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Une livraison de pirate tout frais

Les mouettes volaient au grès du vent perçant le ciel de leurs cris. Le navire pirate à la silhouette élancée fendait les flots tout en remorquant derrière lui un vaisseau plus petit et en moins bon état. Suite à l'abordage violent des pirates et au combat qui s'en était suivit, le navire civil avait subi de lourdes avaries. Le mât était brisé et l’un des bords était littéralement éventré. C’est donc dans un souci d’efficacité et de sécurité que tous les passagers avaient été embarqués sur le navire pirate fraichement réquisitionné.

L'air était bon et l'équipage en sueur maniait avec dextérité cette nouvelle embarcation. On pouvait ainsi entendre les cris et les chants habituels d’un équipage de matelots aguerris.

Sweety : MAIS RELACHEZ MOI BON SANG.
Matelot de garde : Tu vas la fermer oui ? Foutu pirate, t’as d’l’a chance qu’tu sois une femme où j’t’aurais d’jà fait payé la mort d’mes Nakamas.
Sweety : Quoi ! Mais comment t’ose me parler comme ça !

La scène se passait sur le pont. Pour plus de sécurité le capitaine avait décidé de séparer la capitaine pirate de ses comparses. Ces derniers étant enchainés dans la cale. Des pas se firent entendre et une silhouette noire s’approcha. Le matelot se retourna d’un bloc sur les nerfs et se détendit quand il reconnut le Chasseur. Celui-ci lui fit un salut simple de la tête puis se focalisa sur la capitaine. Ses yeux sévères de rapace profondément ancrés dans ceux plus humide de frustration de la jeune femme. Il ne parlait pas se contentant de la dévisager. De grosse goutte de sueur apparurent sur le front de Sweety qui d’un regard bravache défiait elle aussi du regard Theneryl.

Celui-ci devait bien reconnaitre une chose. Elle avait de la volonté. Battue, ligotée et prête à être livrée à la marine elle gardait son caractère de cochon. Une fille normale de son âge aurait déjà pleuré toutes les larmes de son corps. Theneryl s’accroupit devant elle la regardant toujours dans les yeux. Il semblait la juger du regard et cela devenait de plus en plus insoutenable. C’était comme regarder directement dans les yeux d’un aigle qui se demande s’il a encore assez faim pour vous picorer les joues. Elle fit alors mine de parler et avant de lui en laisser le temps il la gifla.

Du sang se mis à couler au coin de ses lèvres pulpeuses, une expression ébahie sur le visage. Comment cet homme avait-il put la frapper alors qu’elle ne pouvait pas se défendre. Même le matelot en resta bouche-bée. Elle se retourna vers lui la mine furieuse prête à lui lancer tout le venin qu’elle pouvait. Il la gifla à nouveau, plus fort. Du sang tomba sur le bois du pont. Toute activité alentour s’était arrêtée. Les hommes, le capitaine du navire et les passagers le regardait faire. Chacun affichant une expression différente. Theneryl se contenta de continuer à la regarder et, quand elle ramena enfin son visage à nouveau vers lui, le regard haineux mais silencieuse, il parla.

Theneryl : Tu es ma prisonnière. Ma proie. En tant que telle j’ai droit de vie et de mort sur toi. Comprends-tu ?
Sweety hocha la tête lentement sans le quitter des yeux plein de haine.
Theneryl : Bien ! Alors écoute moi car en cela ta vie pourras t’être peut être épargné. J’ai vu tes camarades. Tous des chiens galeux, vieux et on ne peut plus rien pour eux. Les amener à la Marine et leur donner la mort est la chose la plus miséricordieuse que l’on peut faire pour eux comme pour ce monde. » Il la regarda un instant scrutant son visage. « Mais toi. Toi tu es encore jeune. Tu as encore une chance d’être sauvée de cette gangrène que l’on nomme piraterie. Celle-ci sème la mort et la désolation partout où elle passe. Tu n’es pas d’accord ?
Sweety le regardais toujours haineuse mais surtout éberluée. Son visage faisait une moue entre dégout et stupéfaction.
Theneryl : Voilà ce que je te propose. Retire-toi de la piraterie. Je te prendrais avec moi et je t’enseignerais la chasse. Tu es un prédateur comme moi. Tu me ferais une bonne compagne de route. Qu'en dis-tu ?
Sweety déglutit semblant ne pas en croire ses oreilles : Et mes compagnons ?
Theneryl : Je te l’ai dit. C’est trop tard pour eux. Ils sont condamnés.

Sweety le regarda alors encore plus éberluée puis tout à coup, sans prévenir, elle éclata de rire. Un fou rire comme seuls en connaissent en général les déments et les fous, pensa Theneryl. Elle en pleurait même. Semblerait-il, il avait dit quelque chose d’hilarant, mais il ne voyait pas quoi. Il avait fait pourtant attention à bien choisir ses mots pour être sûr de se faire comprendre. Mais elle riait et riait encore. Puis elle ne ria plus. Secouée encore de quelques spasmes elle regarda Theneryl comme si c’était un débile profond.

Sweety : Tu veux . . . que j’abandonne mes Nakamas et que . . . haha . . . je te suive et t’obéisse en reniant tout ce que je suis ?
Theneryl hocha la tête l’air très sérieux.
Sweety : Voilà ma réponse alors » Et elle lui cracha dessus. « Je préfère encore mourir !

Theneryl soupira et s’essuya le visage. Il se releva et la regarda l’air triste (ce qui ne fit qu'accentuer son regard sévère). Puis il se retourna et la laissa derrière lui pour retourner vers la poupe du navire. Des regards incrédules comme soupçonneux le suivirent tout du long. Ou était-ce son imagination ? De toute manière il n’en avait rien à faire. L’île du QG de la Marine était en vue, il en aurait bientôt finit de cette chasse frustrante. Les cris de Sweety reprirent de plus belle.
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Le vaisseau faisait toujours voile vers le QG de la marine qui commençait à apparaitre à l’horizon. Celui-ci se découpait assez bien dans l’air matinal. Une douce brise s’était levée et les mouettes étaient de plus en plus nombreuses dans le ciel. De toute évidence, depuis l’attaque d’il y a deux ans la base militaire est toujours en effervescence. De loin on peut déjà apercevoir nombres de vaisseaux amarrés à son port. Navires militaire ou de transports civils, gros transporteurs ou encore petites frégates, il est certain que le QG est encore en pleine reconstruction.

C’est accoudé à l’avant du navire que Theneryl faisait toutes ses observations, ses yeux l’aidant beaucoup. Il vit par exemple un marine portant un gros sac en toile s’affaler sur le sol et être secourut par ses camarades. Il avait de toute évidence trop bu la veille. Ou encore, une femme un masque sur le visage semblait superviser le transport de nouveaux canons pour la défense de l’île. Enfin, un QG de la marine en pleine effervescence donc.

C’est toujours perché sur ses talonnettes que le capitaine le rejoint. S’accoudant à côté de lui il suit la direction du regard du Chasseur.

« Eh bien on est plus très loin d’arriver au QG le Chasseur. Vous allez bientôt pouvoir livrer ces satanés pirates et toucher votre prime. »
« Hum ! Ouais ! »
« Vous allez bien les livrer n’est-ce pas ? »

Le capitaine avait gardé la tête tourné vers l’horizon, évitant de toute évidence de croiser le regard de rapace de Theneryl. Celui-ci par contre regardait tout à coup le capitaine. La question semblait anodine dite sur ce ton, mais on sentait un sous-entendu derrière. Theneryl ramena son regard vers l’île et continua de regarder un instant la femme (ou l’homme ?) au masque. Celui-ci d’ailleurs, comme mû par un instinct des plus aiguisés, avait tourné la tête dans sa direction. Leurs « regards » se croisèrent, enfin semblait-il. Pour couper court à ce contact dérangeant et nouveau il se tourna à nouveau vers le capitaine.

« Pourquoi cette question capitaine ? Doutez-vous de moi ? »

Le capitaine sembla soudain gêné. Quittant du regard l’horizon il promena ses yeux sur le pont avant de prendre la parole.

« Eh bien votre discours tout à l’heure avec la capitaine pirate en a laissé plus d’un dubitatif. » Il regarda finalement Theneryl. « Certains prétendent que vous allez pas la livrer aux marines. Et au vu de ce qu’a fait son équipage à notre navire, plus les gens tués, ça ne leur plairait pas du tout. » Il soupira. « Écoutez. Moi je vous dois une fière chandelle. Vous avez sauvé mon équipage et mes passagers. Mais je dois faire attention au moral des gens sous ma garde pour éviter les troubles. Du coup répondez-moi franchement le Chasseur. Que je sache sur quel pied danser. »
« Que voulez-vous que je vous dise. Elle a refusé ma proposition. Je ne suis pas homme à forcer les gens. Elle a choisi son destin. »
« Vous allez donc la livrer ? »
« Oui. »

Le soulagement apparut sur son visage. Il semblait perdre un poids et respirer plus facilement. Il s’adossa contre la rambarde et ferma les yeux. Puis sans un mot, il tapa l’épaule de Theneryl et s’en retourna auprès de son équipage. Pas de doute, d’ici leur arrivé au port du QG de la marine, tout le monde serait au courant de leur conversation. Le navire fendait la mer. Il serait bientôt au port. La personne au masque n’était plus sur les quais.
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