pas terminé, il continue :

- Maintenant j'ai autre chose à vous dire. J'aurais aimé en parler avec l'agent Atsuji puisqu'il est dans nos services depuis plus longtemps que vous, mais c'est tout aussi bien si vous faites la liaison...

***
Je me réveille subitement, assise sur un caisson de vêtements pour fille, dans un coin. Les bruits de pas sur le pont indiquent que mes deux compagnons sont réveillés. Je relève la tête tout en ombrageant mes yeux de ma main gauche, à demi aveuglée par le soleil couchant. La langue pâteuse, je me paye une nouvelle rincée dans la bouteille conservée à portée. Mon regard se fait lourd, Kaitô semble deviner que quelque chose me tracasse.

- Ça te dit quelque chose ? Que j'lui balance sans prévenir, faisant balader mes doigts dans la fourrure soyeuse de Balisto qui sort sa petite tête hasardeuse de mon décolleté.

Son regard se fait interrogateur, son expression se veut claire et ne peut laisser transparaître d'autre réaction que le "quoi ?" traditionnel. Scarlet se montre curieuse et s'approche discrètement. A tous deux je leur fais signe, après avoir balancé la bouteille vide dans l'océan, le regard fixé sur le plancher ondulant - faute du continuum des vagues ou de mon alcoolémie trop élevée - j'annonce sans une once de sentiment, d'un ton qui se veut trop sérieux :

- La boite de Pandore est ouverte.
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